Oratoire  du  Louvre .fr Recherche sur oratoiredulouvre.fr

 

Bienvenue

Page d'accueil
Contacts
Accès à l'Oratoire
Agenda des rencontres
Activités pour tous
Activités de Jeunesse
Catéchisme d'adulte
Bulletin
Concerts à l'Oratoire
Patrimoine
Soutenir l'Oratoire
Faire une offrande en ligne
Quelques souvenirs
Le livre du bicentenaire
Blog: réflexions & débats

Réflexion

Questions & Réponses
Prédications
Petit dico de théologie
Articles / Dossiers
Audio / Vidéo
Téléchargements
le Protestantisme
Confessions de Foi
Histoire Protestante
La croix Huguenote
Nuit de l'éthique
Anciennes Prédications

En Relation à Dieu

Prier chez soi
Lire la Bible
Le Culte
Textes pour un Culte
Communion (Ste Cène)
Baptême d'enfant
Baptême d'adulte
Profession de foi
Mariage
Service Funèbre

Ouvertures

Entraide de l'Oratoire
Fondation de l'Oratoire
Chœur de l'Oratoire
Eglise Réformée
Fédération Protestante
Scoutisme
La Clairière
Évangile et liberté
Cantates de Bach
Liens vers d'autres sites

 

 

Les orgues des églises réformées
de Saint-Louis et de l'Oratoire du Louvre
à Paris 1791-1980

par Claude-Rémy Muess, pasteur

De Saint-Louis du Louvre à l'Oratoire

Du 14 mai 1791 est daté un reçu - conservé à la Bibliothèque de la Société de l'Histoire du Protestantisme Français, à Paris - ainsi libellé : « Nous officiers municipaux de cette ville, commissaires à l'Administration des Biens nationaux, certifions que M. Fabre a payé, tant en son nom qu'à celui de MM. Dangirard, Dumas et Marron, représentant une Société de personnes qui professent une religion particulière, la somme de 600 livres ès mains de M. Vallet de Villeneuve, trésorier général de la ville, qui la reconnaît pour loyer d'avance pendant trois mois qui commenceront à courir le 22 de ce mois, du bâtiment et sacristie qui servaient ci-devant à l'église dite de Saint-Louis du Louvre. »

À la faveur de la Révolution, la communauté réformée de Paris - puisque c'est d'elle qu'il s'agit - avait obtenu la faculté de louer dans la capitale même un lieu de culte. On sait qu'après la Révocation de l'Edit de Nantes (1685) et la démolition du temple de Charenton - lieu de culte des réformés de Paris élevé de 1621 à 1623 par le célèbre architecte Salomon de Brosse (1575-1626) - l'exercice du culte protestant ne fut plus toléré à Paris que dans certaines chapelles d'ambassades : tandis que les luthériens fréquentaient la Chapelle de Suède dès 1626, les calvinistes se rendaient à la Chapelle de Hollande, qui eut pour chapelain, à partir de 1782, le pasteur Paul-Henri Marron (1754-1832). Né à Leyde dans une famille de réfugiés français, il devait devenir le premier pasteur de 1'Eglise Réformée de Paris, grâce à l'intervention de Jean-Paul Rabaut Saint-Etienne (1743-1793). Le premier culte public eut lieu le 7 juin 1789 dans une salle louée à un marchand de vin de la rue Mondétour. La location à bail de la « ci-devant église de Saint-Louis du Louvre » avait été obtenue par Jean-Sylvain Bailly (1736-1793) et le général de La Fayette (1757-1834).

Le 26 floréal an XI (16 mai 1803), le citoyen Aubert, architecte de l'Enregistrement et des Domaines nationaux, notait après avoir visité l'église et la sacristie « Nous avons fait la visite de l'église et de la sacristie, qui consiste en un grand vaisseau composé de douze travées décorées d'architecture, éclairées de douze vitraux, ayant quatre escaliers aux angles pour communiquer aux tribunes et au jubé où est l'orgue, ainsi qu'aux combles, plus une sacristie éclairée de deux croisées sur la cour de la maison restante au citoyen Carné, à l'angle des rues Saint-Thomas du Louvre et des Orties, et qui a un dégagement de sortie dans la dite maison, en sorte qu'il n'est pas nécessaire d'ouvrir les portes de cette église sur les rues de Saint-Thomas du Louvre et du Doyenné, lorsque le service' ne s'y fait pas, pour y entrer, puisque la communication existe par la sacristie. a Dès l'ouverture de l'église au culte réformé, le citoyen Antoine Fabre, adjudicataire du bail, avait demandé à l'Administration des Biens nationaux de Paris le remplacement de la chaire se trouvant à Saint-Louis du Louvre par celle se trouvant dans l'église des Capucins de la rue Saint-Honoré. Ce transfert fut effectué aux frais du Consistoire réformé.

Le culte ne devait pas être célébré pendant de longues années à Saint-Louis du Louvre. Napoléon ayant conçu le projet de réunir le' Louvre et les Tuileries, le Consistoire fut avisé, dès janvier 1811, de la démolition prochaine de l'église, qui s'élevait entre le pavillon Denun et le pavillon Mollien du Louvre actuel (elle avait été affectée; au Consistoire réformé par arrêté consulaire du 3 décembre, 1802). Le 23 février 1811, le pasteur Paul-Henri Marron obtenait de l'empereur Napoléon 1" l'ouverture de l'Eglise de l'Oratoire au culte réformé, mais seulement à. titre provisoire. Cette ouverture se fit le 31 mars 1811, 'mais la loi affectant définitivement - l'édifice au culte, réformé ne fur votée qu'en août 1844.

La construction de l'église de l'Oratoire avait été, entreprise en 1621, sur les plans de l'architecte Jacques Lemercier (1585-1654). Devenu chapelle royale par brevet du 23 décembre 1623, l'édifice devait être établi, suivant le désir du roi Louis XIII, sur un plan tel que son axe prolonge passât par le centre du Louvre. L'architecte Clément Métezeau (1581-1652), auteur présumé de la façade de l'église Saint-Gervais, fut chargé de modifier en conséquence le plan de l'église, d'où son obliquité par rapport à la rue Saint-Honoré. Interrompus en 1625, les travaux ne reprirent qu'en juillet 1740, sous la direction de l'architecte Caqué, qui acheva la nef, et la flanqua en 1745 du portail ouvrant sur la rue Saint-Honoré. La dédicace solennelle de l'église eut lieu le 12 juillet 1750. Saccagée en juillet 1793 - après avoir servi de cadre, en 1791, au sacre par Talleyrand (1754-1838) des premiers évêques constitutionnels - elle fut utilisée comme salle de réunion d'académies littéraires, salle de cours, Bourse, puis, au début du premier Empire, annexe de l'Opéra abritant les décors. Entre 1642 et 1791, 35 oraisons funèbres y furent prononcées, dont celles du cardinal de Richelieu (1642), de Louis XIII (1643), d'Anne d'Autriche (1666), de Marie-Thérèse (1683), du chancelier Séguier (1672), du cardinal de Retz (1679), et de Jean-Philippe Rameau (1764). L'église servant quasiment de chapelle au palais du Louvre où résidait la Cour, une porte permettait d'accéder directement de l'enclos du Louvre à celui des Oratoriens (la rue de Rivoli n'existait pas). Le percement de la rue de Rivoli (1854) entraîna la démolition des bâtiments conventuels (dissoute le 14 décembre 1792, la congrégation de l'Oratoire, qui avait été fondée en 1611 par Pierre de Bérulle, ne fut rétablie qu'en 1852) et le dégagement du chevet au pied duquel s'élève, depuis 1889, le monument - oeuvre de l'architecte Scellier de Gisors et du sculpteur valenciennois Crauck - dédié à l'amiral Gaspard de Coligny.

À l'Oratoire, des orateurs parfois étrangers à la congrégation, tels que Bossuet (1627-1704), Bourdaloue (1632-1704) et Massillon (1663-1742), attiraient les foules. La réputation musicale du sanctuaire n'était pas moins grande, ainsi que le laisse entendre Félix Raugel dans les pages qu'il consacra à l'église de l'Oratoire en 1927 (e Les grandes orgues des églises de Paris et de la Seine », p. 157-160)

L'église des Pères de l'Oratoire, qui fut choisie tant de fois par les Académies des Lettres et des Sciences pour y célébrer avec éclat la fête de Saint-Louis, et par les Maîtres de musique de Paris pour leur messe annuelle de Requiem, a dû posséder un orgue dès le premier tiers du XVlle siècle. Faut-il rappeler que la musique du roi s'y rendait souvent, et que Louis XIII, cantor bénévole, Anne d'Autriche et Louis XIV aimaient venir y faire leurs dévotions ? C'est dans l'église des Pères "au beau chant" que, le 14 janvier 1635, un grand concert de musique religieuse attirait les nonces Mazarin et Bolognetti que les maîtres de musique du roi, François Veillot, Thomas Gobert, et plus tard du Bousset, firent exécuter leurs grands motets à basse continue ; c'est là encore que fut chanté le fameux Miserere de Lully pendant le service célébré en grande pompe, le 4 mai 1672, à la mémoire du chancelier Séguier. »

Les orgues

Dès 1790, l'un des membres du Consistoire réformé, le négociant Louis Féline, avait fait don à la communauté d'un orgue qui fut placé sur le jubé de l'église Saint-Louis du Louvre. Le 17 janvier 1792, le Consistoire chargeait le facteur Denis-Claude Ferrand, moyennant une rétribution annuelle de 72 francs, de l'entretien et de l'accord de l'instrument. Lorsque Ferrand mourut, le 1°' avril 1792, les matériaux se trouvant dans son atelier furent repris par Jean-Antoine Somer (1740-1830) et Claude-François Clicquot (1762-1801). Parmi les dettes actives figuraient notamment 248 livres dues par l'ambassade de Hollande pour des ouvrages faits à l'ambassade ; 48 livres dues par l'ambassade de Suède, et « 12 livres dues pour l'entretien de l'orgue des protestants à Saint-Louis du Louvre ». Ceci semble indiquer que l'instrument offert par Féline n'était ni celui de la Chapelle de Hollande, ni, à plus forte raison, celui de la Chapelle de Suède, dont on sait qu'il avait été donné à la communauté luthérienne de Paris par Haering (peut-être jean Haering, « opticien de Sa Majesté le Roi de Wurtemberg »), puis fut acheté en 1807 par le libraire Jean-Georges Treuttel pour être installé en 1809, par Jean-Antoine Somer, dans l'église luthérienne des Billettes (cf. « Les orgues de l'église luthérienne des Billettes », in « L'Orgue », n° 143, p. 80-91).

Après le décès de Ferrand, l'entretien et l'accord de l'orgue échurent, aux mêmes conditions, à jean-Antoine Somer. Cet orgue de petite dimension - vraisemblablement à clavier unique - ressemblait sans doute à celui de la Chapelle de Danemark (doté de 6 jeux) que pour le premier anniversaire de la chute de la royauté (célébré au Champ de Mars le 10 août 1793), Jean-Antoine Somer fournit, en même temps que quatre autres instruments. On peut s'interroger sur l'origine de l'orgue que le Consistoire dut à la libéralité de Féline s'agissait-il de l'orgue apporté de l'église Saint-Thomas du Louvre (effondrée en 1739) ; orgue construit par Valéran de Héman en 1624, transformé par François Deslandes en 1722 et démonté en 1740 par Pierre Aubé ? Si Aubé (mort en 17531 avait lui-même remonté l'instrument à Saint-Louis du Louvre, cela pourrait signifier que Féline fit don au Consistoire de l'orgue qui était déjà en place lorsque la communauté réformée s'y transporta. Mais le donateur peut tout aussi bien avoir acquis l'un des orgues mis en vente par le Département*.

Le 7 messidor an XIII (26 juin 1805), les membres du Consistoire apprennent que e lundi prochain on démontera l'orgue de Saint-Louis, qu'il faudra quatre mois pour la nettoyer et en déposer les tuyaux dans un des appartements libres de la maison jouxtant l'église ». Il est décidé de prévenir « les personnes qui peuvent diriger et soutenir le chant, afin que placées ensemble, elles suppléent par leur accord au silence de l'orgue » ;- en outre, il est demandé à Messieurs les prédicateurs, d'avoir soin de « choisir des psaumes d'un chant harmonieux et facile ». Le relevage fut effectué par le facteur Semer aux frais de Louis Féline, ce qui amena le Consistoire à consigner dani le procès-verbal de sa réunion du 8 brumaire an XIV (30 octobre 1805) e sa reconnaissance pour la générosité de M. Féline, ancien, lequel a fait, à ses frais, la dépense considérable de la réparation de l'orgue de Saint-Louis, dont il avait fait don à l'Eglise en 1790

Un membre du Consistoire proposa de faire placer sur le buffet de l'orgue une inscription e qui perpétue la mémoire de la pieuse générosité de M. Féline père » ; le 16 brumaire (7 novembre 1805), le généreux mécène déclinait modestement l'honneur que l'on avait cru devoir lui faire.

Puis vint, en 1811, le déménagement à l'église de l'Oratoire. Dans l'intervalle, la 'communauté réformée de Paris avait obtenu l'ouverture d'un second lieu de culte : l'ancienne église de la Visitation Sainte-Marie, rue Saint-Antoine. Un orgue antérieur à la Révolution se trouvait encore - dans quel état ? - sur la tribune située au revers du grand portail de l'église de l'Oratoire. Il fallut donc installer au fond du choeur, sûr un tambour, 'l'orgue apporté de Saint-Louis du Louvre. Le 10 novembre 1813, le Consistoire délibère que e l'orgue qui est maintenant dans le choeur du temple de l'Oratoire sera démonté et mis en lieu sûr pour être remonté sur la grande tribune en face du choeur, quand celui qui s'y trouve maintenant aura été enlevé ; que la boiserie qui supporte l'orgue actuellement dans le choeur sera également démontée et mise en lieu sûr pour être retrouvée et employée au besoin ». En janvier 1814, le Consistoire adressait au baron de Chabrol, préfet de la Seine, une « demande de réparations et de constructions dans l'intérieur du temple de l'Oratoire qui sont nécessaires à la célébration de notre culte ». Cette demande tendait à ce que le tambour placé dans le choeur de l'église et supportant l'orgue, « soit placé intérieurement contre la grande porte d'entrée, que l'orgue le soit sur la grande galerie, que des stalles qui étaient au fond du choeur y soient replacées, que le vide que le déplacement du tambour laissera dans la ligne des tribunes soit rempli par un avancement en galerie tel que l'architecte pourra le trouver convenable ». Le Consistoire fondait principalement sa demande sur le fait que le tambour occupait dans le choeur des places utiles, et d'autant plus nécessaires qu'elles étaient proches de la chaire, et sur le fait que l'absence de tambour contre la porte d'entrée était préjudiciable au recueillement, les bruits de la rue pénétrant dans le temple. En compensation de la dépense à engager, le Consistoire offrait e ce que nous avons de disponible et de moins nécessaire à notre culte, savoir un chapier et ses accessoires que Monsieur l'architecte pourra apprécier » ; il disait son désir de pouvoir jouir de ce changement dès les fêtes de Pâques prochaines. Suite à cette lettre, le préfet de la Seine autorisa la fabrique de la paroisse Sainte-Marguerite à faire usage du chapier.

Le 10 avril 1818, le Consistoire était saisi d'une proposition tendant à l'agrandissement de l'orgue du temple de la rue Saint Honoré; le projet devait entraîner une dépense approximative de huit cents francs. Il fut approuvé par le Consistoire, mais à la condition que les fonds nécessaires lui fussent fournis par l'administration préfectorale. Les choses en restèrent là, de même qu'en 1819, lorsque fut soumis au Consistoire « un projet de devanture pour l'orgue du temple de la rue Saint-Honoré ». Sans doute l'instrument était-il jugé insuffisant et d'allure peu esthétique. De fait, le 7 mai 1824, la « commission des bâtiments et de l'intérieur » soulignait l'urgence de le faire établir, dans le temple de la rue Saint-Honoré, un orgue plus assorti à l'étendue de ce temple et plus propre à le décorer que celui qu'il y a maintenant. En conséquence, elle propose au Consistoire de faire la demande d'un orgue à M, le préfet ». Le préfet de la Seine demandant une évaluation de la dépense à prévoir, la commission des finances estima celle-ci à la somme de 20 000 francs, dont le Consistoire s'engageait à fournir le tiers. Des devis avaient été demandés à Jean-Antoine Somer et à Gabriel-Joseph Grenié (17561837)*. Les membres du Consistoire, après avoir entendu l'orgue de Grenié au Conservatoire, rendirent justice « au mérite du jeu expressif qui ajoute à l'effet et à l'agrément de l'instrument par le renflement et la diminution du son » ; s'étant entourés « des lumières de gens de l'art » et ayant consulté successivement Chérubini, Paèr, Le Sueur et Séjan, organiste de Saint-Roch, ils concluaient « L'invention de M. Grenié est extrêmement intéressante sous le rapport de l'art et mérite les plus grands éloges, puisqu'elle rend l'orgue capable d'expression, c'est-à-dire des sons renflés et diminués ; toutefois ce nouveau jeu, très propre à accompagner une ou un petit nombre de - voix, perdrait probablement son avantage, appliqué au plein chant, et il ne conviendrait peut-être pas à la musique de notre Eglise, où tous les fidèles chantent à la fois ; l'invention ne s'applique qu'aux jeux dits de Positif, laissant les autres absolument sans changement. » Ayant comparé les devis, la commission des bâtiments les soumit à l'examen de deux organistes ; elle reconnut « que celui de M. Grenié s'élevait à 20 000 francs pour 16 jeux, dont 3 appartenant à l'orgue expressif, à quoi M. Grenié avait offert par lettre supplémentaire d'ajouter 2 jeux ; que celui de MM. Somer et Callinet, facteurs d'orgues, s'élevait à 16 600 francs, buffet non compris dans les deux devis ».

Le 4 février 1825, elle faisait au Consistoire le rapport suivant : « La commission, considérant que malgré le mérite de l'invention de M. Grenié, auquel elle se plaît à rendre justice, elle paraît peu applicable à la musique de notre Eglise, qu'il y aurait en tout quelque danger à se livrer à cette innovation et à une construction d'orgue d'après un procédé nouveau, non assez éprouvé par l'expérience que M. Grenié a fait connaître qu'il ne consentirait d'ailleurs pas à se borner à la seule construction du jeu expressif, laissant faire les autres aux facteurs ordinaires ; qu'il résulte du devis de MM. Somer et Callinet une économie de 3 400 francs et un excédent de 9 ou 7 jeux, a l'honneur de vous proposer d'adopter le devis de MM. Somer et Callinet, et d'exprimer à M. Grenié les regrets du Consistoire de ne pouvoir accepter les offres d'un homme aussi distingué par son caractère et ses talents. a Le Consistoire adopta les conclusions du rapport qui lui était présenté : il adopta le devis de Somer et Callinet portant à 16 600 francs, non compris le buffet, le prix de l'orgue. Quant au buffet, ressortissant à la décoration de l'église, il semblait devoir être pris en charge par la ville ; en conséquence, le Consistoire ne crut pas devoir présenter un devis du dit buffet, qui serait, sans doute confié par l'administration aux soins de l'architecte Godde*. Par lettre datée du 3 novembre 1825, le préfet de la Seine avisait le Consistoire de la décision prise par le Conseil municipal de Paris d'accorder une somme de 10 000 francs en vue du remplacement de l'orgue de l'église de l'Oratoire et de la construction d'un nouveau buffet, à condition que les travaux soient surveillés par les architectes de la ville. Le reste de la dépense incombait à l'Eglise. Avec Somer et Callinet, il fut convenu que le nouvel orgue serait établi dans le délai d'une année, « à compter du jour où les engagements (seraient) signés t>. Le prix de l'instrument, sur lequel les facteurs assuraient ne - pouvoir faire aucune déduction, devait leur être payé, « savoir 3 000 francs comptant 3 000 francs lorsque tous les sommiers seront placés dans le buffet ou prêts à l'être, le mécanisme terminé et la moitié des jeux en place ; 3 000 francs quand les mouvements, abrégés, claviers et soufflets seront finis ; les 7 600 francs qui resteront dus seront payés quand, l'ouvrage étant achevé, il aura été reçu à dire d'experts. Si l'ouvrage n'est pas fini trois mois après l'année révolue, MM. Somer et Callioet feront une déduction de 300 francs pour chaque mois de retard t>. Pour l'érection du buffet, il fallait envisager une dépense de 5 000 francs ; l'architecte Etienne-Hippolyte Godde (1781-1870), inspecteur en chef des édifices religieux de la ville de Paris, le dessina et supervisa les travaux, dès la signature du marché, qui intervint le 6 juillet 1826*. Le 7 décembre 1827, le Consistoire apprenait que le nouvel orgue n'était pas encore terminé, mais qu'il était assez avancé pour qu'on pût « commencer à s'en servir aux fêtes de la Noël ». Sur quoi il fut arrêté qu'on ne s'en servirait que lorsqu'il serait fini, qu'il aurait été vérifié par des experts et reçu par le Consistoire. Cinq mois plus tard, une lettre du facteur Louis Callinet (1786-1846)* annonçait au Consistoire que le nouvel orgue était prêt à être examiné par des experts le samedi 12 mai (1828), et elle l'engageait à nommer ceux-ci. Le Consistoire choisit comme experts Jacques-Marie Beauvarlet-Charpentier (1766-1834) et Louis-Nicolas Séjan (1786-1849)*. Dans le rapport qu'ils remirent au Consistoire, ceux-ci déclaraient l'orgue parfaitement conditionné », que « le facteur qui l'a fait a bien rempli son marché, qu'il a même outrepassé son devis, et fait des frais auxquels il ne s'était pas attendu, ce qui lui mériterait une indemnité qui, portée à 1 500 francs, serait modérée ». Pour leur peine, les deux experts reçurent chacun une somme de 50 francs, avec les remerciements du Consistoire.

Daté du 17 mai 1828, le rapport de Beauvarlet-Charpentier, organiste de Saint-Paul et de Saint-Germain-des-Prés, compositeur et éditeur de musique, breveté de S. A. R. Madame la Duchesse de Berry », et de L. Séjan, « organiste du Roi », était ainsi libellé

« Nous soussignés, nommés par Messieurs les Membres du Consistoire, à l'effet de vérifier et arbitrer la confection de l'orgue du Temple de l'Oratoire, certifions que cet orgue est parfaitement confectionné et d'une très belle harmonie.

  • 1. Les mouvements du mécanisme sont tellement bien combinés et en rapport que les claviers sont des plus faciles et agréables à toucher.
  • 2. Tous les tuyaux en métal d'étain fin sont fort bien étoffés, faits au marteau et non laminés ainsi que cela se pratique trop souvent.
  • 3. Ceux en bois sont également bien conditionnés, en sorte que les jeux de fond sont bien fournis et les flûtes extrêmement agréables.
  • 4. J tuyaux des jeux de Trompette et de Clairon à la Pédale poussés jusqu'en fa sont très forts et d'une belle rondeur de son.
  • 5. Les quatre soufflets sont parfaitement établis, se servent facilement et fournissent amplement.
  • 6. Les portevents sont bien placés et faits solidement.

M. Callinet a fourni de plus un Bourdon de 16 pieds au Grand Orgue commençant au la de la première octave en bas. En outre, tous les planchers fournis par le menuisier ont été ajustés et posés par le facteur.

Nous pouvons en toute vérité certifier que M, Callinet a parfaitement rempli son marché en apportant tous ses soins et la conscience d'un artiste estimable à la confection de cet instrument, qu'il a même outrepassé son devis et qu'il éprouve un déficit assez considérable, tant par les fournitures qu'il a faites que par le temps qu'emploie le nouveau genre de mécanisme qu'exige un orgue de forme carrée et à face plate.

Nous jugeons devoir l'appuyer pour réclamer de la justice de Messieurs les Membres du Consistoire une indemnité, laquelle portée à 1 500 francs serait modérée.

En foi de quoi nous signons le présent certificat. »

Le nouvel orgue comportait trois claviers manuels (les deux premiers de 52 notes, sans premier ut dièze ; le troisième de 32 notes) et un pédalier indépendant de 25 notes, pourvus de vingt-huit jeux ainsi disposés :

II Grand Orgue : 11 jeux

  • Bourdon 16'
  • Montre 8'
  • Bourdon 8'
  • Flûte 8' (à partir d'ut 2)
  • Prestant 4'
  • Cornet V rangs (D)
  • Nazard 2 2/3'
  • Tierce 1 3/5'
  • Trompette 8'
  • Clairon 4'
  • Voix humaine 8'

III Récit : 4 jeux

  • Bourdon 8'
  • Flûte 8'
  • Cornets V rangs
  • Hautbois 8'

I Positif : 9 jeux

  • Montre 8'
  • Bourdon 8'
  • Prenant 4'
  • Flûte allemande 8' (à partir d'ut 2)
  • Nazard 2 2/3'
  • Trompette 8'
  • Hautbois 8' (D)
  • Clairon 4' (B)
  • Cromorne 8'

Pédale : 4 jeux (à ravalement)

  • Bourdon 8'
  • Flûte 4'
  • Trompette 8'
  • Clairon 4'

Ne comportant qu'un seul accouplement (sans doute Grand Orgue Positif à tiroir, puisque l'on se plaignait de ne pouvoir s'en servir pendant l'exécution), dépourvu de toute tirasse comme de Doublette et de Mixtures, cet instrument avait trouvé place dans un unique buffet à trois plates-faces, sans tourelles, analogue à celui dont les facteurs François et Louis-Paul Dallery venaient de doter l'orgue de la chapelle de la Sorbonne (1825-1827). La console était située à l'arrière du buffet. La restauration du petit orgue donné autrefois par Féline ne fut pas effectuée par Callinet, en dépit du marché. Toujours est-il qu'en novembre 1828, un facteur d'orgues nommé Ferrand ayant demandé à acquérir l'ancien orgue, il lui fut répondu que la vente en était ajournée (s'agit-il de ce Ferrand qui, en 1828 précisément, restaura l'orgue de l'église Notre-Dame d'Embrun ? Cf. Jean Martinod, « Répertoire des travaux des facteurs d'orgues du Ix' siècle à nos jours », Fischbacher, Paris, 1970, p. 194).

En 1833 parvenait au Consistoire une nouvelle offre d'achat relative au petit orgue de l'église de l'Oratoire e devenu inutile depuis la construction de celui qui existe actuellement ». Après inventaire, le Consistoire décida de prêter l'instrument en question au demandeur, « M. Luscombe, évêque anglican dont le troupeau fait en ce moment construire une église ». Il semble que ce prêt n'ait eu qu'un caractère temporaire. En 1835, un nouvel acquéreur se faisait connaître en la personne du président du Consistoire réformé de Nantes. Il fut en conséquence demandé à Louis Callinet d'estimer la valeur de l'ancien orgue ; après quoi le Consistoire décida que la cession de l'orgue serait faite à l'Eglise de Nantes, si elle le désirait, au prix de 3 000 francs. Une contre-expertise, effectuée par un autre facteur à la demande du Consistoire de Nantes, ne porta la valeur de l'instrument -- en raison des réparations importantes qu'il exigeait qu'à 2 500 francs, prix auquel le Consistoire de Paris consentit à le céder.

Dès juillet 1838, dix ans après la réception de l'orgue Callinet, des devis étaient présentés au Consistoire « soit pour la réparation, soit pour l'amélioration de l'orgue de l'Oratoire. Ces devis s'élèvent à 1345 francs pour la simple réparation, et à ... si l'on ajoutait à l'orgue quelques jeux nouveaux ». Le Consistoire accepta le principe de la réparation, et demanda que soit loué un orgue portatif pendant la durée des travaux, afin que le service divin ne soit pas perturbé. Après que le devis établi par Louis Callinet eut été jugé digne d'une entière confiance, on décida le mois suivant que l'orgue serait simplement nettoyé, et qu'il serait fait « un changement au soufflet ». En 1839, on eut à se plaindre de négligences dans l'entretien de l'orgue de l'Oratoire, de la part du successeur de Louis Callinet. Celui-ci ayant allégué que e l'orgue de l'Oratoire avait pu être dérangé par des mains étrangères », il fut recommandé au concierge de se montrer particulièrement vigilant et de contrôler étroitement l'accès à la tribune. En 1842 étaient enregistrées des plaintes au sujet du mauvais état de l'orgue ; on écrivit au facteur chargé de l'entretien pour lui rappeler ses devoirs. Puis on demanda à Henry-Joseph Taskin (1779-1852)* d'examiner l'instrument avec soin et d'établir un rapport « qui fasse connaître s'il suffirait d'accorder (cet) orgue avec plus d'exactitude et plus fréquemment, ou s'il a besoin de réparations, et, en ce dernier cas, quelles seraient la nature et l'importance des travaux à exécuter ». En octobre 1842, le Consistoire prenait connaissance du rapport de Taskin montrant que l'orgue de l'Oratoire était en bon état.

En 1843, quinze ans seulement après son achèvement, l'orgue Callinet déplaisait. Le nouvel organiste nommé cette année-là, Ernest Meumann, venait d'Allemagne où fi avait été le témoin des récents progrès accomplis par la facture d'orgues. Très lié au facteur Eberhard-Priedrich Waicker (1794-1872)*, grand admirateur de la facture allemande, entièrement acquis à l'esthétique romantique déjà illustrée outre-Rhin par de grands instruments, il tenta dès son arrivée à l'Oratoire d'obtenir le remplacement de l'orgue Callinet par un instrument nouveau conforme à ses voeux. Sur la demande du président du Consistoire, Meumann avait examiné avec soin l'orgue de l'Oratoire et rédigé un rapport détaillé qui fut présenté en juillet à la vénérable assemblée*.

Selon Ernest Meumann, « l'orgue d'un temple protestant doit être construit sur des principes appropriés aux besoins spéciaux du culte protestant. La partie musicale de ce culte consiste en ce que les protestants chantent tous ensemble un psaume ou cantique accompagnés de l'orgue. Cet instrument se fait aussi entendre seul, aux préludes, ritournelles et sorties, mais son but principal est de soutenir et guider le plein chant. Pour atteindre ce but, il faut que l'instrument soit tout autrement construit qu'un orgue presque exclusivement destiné à se faire, entendre en morceaux solo. Or il est complètement nécessaire qu'un orgue destiné à accompagner le plein chant puisse soutenir les chanteurs par des sons graves, tout en les dirigeant avec précision ; il doit surtout posséder des pédales bien fournies tant en quantité de jeux qu'en qualité de sons ; enfin il faut qu'une personne n'étant pas musicienne, n'ayant pas même des notes devant elle, puisse tout de même chanter à l'aide de l'orgue. Pour mettre un instrument en état de remplir ces conditions, il faut en construisant un orgue prendre garde :

  • 1. à faire un bon choix entre les genres de jeux ;
  • 2. à unir avec une entière sûreté les différents calibres de jeux de 16, 8, 4, 2, 2 2/3, etc., pieds.

C'est parce qu'on a manqué dans ces deux points que l'orgue de l'Oratoire n'est pas un instrument qui convient à notre culte, et qu'il a les défauts suivants :

  • 1. il y a trop de jeux d'anches. Sur un total de 28 jeux, il y a 10 jeux d'anches, et comme on n'accompagne pas le chant avec ces jeux, ils sont inutiles au culte proprement dit; 3 de ces jeux, qui ne sont que des jeux d'agrément et de variétés, suffiraient.
  • 2. il n'y a pas assez de jeux de Flûtes. Ils sont insuffisants pour accompagner le chant, dans un vaisseau aussi vaste que celui de l'Oratoire. Par suite de défauts de mécanisme sur lesquels on reviendra, et de la mauvaise qualité de quelques jeux de Flûtes, tels que Tierce, Cornet et d'autres, on ne peut accompagner le chant, au plus fort, qu'avec 13 jeux. L'orgue a 28 jeux, 15 d'entre eux sont donc inutiles.
  • 3. le calibre des jeux ne répond pas aux besoins de l'accompagnement. On vient de dire qu'il n'y a pas assez de jeux de Plûtes ; il en manque de tous les calibres. Il manque des jeux de 16 pieds donnant du grave il manque des 8 pieds; il manque des jeux de 4 pieds imprimant davantage dans les octaves supérieures la mélodie.
  • 4. il y a trop de jeux de même fractionnée. Ces jeux, tels que Nazard, Cornet, etc., sont au nombre de 5 ; 3 seraient suffisants. Ces jeux ont en outre tous le défaut de ne pas entonner la Quinte ou la Tierce la plus proche, mais ils prennent tous celles éloignées de deux octaves de la racine, ce qui contribue puissamment à produire les sons bruyants dont on se plaint. On a compris que les jeux de fond ne suffisaient pas, et l'on a alors ajouté tant de jeux criards, pour subvenir aux besoins des chanteurs qui veulent être soutenus et en entendre distinctement, sans cependant être écrasés par des sons criards.
  • 5. les pédales sont insuffisantes a. il leur manque 5 notes; au lieu de descendre jusqu'à l'ut, elles ne vont que jusqu'au fa ; les principales notes des basses manquant ; b. le calibre des jeux n'est pas assez considérable ; il manque surtout des jeux de 16 pieds ; c. le nombre des jeux n'est pas suffisant ; ce nombre doit surpasser le quart du total des jeux. Ce sont les bonnes basses qui soutiennent principalement le chant ; l'orgue de l'Oratoire ne peut donc pas faire ceci, puisqu'il manque tant à son système de pédales.
  • 6. neuf jeux sont incomplets (y compris les 4 jeux du Récit). Ces jeux ne possédant que la moitié de la gamme ; et c'est presque toujours la moitié inférieure, celle des basses, qui manque ; ceci empêche l'orgue de rendre des effets d'harmonie tels que le compositeur les a écrits, et des accords et des psaumes entiers sont, comme on l'a démontré et pourra encore toujours prouver, renversés et rendus méconnaissables.
  • 7. le mécanisme est insuffisant. Il y manque trois accouplements, et il manque à celui qui existe la faculté de pouvoir s'exécuter pendant que l'on touche,
  • 8. la soufflerie est insuffisante. Elle produit des secousses de vent, le vent ne suffit souvent pas, et le principal défaut consiste dans le mauvais partagement du vent.
  • 9. les claviers sont mal placés et empêchent l'organiste d'entendre le chant en mesure. On ne pourrait guère songer à une réparation parce que : ôter des jeux d'anches, ajouter de nouveaux jeux, compléter les jeux auxquels manquent les basses, et changer le placement des claviers est une chose que personne ne pourrait et ne voudrait entreprendre...

Le point de vue véritable est de considérer l'orgue de l'Oratoire uniquement comme instrument d'accompagnement et de voir s'il l'est réellement ou non. Pour pouvoir partir de ce véritable point de vue, il faut posséder des connaissances et des expériences que l'on ne peut acquérir que par de longues années de pratique. Les jugements même des facteurs d'orgues ne sont souvent pas compétents ; ce sont presque toujours les organistes qui font les plans d'orgues, et les facteurs se bornent à .les exécuter. Mais les organistes, en fixant les plans, doivent connaître entièrement les besoins du culte et les effets résultants des différentes combinaisons. Ce serait donc à un organiste habile qu'il faudrait s'adresser pour juger à fond cette affaire ; mais où se trouvent les véritables organistes ? Où se trouvent les vrais orgues d'accompagnement ? C'est seulement en Allemagne, et encore, là exclusivement dans les pays et les villes protestants, car ni Munich ni Vienne, ces deux capitales catholiques, n'ont ni orgues ni organistes célèbres et remarquables. J'en ai déjà appelé au jugement de Messieurs liesse et Neukomm* ; ils ont tous les deux été du même avis sur l'orgue de l'Oratoire que moi. Le premier nom est peut-être le plus compétent qui existe il est expert, nommé par le gouvernement pour juger toutes les orgues de la province prussienne de la Silésie. Enfin, Messieurs, le grand intérêt de cette affaire exige de trouver et de choisir un homme vraiment capable pour la juger ».

Eclairé par ce premier rapport, le comité responsable des questions musicales demanda à connaître les avantages d'un orgue construit selon les principes prônés par l'organiste Neumann. Celui-ci établit donc un second rapport, qui conduisit le comité à entamer des relations avec le facteur Walcker*. Meumann se heurta à une forte opposition, de la part de ceux qui estimaient bon l'orgue de l'Oratoire, et inutile un nouvel instrument. Il répliqua en novembre 1844 « Il faut faire résoudre cette question par des gens de l'art, des hommes vraiment capables et dont les seuls noms garantissent l'importance et le poids de leurs opinions. Ce sont MM. Neukomm, Hesse, Stern de Berlin* et beaucoup d'autres aussi compétents mais non aussi connus, qui ont à l'unanimité déclaré l'orgue de l'Oratoire incomplet, mal combiné et incapable de rendre les services que l'orgue doit à l'accompagnement du plein chant. »

Dans une lettre - hélas non datée - adressée à Ernest Meumann, le facteur Walcker établit une comparaison entre sa facture et la facture française, comparaison qu'il est en mesure de faire car, l'année précédente, deux facteurs de Paris sont venus 'visiter son établissement. Ii déclare leur avoir tout montré sans retenue ; de leur côté, les facteurs français ont communiqué à Walcker leur manière de faire. D'après ce qui lui a été communiqué, celui-ci affirme :

  • 1. que ses sommiers nouvellement inventés et brevetés offrent une grande supériorité sur tout ce que l'on a fait jusqu'à présent ; aussi l'un des facteurs français a-t-il demandé la permission de s'approprier cette invention ;
  • 2. que la soufflerie allemande est supérieure ; qu'il peut alimenter facilement un grand instrument avec deux souffleurs, tandis qu'avec la soufflerie française, il faudrait pour le même instrument cinq à six souffleurs ; la soufflerie allemande aurait aussi une grande influence sur le son des orgues allemandes que l'un des facteurs français a lui-même reconnu qu'avec ses nouveaux sommiers, la dureté et la résistance des touches est tellement faible qu'on n'a pas besoin comme en France d'un mécanisme très compliqué pour rendre les claviers de l'orgue d'un toucher facile et agréable.

Enfin, Walcker affirme qu'il a de l'ouvrage tant qu'il en veut, et plus qu'il ne peut faire, mais qu'il regretterait beaucoup s'il perdait cette occasion de montrer à Paris ce que peut fournir la facture allemande.

Meumann s'acharna à faire admettre qu'il était impossible d'améliorer l'orgue de l'Oratoire parce que la facture française n'était point celle qui convenait au culte protestant, et parce qu'une réparation, « tout en coûtant plus qu'un orgue neuf, ne pourrait jamais faire atteindre le but qu'on se proposerait ». Selon lui, il ne fallait pas demander à des facteurs français un orgue qui convînt au culte réformé, parce que ceux-ci n'étaient pas en état de répondre aux besoins du culte protestant, autres que ceux du culte catholique. « Tandis que pour les facteurs allemands, poursuivait-il, protestants eux-mêmes, habitant un pays protestant, et au milieu du peuple qui s'occupe le plus le plus de musique,' et surtout de chant religieux, ils ont pu étudier les besoins de ce culte, et sont parvenus tellement à y satisfaire qu'ils ont obtenu on degré de perfection tel qu'aujourd'hui les facteurs français leur envient leur succès, en recourant de toute manière à l'appui de leur savoir et de leur habileté. »

Pour mettre toutes les chances de son côté et convaincre plus sûrement les autorités de i'Eglise, Meumann avança des considérations financières il soulignait « la modicité extrême des prix qui est telle que, pour ne citer qu'un chiffre; il suffira de dire que l'orgue de Saint-Denis, qui a coûté 250 000 francs, n'aurait coûté qu'environ 60 000 francs là-bas ». On envisageait, pour financer la construction d'un nouvel orgue, de vendre l'orgue Callinet, « qui peut parfaitement convenir dans une église catholique, et qu'il sera facile de placer, ce qui peut produire de 10 000 à 15 000 francs », de solliciter l'aide de l'administration, et d'ouvrir une souscription parmi les membres les plus riches de l'Eglise. Deux circonstances, enfin, militaient en faveur d'une prise de décision rapide : l'espoir d'obtenir une exemption des droits de douane et la promesse faite par le facteur Walcker de donner tous ses soins à celui, parmi les instruments qu'il construisait présentement, qui viendrait à Paris. Il s'agissait d'éviter que se produise pour le nouvel orgue ce qui s'était produit pour l'orgue Calliner on avait dû reconnaître, après un petit nombre d'années, qu'un instrument sur lequel on avait voulu faite quelques économies, était devenu hors d'état de rendre de bons et utiles services.

Meumann ne s'adressa pas seulement à la maison Walcker, malgré sa prédilection pour la facture allemande. Il transmit à la maison Daublaine* la disposition d'un grand orgue de 56 jeux, en lui demandant une estimation de la dépense à prévoir. Dans sa réponse, datée du 16 février 1845, l'administrateur de la firme reconnaissait : « Parmi nos instruments les plus remarquables, on n'en trouve aucun qui puisse servir comme type d'un orgue calculé pour soutenir et diriger de grandes masses de voix, et nous ne pouvons qu'approuver l'idée de votre organiste, qui propose la construction d'un instrument dont la composition des jeux est tirée des meilleurs exemples que nous fournit l'Allemagne, où l'expérience démontre depuis longtemps la parfaite adaptation de ces instruments à leur objet. Nous croyons donc pouvoir affirmer qu'un tel instrument établi dans l'église de l'Oratoire contribuerait puissamment à l'amélioration du chant et répondrait à toutes les conditions, tant architecturales qu'acoustiques, de l'édifice. En terminant, nous pensons, après ce que nous venons de dire, qu'il est juste de faire observer que, s'il faut concéder aux orgues de l'Allemagne une certaine supériorité par le nombre et la variété de leurs jeux de fond, d'un autre côté il est vrai de dire aussi que les orgues de la France, et -notamment celles sortant de nos ateliers, présentent une supériorité incontestable sous le rapport de la soufflerie, des sommiers, du mécanisme, etc. Conserver tout ce que peut avoir de bon l'ancienne facture française ou étrangère, en y ajoutant toutes les améliorations qui résultent des progrès dans les arts et des découvertes remarquables, tel est le uut que nous nous proposons... Quant à l'orgue actuel de l'Oratoire, il n'est guère nécessaire d'observer qu'il est loin de remplir les conditions ci-dessus énoncées. C'est un bon instrument quant à sa confection, mais il ne présente que peu de ressources à l'organiste à cause du peu de jeux de fond qu'il renferme. Nous avons examiné la question de son agrandissement, et nous nous sommes convaincus que des changements partiels faits pour l'assimiler aux instruments construits dès le principe sur une plus grande échelle amèneraient infailliblement des disproportions entre ses diverses parties, ce qui amoindrirait les effets auxquels on pourrait s'attendre. Ces résultats seraient d'autant plus à regretter que ces changements nécessiteraient des frais considérables. Nous pensons donc qu'il serait infiniment préférable, dans l'intérêt du Consistoire, que nous prenions cet ancien instrument pour notre compte, et que nous en déduisions le prix sur le devis que nous aurions à vous présenter pour la construction du nouvel orgue. »

Le « Projet d'un orgue pour l'église réformée de l'Oratoire de Paris, d'après la note du 19 janvier 1845 communiquée par Monsieur Meumann, organiste » établi par la maison Daublaine, décrivait un instrument riche de 56 jeux distribués sur trois claviers manuels et deux pédaliers indépendants, et ainsi disposés

Grand Orgue : 17 jeux

  • Bourdon 32'
  • Gambe 16'
  • Montre 16'
  • Montre 81
  • Flûte 8'
  • Gambe 8'
  • Bifara 8'
  • Frestant 4'
  • Flûte 4'
  • Fugara 4'
  • Octave 2'
  • Quinte 2 2/3'
  • Tierce 1 3/5'
  • Mixture V rangs
  • Bombarde 16'
  • Trompette 8'
  • Clairon 4'

Récit : 10 jeux

  • Quintaton 16'
  • Flûte 8'
  • Violoncelle 8'
  • Bourdon 8'
  • Spitzfiote 4'
  • Flûte harmonique 4'
  • Petite Flûte 2'
  • Nazard 2 2/3'
  • Euphone 8'
  • Hautbois 8'

Positif : 13 jeux

  • Bourdon 16'
  • Montre 8'
  • Flûte douce 8'
  • Bourdon 8'
  • Viole d'amour 8'
  • Salicional 8'
  • Prestant 4'
  • Flûte traversière 4'
  • Doublette 2'
  • Nazard 2 2/3'
  • Mixture V rangs
  • Trompette 8'
  • Basson-Clarinette 8'

Première Pédale : 12 jeux

  • Contrebasse 32'
  • Principal 16'
  • Violoncelle 16'
  • Prestant 16'
  • Octave 8'
  • Gemshorn 8'
  • Octave 4'
  • Quinte 5 1/3'
  • Cornet V rangs
  • Bombarde 16'
  • Trompette 8'
  • Clairon 4'

Deuxième Pédale : 4 jeux

  • Bourdon 16'
  • Violoncelle 8'
  • Flûte 4'
  • Basson 16'

À Félix Danjou, le directeur artistique de la maison Daublaine, le Consistoire avait posé ces trois questions e 1. L'orgue actuel du temple de l'Oratoire est-il établi dans les conditions nécessaires à l'accompagnement du chant du peuple et répond-il aux besoins et aux exigences du culte ? 2. Cet orgue est-il susceptible de recevoir des améliorations et modifications qui le rendent propre au but qu'il doit atteindre, au rôle qu'il doit remplir? 3. S'il est prouvé que l'instrument actuel ne puisse être amélioré, quelles seront les conditions et les avantages résultant de l'établissement d'un nouvel orgue? » Voici la réponse de Danjou :

D'abord, sur la première question, (...) nous répondons négativement, sans hésiter. L'orgue de l'Oratoire construit sur les indications d'un organiste qui avait longtemps touché l'office dans des églises catholiques a été rendu de tous points semblable aux orgues destinés à ce culte, or il existe une très grande différence pour l'emploi de l'orgue entre le culte protestant et le culte catholique. Il suffira de faire remarquer que dans le service catholique, l'orgue est chargé à chaque instant d'interpréter, de traduire en quelque sorte les paroles mêmes de l'office qu'on lui laisse le soin d'exprimer ; alors il en résulte pour l'organiste la nécessité d'une multitude de jeux variés, bruyants, expressifs, formant une sorte d'orchestre et destiné à des effets divers. Dans le culte protestant, le rôle de l'orgue est tout différent ; sa première fonction est l'accompagnement varié suivant le nombre ou la nature des voix, suivant même le caractère du psaume qu'on chante ; entre chaque verset l'organiste doit remplir par un morceau doux, religieux et varié, la lacune nécessaire pour reposer les voix. Aussi dans les contrées où le culte protestant domine, ces orgues sont exclusivement composés de jeux doux, tous propres à l'accompagnement des voix et variés autant que l'exigent la variété même des voix, la diversité de leur timbre, et surtout le caractère différent de chaque psaume. Les jeux doux dans l'orgue appartiennent à la classe des tuyaux à bouche. Les jeux forts appartiennent à la classe des tuyaux à anches. Et pour donner une idée précise de la différence qui existe entre un orgue protestant et un orgue catholique, il nous suffira de citer le fait suivant : l'orgue de Saint-Sulpice à Paris contient soixante-six jeux parmi lesquels on compte vingt-quatre jeux forts ou jeux à anches. L'orgue de Saint-Paul de Francfort, destiné au service des protestants, contient quatre-vingt-quatre jeux parmi lesquels on ne compte que cinq jeux forts ou à anches. L'orgue de l'Oratoire, construit à une époque où l'on s'occupait fort peu de musique religieuse, a été construit suivant les usages de l'Eglise catholique, et il est incontestable qu'il ne remplit pas le but qu'on doit vouloir atteindre dans le culte protestant avec cet instrument harmonieux. Nous avons examiné avec soin la possibilité d'utiliser cet orgue actuel et de le rendre, par des modifications importantes, approprié au culte et à ses exigences. Nous avions d'abord espéré par ce moyen diminuer la dépense et rendre plus facile l'exécution de cette utile réforme. Après un long examen, nous avons dû renoncer à modifier l'orgue actuel et proposer d'en construire un nouveau entièrement conforme aux orgues des églises protestantes d'Allemagne, où on comprend si bien l'accompagnement du chant religieux. Nous nous engagerons à reprendre l'orgue actuel pour la somme de 16 000 francs en déduction du prix ci-dessous affecté à I construction du nouvel orgue. Si l'on veut bien considérer les frais qu'il faudra faire pour démonter, transporter, réparer et remonter ailleurs l'orgue actuel, on verra qu'en offrant 16 000 francs de cet instrument, nous voulons donner une preuve certaine de notre désir de rendre ces projets exécutables. Nous désirons vivement en effet produire en France un orgue tel qu'on le comprend en Allemagne, en le faisant de la supériorité de son mécanisme, supériorité qu'on ne conteste pas. Nous avons pris le judicieux avis et les conseils éclairés de M. Meumann dans la rédaction du projet ci-dessous, qui nous paraît réunir toutes les conditions exigibles. Nous n'avons pas voulu, comme à Francfort et dans quelques temples de l'Allemagne, proposer un orgue monumental dont un certain nombre de jeux eût été purement de luxe. Nous nous sommes bornés à rassembler tout ce qui constituait l'utile et l'agréable, nous tenant également en garde contre un projet mesquin et trop restreint, ou contre un projet trop grandiose et sans utilité réelle. L'orgue que nous proposons ne pourrait s'exécuter en moins de deux ans ; nous laisserons le plus longtemps possible l'orgue actuel en place, ensuite nous prêterions un orgue convenable jusqu'à l'achèvement des travaux. »

Rendant compte, dans une lettre datée du 21 février 1845, de ses entretiens avec Félix Danjou, l'organiste Ernest Meumann écrivait : « Le prix d'un orgue construit d'après mon plan serait environ 55 000 francs. La maison reprendrait l'orgue actuel pour 16 000 francs. Le plan communiqué à M. Danjou est exactement le même qui a été envoyé à M. Walcker, facteur à Ludwigsburg. M. Walcker demande 24 à 28 000 florins rhénans, environ 50 à 59 000 francs. J'avais autrefois dit au Comité du Choeur que les prix allemands étaient beaucoup plus bas que les prix français ; je croyais avoir droit de lui dire cela parce que les facteurs eux-mêmes des orgues de Saint-Denis et de Saint-Eustache m'avaient déterminé les prix de leurs instruments tels que je les ai communiqués au Comité. Malheureusement, ces Messieurs s'étaient plu à exagérer les prix, croyant sans doute que ma demande n'avait pas un but véritable ; mais à présent, lorsqu'on demande sérieusement, on rétablit les prix dans leur juste balance. Je regrette beaucoup que le Comité ait été mal instruit pendant quelque temps mais à présent, nous avons des documents que déterminent les véritables prix de deux facteurs. M. Danjou venait justement de faire un voyage en Allemagne où il était allé visiter les principales orgues, qui dans ce pays se trouvent exclusivement dans des églises protestantes. M. Danjou, en voyant ces instruments, a compris l'immense différence de construction qui doit exister entre un orgue catholique et un orgue protestant ; il me disait combien il trouvait à présent que l'orgue actuel de l'Oratoire était loin d'être établi en ces principes. M. Danjou me parla aussi avec la plus grande impartialité de la facture allemande il trouve que cette facture, sous le rapport de variété des jeux et du son harmonieux de ceux-ci, a de la supériorité sur la facture française. Mais la maison Daublaine croit pouvoir parvenir à atteindre cette même perfection 1. par l'engagement que M. Danjou a fait en Allemagne d'un ouvrier très habile, et 2, en envoyant son directeur, M. Barker*, homme très habile et déjà célèbre par de nombreuses découvertes et inventions, en Allemagne visiter et étudier les plus grands instruments. La maison me fait la proposition d'accompagner aux frais de la maison M. Barker pendant toute sa tournée. M. Danjou pense que les facteurs allemands font bien plutôt par pratique que par raisonnement, tandis que la maison se sert des deux principes, et principalement du dernier, pour arriver à leur but ; il ne doute pas que M. Barker, homme surtout très intelligent, ne découvre bientôt, une fois arrivé sur les lieux, par quel moyen les facteurs allemands produisent ce son harmonieux et suave qui distingue leurs jeux d'accompagnement. M. Danjou ne doute pas que M. Barker, muni des connaissances nouvelles dont il a étudié les effets pratiques, ne soit en état de donner à l'église de l'Oratoire un orgue établi sur le même principe que les orgues allemands. Messieurs, permettez-moi à présent de vous présenter quelques considérations sur les opinions que M. Danjou a émises. D'abord, il me semble en résulter le fait important et capital, c'est que M. Danjou, qui revient d'Allemagne où il a vu les modèles des instruments tels qu'il nous les faut pour notre culte, reconnaît avec moi entièrement et pleinement que l'orgue actuel a été manqué dans les principes de sa construction, que c'est par l'ignorance des besoins réels de notre culte que cet instrument est dépourvu de tout ce qui peut suffire à ces besoins. Voici donc la contre-expertise qui confirme ce que depuis ma nomination je n'ai cessé de reprocher à l'ordre actuel ; il me semble que la commission pourrait à présent en toute confiance proclamer la nécessité d'un changement d'orgue. C'est un devoir de l'Eglise Réformée de Paris de ne pas rester au-dessous du nécessaire pour le culte public ; dans tous les pays protestants, les orgues sont regardés comme de première importance, et les plus magnifiques instruments n'appartiennent qu'au culte protestant. N'avons-nous pas en Allemagne des villes de vingt mille âmes qui possèdent deux ou quatre instruments comme la France n'en possède aucun ? L'Eglise protestante naissante a élevé l'orgue et l'art de le jouer, la première Eglise réformée de France doit prendre à coeur l'éducation de ces deux parties si importantes de notre culte. Puisque donc un changement d'orgue doit une fois avoir lieu, il serait inutile d'en priver plus longtemps le troupeau. La différence des prix n'existe plus ; on sait que l'on aura besoin environ de 50 000 francs ; on décidera plus tard, après le voyage que j'aurai fait avec M. Barker en Allemagne, et après avoir rendu compte des résultats de nos recherches, à quelle facture il faudra s'adresser ; en conséquence de ces faits énumérés, il me semble qu'aucune époque de l'année n'est plus favorable pour ouvrir une souscription particulière que celle-ci, et j'ai l'honneur de proposer à la commission d'obtenir du Consistoire l'autorisation nécessaire à cet effet. Secondement, qu'il plaise à la commission de proposer au Consistoire de faire à la Ville de Paris la demande de faire construire le nouveau buffet d'orgue et de restaurer le mobilier de l'église qui est à la charge de la Ville ; par ceci le changement d'orgue amènerait aussi les modifications extérieures, que tant de personnes désirent. La ville de Paris, qui dépense quelquefois 100 000 francs pour la décoration d'une petite chapelle latérale, ne pourrait refuser de consacrer au culte protestant 6 000 francs sur lesquels un buffet d'orgue convenable serait donné au premier temple de Paris. »

En même temps qu'il se tenait en relations suivies avec Félix Danjou et Charles Barker, les animateurs de la manufacture Daublame, l'organiste de l'Oratoire ne négligea, pas de prendre l'avis de l'autre grand facteur parisien du temps, qui alors travaillait encore en association avec son père Dominique (1771-1862) Aristide Cavaillé-Coil (1811-1899) ; leur association cessa en 1849. A l'auteur prestigieux du grand orgue de la basilique de Saint-Denis - chef d'oeuvre unanimement admiré -, Meumann avait proposé le même programme qu'à son favori Walcker, et qu'à la firme Daublaine. La réponse des Cavaillé porte la date du 24 mars 1845 ; elle contient un mémoire relatif à l'orgue de l'église de l'Oratoire, mémoire qui traite 1. de l'état de l'orgue actuel par rapport aux besoins du culte*; 2. du devis estimatif du nouvel orgue projeté par Ernest Meumann; 3. de l'évaluation de l'orgue actuel et enfin, 4. de quelques perfectionnements importants et de leur application aux grandes orgues d'églises.

Le « Devis estimatif d'un grand orgue de 32 pieds projeté par M. Meumann, organiste, pour le temple de l'Oratoire de Paris » s'élevait à la somme de 66 310 francs. Les Cavaillé estimaient l'ancien orgue à 14 145 francs, y compris le buffet d'orgue avec les ornements de sculpture qui le décoraient (évalué à 1 500 francs). La dépense à envisager était donc de 52 165 francs, pour un instrument compor-, tant trois claviers manuels de 54 notes et deux Pédales de 27 notes, riche de 56 jeux.

Grand Orgue : 17 jeux

  • Bourdon 32' (à partir d'ut 2)
  • Montre 16' (18 tuyaux en Montre)
  • Gambe 16' (12 tuyaux en Montre)
  • Montre 8' (12 tuyaux en Montre)
  • Flûte 8'
  • Gambe 8'
  • Bisora 8' (double bouche)
  • Prestant 4'
  • Flûte 4'
  • Fugara 4'
  • Quinte 5 1/3' (ou Gros Nazard)
  • Grosse Tierce 3 1/5'
  • Doublette 2'
  • Mixture V rangs
  • Bombarde 16'
  • Trompette 8'
  • Clairon 4'

Récit :10 jeux

  • Quintaton 16'
  • Flûte 8'
  • Bourdon doux 8'
  • Violoncelle 8'
  • Spitsfiûte 4'
  • Harmonica 4'
  • Nazard     2 2/3'
  • Petite     Flûte 2'
  • Trompette harmonique 8'
  • Hautbois 8'

Positif :13 jeux

  • Bourdon     16'
  • Montre 8' (12 tuyaux en Montre)
  • Flûte douce 8' (à cheminée)
  • Viole d'amour 8'
  • Salicional     8'
  • Bourdon     8'
  • Prestant     4'
  • Flûte traversière 4' (harmonique)
  • Doubiette     2'
  • Nazard 2 2/3'
  • Mixture V rangs
  • Trompette 8'
  • Basson-Clarinette 8'

Première Pédale : 12 jeux

  • Contrebasse 32' (ou Flûte ouverte)
  • Principal 16'
  • Flûte 16'
  • Prestant 16'
  • Octave 8'
  • Gemshorn 8' (Flûte à fuseau)
  • Octave 4'
  • Quinte 10 2/3'
  • Cornet V rangs
  • Bombarde 16'
  • Trompette 8'
  • Clairon 4'

Deuxième Pédale : 4 jeux

  • Bourdon 16'
  • Violoncelle 8'
  • Flûte 4'
  • Basson 16'

Une note spécifiait : « Les tuyaux de Montre, qui doivent décorer le buffet d'orgue et faire des basses des jeux désignés dans les premier et deuxième claviers à mains, ne sont pas compris dans les prix ci-dessus. La valeur de ces tuyaux serait estimée ultérieurement, d'après le plan adopté, à raison de six francs le kilogramme. »

Quant à l'instrument existant, sa soufflerie « composée de quatre petits soufflets simples et trop défectueux quant au principe » ne pouvait être comptée, aux yeux de Cavaillé-Coll, « que pour la valeur matérielle du bois entrant dans sa construction ». Les sommiers n'avaient « pas l'étendue convenable usitée aujourd'hui dans les nouvelles orgues » ; ceux du Grand Orgue et du Positif manquaient « de la deuxième note, ut dièse, dans la basse et de la dernière note, fa, dans le dessus. Ils n'ont par conséquent que 52 gravures au lieu des 54 qu'exige l'étendue actuelle des instruments. Le sommier de Récit n'a que 32 gravures. Ces sommiers incomplets sous le rapport de l'étendue et des trop petites dimensions par rapport aux jeux qu'ils supportent déprécient notablement la valeur de cette partie importante de l'orgue ». Le mécanisme semblait pouvoir être « difficilement employé dans une autre localité. Les claviers se trouvent placés derrière l'orgue ». Seuls étaient jugés susceptibles de servir encore le buffet d'orgue avec ses ornements, les tuyaux de la Montre, et « 1. Un abrégé du Grand Orgue, en bois, 52 rouleaux; 2. Un abrégé -du Récit, en bois, 32 rouleaux; 3. Abrégé et éventail du Positif, 52 mouvements; 4. Echelle des Pédales, 25 mouvements; 5. Mouvements de registres, en bois ; 6. Claviers à mains et des Pédales, 'en mauvais état ».

C'est ce piètre instrument que Meumann dut cependant continuer à jouer tant de discussions, tant de rapports, tant d'arguments exposés à longueur de pages et de comités en comités n'aboutirent à rien. On ne toucha pas à l'orgue Callinet; en dépit de ses efforts persévérants, et malgré l'appui de certains membres du Consistoire, Meumann ne parvint pas à arracher à celui-ci la décision qui aurait permis au o premier temple de Paris » de disposer d'un orgue modèle. Rapports et devis furent rangés - d'ailleurs avec un soin qui ravit le chercheur - dans des dossiers, et l'on oublia l'orgue de l'église de l'Oratoire, tout occupé que l'on allait être de doter d'un bon instrument la nouvelle église réformée ouverte en 1846 - la troisième, après les églises de Sainte-Marie et de l'Oratoire -, à savoir le temple de Pentemont.

En 1847, le facteur chargé de l'entretien de l'orgue de l'Oratoire est le Sieur Ducroquet. Il « demande 1 500 à 2 000 francs pour la construction d'un nouveau soufflet, sur un nouveau système ». La dépense étant jugée trop élevée par le Consistoire, on se bornera à faire au souffleur les recommandations nécessaires, afin de o remédier au bruit dont on se plaint ».

Le 2 avril 1852 est présenté au Consistoire un o devis pour l'amélioration de l'orgue de l'Oratoire. Moyennant 750 francs, M. Cavaillé-ColI s'engage à y faire des travaux assez importants qui donneraient au jeu de cet instrument plus de force et d'harmonie. Dans ce devis se trouve compris le clavier de Pédales autorisé déjà, qui devait coûter 1-0 francs. Ces réparations auraient lieu immédiatement après les fêtes de Pâques, et seraient entièrement terminées (sans que le service du dimanche fût d'ailleurs interrompu) pour les fêtes de Pentecôte ». Avec l'accord du Consistoire, le marché fut signé le 11 avril 1852, et les travaux achevés et livrés à la Pentecôte. Le paiement en était réclamé, dans une lettre datée du 26 juillet 1852, par « A. Cavaillé-Coll fils, facteur d'orgues, rue de La Rochefoucauld 66, à Paris, auteur des orgues de la basilique de Saint-Denis et de la Madeleine à Paris ». À la suite de ces travaux, la maison Cavaillé-Coll demeura chargée de l'entretien de l'orgue de l'Oratoire ; des observations lui furent adressées, au début de l'année 1855, car l'instrument n'était pas visité assez souvent, ni avec le soin nécessaire. Depuis le 26 mars 1852, les attributions du Consistoire réformé avaient été partiellement dévolues au Conseil presbytéral, de Paris, créé par décret de Louis Napoléon Bonaparte.

On ne recommença à s'inquiéter de l'état de l'orgue qu'à la fin de l'année 1882, trente ans après la campagne de travaux - modeste au demeurant, vu son coût - menée par la maison Cavaillé-ColI. Certains estimaient que « l'orgue devrait, pour rendre de vrais services, être placé au fond du choeur, au-dessus de la porte du Consistoire, avec tribunes adjacentes pour les choristes ». En février 1883, à l'occasion d'un mariage, l'instrument fut touché par e un artiste et compositeur distingué, M. Hess. Il a été frappé de certaines parties, surtout des voix d'anges (sic), et il engage vivement à ne pas renoncer à un instrument aussi remarquable, quoique ayant certainement besoin d'importantes réparations. Il conseillerait de consulter plusieurs facteurs et, dans le cas d'un remaniement, de tourner l'orgue dans le sens opposé ». On payait jusque-là 200 francs par an pour l'entretien du grand orgue « ayant reconnu la nullité de cet entretien », le Conseil presbytéral le fit cesser le i avril 1883 et loua un harmonium. Mais il constata bien vite « l'impression défavorable produite sur le troupeau par l'insuffisance notoire » de celui-ci. On se remit en relations avec Cavaillé-Coll qui accepta d'effectuer quatre accords par an, pour la somme totale de 100 francs, et proposa « un nettoyage complet pour la somme de 1 500 francs ». En décembre 1893, le président du Conseil presbytéral soulignait « la nécessité qu'il y aurait à remplacer l'harmonium défectueux, en attendant que des libéralités permettent de donner à l'Oratoire l'orgue digne de lui, mais auquel il n'est possible de consacrer aucune des ressources déjà insuffisantes du budget paroissial ».

Malgré l'impécuniosité de la paroisse, on se procura un devis e L'état de vétusté (du grand orgue) le rend en partie impropre au service. Une réparation complète, d'après un devis de M. Merklin*, coûterait 29000 francs. Un autre projet serait d'acheter un petit orgue d'accompagnement pour remplacer l'harmonium à l'entrée du choeur il coûterait une dizaine de mille francs et serait à portée des chanteurs. Il est vrai que d'une part M. Merklin propose d'établir pour 200 francs un clavier électrique qui, occupant la place actuelle de l'harmonium, serait en communication avec le grand orgue, mais l'organiste assure que l'exécution s'en ressentirait d'autre part, les membres du choeur pourraient se placer auprès du grand orgue, mais ils s'y refusent comme étant trop loin du prédicateur. » L'on était en mai 1894... En février 1896, « M. Gressier, facteur d'orgues, a demandé à faire l'essai d'un système électrique dont il est l'inventeur, et qui permettrait à l'organiste de jouer le grand orgue tout en se tenant dans le choeur ». Le Conseil presbytéral autorisa l'essai, mais nulle décision ne fut prise, car quelques mois plus tard on revenait sur la nécessité de doter l'Oratoire « d'un orgue en rapport avec ce qu'on est en droit d'attendre dans le plus grand de nos temples protestants de Paris » en 1897 encore, le désir est exprimé « de voir, dans un avenir pas trop éloigné, remédier à l'état déplorable du grand orgue ».

Mais l'on ne tardera plus, cette fois, à passer à l'action ; le 25 juin 1897, le Conseil presbytéral apprend que « plusieurs membres de l'Eglise se sont préoccupés de l'état de plus en plus défectueux du grand orgue, et ont cherché les moyens d'y porter remède, et même, si possible, de le refaire presque en son entier. Ils ont formé à cet effet, de leur initiative privée et en dehors du Conseil presbytéral, un comité qui étudie les voies et moyens de parvenir à cette réfection, et a cru devoir d'abord en prévenir le Conseil presbytéral lui-même, et solliciter son autorisation ». Le Conseil presbytéral, « qui ne peut voir ce projet qu'avec sympathie, mais ne saurait en rien y participer », prend la délibération suivante « Le Conseil presbytéral, ayant reçu communication d'une offre faite par un comité qui se propose de remplacer l'orgue, en se servant pour le nouveau des éléments de l'ancien pouvant encore être utilisés, autorise cette réfection à la condition qu'aucune responsabilité, ni de près ni de loin, ne lui en incombe, et déclare formellement qu'il ne saurait en rien assumer cette responsabilité. »

L'église de l'Oratoire dut donc au mécénat privé de disposer d'un nouvel orgue, construit en 1898-1899 par le facteur Merklin et mis en place dans le buffet de Godde, un buffet sans grâce à trois plates faces garnies de tuyaux et séparées par des pilastres soutenant un entablement dont la corniche était décorée de denticules et de modillons. L'instrument fut inauguré le 24 mars 1899 avec le concours d'Henri Dallier (1849-1943), organiste de Saint-Eustache*, et d'Henri CEchsner de Coninck (1850-1904), organiste du Grand Temple du Havre*. Construit, disait le facteur, e avec application de notre nouveau système pneumatique-tubulaire breveté », il comportait 32 jeux distribués sur deux claviers manuels de 56 notes et un pédalier de 30 notes, selon la disposition suivante :

Grand Orgue : 14 jeux

  • Montre 16'
  • Bourdon 16'
  • Montre 8'
  • Bourdon 8'
  • Flûte harmonique 8'
  • Salicional 8'
  • Gambe 8'
  • Prestant 4'
  • Flûte octaviante 4'
  • Jeux de combinaison
  • Cornet V rangs
  • Fourniture
  • Bombarde 16'
  • Trompette 8'
  • Clairon 4'

Pédale : 6 jeux

  • Contrebasse 16'
  • Soubasse 16'
  • Octave basse 8'
  • Bourdon 8'
  • Jeux de combinaison
  • Bombarde 16'
  • Trompette 8'

Récit expressif : 12 jeux

  • Quintaton 16'          -
  • Flûte traversière 8'
  • Cor dc nuit 8'
  • Gemshorn 8'
  • Viole de gambe 8'
  • Voix céleste 8'
  • Flûte d'écho 4'
  • Octavin 2'
  • Jeux de combinaison
  • Trompette harmonique 8'
  • Basson-Hautbois 8'
  • Voix humaine 8'
  • Clarinette 8'

Pédales d'accouplement et de combinaisons :

  • - Pédale de Tonnerre
  • - Tirasse Grand Orgue
  • - Tirasse Récit
  • - Appel des jeux du Grand Orgue
  • - Accouplement Récit/Grand Orgue à l'unisson
  • - Accouplement Récit/Grand Orgue à l'octave grave
  • - Expression Récit
  • - Introduction des jeux combinés par groupes
  • - Introduction des jeux de combinaisons de la Pédale
  • - Introduction des jeux de combinaisons du Grand Orgue
  • - Introduction des jeux de combinaisons du Récit
  • - Trémolo

La nouvelle console prit place sur le devant de la tribune. Elle était équipée, pour chaque jeu, d'un second bouton d'appel indépendant du premier, ce qui permettait à l'exécutant de préparer à l'avance deux combinaisons différentes de jeux. Pendant l'exécution, expliquait le facteur, « l'organiste peut alors, sans ôter les mains des claviers, faire parler, à l'aide d'une pédale, les jeux tirés soit de l'une, soit de l'autre série des boutons d'appel s. L'orgue Callinet avait vécu soixante-dix ans ; l'Oratoire était désormais doté d'un instrument qui eût ravi l'organiste Meumann un demi-siècle plus tôt... Il répondait au goût de l'époque et reflétait les progrès - ou ce qui était jugé tel - réalisés par la facture d'orgue à la fin du XIXe siècle,

Quelques semaines avant l'inauguration du nouvel orgue, on discuta de l'agrandissement de la tribune, vivement souhaité par quelques-uns, mais celui-ci ne fut pas jugé nécessaire ; le Conseil presbytéral reculait d'ailleurs devant la dépense, estimée à 5 000 francs par l'architecte Rey, et à 2 300 francs seulement par le facteur Merklin. La remise officielle de l'orgue au Conseil presbytéral, par le président du comité qui avait pris l'initiative des travaux, s'effectua le 14 avril 1899 ; il avait coûté 34 532 francs. La firme Merklin n'ayant reçu que 28 000 francs, elle sollicita, en compensation, « l'autorisation de donner des auditions à des amateurs dont le nombre ne dépasserait pas cinquante personnes environ. C'est M. de Bricqueville (sic) qui tiendrait l'orgue, et cette demande est appuyée par M. Fernand Robineau, professeur au lycée de Versailles ». Il est possible que les facteurs aient perdu de l'argent en construisant l'orgue, estima un conseiller, mais il faut constater que c'est leur habitude de se plaindre. Pour les temples de Saint-Paul et des Batignolles*, ils ont présenté des réclamations analogues. La crainte s'exprima que les auditions envisagées aient « un caractère presque mondain »; On estimait, de toute manière, un sérieux contrôle indispensable car « on ne saurait admettre l'excès des airs de flûte ou de piano selon le goût de M. Merkin, qui est très bon facteur, mais peu musicien, et qui aime surtout les effets d'orgue » (!). D'un autre côté, on fit valoir que « dans le public catholique, il est bon qu'on sache que nous avons un excellent instrument, car on reproche toujours aux protestants de ne pas aimer la musique ». L'un des pasteurs était d'avis d'imposer des limites à la fantaisie, mais de ne « -pas se montrer trop absolu » : n'organisait-on pas, en Hollande, des concerts hebdomadaires dans les temples ? Ne donnait-on pas aussi de tels concerts en Suisse ? En insistant pour que « l'austérité protestante soit respectée », le Conseil presbytéral finit par accorder l'autorisation demandée trois auditions pouvaient avoir lieu, à des dates aussi rapprochées que possible. Après la première, on convint qu'elle avait été « très convenable sous tous les rapports », et que l'on n'avait « exécuté que de la musique religieuse très sérieuse ». Le 29 mai 1899, le nouvel orgue fut examiné et entendu par « M. Dubois, le directeur du Conservatoire* ». La maison Merklin demandait 200 francs par an pour accorder l'orgue ; ce prix fut accepté par le Conseil presbytéral, à condition que l'orgue « soit accordé au moins quatre fois par an, et plus si besoin était ». Le 14 décembre 1900, le Conseil presbytéral examinait la demande faite par Henri Dallier de donner à des jeunes gens quelques leçons sur l'orgue de l'Oratoire, deux nu trois fois par mois il ne consentit pas à un usage régulier de l'orgue, se déclarant prêt, tout au plus, à accorder l'autorisation une fois par mois, et à la condition que M. Dallier soit toujours présent.

Devant la difficulté de se procurer, pour les cérémonies privées, les deux souffleurs indispensables, l'organiste sollicita, dès le mois de juin 1901, l'autorisation d'électrifier la soufflerie de l'orgue. Le Conseil presbytéral accepta le principe de cette transformation. En février 1902, le facteur Merklin présenta un devis s'élevant à la somme de 2 500 francs. Désirant étudier d'abord « ce fonctionnement du souffle électrique appliqué à d'autres grandes orgues », le Conseil presbytéral ajourna sa décision. Le marché fut signé, et les travaux exécutés par la maison Merklin, à la fin de l'année 1902 ; le nouveau ventilateur était indépendant de la soufflerie existante, de sorte que l'on pouvait se servir indifféremment de l'un ou de l'autre.

En 1903 revint à l'ordre du jour la question de l'agrandissement de la tribune. Diverses solutions furent envisagées, dont le transfert de la console à droite de la tribune, souhaité par l'architecte Cave]. Celui-ci avait consulté le facteur Abbey* sur « le fonctionnement des claviers électriques » Abbey déconseillait « ce système très coûteux (qui) se dérange souvent et laisse subsister un intervalle entre le jeu de l'organiste et l'émission du son. Merklin, également consulté, proposait « un plan de transposition du clavier, donnant sur le devant de l'orgue 57 places de choristes sur trois gradins » il s'engageait à « faire le travail complet, transfert du clavier, changement d'ouverture des portes et gradins pour la somme de 2 600 francs ». Ce dernier projet reçut un début d'exécution, mais l'on se plaignit dès octobre 1903 du « mauvais fonctionnement du clavier électrique installé par M. Merklin ». 2 000 francs restaient dûs sur le prix du ventilateur électrique installé l'année précédente le facteur Gutschenritter, successeur de Merklin réclamait son dû avec d'autant plus d'insistance que « l'industrie des facteurs d'orgues traverse actuellement une crise très aiguë ». Il n'obtint pas immédiatement satisfaction car le fonctionnement de la nouvelle soufflerie s'était avéré capricieux. La dette du Conseil presbytéral fut soldée en avril 1904. Un e accident assez grave » survint encore au ventilateur en 1905, occasionnant une dépense de 250 francs prise en charge pour moitié par le facteur et pour moitié par la paroisse.

Les tenants d'une tribune d'orgue agrandie n'avaient pas désarmé. Ils obtinrent gain de cause, quant au principe, en juin 1910. Les travaux furent exécutés, avec l'autorisation de la préfecture de la Seine, en 1911. Dès 1920, le Conseil presbytéral accepta de « verser annuellement 50 francs à un spécialiste pour la visite périodique du moteur de l'orgue ». En 1928, l'orgue était estimé à 150 000 francs par les Etablissements Gutschenritter qui en assuraient l'entretien.

En novembre 1945, le Conseil presbytéral était alerté par l'organiste, Henriette Roget, au sujet du mauvais état de l'orgue : des réparations s'imposaient, il fallait s'attendre à une très grosse dépense qui ne pourrait vraisemblablement pas être couverte, même partiellement, par l'administration des Beaux-Arts ; on prévoyait de demander un devis, e avec une variante pour le cas où on porterait à trois le nombre des claviers ». En janvier de l'année suivante, on prévoyait une dépense de l'ordre de 750 000 francs ; en novembre, cette somme passait à 2 500 000 francs. En mai 1947, 230 000 francs avaient déjà été recueillis en faveur de la réfection de l'orgue. Pendant ce temps, l'instrument e donne des signes de faiblesse et risque de se trouver rapidement indisponible ». A la suite d'une expertise faite par le Service des Beaux-Arts au cours du premier trimestre de l'année 1949, il fut reconnu que l'orgue de l'Oratoire e avait besoin d'une part d'un nettoyage complet et de quelques réfections secondaires, d'autre part d'une transformation profonde du système de transmission actuellement vétuste et périmé ». On pensait que la Ville de Paris pourrait entreprendre immédiatement la première opération, mais que la seconde, qui coûterait entre six et sept millions, ne pourrait pas être entreprise avant quatre ou cinq ans. En octobre, on apprit que la préfecture de la Seine envisageait de faire relever l'orgue de l'Oratoire e dès la fin des travaux en cours à l'église Saint-Etienne-du-Mont u. Le 15 mai 1951, un orgue provisoire était installé dans le choeur de l'église ; il avait été mis par son propriétaire à la disposition du Conseil presbytéral pour la durée des travaux de restauration du grand orgue*. Le premier crédit de sept millions fut voté l'année suivante. Après diverses tractations, le Ministère de l'Intérieur proposait, en 1955, une solution transactionnelle à la paroisse alors que celle-ci désirait un orgue de 63 jeux, le Ministère en accordait 47, au lieu des 32 existants. L'année suivante, le Conseil presbytéral acceptait de contribuer à la dépense pour une somme de trois millions, à condition que le paiement soit étalé sur plusieurs années, et que la paroisse ait voix consultative au sujet du choix de l'organier. À la suite de l'appel d'offres qui fut lancé, les soumissions des facteurs devaient être déposées avant le 30 avril 1956. Un arrêté préfectoral du 26 septembre de la même année confirmait la reconstruction de l'orgue de l'Oratoire, confiée à la maison Gonzalez ; le délai total prévu pour les travaux était de dix-huit mois, à compter de la date de l'arrêté.

En mai 1958, le Conseil presbytéral prenait connaissance du plan du nouvel orgue et de la tribune, tel qu'il avait été proposé par l'architecte de la Ville de Paris, et l'approuvait. Le montage du nouvel orgue débuta en novembre 1958 ; son achèvement était prévu pour la fin du mois d'avril 1959. Quant à l'orgue provisoire, on envisagea sa dépose dès le mois d'avril 1959 : on songeait à le remonter soit en l'église réformée d'Auteuil, soit en l'église réformée de Clermont-Ferrand ; le transfert s'effectua au début de l'été 1959, en direction de l'église réformée de la rue Erlanger, à Paris (depuis la reconstruction de cette église, en 1970, l'instrument est installé dans l'église luthérienne de la Réconciliation, à Suresnes). L'achèvement du montage de l'orgue Gonzalez prit du retard, de sorte que l'inauguration officielle, tout d'abord prévue pour le milieu du mois de juin 1961, se déroula, en définitive, au soir du dimanche 14 janvier 1962, avec la participation du pasteur Marc Boegner (1881-1970), président d'honneur de la Fédération protestante de France, et de M. Pierre Ducros, l'un des pasteurs de la paroisse de l'Oratoire. La Maîtrise de l'Oratoire, sous la direction de son chef Horace Hornung, prit part à la cérémonie, cependant qu'aux claviers se succédaient Alexandre Cellier (1883-1968), organiste de l'église réformée de l'Etoile à Paris, Marcel Dupré (1886-1971), organiste de l'église Saint-Sulpice, et les deux organistes titulaires Henriette Roget 1" prix d'orgue dans la classe de Marcel Dupré en 1930) et Marie-Louise Girod (1er prix d'orgue dans la classe de Marcel Dupré en 1941). Au cours de la soirée, on put entendre des oeuvres de Claude Goudimel, Jean-Sébastien Bach, Alexandre Cellier, Dietrich Buxtehude, Antonio Soler, Marcel Dupré, et Georges-Frédéric Hændel, ainsi qu'une improvisation de Marcel Dupré.

La composition du nouvel orgue avait été établie par les soins d'une commission réunissant les deux organistes titulaires susnommées, ainsi qu'Alexandre Cellier, Marcel Dupré, Norbert Dufourcq et les architectes en chef des Monuments Historiques, MM. Prieur et Sallez. Sur l'avis de M. Norbert Dufourcq, on a placé la tuyauterie du Positif dans les deux niches latérales flanquant la tribune, afin de dégager celle-ci et de lui permettre d'accueillir une maîtrise importante ; de ce fait, une traction électrique s'imposait. La manufacture Gonzalez réutilisa au moins les jeux anciens (Salicional, Gemshorn, Clarinette...) qui firent l'objet d'une réharmonisation et d'un rediapasonnage. L'instrument est riche de 66 jeux, distribués sur trois claviers manuels de 61 notes et un pédalier de 32 notes ; il possède deux combinaisons générales permettant de changer instantanément de registration.

Grand Orgue : 17 jeux

  • Montre 16'
  • Bourdon 16'
  • Montre 8'
  • Bourdon 8'
  • Salicional 8'
  • Flûte harmonique 8'
  • Prestant 4'
  • Flûte douce 4'
  • Doublette 2'
  • Quinte ouverte 2 2/3'
  • Cornet V rangs
  • Fourniture IV rangs
  • Cymbale III rangs
  • Bombarde 16'
  • Trompette 8'
  • Clairon 4'
  • Clarinette 8'

Récit expressif : 17 jeux

  • Quintaton 16'
  • Principal 8'
  • Gemshorn 8'
  • Flûte à fuseau 8'
  • Voix céleste     8'
  • Prestant 4'
  • Flûte ouverte 4'
  • Octavin 2'
  • Nazard 2 2/3'
  • Tierce 1 3/5'
  • Fourniture IV rangs
  • Cymbale III     rangs
  • Tuba 16'
  • Trompette 8'
  • Clairon 4'
  • Basson-Hautbois 8'
  • Voix humaine 8'
  • Trémolo

Positif : 14 jeux

  • non expressif
  • Diapason 8'
  • Principal 4'
  • Fourniture III rangs
  • Cymbale II rangs
  • Trompette 8'
  • Soprano 4'
  • expressif
  • Flûte creuse 8'
  • Cor de nuit 8'
  • Gemshorn 4'
  • Quarte 2'
  • Nazard 2 2/3'
  • Tierce 1 3/5'
  • Larigot 1 1/3'
  • Piccolo 1'

Pédale : 18 jeux

  • Montre 16'
  • Contrebasse 16'
  • Soubasse 16'
  • Octave basse 8'
  • Principal 8'
  • Bourdon 8'
  • Principal 4'
  • Flûte 4'
  • Choral basse 2'
  • Quinte 10 2/3'
  • Quinte 5 1/3'
  • Fourniture IV rangs
  • Bombarde 16'
  • Trompette 8'
  • Clairon 4'
  • Basson 16'
  • Basson 8'
  • Basson 4'

Tirasses Grand Orgue, Positif, Récit

Accouplements Positif/Grand Orgue, Récit/Grand Orgue, Récit/Positif Octaves graves et aiguës, Crescendo, Tutti.

Le prix de revient de cet orgue s'est élevé, tribune comprise, à 42 millions de francs (valeur 1959). La contribution de la paroisse a atteint un peu plus de 10 % de cette somme*.

La première paroisse réformée de Paris - par l'ancienneté et par le nombre de ses membres - a ainsi disposé, en 170 ans, à Saint-Louis du Louvre puis à l'Oratoire, de quatre orgues de dimension croissante et d'esthétiques diverses, reflétant les goûts dominants à l'époque de leur construction

  • l'orgue de facteur inconnu offert au Consistoire par Louis Féline.
  • l'orgue de Louis Callinet (1828), au jeux d'anches surabondants (28 jeux).
  • l'orgue de joseph Merlclin (1899), romantique, à traction pneumatique (32 jeux).
  • l'orgue de la firme Gonxalez (1962), néo-classique, à traction électrique (66 jeux).

 

Réagissez sur le blog de l'Oratoire, c'est un espace où vous pouvez faire profiter les autres de vos propres réflexions...

Blog de l'Oratoire du Louvre

Notes

* Nous devons la substance de ce paragraphe à la compétence de M. Pierre Hardduin, que nous tenons à remercier pour les renseignements aimablement communiqués.

* Ce Bordelais est considéré comme l'inventeur de « l'orgue expressif ». Vers 1810, il construisit en effet on instrument à anches libres qu'il soumit à l'examen de l'Institut de France et du Conservatoire de Paris. Son invention ayant donné lieu à des rapports favorables de la part du physicien Charles et du compositeur et organiste Etienne Méhul (1763-1817), il construisit des instruments plus importants, dont un orgue mixte comportant un clavier e expressif » pour le Conservatoire, en .1812. Sa découverte consistait d'une part à modifier l'intensité sonore au moyen d'une pédale agissant sur les soufflets, d'autre part à ajouter des anches libres aux tuyaux, et à les mettre en vibration sans le secours de résonateurs. Ces deux principes, perfectionnés par Sébastien Erard (1752-1831), Jacob Alexandre (1804-1876) et Alexandre-François Debain (1809-1877), sont à l'origine de l'harmonium.

* Elève de Lagardette, professeur d'architecture, architecte de la ville de Paris, de 1813 à 1830, Godde fit exécuter des travaux dans diverses églises parisiennes (Sainte-Elisabeth-du-Temple, Saint-jean-Saint-François, Saint-Pierre-du-Gros-Caillou, Saint-Germain-des-Prés) il dressa lea plana des églises Notre-Dame-de-Bonne-Nouvelle et Saint-Denis-do-Saint-Sacrement, ceux de nombreuses constructions particulières. Avec Leaueur, il agrandit l'Hôtel de Ville de Paria (incendié en 1871). On lui doit aussi le Séminaire de Saint-Sulpice et la porte du cimetière du Père Lachaise.

* « Ce jourd'hui 6 juillet 1826, entre les soussignés, Monsieur Marron, pasteur, stipulant au nom du vénérable Consistoire de l'Eglise Réformée de Paria comme président du dit vénérable Consistoire, et Messieurs Somer et Callinet, facteurs d'orgues, demeurant à Paria, le premier rue du Fau- bourg Saint-Martin 89 et le second rue des Tournelles 17, a été arrêté et convenu ce qui suit : les dits Sieurs Somer et Callinet ont promis et se sont engagés envers le Consistoire à fournir un grand orgue conforme au devis ci-annexé qu'ils ont dressé eux-mêmes, et qui a été adopté par le Consistoire. Cet orgue sera établi dans le Temple de l'Oratoire rue Saint- Honoré, et ajusté dans une montre en menuiserie exécutée par les soins de Monsieur Godde, Architecte des Travaux Publics et des Temples de Paris, d'après l'autorisation de Monsieur le Préfet de la Seine en date du ……….. Pour raison de l'accomplissement des promesses des dits Sieurs Somer et Callinet détaillées tout en long dans le devis, le Consistoire s'engage à leur payer la somme de 17 160 francs aux quatre époques sui- vantes, savoir : 3 000 francs comptant 3 000 francs lorsque tous les sommiers seront placés dans le buffet ou prêts à l'être, le mécanisme terminé et la moitié des jeux en place ; 3 500 francs quand les mouvements, abrégés, claviers et soufflets seront finis. Les 7 660 francs qui resteront dus seront payés quand l'ouvrage ayant été achevé aura été reçu à dire d'experts.
Messieurs Somer et Callinet s'engagent encore à déposer immédiatement, nettoyer à neuf et reposer dans la grande tribune près de la chaire le petit orgue actuellement existant, moyennant la somme de 300 francs. Tous ces travaux de construction de grand orgue et réparations du petit seront exécutés dans l'espace de seize mois à partir du jour de la signature du présent acte, et faute par les dits Sieurs Somer et Callinet et remplir cette condition, il leur sera fait une retenue de 300 francs par chaque mois de retard, ce dont ils conviennent et se disent contents.
Ainsi fait double à Paris les jour, mois et an que dessus, pour être fidèlement exécuté entre les parties soussignées.
Marron, pasteur       Callinet, successeur de M. Somer,
Chevalier de la Légion d'honneur facteur d'orgues Somer. »

* Associé avec jean-Antoine Somer (qui meurt le 25 janvier 1830, à l'âge de 90 ans) à partir de 1821, puis avec Daublaine (de 1839 à 1844), Louis Callinet est le plus célèbre des Callinet. Ayant appris le métier chez son oncle François Callinet (1754-1820), il eut un fils, également facteur d'orgues, qui mourut jeune. Sa réputation était telle qu'il a été considéré comme le meilleur facteur d'orgues parisien avant Aristide Cavaillé-ColI. L'organologue Marie-Pierre Hamel (1786-1879) fait de lui un élève de Somer, Félix Danjou (1812-1866) un élève de Pierre-François Dallery (17641833), Jacques Gardien un élève de François Callinet. Selon P. MeyerSiat (« Les Callinet », Istra, 1965, p. 45-46), « en fait, ce Callinet célèbre est assez mal connu ; quoi qu'il en soit, il ne peut se mesurer avec ses cousins de Rouffacb, ni pour la quantité, ni pour la qualité de ses ouvrages, ni non plus pour sa valeur humaine ».
Quant à Jean-Antoine Somer (ou Antoine-Jean), il était l'un des trois fils de Nicolas Somer, artisan facteur d'orgues descendant d'un ébéniste louisquatorzien. En l'an III, il fit partie, avec son frère aîné Louis-Nicolas Sumer, de la Commission - dite commission Molard - qui fut chargée de dresser le bilan des orgues parisiennes à conserver, à réquisitionner ou à démonter ; à cette commission appartenaient également le facteur Dallery et les organistes Balbastre, Séjan, Miroir et Després (cf. « Le livre de l'orgue français (1589-1789) », tome III : « La facture », A. & J. Picard, Paris, 1978, par N. Dufourcq).

* Fils de l'organiste et compositeur Jean-Jacques Beauvarlet-Charpentier (1734-1794), Jacques-Marie Beauvarlet-Charpentier naquit à Lyon et suivit les traces de son père, à qui il succéda à l'orgue de l'église SaintPaul-Saint-Louis de Paris. Après la Révolution, il devint organiste des églises Saint-Germain-des-Prés et Saint-Germain-l'Auxerrois puis, en 1815, des églises Saint-Eustache et des Missions étrangères. On lui doit des pièces pour piano forte, des romances, 6 Magnificat, 15 Noël, des Messes d'orgue, 2 Te Deum, 6 Hymnes pour les principales fêtes de l'année, un Journal d'orgue, publié à partir de 1822, à raison de six cahiers par an. Toute cette musique, notamment les Noëls, est d'assez médiocre facture ; elle témoigne d'un goût jugé aujourd'hui déplorable.
Fils de l'organiste et compositeur Nicolas Séjan (1745-1819), l'un des meilleurs représentants de l'école française préromantique, Louis-Nicolas Séjan succéda à son père à l'orgue de Saint-Sulpice et à celui de SaintLouis-des-Invalides. Il a laissé quelques oeuvres pour orgue, de la musique de chambre et un opéra.

* Appartenant à une célèbre famille de facteurs de clavecins et de musiciens, Henry-Joseph Taskin eut une triple activité de professeur, de -compositeur - et d'éditeur de musique. On lui doit des trios, un concerto pour piano, des mélodies, des cantates, trois opéras inédits et une notice sur les Couperin. Il était le petit-neveu du fondateur de la dynastie, Pascal Taskin (1723-1793), qui perfectionna la fabrication des clavecins en généralisant, dès 1768, l'emploi de pointes de cuir de buffle à la place des plumes de corbeau dont' étaient munis les sautereaux, et qui inventa, vers 1789, une harpe-psaltérion sans clavier nommée « armandine ».

* Fils du fondateur de la manufacture, Eberhard Walcker (1756-1843), Eberhard-Priedrich Walcker transféra celle-ci de Cannstatt à Ludwigsburg (Wurtemberg) en 1820, et ?associa, en 1842, avec Heinrich Spaich. La firme, qui est aujourd'hui la plus importante d'Allemagne fédérale, a construit plus de 5 200 instruments répartis dans tous les continents. A l'époque où nous noua situons venaient d'être inaugurés ou allaient être inaugurés quatre grands instruments construits par la maison Walcker, ceux de Saint-Paul de Francfort (1833 ; 3 claviers manuels et 2 pédaliers, 74 jeux), de Saint-Pierre de Saint-Petersbourg (1840 3 claviers manuels et 2 pédaliers, 65 jeux), de la Olaikirche à Reval (aujourd'hui Tallinn, en Estonie ; 1842, 65 jeux) et de la Stiftakirche à Stuttgart (1845, 74 jeux). Un peu plus tard, les établissements Walcker installèrent un instrument à Mulhouse (Saint-Etienne, 1868, 3 claviers, 61 jeux), et deux instruments à Strasbourg, en 1897 (Saint-Paul, 3 claviers, 58 jeux, et Saint-Guillaume, 3 claviers, 52 jeux).

* « Rapport fait au vénérable Consistoire sur l'orgue de l'Oratoire par M. Meumann, organiste.
Sur la demande de Monsieur le Président, du 13 juin 1843, d'examiner l'orgue avec soin, et de prendre note de ce qu'il laisse à désirer, l'organiste a l'honneur de présenter l'analyse suivante de l'instrument.
L'orgue de l'Oratoire se compose de 28 jeux, placés sur trois claviers et une Pédale; le premier davier contient 11 jeux, le second 9 et le troisième 4 ; les pédales ont 4 basses ; le vent est fourni par 4 soufflets correspondant ensemble et remplissant l'un l'autre.
Le premier davier contient, savoir :
1. Montre de 8 pieds. Les Montres sont placées séparément, c'est-à-dire que les trois octaves supérieures restent à la même hauteur que les autres tuyaux du clavier, tandis que l'octave inférieure se trouve à 7 pieds plus bas. Cette octave est en outre encore d'une intonation équivoque, et le registre entier ne peut jamais offrir une gamme égale et correcte, puisque le son porté à l'oreille, partant d'un endroit différent, doit nécessairement la frapper plus ou moins selon le placement du tuyau.
2. Bourdon 16 pieds. Ce jeu est en lui très faible, son intonation n'est pas assez forte pour servir de basse aux jeux de 8 pieds ; en outre finit-il avec la, au lieu de descendre jusqu'à ut, ce qui ôte à l'instrument une grande partie de sons larges, bien remplis, et servant de soutien pour accompagner le chant.
3. Bourdon 8 pieds. Il existe entièrement, mais il est si faible qu'il n'est pas du tout en état de remplacer ce qui manque aux autres jeux; du reste, le Bourdon étant le jeu le plus en usage dans les orgues ordinaires, il est naturel de le trouver dans cet instrument entièrement, et non pas dépouillé de ses basses.
4. Flûte de 8 pieds. Les trois octaves supérieures sont bonnes, mais la dernière, celle de la basse, n'est que la répétition de celle qui la précède l'octave de la basse n'existe donc pas véritablement dans ce jeu.
5. Prestant 4 pieds. Il est bon. L'orgue ne possède pas assez de ces jeux de 4 pieds, qui chantent dans des octaves supérieures la mélodie, et l'impriment davantage à l'oreille.
6. Clairon 4 pieds. Dans un orgue de la grandeur de celui de l'Oratoire, il n'est pas bon d'avoir de jeux d'anches de 4 pieds, qui crient très fort, et dont on ne peut se servir que dans des octaves moyennes ; ainsi le facteur a-t-il répété la troisième octave deux fois ; la quatrième n'existe pas.
7. Tierce. Ce jeu devrait tempérer la quantité énorme de jeux d'anches contenus dans l'orgue de l'Oratoire, mais elle ne le fait pas, parce qu'elle n'entonne pas la tierce la plus rapprochée, mais celle qui est à deux octaves plus haut, ce qui la fait crier dans des régions de son dont on ne se sert plus.
8. Nazard. Ce jeu a le même défaut que la Tierce, il entonne la quinte éloignée de deux octaves, au lieu de prendre la plus proche; dans les deux jeux, la différence dans le prix de ce qu'ils devaient être et de ce qu'ils sont est de la moitié.
9. Cornet. Il n'existe que dans deux octaves, au lieu de se trouver dans les 4 1/2 que contient le clavier ; du reste, il a le son désagréable et fort du nez.
10. Trompette. Elle est bonne.
11. Voix humaine. On n'a pas de plaisir à entendre ce jeu, il ne répond guère de ce qu'on attend de son nom; on croirait plutôt entendre une petite Trompette.
Le second clavier contient, savoir :
1. Montre de 8. Les Montres ont le défaut de beaucoup de jeux dans cet orgue, leur dernière octave n'est que la répétition de celle qui la précède; on veut partout épargner cette octave qui du reste, quand elle existe, coûte presque autant à elle seule que les autres trois et demi, chez des jeux ordinaires ; pour les Montres, qui sont le jeu principal de l'orgue, elle coûte même beaucoup plus.
2. Bourdon 8. Ce Bourdon, comme celui dans le premier clavier, s'y trouve entièrement, sa gamme est complète, mais il faut le répéter, ce n'est pas grand-chose de trouver un jeu comme le Bourdon complet.
3. Flûte 8. Son octave de basse n'existe pas, elle n'est pas même répétée, comme elle l'est chez plusieurs autres jeux manquant de leurs basses.
4. Nazard. Il passe sans qu'on puisse le vanter.
5. Prestant. Très bon, le meilleur jeu ; cependant devrait-on avoir plus de ces jeux de 4 pieds.
6. Kromhorn. C'est un jeu qui vient agrandir le nombre des jeux d'anches, dont l'orgue abonde, sans même être d'une bonne qualité.
7. Clairon. Il est seulement pour la basse, mais n'a que 4 pieds, ce n'est donc pas un véritable jeu, pour des octaves inférieures ; c'est aussi pourquoi il ne peut être regardé comme la continuation du
8. Hautbois, qui ne s'étend que dans les deux octaves et demies supérieures, et est par conséquent sans basse.
9. Trompette. Ce jeu fait accroître le nombre des jeux d'anches et en augmente tellement la force qu'il serait très désagréable de s'en servir aussi reste-t-il là, sans utilité.
Le troisième clavier, enfin, a si peu d'importance qu'il est inutile d'analyser ces quatre jeux, Bourdon, Flûte, Cornet et Hautbois. Ce clavier existe seulement à moitié, le reste sont des touches qui ne se baissent pas, et pour lesquelles les tuyaux n'existent non plus.
Autant aux Pédales, elles commencent par fa, au lieu de commencer par ut, ce qui fait manquer les cinq notes qui servent principalement à soutenir le chant, et qui en général font valoir de grandes masses de sons puissants et bien nourris. Faute de ces cinq notes, l'organiste est obligé, pour jouer des morceaux spécialement écrits pour l'orgue avec Pédale obligée, de les transposer ; encore cette transcription ne peut-elle s'effectuer toujours sans nuire à l'effet que voulut produire le compositeur, en occupant les plus fortes basses de l'instrument. En outre, la force des Pédales n'est pas en relation avec la force de l'orgue entier ; en général compte t-on au moins le quart du total des jeux pour des Pédales ; à l'Oratoire, ce n'est que la septième partie, il faudrait donc encore avoir une basse ouverte de 16 pieds, une Quinte et une basse de 8 pieds, pour mettre les Pédales en état de soutenir les autres jeux. De même serait-il nécessaire de pouvoir accoupler les Pédales au premier clavier pour faire parler aussi les basses du clavier, que l'exécutant ne peur pas prendre avec ses mains, mais desquelles il peut facilement se servir, quand les Pédales seraient accouplées au clavier. L'organiste peur affirmer ne pas encore avoir vu un orgue sans cet accouplement; il y a même des orgues auxquels on ne peut pas même détacher les basses des claviers des Pédales ; c'est donc une chose sous-entendue comme devant se trouver toujours à tour orgue, sans qu'on en fasse la commande expresse. Cet accouplement, et principalement l'addition des cinq notes manquantes aux Pédales, et des jeux manquant aussi, exigerait sans doute un élargissement de la caisse extérieure dans laquelle les tuyaux de l'orgue se trouvent enfermés ; il demanderait en outre l'augmentation des soufflets, il en faudrait au moins un de plus, puisque les quatre soufflets qui s'y trouvent à présent ne sont pour ainsi dire pas en état de fournir le vent nécessaire quand on se sert de tous les jeux de l'orgue ; il arrive même souvent que le vent manque en accompagnant de la manière ordinaire le chant, il en résulte des chocs et des interruptions de sons qui sont très désagréables pour l'oreille, et qui très souvent peuvent nuire à la mesure, et même la rompre complètement. Le vent se partage aussi, c'est-à-dire que les différents claviers et Pédales ont chacun leurs soufflets spéciaux, chose qui ne se fait qu'à des instruments beaucoup plus grands, et auprès de ceux-là seulement, lorsque l'on se sert de toute la force. Comme il arrive très souvent qu'on ne se sert que d'un clavier à la fois, le souffleur est cependant toujours obligé de faite du vent inutile pour les autres claviers, parce qu'il peut arriver que l'organiste changeant subitement de clavier doit nécessairement avoir du vent ; il est évident que cependant ce vent peut avoir été fourni pendant longtemps inutilement, et se mangeant lui-même, tandis qu'il n'arriverait jamais qu'il fût fait du vent dont on ne se servirait pas lorsque tous les soufflets donneraient tous ensemble leurs vents à la partie de l'orgue de laquelle on se sert momentanément, au lieu d'être restreints par des conduits à tel ou tel clavier ou Pédale, de laquelle on ne fait souvent pendant longtemps point d'usage, et donc le vent se perd et expire.
Quand on examine l'orgue de l'Oratoire comme un ensemble, on trouve en général que le son en est trop criard et pas assez soutenu, qu'il y a beaucoup trop de jeux d'anches, que les jeux de Flûtes sont en nombre non seulement très inférieurs, mais encore pas assez soutenus et beaucoup trop faibles pour accompagner le chant à eux seuls ; qu'il manque ensuite les jeux tempérant la force désagréable des jeux d'anches et les unissant aux jeux de Flûtes ; sans ces jeux formant le milieu, on n'entend jamais ou seulement des jeux de Flûtes ou bien un si grand nombre de jeux d'anches couvrant les jeux de Flûtes, et jamais un ensemble de son ressortant du mélange convenable de ces deux sortes de jeux. La qualité de son en général ne peut pas être appelée mauvaise, mais elle est non plus remarquablement belle, bien chantante et surtout assez soutenue. Ce soutien de son ne peut se donner qu'en plaçant dans l'instrument les tuyaux manquant au plus grand nombre des jeux, et surtout à leurs basses; mais spécialement en doublant et thème triplant les gros jeux de 16 pieds, descendant dans toute l'étendue du clavier, et ne pas finissant avec la comme le fait le seul Bourdon 16 pieds se trouvant dans l'orgue celui-ci est déjà d'un très bon effet lorsqu'on joue doux, mais quand le nombre des jeux de 8 pieds s'augmente, il n'est pas en état de les soutenir, surtout lorsqu'il lui manque les cinq notes principales.
Il faut ici encore une fois répéter que ces agrandissements et compléments ne pourraient se faire sans élargir le buffet de l'orgue il serait à vérifier ensuite si le buffet agrandi permettrait aux soufflets également augmentés d'être placés, et il est même probable que la tribune de l'orgue serait trop petite et surtout pas assez large pour permettre les changements mentionnés ci-devant. Il existe encore un inconvénient grave à l'orgue, c'est celui que l'organiste ne peut ni voir ni entendre distinctement ce qui se passe pendant le service dans l'église il ne peut pas comprendre le pasteur annonçant le psaume, lorsque celui-ci ne crie pas, pour ainsi dite, ou lorsque le bruit des grosses voitures dans la rue est très considérable il est ensuite gêné par le craquement plus ou moins fort des soufflets, et ne peut jamais avec autant de sûreté répondre de son office que lorsque les claviers se trouveraient dans l'orgue même, par une ouverture percée su milieu, ou bien quand ils seraient placés sut l'un des cotes, desquels on découvre tout le bâtiment, et d'où l'on entend surtout le chant beaucoup plus distinctement, car il arrive à présent très souvent que de la place de l'organiste, les enfants de choeur ne semblent pas aller en mesure parce que d'abord ils se trouvent à une distance assez considérable, et que le son arrive à l'organiste un moment plus tard parce que le corps de l'orgue le retient et l'empêche d'arriver tout droit mais lorsqu'on se trouve à l'un des cotes de l'orgue, on s'aperçoit très souvent que le chant est tout à fait bien en mesure il en résulte que l'organiste croyant les chanteurs pas en mesure veut toujours les suivre en ralentissant ou pressant, selon l'exigence du cas, mais il est alors -loin de guider le chant, mais au contraire il le trouble en voulant le dominer par la force du son de l'orgue. Si l'on voulait changer le placement des claviers, il en résulterait un changement de système complet toute la mécanique, ce qui est su moins le tiers de l'entier, -devrait être changée et refaite, les tuyaux de Pédales devraient tous être déplacés, et il en résulterait une dépense si considérable, dont la qualité de l'instrument n'est pas digne, et si l'on ne mettait pas fin à cet inconvénient de placement des claviers, l'organiste est hors d'état de pouvoir répondre de commencer toujours à l'instant même où M. le Pasteur finit, et surtout de pouvoir tenir la mesure aussi exactement qu'elle le devrait être. Pour compléter les jeux auxquels il manque des basses, il faudrait aussi changer tous les sommiers, il serait très probable de ne pas trouver la place nécessaire, parce que le nombre des tuyaux manquants est en effet très considérable, et ce ne sont justement pas ceux qui occupent la plus petite place, mais au contraire ceux qui sont les plus forts et usent de la plus grande quantité de vent. L'accouplement des Pédales aux claviers ne pourrait s'effectuer avec avantage que lorsque les claviers seraient remplis dans l'octave inférieure, et surtout lorsque les Pédales commenceraient aussi par ut, comme le font les claviers, au lieu de commencer avec fa, ce qui leur fait manquer cinq notés, et justement les plus fortes et les plus considérables.

Il convient ici de remarquer que les claviers ne contiennent pas d'ut dièzes du tout, dans l'octave inférieure, ce qui prive l'orgue de 28 tuyaux de basses qu'il serait très difficile d'y ajouter, et qui du reste coûtent fort cher, parce que ce sont presque les plus grands et les plus remarquables que contient l'orgue. L'organiste se voit enfin obligé de dire que ce serait one chose fort difficile que d'améliorer véritablement l'instrument il est même convaincu que si l'on voulait dépenser une somme plus forte même que celle de l'achat, on ne parviendrait guère à avoir quelque chose qui poisse répondre toot à fait aux exigences du culte un son bien rempli et soutenu, propre à accompagner le chant. Jamais des tuyaux ajoutés aux vieux ne peuvent produire une gamme égale et d'une même couleur de son, et l'orgue étant même amélioré en quelque sorte, ne pourrait jamais devenir un ensemble parfait, dont toutes les parties seraient ressorties de la même main jamais enfin n'aurait-il le son de celui dont tout serait d'une véritable main d'artiste, d'une main habile, qui dès la naissance de ses ouvrages les présente comme parfaits et irréprochables. S'il s'agissait à l'Oratoire seulement d'ajouter des jeux, la chose serait moins difficile le buffet serait élargi, le vent augmenté, le mécanisme et les tuyaux placés, il faudrait faire des sacrifices, mais la chose pourrait se faire Mais il s'agit ici d'un son moins criard, d'augmenter le nombre des tuyaux sur des sommiers qui ne sont faits que pour le nombre des tuyaux y placés actuellement il s'agit avant toot de produire la même couleur de son dans les tuyaux ajoutés ; c'est un cas bien plus délicat et dont l'exécution à la perfection est à peu près une chose impossible, enfin une chose que tout le monde s'y entendant tout à fait et ayant vraiment des connaissances à cet égard ne conseillerait pas de faire de quoi on se repentirait peutêtre plus tard, et qui exige des dépenses vraiment considérables, et encore ces dépenses ne produiraient-elles jamais les résultats que les mêmes sommes données pour un instrument neuf ne pourraient manquer d'entraîner.

L'organiste de l'Oratoire, E. Meumann Paris 8 juillet 1843 Au très vénérable Consistoire de l'Eglise réformée de Paris »

* Adolf-Friedrich Hesse (1809-1863), organiste et compositeur né et mort à Breslau, était le fils d'un facteur d'orgues. A Breslau, il fur l'élève des organistes F.-W. Berner et E. Kohler. Dès 1831, il tint les orgues de l'église Sankt-Bernbardin. Très admiré en Allemagne, il fit sensation par son jeu de pédale à Paris, où il participa à l'inauguration, le 19 juin 1844, du grand orgue - construit par la maison Daublaine - de l'église Saint-Eustache (69 jeux double pédalier). Il dirigea longtemps les concerts symphoniques de Breslau et composa de nombreuses oeuvres, dont une quarantaine pour son instrument. Parmi ses élèves, il convient de mentionner tout particulièrement Nicolas-Jacques Lemmens (1823-1881), futur maître d'Alexandre Guilmant (1837-1911) et Charles-Marie Widor (18451937). Hesse passe pour avoir gardé la plus fidèle tradition de Jean-Sébastien Bach. On sait que Cavaillé-Coll lui fit, en même temps qu'à Frédéric Chopin, les honneurs de son chef-d'oeuvre de Saint-Denis. Le Chevalier Sigismund von Neukomm (1778-1858), qui était né à Salzbourg, fut l'élève de Michel Haydn, puis de joseph Haydn, à Vienne. Après un séjour comme chef d'orchestre à Saint-Petersbourg et à Stockholm, où il fut élu membre de l'Académie royale, il regagna Vienne en 1808. En 1810, il vint s'installer à Paris où il lia rapidement connaissance avec Monsigny, Gossec, Grétry et Chérubini. Il devint le pianiste de Talleyrand qu'il accompagna en 1814 au Congrès de Vienne. En 1816, il se rendit au Brésil en compagnie du duc de Luxembourg; maître de chapelle du roi du Brésil, il déploya là-bas une grande activité. Revenu à Paris en 1821, il entreprit de nombreux voyages et tournées de concerts à travers toute l'Europe. Son oeuvre très abondante ne lui a guère survécu. Il conseilla le Consistoire luthérien de Paris lors des achats d'orgues que fit celui-ci en 1842 pour l'église des Billettes (cf. notre étude déjà citée in « L'Orgue », n° 143, p. 80-91), et en 1844 pour l'église de la Rédemption (cf. notre étude parue in « L'Orgue », n° 164, p. 63-83 « Les orgues de l'église luthérienne de la Rédemption à Paris »). Sur Neukomm, consulter en outre : e Un brillant élève des frères Haydn Sigismond Neukomm, organiste et compositeur (1778-1858) », in « L'Orgue », n° 150, p. 56-64.

* Daté du 26 février 1844, ce « Rapport sur les avantages que présenterait une nouvel orgue à l’Oraroire » était beaucoup plus copieux que celui qui avait été présenté par Meumaon en juillet 1843. II comportait une introduction, six parties et une conclusion. Les diverses parties du rapport s'enchaînaient comme suit 1. Défauts de l'orgue actuel 2. Le nouvel orgue n'aurait aucun de ces défauts 3. Le nouvel orgue serait un puissant moyen pour l'amélioration du chant 4. Supériorité de la facture allemande pour des orgues du culte protestant 5. Le facteur allemand auquel il faudrait s'adresser 6. Des prix allemands et français.
Sous le titre 3, le rapporteur écrivait « Après done avoir établi la supériorité de la facture allemande en général, on ne devra point croire que toutes les orgues allemandes soient bonnes, et que tout facteur allemand soit en état d'être vraiment supérieur à un facteur français . Presque chaque petite ville d'Allemagne a son facteur d'orgues, mais on ne pourrait citer sans exceptions leurs ouvrages comme modèles. Il y a cependant quelquefois parmi ces petits faiseurs des hommes doués d'un talent extraordinaire, qui dans peu de temps parviennent à se faire remarquer avantageusement parmi le grand nombre de leurs collaborateurs. Un homme de ce genre eat le facteur Waleker à Ludwigsburg près Stuttgart. Il a profondément étudié tout ce qui eat nécessaire à exercer son art avec habileté, personne n'entendit parler de lui jusqu'à ce que la Ville de Francfort ouvrît un concours pour la construction d'un orgue d'une force énorme dans la nouvelle église de Saint-Paul. Walcker se présenta aussi et obtint la préférence sur 33 concurrents. Cet orgue fut construit et achevé, et surpassa tellement les attentes du Sénat de Francfort que, tous les comptes payés, celui-ci donna à Walcker encore une prime de 2 000 florins. Aussi la renommée de ce facteur devint-elle bientôt européenne, des commandes arrivèrent de toutes parts. La Russie possède deux de ces orgues à Saint-Petersbourg, à Reval, sans parler de nombreux petits instruments qu'il construisit pour d'autres villes russes avec ces deux grandes orgues semblables à celui de Francfort. Stockholm va bientôt avoir un orgue de Waleker. En Russie, on ne fut pas moins content de ses ouvrages qu'à Francfort, et des médailles et primes considérables lui furent données lorsque tous les comptes étaient réglés. Sa patrie, le Wurtemberg, possède aussi de ses ouvragea dans les villes de Tubingue et de Stuttgart. Dans la cathédrale de cette dernière ville, Walcker parvint à faire parler des tuyaux de 32 pieds qui, avant lui, avaient été complètement inutiles. Enfin le roi de Wurtemberg fut tellement frappé de la beauté du son de l'orgue construit par Waleker dans la chapelle du château qu'il le décora d'un ordre royal comme marque de sa haute satisfaction.
Le rapporteur a eu l'occasion d'étudier à fond les ouvrages do Walcker, car il a habité Francfort pendant deux années et demi, et a aussi été envoyé chez lui en Souabe pour traiter la commande d'un orgue assez considérable. Il serait en état de donner une foule de détails propres à constater les immenses talents de Walcker, tels que son nouveau système de ventilation, sa nouvelle manière de construire l'intérieur des tuyaux, etc., mais Walcker a en outre inventé bon nombre de jeux d'une douceur et beauté de son remarquables. Ses ouvragea possèdent des avantages que lui seul est en état d'offrir ; enfin c'est Walcker qui eat parvenu à s'emparer du moyen de produire le crescendo sur l'orgue par le gonflement du vent, secret qui n'est à la portée d'aucun autre facteur. La renommée de Walcker est d'ailleurs complètement faite; elle s'est aussi déjà établie à Paris. Cavaillé, facteur de l'orgue de Saint-Denis, disait au rapporteur qu'il estimait Walcker hautement, et qu'il serait capable d'aller le voir à Louisbourg; de même que le chef de la maison Cahinet (cette maison construisit l'orgue de l'Oratoire) fit expressément l'été dernier le voyage de Francfort pour voir l'orgue de Walcker, et il fut tellement convaincu de la supériorité de cet orgue qu'il fit refaire des travaux assez considérables à l'orgue de Saint-Eustache que l'on répare en ce moment, sur le modèle des dispositions de Francfort. Telles sont les opinions de ses concurrents sur Waleker ; il serait sans doute inutile d'y vouloir ajouter encore d'autres; car puisque la grande renommée de ses ouvrages est même confirmée par la haute et entière approbation de ses concurrents étrangers, l'auteur de ces ouvragea doit bien être un homme de talent. Il faut encore ajouter que les nombreuses inventions et améliorations des orgues de Waleker concourent presque toutes non pas à faire de l'instrument un magasin d'effets piquants et originaux, mais au contraire ce facteur a perfectionné lea orgues dans le but de lea rendre, comme ensemble, plus agréables et plus propres aux besoins du culte, tout en offrant aux organistes la faculté de se servir des différents jeux et combinaisons de registres pour tirer de l'instrument des sons d'un caractère toujours nouveau. Même les jeux d'anches de ces orgues n'ont pas le son criard et bruyant qui caractérise ceux de l'orgue de l'Oratoire et des orgues françaises en général, mais les jeux d'anches des orgues de Waleker produisent l'effet le plus religieux, et charment l'oreille par la suavité de leurs sons, tout en formant un contraste piquant avec les jeux de Flûtes. Qui ne serait pas enchanté d'entendre dans l'orgue un quatuor complet, les différents instruments à vent, et surtout la voix humaine, tous ces jeux jouant en crescendo et decrescendo, et imités à s'y méprendre complètement ? Tels seraient pourtant les résultats que produiraient les différents jeux du nouvel orgue employés en solo, et réunis ensemble ils formeraient ce puissant soutien dont on ne peut se passer pour guider le chant d'une manière convenable et digne. » Pour qu'un si vibrant plaidoyer, longuement exposé, ne pût susciter de réserves quant à l'impartialité et au désintéressement du rapporteur, celui-ci concluait en ces mots « Puisse l'honorable Comité du Choeur être persuadé que l'organiste, en agitant cette question, ne l'a fait que pour obtenir, par le changement de l'orgue, non seulement un autre instrument pour lui, mais principalement et uniquement parce que les besoins du culte l'exigent, et que c'est dans le fond réellement une bonne chose.»

* Comme Hesse, Julius Stern (1820-1883) naquit à Breslau, capitale de la Silésie (aujourd'hui Wroclaw, en Pologne). Chef de choeur et pédagogue, il avait travaillé le violon, le contrepoint, la composition et le chant à Berlin, puis à Dresde (1843-1846), enfin à Paris où il se fit rapidement remarquer comme chef de choeur. De retour à Berlin en 1846, il fonda l'année suivante le Sternscher Gesang-Verein, qu'il dirigea jusqu'en 1874, et en 1850, avec Th. Kullak et A.-B. Marx, un Conservatoire qu'il dirigea seul à partir de 1857 (en 1945, ce Conservatoire est devenu celui de la Ville de Berlin), et qui bénéficia rapidement d'une grande réputation.

*  Rappelons que l'association de Callinet avec Daublainc prit fin en 1844. Pendant les trois dernières années de sa vie, Louis Callinet connut la misère, travaillant à la journée chez Cavaillé-Coil. A cette époque, le directeur artistique de la maison Daublaine était Jean-Louis Félix Danjou (1812-1866), organiste et musicologue né à Montpellier qui, après avoir été l'élève de François Benoist (1794-1878) au Conservatoire de Paris, devint en 1834 organiste de l'église Saint-Eustache, puis en 1840 (jusqu'en 1847), organiste de Notre-Dame de Paris. Sa passion pour la facture d'orgue l'entraîna à la ruine il finit par abandonner la carrière musicale.

* Ce facteur d'orgues anglais né à Bath en 1804 et mort à Maidstone en 1879, vint à Paris en 1837, ses recherches trouvant peu d'audience dans son pays. En 1840, il prit la direction de la maison Daublaine et Callinet. En 1860, il fondait sa propre entreprise, Barker et Verschneider, à qui l'on doit l'orgue de l'église Saint-Augustin, et celui de l'église SaintPierre-de-Montrouge à Paris. Mais la guerre de 1870 l'obligea à retourner outre-Manche il construisit encore l'orgue de la cathédrale de Cork et celui de la cathédrale de Dublin, en Irlande. Il est l'inventeur d'une machine pneumatique - qui porte son nom - permettant d'accoupler les claviers sans alourdir la traction. Le système Barker fut appliqué par Aristide Cavaillé-Coll à Saint-Denis (1841), Saint-Roch (1843) et La Madeleine (1846).

*  « De l'état de l'orgue actuel par rapport aux besoins du culte. Cet instrument, établi sur les principes de l'ancienne facture et composé suivant l'usage adopté en France pour les orgues des églises catholiques, n'est nullement en rapport avec les besoins du culte protestant. Dans les églises catholiques, en effet, le grand orgue ne joue ordinairement que d'une manière concertante, tandis que dans les églises réformées, il doit particulièrement servir à l'accompagnement des masses chorales. Les jeux d'anches et les jeux à bouches ou à flûtes, dont se composent les grandes orgues, ne sont pas également propres à l'accompagnement des voix; les premiers, ayant pour principe sonore une anche semblable à celle d'un bec de clarinette, rendent des sons qui ont beaucoup d'éclat et d'intensité, mais dont le timbre, analogue à celui des voix, les domine ou se mêle avec elle et ne les soutient pas. Les jeux à bouches, au contraire, ayant pour principe sonore une embouchure pareille à celle d'une flûte à bec, rendent des sons d'une grande pureté, tout en excitant des ondes sonores d'un volume très considérable. Ces jeux, connus sous le nom générique de jeux de fond, forment en effet la base fondamentale d'un bon orgue; ils sont en même temps les plus propres à l'accompagnement des voix. La différente fonction que les grandes orgues sont destinées à remplir dans les églises catholiques et dans les églises protestantes a seule occasionne les dissemblances qui existent entre les orgues de France et d'Allemagne. Dans les premiers, on a multiplié les jeux d'anches pour donner de la variété et de l'intensité à l'instrument. Dans les secondes, on s'est particulièrement attaché à multiplier les jeux de fond, pour soutenir et accompagner le chant. Il résulte de la différente composition des orgues dont nous venons de parler que les orgues de France ont généralement plus d'intensité, et que les orgues d'Allemagne tendent un plus grand volume de son. Dans un voyage que nous avons fait récemment en Alsace, en Suisse, en Allemagne, en Hollande et en Angleterre, dans la vue d'étudier la facture des orgues dans ces divers pays, nous avons été à même d'apprécier le bon effet d'un grand nombre d'instruments, comme aussi de constater la supériorité que possèdent, sous certains rapports, nos orgues de France. A côté des jeux de fond, qui ont une belle sonorité, jointe à un beau timbre, les jeux d'anches sont généralement maigres de son et d'une faible intensité. Les jeux de gambe, violoncelle, salicional et autres jeux appartenant à la famille des jeux à bouches, sont traités avec une grande perfection dans les orgues d'Allemagne. La main-d'oeuvre est également bien soignée, le travail matériel est fait consciencieusement. Les souffleries sont généralement défectueuses. Cette partie essentielle de l'orgue est restée tout à fait stationnaire en Suisse, en Allemagne et en Hollande. En Angleterre au contraire, où tout le travail de l'orgue est de beaucoup inférieur à celui des autres nations, la soufflerie a quelques perfectionnements. On trouve également dans leurs orgues l'usage des boîtes expressives, que nous possédons en France, et qui sont encore presque inconnues dans Tes autres pays. En terminant ce court exposé, nous croyons devoir émettre notre opinion sur la composition des jeux et les qualités que doit réunir un grand orgue destiné au culte protestant. Ainsi que nous l'avons déjà dit, les jeux de fond devraient faire la principale base de l'instrument; on pourrait toutefois se dispenser de les multiplier autant que dans les orgues d'Allemagne, en tenant compte de l'augmentation de puissance et de la qualité qu'on peut leur donner, à l'aide de notre nouveau système de soufflerie, et de plusieurs dispositions mécaniques dont il sera parle ci-après. Les jeux d'anches, sans y entrer en aussi grand nombre que dans les orgues des églises catholiques, pourraient néanmoins être employés avec avantage, et offrir des ressources à l'organiste plus variées, soit pour les préludes ou pour jouer toutes les sorties. Il pourrait même, au besoin, faire usage des jeux d'anches enfermés dans la boîte expressive pour l'accompagnement du chant, en les ajoutant à l'ensemble des jeux de fond, dont il pourrait augmenter ou diminuer l'intensité, au moyen d'une pédale. Cet orgue devrait aussi posséder une partie de jeux harmoniques que nous avons imaginés pour augmenter le volume et l'intensité des jeux de fond, et qui donnent à l'orgue un timbre d'une qualité bien distincte des jeux ordinaires. Enfin, il serait utile, pour faire rendre à l'instrument tous les effets dont il serait susceptible, d'y faire l'application de l'appareil inventé par M. Barker pour adoucir les claviers et permettre de faire jouer tous les claviers ensemble, sans augmenter la résistance des touches. Cet appareil, joint à plusieurs dispositions mécaniques que nous avons imaginées pour appeler et combiner à volonté les divers jeux de l'orgue, ajouterait au profit de l'instrument une infinité de ressources à l'organiste et une puissance au moins double de celle d'un orgue établi sur les principes ordinaires. L'orgue projeté par Monsieur Meumann dont nous donnons ci-joint le devis estimatif fournirait l'occasion d'établir à Paris un instrument modèle pour le culte protestant. Le nombre, et surtout la dimension des jeux qu'il renferme, permettrait de le classer parmi les grandes orgues de France quant à l'effet de l'instrument par rapport à la dimension du temple. Nous croyons qu'il remplirait toutes les conditions qu'on doit exiger. »

* Joseph Merklin était né à Oberhausen, dans le Pays de Bade, en 1819. Il mourut à Nancy en 1905. Après avoir travaillé successivement chez son père, chez Friedrieb Hass, en Suisse, chez Eberhard Priedrich Waicker, à Ludwigsburg, et chez Wilhelm Korfmacher, à Linnieh (près d'Aix-laChapelle), il vint s'établir à Bruxelles en 1843. S'associant avec son beaufrère Friedrich Schfltze, il donna à l'entreprise le nom de e Merklln, Schûtze et Cie » en 1853. En 1855, ii racheta, à Paris, la maison Dueroquet, et créa un centre d'activité dans la capitale française. En 1858, il transforma l'entreprise en société anonyme. Il fonda à Lyon une succursale qu'il vendit en 1894 à Théodore Kuhn. En 1899, il céda la maison parisienne à son collaborateur Georges Gursehenritter. En 1877, il avait construit à Strasbourg l'orgue du Temple Neuf (3 claviers manuels et pédalier, 40 jeux).

*  Ce Champenois, lauréat de la classe d'orgue de César Franck au Conservatoire de Paris en 1878, était devenu organiste de Saint-Eustache en 1879. Il devait succéder à Gabriel Fauté à l'orgue de la Madeleine en 1905. De 1908 à 1928, il enseigna l'harmonie au Conservatoire. Brillant improvisateur, il a aussi composé des pièces pour son instrument, de la musique de chambre et des mélodies. Il fut le premier maître d'Alexandre Cellier.

*  Henri-Denis Œchsner de Coninck, pianiste et organiste amateur de haut niveau, était le fils d'un musicien professionnel, André Œchsner, né à Mayence en 1815, et mort au Havre en 1886, où il était venu s'établir vers 1845. Ayant travaillé le violon, et fait des études de contrepoint et de composition, il devint professeur, puis directeur de l'Ecole de musique de Wesserling (Haut-Rhin). Toute sa vie, il s'adonna à la composition, à la direction de choeurs, et à l'enseignement. Venu au Havre, il fut appelé, en 1872, à créer l'Ecole de musique de la ville, et à organiser l'enseignement du chant dans les écoles. Tous deux bons musiciens, ses fils HenriDenis et William se produisirent dès l'âge de 13 ans, le premier comme pianiste et le second comme violoniste, dans les salons de la côte normande, où vivaient les grandes familles protestantes. William Œchsner (1851-1916) fit des études de chimie, notamment sous la direction de Charles-Adolphe Wurtz, dont il épousa la fille, Marie. Après ses études, Henri-Denis épousa, en 1874, la Nantaise Marie Bardot (1850-1916), et revint au Havre où il exerça la profession de courtier en coton. Au Grand Temple du Havre, il prit la succession de l'organiste Donat Guéroult, mort en 1896 il conserva ce poste jusqu'à sa mort, en 1904. Les deux frères Œchsner avaient été adoptés en 1873 par leur grand-oncle, Frédéric de Coninck, d'où leur patronyme « Œchsner de Coninek ». Le compte-rendu du concert d'inauguration paru dans l'hebdomadaire luthérien « Le Témoignage » jugea le programme « trop long et mal équilibré ». Dallier improvisa sur un air de e Judas Macchabée » et sur la mélodie du Psaume 138 il interpréta par ailleurs « les difficiles toccata et fugue en ré de Bach, et l'andante (symphonie cantate) de Mendelssohn ». Plusieurs artistes amateurs avaient prêté leur concours : la baronne d'Heimann, Madame de Visme, Messieurs Moller, Rabatel et d'Obrecht, outre les organistes H. CEchsner de Coninck et H. d'Aubel. Ce dernier joua e avec puissance la belle marche d' "Athalie". Au programme étaient inscrites des oeuvres de Bach, Mager, Mendelssohn et Verdi. Le choeur de l'église, qui participait à la fête, parut manquer de cohésion, et l'on déplora le manque de préparation des exécutants dans l'extrait qui fut donné du Requiem de Verdi. C'est le pasteur Decoppet qui prononça l'allocution de circonstance.
Quant à la commission de réception du nouvel orgue, qui en effectua l'expertise, elle comprenait, en plus des pasteurs Emile Roberty (de la paroisse de l'Oratoire) et Auguste Schaffner (cet ardent défenseur de la cause de l'orgue dans le protestantisme français était alors au service de la Mission intérieure luthérienne à Saint-Denis), les organistes Henri d'Aubel et Henri Œchsner de Coninck, et le comte de Bricqueville (sic), critique d'art. Ce dernier patronyme semble désigner, en fait, le compositeur et musicologue Pierre Onfroy de Bréville (1861-1949), qui fut l'un des derniers élèves de César Franck ; il collabora, en tant que critique musical, au Mercure de France, à la Revue Internationale de Musique, à la Revue Blanche et au Courrier Musical.

* Au cours de l'année 1898, deux orgues sortis des ateliers de joseph Merklin avaient été installés dans des églises protestantes parisiennes, le premier à l'église réformée des Batignolles (2 claviers manuels de 56 notes et un pédalier de 30 notes, 14 jeux; traction pneumatique tubulaire ; double registration), et le second à l'église luthérienne Saint-Paul de Montmartre (2 claviers manuels de 56 notes et un pédalier de 30 notes, 8 jeux; traction pneumatique tubulaire ; inauguration le dimanche 3 juillet 1898 par le pasteur et organiste Jules Pfender qui fit entendre « plusieurs beaux morceaux classiques o !). Quelques années auparavant, un orgue Merklin avait été fourth à l'église réformée de Sainte-Marie, rue SaintAntoine : celui-ci était à traction mécanique.

* François-Clément-Théodore Dubois (1837-1924) vint de bonne heure au Conservatoire de Paris où il fut l'élève d'Antoine-François Marmontel (1816-1898) pour le piano, et d'Ambroise Thomas (1811-1896) pour la fugue et la composition. Il remporta le premier prix de Rome en 1861 avec sa cantate « Atala ». A son retour d'Italie, il fut nommé maître de chapelle à Sainte-Clotilde, puis à la Madeleine. Devenu professeur d'harmonie au Conservatoire, il en prit la direction à la suite d'Ambroise Thomas. En 1894, ii avait été élu à l'Académie des Beaux-Arts. Sa production comporte un certain nombre d'oeuvre pour piano et pour orgue.

*  En l'occurrence John-Albert Abbey (1843-1930), fils du fondateur de la manufacture, John Abbey (1785-1859). On lui doit notamment la reconstruction des orgues de Notre-Dame de Louviers et de la cathédrale Saint-Etienne de Châlons-sur-Marne. Son fils John-Mary (1886-1931) a poursuivi son oeuvre. Les Abbey ont construit au total un demi-millier d'instruments de bonne facture.

* Ce petit orgue comportait deux claviers manuels de 56 notes et un pédalier de 30 notes ; il était doté d'une traction mécanique et de 15 registres
Grand Orgue
Bourdon 16'
Montre 8'
Flûte harmonique 8'
Prestant 4'
Récit expressif
Cor de nuit 8'
Voix céleste 8'
Viole de gambe 8'
Flûte octaviante 4'
Plein Jeu IV rangs
Trompette 8'
Basson-Hautbois 8'
Pédale
Soubasse 16'
Basse 8'
Bourdon 8'
Violoncelle 8'
Tirasses Grand Orgue et Récit
Accouplement Récit/Grand Orgue
Trémolo Récit

*  Sur l'orgue Gonzalez de l'église réformée de l'Oratoire, consulter l'article, illustré de trois clichés (vue générale de l'orgue Merklin vue générale de l'orgue Gonzalez vue de la console Gonzalez), de Norbert Dufourcq in « Les Monuments Historiques de la France », Bulletin trimestriel, année 1962, nos 2-3, avril-septembre, p. 172-175. Voir aussi l'article, illustré de deux clichés, de Marie-Louise Girod, organiste titulaire, et de jean Devaux-Charbonnel, conseiller presbytéral, in « L'Orgue », n° 109, p. 23-27 ; les Etablissements Gonzalez y évoquent e Ce qu'a exécuté le facteur ».

 

 

 

 

 

L'orgue de l'Oratoire du Louvre - Photo Pascal Deloche © GODONG

L'orgue de L'Oratoire du Louvre
Photo Pascal Deloche © GODONG

 


Eglise Réformée de l'Oratoire du Louvre
temple : 1 rue de l'Oratoire et 145 rue Saint Honoré 75001 Paris
secrétariat : 4 rue de l'Oratoire 75001, téléphone : 01 42 60 21 64 (international : +33 142 602 164)
mail : pasteur@oratoiredulouvre.fr