Avec cette phrase choc, Jésus nous propose une théologie : Dieu n'a aucune intention de faire du mal aux méchants mais il fait tout pour que chacun ait une chance de s'épanouir.
Si Noël est la fête de ce que Dieu nous donne en Christ, Noël pourrait nous inviter à accueillir encore un petit peu plus profondément cette théologie et cette façon d’être que le Christ a portées. Il me semble que nous avons là le cœur de l’Évangile (et l’Évangile du cœur qu’incarne Jésus-Christ). Le témoignage qu’il exprime ici dans sa prédication, Jésus de Nazareth l’a porté par bien des gestes au cours de sa vie, y compris par sa mort. Ce témoignage porte un éclairage sur nos conceptions de Dieu, sur notre idée de la justice, sur nos actions, sur nos désespoirs aussi, et sur notre espérance.
Cette lumière, comme le dit ce verset, se lève sur chacun. Elle s’est levée sur les méchants, ou plutôt sur notre part de méchanceté à tous, qui profitons de cette bienveillance de Dieu pour continuer à vivre au mépris de Dieu, des autres, et finalement au mépris de nous-mêmes aussi. Cette lumière s’est levée également sur les justes, encourageant la moindre étincelle de bonté en nous.
Cette date symbolique qu’est Noël convient bien pour dire cette ambiguïté de toute vie en ce monde, et nous encourager à recevoir cette lumière donnée en Christ. En effet, Noël est à peu de chose près la journée la plus sombre de l’année dans l’hémisphère nord, et à partir de Noël, le jour augmente insensiblement, de quelques pincées de secondes par jour. La venue du Christ dans le monde est ainsi présentée comme ce soleil de l’amour de Dieu « pour les méchants et pour les bons », comme une montée en puissance insensible mais bien réelle des effets de cet amour en nous.
Il est parfois difficile de suivre ce chemin que Jésus nous propose ici, en particulier dans l'urgence de situations dramatiques. Mais il n’est pas question d’être parfait dès demain matin, mais simplement de gagner quelques secondes de lumière en plus, comme le jour de Noël, d’arrêter de stagner ou de nous assombrir encore. Selon ce texte, nous n’avons pas à créer nous-mêmes ce cœur, ce regard, cette vie qui aime véritablement. Mais Jésus parle d’une naissance, la nôtre comme enfant de ce Dieu qui aime sans condition. Jésus nous propose ici un programme d'amour en quatre verbes : aimer, bénir, faire du bien, et prier. Et il nous dit que nous pouvons compter sur Dieu pour être bénéficiaires de ce programme qu’il offre à chacun :
- Aimer : c'est avoir un regard positif sur l'autre, sur notre vie, sur nous-mêmes, sur le monde, sur Dieu. Au-delà de ce qui ne va pas, ce programme met en lumière plutôt ce qui est bon, et en laissant le temps de devenir meilleur encore. Espérant que du mieux advienne.
- Bénir : c'est dire du bien, et le dire ouvertement, le dire au nom de Dieu, et travailler avec lui en faveur de ce qui est béni.
- Faire du bien pour grandir l'autre, grandir notre idée de Dieu, notre intelligence de la vie, et l’enfant de Dieu que nous sommes tous et toutes.
- Prier : après avoir fait ce que l'on a pu pour aimer, dire du bien et faire du bien, nous pouvons remettre la suite à Dieu. Comme celui qui a semé la graine espère la pluie et le soleil, nous pouvons prier Dieu pour l'autre, pour les autres, pour ce monde et pour nous-mêmes. Car Dieu est un formidable démultiplicateur, une stupéfiante source de miracles inattendus.
Le Christ est la véritable lumière qui, venant dans le monde, éclaire toute personne, tout dans chaque personne. Cette lumière est venue chez les siens, et les siens l’ont à la fois reçue et non reçue. Mais à tous ceux qui l’ont reçue elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu (Jean 1:9-13).
Fêtons donc joyeusement ensemble la naissance de ces enfants de lumière, enfants de Dieu.