Ne pas prendre les textes bibliques comme une déclaration
officielle de l'Eglise
Parmi les convictions communes
aux protestants il y a ce principe de " l'Ecriture seule
" : chaque personne est invitée à lire directement
la Bible, sans intermédiaire, pour y discerner l'espérance
de Dieu en matière de vie. Ce principe exprime, également,
que c'est la Bible qui fait autorité en matière
de foi et la Bible seulement. De nos jours, cela semble assez
contraire à la pratique courante qui place une grande quantité
de médiateurs entre le texte biblique et le lecteur : des
exégètes, des commentaires bibliques, des prédicateurs,
des guides de lecture biblique
à croire que la Bible
a été confisquée par des spécialistes
sans lesquels plus aucune lecture de la Bible n'est possible.
Et il n'est pas rare que l'on se réfugie derrière
l'interprétation d'un pasteur plutôt que d'oser une
lecture personnelle d'un passage biblique.
Certes, le temps qui nous sépare des époques où
la Bible fut rédigée demande un travail exigeant
pour retrouver les intentions des auteurs, pour éviter
les contre-sens ou les surinterprétations. Le fait même
que la Bible n'ait pas été écrite en français
doit nous conduire à retrouver le sens des expressions
dans leur langue originelle. Mais rien ne saurait remplacer le
face à face entre le lecteur et le texte, ce corps à
corps digne de Jacob luttant toute une nuit avec un personnage
mystérieux qui s'avère être détenteur
d'un savoir particulier destiné à Jacob (Genèse
32). Tous les outils pour lire la Bible sont précieux à
la condition de ne pas perdre de vue que la Bible n'est pas avant
toute chose un livre dans lequel il faudrait trouver les réponses
que nous voulons mais le recueil des questions qui ouvrent notre
vie aux horizons que Dieu trace pour nous. Si notre spiritualité
se nourrit de la lecture de la Bible c'est parce que nous laissons
à la Bible le soin de nous lire, d'interroger notre existence,
de mettre notre vie en perspective, de lui proposer de nouvelles
configurations en ouvrant notre regard sur des aspects de l'humanité
que nous ne soupçonnions pas forcément.
La lecture de la Bible s'enrichit des apports des sciences ;
elle s'enrichit aussi du dialogue que nous entretenons avec ce
que nous expérimentons au jour le jour et qui ne vaut pas
moins qu'une approche historique. C'est d'ailleurs l'un des intérêts
de la lecture en groupe : multiplier les approches, confronter
les interprétations, découvrir qu'un texte peut
susciter différents types d'écho selon le lecteur.
L'apôtre Paul, par exemple, n'imaginait pas que ses lettres
deviendraient un texte biblique : cela doit nous encourager à
ne pas prendre les textes bibliques comme une déclaration
officielle de l'Eglise, qu'il faudrait suivre au pied de la lettre,
mais une source de questionnement, de débat, qui sera d'autant
plus riche qu'il se fait à plusieurs. Les groupes d'études
bibliques permettent cela, bien évidemment, de même
que le cadre familial offre un espace tout à fait précieux
qui mêle différents âges, différents
centres d'intérêts, qui permettent à chacun
de renouveler sa lecture de la Bible et de pouvoir s'affirmer
comme lecteur.
James Woody
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