Maîtrise de l'Oratoire du Louvre,
sous la direction de Horace Hornung,
avec Pierre Gabard (trompette solo) et Marie-Louise Girod (orgue),
Numérisation de disques 33 tours
de 1972 CV. 25001
I. FANTASIE Ad imitationem, Moduli, Benedicta est Coelorum Regina, de Claude LE JEUNE, Paris, 1612. pour orgue, trompette en ut et trombone. Restitution et transcription, par Jean BONFILS.
II. PSAUME CXXXVIII : Il faut que de tous mes esprits
1 Claude GOUDIMEL : version note contre note, Paris 1564, 1565 (c.f. au ténor). (c.f. : cantus firmus, mélodie ou timbre), et
2 Claude GOUDIMEL: version en contrepoint fleuri, Genève, 1568, 1580. (c.f. au soprano).
3 Arthur HONEGGER : version pour chant à l'unisson et orgue, Paris, 1941. (c.f. à l'unisson).
III. PSAUME LXVIII : Que Dieu se monstre seulement Évolution du timbre:
1 Matthias GREITER : mélodie originelle, Es sind doch selig aile die... (Ps. 119) Strasbourg, 1525. (c.f. à l'unisson).
2 Matthias GREITER (mélodie) - Jean CALVIN (texte) : En moy le secret pensement (Ps. 36), Strasbourg, 1539. (c.f. à l'unisson).
3 Claude GOUDIMEL (harmonisation) - Théodore de BEZE (texte) Du maling le meschant vouloir (Ps. 36). version en contrepoint fleuri, Genève, 1568,1580. (c.f. au soprano).
4 Claude GOUDIMEL (harmonisation) - Théodore de BEZE (texte) Que Dieu se monstre seulement (Ps. 68), Psaume des Batailles, version en contrepoint fleuri, Genève, 1568, 1580. (c.f. au ténor).
5 Kaspar OTHMAYR (harmonisation) - Sebaldus HEYDEN (texte) O Mensch bewein dein Sünde gross (O Homme, pleure tes lourds péchés) (Choral luthérien), Nuremberg, 1546. (c.f. au ténor).
6 Jean-Sébastien BACH, prélude de choral, extrait du Petit Livre d'orgue (Orgelbüchlein), O Mensch bewein dein Sünde gross, Coethen, y. 1717- 1733. (Mélodie très ornée, à la partie supérieure).
IV. PSAUME LI : Miséricorde au povre vicieux Texte : Clément MAROT - Mélodie : Strasbourg 1539,
1 Richard CRASSOT : version note contre note, Lyon, 1564. (c.f. au ténor) : cuivres.
2 Richard CRASSOT, même version : Maîtrise
V. PSAUME CXLIX : Chantez à Dieu chanson nouvelle Texte: Théodore de BEZE - Mélodie : Genève, 1562.
1 Claude GOUDIMEL : version note contre note, Paris, 1564, 1565. (c.f. au ténor).
2 Alexandre CELLIER : thème et variations pour trompette en ré et orgue, Paris, 1961. (c.f. orgue, trompette).
VI. PSAUME XLVII : Or sus tous humains, frappez en vos mains Texte: Théodore de BEZE -Mélodie: Genève, 1551, 1554.
1 [Genève, 1551] : mélodie à l'unisson (1551). (c.f. à l'unisson).
2 Marie-Louise GIROD : interlude (orgue).
3 Claude GOUDIMEL : version en contrepoint fleuri, Genève, 1568, 1580. (c.f. au soprano).
1 Claude GOUDIMEL : version note contre note, Paris, 1564, 1565. (c.f. au ténor).
2 Roger VUATAZ : Psaume* pour choeur à l'unisson, deux trompettes et orgue, Paris, 1936
a - Prélude (orgue seul)
b - Premier verset (choeur et orgue)
c - Premier interlude ( 2 trompettes et orgue)
d Deuxième verset (choeur, 2 trompettes et orgue.
e - Deuxième interlude (2 trompettes et orgue)
f - Troisième verset (choeur, 2 trompettes et orgue).
Paris, Le Roy & R. Ballard, Superius, 1564 - Page de Titre
Au chevet de l'Oratoire du Louvre, en façade sur la Rue de Rivoli, se dresse le monument de l'Amiral Gaspard de COLIGNY, élevé en 1889 (oeuvre du sculpteur CRAUCK et de l'architecte SCELLIER de GISORS). Sur le socle de la statue, une table de marbre reproduit un extrait de son Testament : «J'oublirai bien volontiers toutes choses qui ne touchent que mon particulier, soit d'injures, soit d'oultrages, pourveu qu'en se qui touche la GLOIRE DE DIEU et le repos public, il y puisse avoir seureté».
L'Amiral Gaspard de COLIGNY fut assassiné dans sa maison située à l'emplacement du n°144, rue de Rivoli à Paris, le 24 Août 1572. Peu de temps après, à Lyon, le musicien Claude GOUDIMEL fut tué et son corps, jeté dans le Rhône.
Cette gravure commémorative paraît dans le cadre de l'ANNEE COLIGNY (1972), à l'occasion du Colloque d'historiens, organisé par la Société de l'Histoire du Protestantisme Français. Elle doit rappeler la mémoire de l'Amiral et du Compositeur, et donner un aperçu du patrimoine hymnologique protestant, situé dans son contexte historique et dans ses prolongements jusqu'au XXème siècle. Principe structurel, le timbre d'un Psaume peut être développé à l'infini, dans des styles divers, allant d'une extrême simplicité (psaumes pour le culte individuel et collectif) à une complexité voulue et à une grande liberté d'expression (psaumes destinés aux concerts) faisant appel au contrepoint simple «note contre note», au contrepoint fleuri, au style de motet, au prélude de choral plus ou moins orné (orgue) et à la technique de la variation.
Ce disque a pour objet de montrer, à partir d'un même psaume, plusieurs possibilités de traitement du cantus firmus, à des époques différentes, allant du XVIème au XXème siècle; la mélodie originelle se maintient à travers les siècles, seuls changent la langue moins archaïque et le revêtement harmonique. Chaque séquence, en principe à trois volets, se présente comme une «partita à auteurs multiples» (Jacques Chailley). Pour le Psaume LXVIII, « Que Dieu se montre seulement» (Psaume des Batailles), nous avons retracé l'évolution du timbre originel dû au chantre strasbourgeois, Matthias GREITER et son utilisation, d'une part dans le répertoire français réformé (Psaume), d'autre part dans l'hymnologie allemande luthérienne (choral) jusqu'à Jean-Sébastien BACH.
La musique d'inspiration protestante, dont les traditions remontent à la Réforme et plus particulièrement à partir de 1524, est restée - malgré les remous historiques que l'on sait extrêmement vivante. Les maillons de la chaîne - plus serrés en Allemagne qu'en France, en raison des circonstances - sont jalonnés par des noms de première grandeur: Claude GOUDIMEL (y. 1520? - 1572), Claude LE JEUNE (y. 1530 - 1600), Heinrich SCHUTZ (15851672), Jean-Sébastien BACH (1685 - 1750)... et, plus proches de nous, Arthur HONEGGER (1892 - 1955), Alexandre CELLIER (1883 - 1968), Roger VUATAZ (né en 1898)... qui ont poussé leur expérience et leur art jusqu'à l'apostolat, et comme l'Amiral de COLIGNY ou Jean-Sébastien BACH : «AD MAJOREM DEL GLiJAM».
Les critères d'interprétation
Ces Psaumes, unis dans chaque groupe, par une mélodie commune (cantus firmus) et une parenté sémantique sont interprétés d'après les critères du XVIème siècle à l'unisson, à quatre voix mixtes, avec ou sans instruments à vent. Les cuivres - selon le symbolisme de l'époque, largement exploité ultérieurement par J.-S. BACH dans l'optique piétiste - sont «porteurs de la Parole divine»; ils interviennent «colla parte» soit pour souligner la mélodie, soit pour colorer la polyphonie vocale. Au temps de la Réforme, les Psaumes à l'unisson étaient destinés au chant «ès-maisons» et au culte, les versions polyphoniques plus élaborées étant exécutées par une maîtrise.
Les musiciens huguenots, tout en apportant une très large contribution au Psautier français, qui connut un succès considérable - plus de 30.000 exemplaires furent imprimés pendant l'année 1562 - et suscita ultérieurement des paraphrases catholiques comme celles de GODEAU, ont aussi cultivé les formes existantes, messes motets et n'oublient pas les thèmes grégoriens antérieurs. Claude GOUDIMEL et Claude LE JEUNE, entre autres, ont composé des pages destinées à l'office catholique et au culte protestant.
Cette gravure d'un intérêt commémoratif, documentaire et historique, s'adresse à un vaste public qui, en ce temps de recherche de modes d'expression plus accessibles à la masse des fidèles, est particulièrement sensibilisé aux problèmes que les musiciens de la Réforme ont tenté de résoudre, comme celui de l'intelligibilité du texte, favorisée par la langue vernaculaire et le style note contre note et homorythmique.
I - fantasie Ad imitationem,
Moduli, Benedicta est Coelorum Regina
Cette Fantasie instrumentale pour orgue, trompette et trombone de Claude LE JEUNE est extraite du Second Livre des Meslanges, publié chez Pierre Ballard, à Paris, en 1612. Elle reprend le thème d'une prose très en faveur aux XVème et XVIème siècles, en l'honneur de la Vierge. Dans cette pièce à cinq voix, le cantus firmus est exposé en valeurs longues par le trombone et ensuite par la trompette, et souligné de façon plus libre et ornée à l'orgue. La restitution et la transcription d'après l'exemplaire de la Bibliothèque Sainte Geneviève, à Paris (Vm 75), sont dues à Jean Bonfils.
II - Psaume CXXXVIII (1) : Il faut que de tous mes esprits
1 Il faut que de tous mes esprits 2 Ton los et pris 3 J'exalte et prise. 4 Devant les grans me presenter 5 Pour te chanter, 6 J'ay fait emprise. 7 En ton sainct Temple adoreray, 8 Celebre ray 9 Ta renommée, 10 Pour l'amour de ta grand' bonté 11 Et feaulté 12 Tant estimée.
Texte : Clément MAROT
Mélodie: Loys BOURGEOIS (1547) d'après les chansons profanes : Une pastourelle gentille (Cl. MAROT) publiée par Attaingnant, Paris 1530, et Quand vous voudrez faire une amie (Attaingnant, 38 Chansons).
Ce Psaume s'appuie sur une mélodie antérieure de chanson profane française, qui accompagne aussi le Psaume CV de Théodore de BEZE, Sus qu'un chascun de nous sans cesse... (Genève, 1562).
1 - La version note contre note de Claude GOUDIMEL (Paris, 1564-1565) reproduit la mélodie au ténor dans une harmonisation rigoureusement en contrepoint simple.
2 - La version en contrepoint fleuri de Claude GOUDIMEL (Genève, 1568,1580) présente la mélodie au soprano, en valeurs longues, avec un commentaire aux autres parties, utilisant quelques imitations et quelques monnayages rythmiques à des fins expressives.
3 - Dans ce Psaume, composé en 1941 et dédié a Eliette Schenneberg, Arthur Honegger prend certaines libertés vis à vis du cantus firmus originel : la partie de piano (orgue) utilise a mélodie traditionnelle avec une légère modification d'intervalle à la fin du vers 2 et au début du vers 3; en outre, la mélodie correspondant aux trois derniers vers est remplacée par celle des trois premiers vers. La partie vocale ne cite pas textuellement la mélodie, à partir du vers 7, et les vers 10 à 12 utilisent la mélodie des vers 1 à 3.
(1) La numération des Psaumes est conforme à l'usage protestant et hébraïque.
III Psaume LXVIII :
Que Dieu se monstre seulement
1 Que Dieu se monstre seulement 2 Et on verra soudainement 3 Abandonner la place 4 Le camp des ennemis espars 5 Et ses haineux de toutes parts 6 Fuir devant sa face. 7 Dieu les fera tous s'enfuir 8 Ainsi qu'on voit s'esvanouir 9 Un amas de fumée 10 Comme la cire auprès du feu 11 Ainsi des meschans devant Dieu 12 La force est consumée.
Texte Théodore de BEZE Mélodie Matthias GREITER, Strasbourg, 1525.
Le «Psaume des Batailles» a un passé hymnologique intéressant. Sa mélodie est empruntée à celle du chantre strasbourgeois, Matthias GREITER, et se trouve, dès 1525, dans le Teutsch Kirchenampt avec la paraphrase allemande du Psaume 119 (Beati immaculati)
1 Es sind doch selig aile die 2 Im rechten Glauben wandeln hie 3 Im Gsatze* Gottes Herren 4 Sie sind doch selig alle sampt 5 Die sin Zeugnis vor Augen hant
6 Von Hertzen in begeren. 7 Dann welches Ubeitèter sind, 8 Die wan deln nit ais Gottes Kind 9 Uff seins Wege nit halten 10 Ach Herre Gott von Hymeireich 11 Du hast gebotten fieyssiglich 12 fa deine bott zum halten.
* (forme archaïque pour : Gecsetze)
Psaume CXIX, Beati immaculati Es sind doch selig aile die...
Edition Strasbourgeoise, 1525 : Teutsch Kirchenampt Notation à «tête de clous».
Mélodie de Matthias Greiter (c.f.* deux finales différentes).
1 - Version allemande, à l'unisson, du Psaume 119. La tradition strasbourgeoise est monodique et non polyphonique comme à Wittenberg. M. GREITER est donc le «mélodiste» (auteur de la mélodie, qui se présente par phrases, avec une valeur longue d'appui au début et à la fin de chaque vers). La notation est typiquement strasbourgeoise, «à tête de clous» (notation particulière aux imprimeurs Prüss Kôpphel et Messerschmid). Transcription E WEBER.
2 - Version française à l'unisson, du Psaume XXXVI, En moy le secret pensement, Strasbourg 1539. Calvin, lors de son séjour dans la capitale alsacienne, rencontre les réformateurs et les musiciens strasbourgeois. Il écrit, à son tour, des paraphrases françaises de Psaumes. Pour le Psaume XXXVI, il emprunte la mélodie de M. GREITER. Cette versification maladroite ne se maintiendra pas. Elle est extraite du recueil : Aulcuns Psaumes et cantiques mys en chant (Strasbourg, 1539). La notation est carrée, et blanche. Transcription : E. WEBER.
Psaume XXXVI, En moy le secret pensement
Edition, 1542 : La forme des prières et chants ecclésiastiques
Notation mesurée, carrée, blanche.
Mélodie de Matihias Greiter (c.f.* deux finales identiques).
3 - Version française à quatre voix de Claude GOUDIMEL (1580), pour le Psaume XXXVI, Du maling le meschant vouloir, d'après le texte de Clément MAROT (Genève, 1562). A partir de 1542, à la suite d'une erreur de copiste ou d'un alignement vers la solution de facilité, le vers 7 s'aligne sur la fin du vers 8. (cf.ps. LXVIII sur : «s'enfuir/évanouir»), la hauteur est confirmée par la présence du «custos». La tradition française adoptera les deux finales identiques; en revanche, le choral allemand respectera les deux fins différentes, plus valables musicalement. Cette version, d'après la mélodie de Matthias GRE!TER qui plane à la partie supérieure, procède par rentrées successives
4 - Version française à 4 voix de Claude GOUDIMEL (1568,1580), pour le Psaume des Batailles. Que Dieu se monstre seulement (cf. texte supra) qui exige un tempo plus rapide et un caractère presque martial, en raison du sujet. La mélodie est exposée au ténor.
5 - Version allemande à 4 voix, exécutée ici par un petit ensemble vocal, dans l'harmonisation de K.OTHMAYR (Nuremberg, 1546). La mélodie de M.GREITER s'adapte au choral «O Mensch bewein dein Sùnde gross », les deux fins différentes sont respectées sur «Leben gab» / «Krankheit ab», la mélodie est confiée au ténor; le style se rapproche de l'écriture franco-flamande, avec rentrées successives, imitations partielles.
1 0 Mensch bewein dein Sünde gross 2 Darum Christus seins Vaters Schoss 3 Aussert und kam aufErden 4 Von einer Jungfrau rein und zart 5 Für uns er hie geboren ward, 6 Er wolit der Mittler werden. 7 Den Toten er das Leben gab * 8 Und legt dabei all Krankheit ab * 9 Bis sich der Zeit herdrange 10 Dass er für uns geopfert wûrd 11 Trugunsrer Sùnden schwere Bürd 12 Wohl an dem Kreuze lange.
* finales différentes
Texte : Sebaldus HEYDEN, (1494- 1561).
6 - Jean-Sébastien BACH, dans sa Passion selon Saint-Matthieu, se sert de ce choral (double choeur, fin de la première partie). Il en donne une version à deux claviers et pédale, dans son Petit Livre d'Orgue (Orgelbüchlein, n°24). Le cantus firmus très orné plane à la partie supérieure.
Le mouvement Adagio assai, convenant au sens des paroles (O homme pleure tes lourds péchés) contraste avec le tempo rapide du psaume des Batailles, utilisant la même mélodie. Un jeu de cornet met le thème en relief.
IV - Psaume LI :
Miséricorde au povre vicieux (XVIème siècle).
1 Misericorde au povre vicieux 2 Dieu tout puissant, selon ta grand clemence 3 Use à ce coup de ta bonté immense 4 Pour effacer mon faict pernicieux 5 Lave moy, Sire, et relave bien fort 6 De ma commise iniquité mauvaise 7 Et du péché, qui m'a rendu si ord 8 Me nettoyer d'eaue de grace te plaise.
Texte: Clément MAROT
Mélodie : Genève. 1551, 1554.
Mélodie différente de la mélodie strasbourgeoise de 1539, et Genève.
1 - La version note contre note de Richard CRASSOT (Lyon 1564), contemporaine des Psaumes de GOUDIMEL dans le même style, en écriture, strictement harmonique et verticale, souligne le caractère grave et méditatif du texte de Clément MAROT. Le cantus firmus est confié au ténor (cuivres).
2 - Même version, par la maîtrise.
V - Psaume CXLIX :
Chantez à Dieu chanson nouvelle
1 Chantez à Dieu chanson nouvelle. 2 Et sa louange solennelle 3 Des bons parmi la compagnie 4 Maintenant soit ouye. 5 Israel s'esgaye en son cœur 6 De l'Eternel son createur 7 Et d'un tel Roy soyent triomphans 8 De Sion les enfants.
Texte Théodore de BEZE
Mélodie Genève, 1562.
1 - La version note contre note de Claude GOUDIMEL (Paris, 1564-1565) reproduit la mélodie au ténor, dans une harmonisation strictement note contre note.
2 - Alexandre CELLIER, organiste de l'Étoile, a repris ce timbre comme principe structurel, pour sa piece intitulée: «Thème et variations» sur le Psaume 149 du Psautier de la Réforme, pour trompette en ré et orgue. Cette œuvre a été créée au Festival de Villefavard, en 1961 par Maurice André (trompette) et Marie-Louise Girod (orgue). L'orgue et la trompette présentent d'abord le thème avec l'harmonisation de GOUDIMEL (cf. 1) d'après l'édition de 1565, avec, à l'orgue, la mélodie au ténor. Ce thème sert de prétexte à une variation en canon avec la basse, à une variation en majeur en forme de muzète, thème à la trompette; le dernier mouvement d'une grande difficulté d'exécution pour le trompettiste est intitulé Final alla bravura.
VI- Psaume XLVII :
Or sus tous humains frappez en vos mains
1 Or sus tous humains 2 Frappez en vos mains 3 Qu'on oye sonner, 4 Qu'on oye entonner 5 Le nom solennel 6 De Dieu éternel. 7 C'est le Dieu très-haut 8 Que craindre il nous faut, 9 Le grand Roy qui fait 10 Sentir en effect 11 Sa force au travers 12 De tout l'univers.
Texte : Théodore de BEZE
Mélodie : Genève, 1551, 1554.
1 - La version à l'unisson apparaît pour la première fois dans les Octante trois Psaumes... parus à Genève en 1551. On remarquera le rythme syncopé et incisif qui traduit symboliquement le sens du Psaume.
2 - Interlude d'orgue. Du temps de la Réforme comme de nos jours, les organistes protestants improvisent sur le thème du Psaume ou du choral chanté par les fidèles. Marie-Louise GIROD, qui a été l'élève du maître Marcel DUPRÉ, connaît tous les secrets de l'art de l’improvisation, spécialité de l'école d'orgue française. Le thème, présenté à la pédale (anches) est accompagné d'un bref commentaire polyphonique aux manuels, dans un mouvement rapide.
3 - La version note contre note de Claude GOUDIMEL en style vertical souligne l'élan rythmique; elle se présente comme une solide affirmation de foi. La mélodie au soprano est doublée (colla parte) par la trompette. GOUDIMEL fait appel au rythme syncopé, aux rentrées décalées pour traduire musicalement ce psaume particulièrement suggestif.
1 Resveillez vous chacun fidele, 2 Menez en Dieu j'oye oren droit 3 Louange est tres seante et belle 4 En la bouche de l'homme droit. 5 Sur la douce harpe 6 Pendue en escharpe 7 Le Seigneur louez. 8 De lutz, d'espinetres, 9 Sainc tes chansonnettes 10 A son Nom jouez.
Texte: Clément MAROT
Mélodie Strasbourg, 1545, 1548, 1553.
Paraphrase moderne de R.-L. PIACHAUD (1936) d'après le texte de Clément MAROT
1 Éveille toi, peuple fidèle Pour louer Dieu tout d'une voix. Car sa louange est naturelle En la bouche des hommes droits. Sur la douce harpe, Pendue en écharpe, Célébrez son nom. Au son des violes Mèlant vos paroles, Chantez son renom.
1 - La version note contre note, de Claude GOUDIMEL, 1564, 1565, avec cantus firmus au ténor, ne contient que quelques notes de passage vers les cadences (à la partie supérieure). Chaque vers de ces «sainctes chansonnettes» est entrecoupé par un silence, et, selon l'esthétique du Psaume, commence et se termine par une valeur longue d'appui. Le vers 7 utilise des formules trochaïques (une longue et une brève) pour attirer l'attention sur l'importance des paroles.
2 -La version de Roger VUATAZ (né en 1898), pour choeur à l'unisson, deux trompettes et orgue, date de 1936. Sa structure est simple : Prélude (orgue seul), premier verset (choeur et orgue), premier interlude (2 trompettes et orgue), deuxième verset (choeur, 2 trompettes et orgue), deuxième interlude (2 trompettes et orgue), troisième verset (choeur, 2 trompettes et orgue). Le cantus firmus progresse des profondeurs vers l'aigu. Une registration adéquate le met en valeur. Le premier verset est présenté par le choeur à l'unisson et doublé par l'orgue. La mélodie en valeurs réduites de moitié (aux trompettes) et en valeurs normales (à l'orgue) circule d'une partie à l'autre. Ce même procédé est utilisé pour le deuxième verset, où le choeur expose la mélodie en valeurs normales. Les deux derniers mouvements, font l'objet d'un travail contrapunctique plus serré, avec quelques rythmes syncopés, quelques formules dactyliques (une longue, deux brèves, rythme de la joie) et des imitations mélodiques. La mélodie reste traditionnelle, le revêtement harmonique est délibérément de notre temps. Cette pièce démontre la possibilité de retourner aux sources mélodiques du Psautier huguenot et de traduire - dans l'idiome musical contemporain, tout en respectant l'esprit du XVIème siècle - les Psaumes chantés par les fidèles en France et en Suisse, depuis plus de quatre siècles.
Ce disque commémoratif, historique et documentaire, illustre les différentes possibilités d'exploiter musicalement une mélodie originelle de Psaume (cantus firmus, timbre) utilisée comme principe structurel dans les styles des XVI, XVII, XVIII et XXèmes siècles et souligne la jonction entre le répertoire hymnologique huguenot (Psautier) de langue française et le choral luthérien (Strasbourg). Les Psaumes polyphoniques du XVIème siècle, tour à tour de caractère très allant (Ps. 138), martial (Ps. 68), joyeux (Ps. 149), grave (Ps. 51), rythmé et énergique (Ps. 47), enthousiaste et dynamique (Ps. 33), rencontrent au XXème siècle (sur le plan oecuménique), le même succès qu'au Siècle de la Réforme. Ils occupent une place légitime dans l'Histoire de la Musique française et protestante.
Édith W E B E R
Professeur d’Histoire de la Musique à l’Université de Paris-Sorbonne.
La Maîtrise de l'Oratoire du Louvre
La Maîtrise de l'Oratoire a été fondée en 1933, par son chef actuel, Horace HORNUNG. Elle participe à la vie de l'Église, aux cultes et aux grandes Fetes. Dès 1935, avec la collaboration des organistes toujours titulaires : Marie-Louise GIRODPARROT et Henriette PUIG-ROGET, elle se lance dans des concerts et exécute, la même année, la Passion selon SaintMatthieu de H. SCHUTZ. Pendant la Deuxième Guerre Mondiale, cet ensemble aborde des oeuvres de plus grande envergure : Magnificat et Passions de J.-S. BACH,Messie de G.F. HAENDEL, Requiem de H. BERLIOZ... Elle s'affirme de plus en plus à Paris, en province et à l'étranger (Amsterdam, La Haye, Rotterdam, Lausanne, Berne, Bruxelles...), réalise le doublage de deux films, enregistre des disques (Le Psautier huguenot chez Vogue, Psaumes et chorals...). Elle compte actuellement (1972), des choristes des premières années et des chanteurs plus jeunes qui ont repris le flambeau. Dépassant le cadre strictement confessionnel, elle accueille tous ceux qui, protestants ou non, aiment à «chanter à Dieu chanson nouvelle» (Ps. CXLIX).
Cet enregistrement réalisé par une centaine de choristes, a eu lieu à l'Oratoire du Louvre (Paris) en Octobre 1972 à l'occasion du Quatrième Centenaire de la mort de l'Amiral Gaspard de COLIGNY et de Claude GOUDIMEL (t 1572).
Les orgues de l'Oratoire du Louvre
Les nouvelles orgues de l'Oratoire ont été inaugurées le 14 Janvier 1962, avec la participation de Marcel DUPRÉ, Alexandre CELLIER, et les organistes titulaires : H. PUIGROGET et M.-L. GIROD. Elles possèdent trois claviers et soixantecinq jeux. Elles sont l'ouvre du facteur GONZALES.
Nous remercions de Dr. Karl VÖTTERLE (Directeur des Editions Baerenreiter, à Kassel) et M. Pierre PIDOUX (responsable de l'édition intégrale des oeuvres de C. GOUDIMEL) qui ont bien voulu autoriser la reproduction de quelques Psaumes et chorals.
Eglise Réformée de l'Oratoire
du Louvre
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Paris
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