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Anciennes Prédications > Archives

« Sans savoir où il allait. »

(Hébreux 11:8 – 11)

 

Prédication de M. le Pasteur Christian Mazel à l’Oratoire du Louvre
culte de la rentrée, le dimanche 7 Octobre 1979

Chants :
Psaume 47/1,2
Cantique 75/1, 2, 5
Cantique 308/1, 2, 5

Texte biblique :
Hébreux : 11/8 – 11
Corinthiens 13/8-12
Marc 1/14-20

 

Catéchumènes,

Quand vous serez en plein dans les responsabilités sociales, quand vous serez conseillers presbytéraux ou diacres, savez-vous ce qu’il en sera du monde ?

En l’an 2000, 83% de la population sera nominalement non-chrétienne. Que deviendra la disproportion entre pays riches et pays pauvres ?

Conseillers presbytéraux et diacres, avec votre expérience, savez-vous mieux que ces jeunes où nous allons dans l’évolution morale et économique de notre peuple ? Les Eglises font des valses-hésitations. Malgré des voyages éclatants, l’Eglise Catholique Romaine, en certains domaines, fait plusieurs pas en avant et des pas en arrière. Nos Eglises protestantes semblent désorientées devant l’évolution si rapide du monde.

L’aventure d’Abraham recommence, à chaque génération, à chaque relève, chaque année.

« Abraham partit sans savoir où il allait. »

La foi ne refuse pas de savoir, ne se réfugie pas dans l’ignorance volontaire. La foi n’est pas l’autruche qui, devant le danger, plonge sa tête dans le sable. La foi décèle les dangers de croire n’importe quoi.

Les Réformateurs du XVIe, avant eux, les prophètes de l’Ancien Testament, après eux, les témoins de la liberté de l’Esprit, ont dénoncé les supercheries religieuses inventées par les naïfs : médailles, simagrées, gestes et paroles prétendus magiques. Ils ont dénoncé l’encouragement à notre pensée d’abdiquer son jugement et l’abêtissement organisé des croyants.

La volonté d’ignorer est une attitude de lâches, de peureux, d’incroyants. Victor Hugo a lancé son « Ouvrez des écoles, fermez des prisons ». Même s’il y avait une certaine superficialité dans ce cri, disons la joie de savoir, la puissance du savoir (la fusée qui monte dans la lune, le médecin qui fait des miracles). Le désir de savoir est l’apanage de l’homme avec ses risques (engins atomiques, armes sophistiquées) et les avancements du mieux-être. Le savoir libère : la médecine est sortie de la magie, la danse des ensorcellements, la prière des superstitions.

« Mais pouvons-nous tout savoir ? »

Déjà avant l’apôtre Paul, les Stoïciens reconnaissaient leur ignorance. L’honnête savoir comporte un Agnosticisme. Avec les Stoïciens, nous connaissons les phénomènes apparents et leurs développements. On peut suivre la marche des choses, des événements, des lois (cause à effet) et s’en souvenir. Mais il est impossible de connaître la réalité existant derrière eux. On sait le feu d’après la fumée. On sait la blessure d’après la cicatrice. Mais qu’est le feu ? Pourquoi la blessure ? disaient-ils. Nous ne voyons que la fumée, que la cicatrice. Les Egyptiens ont laissé des bas-reliefs, des stèles, par exemple la « stèle des vautours » : Des prisonniers enfermés dans un filet et un roi frappe sur eux à coups de bâton. Qui sont-ils, ces prisonniers enfermés dans un filet ? Nous voyons des êtres comme des ombres sur le mur, au fond d’une caverne, enseignait Platon. La réalité dernière nous échappe.

Après la mort, qu’en est-il ? Et même, qui peut décrire la Société humaine idéale, le système politique économique parfait ? Quand les idéalistes accèdent au pouvoir, que de catastrophes humaines ! D’Hitler à Staline, des chefs de sectes religieuses du christianisme aux dictateurs musulmans, que d’hécatombes !

Dans ces conditions, pouvons-nous comprendre, « saisir » Dieu dans son Eternité, son Absolu, son Infini, son Amour ?

Ce que Dieu est pour nous, nous est donné par Jésus-Christ : pour nous, il est la Parole de Dieu, le visage de Dieu, la main de Dieu, le c?ur de Dieu. Mais nous ne savons jamais ce que Dieu est en Lui-même, à la fois tout autre que moi et plus réel que moi-même.

« Sans savoir »

Dans l’Antiquité, et plus près de nous, on a fait de Dieu un bouche-trou de nos connaissances. Il est l’explication offerte facilement.

D’où viennent les vents ? C’est Eole. D’une île flottante qui portait –solidement défendue par des rochers de bronze – le vaste palais, Eole ouvre et ferme les portes des vents. Raisonnement enfantin, mais dans la pensée des siècles passés et jusqu’à présent, le malheur n’est-il pas considéré comme la punition de Dieu due à une désobéissance dans ce monde-ci ou dans des existences antérieures ? Pourquoi prêter à Dieu cette violence ?

La foi chrétienne reconnaît ne pas savoir, ne pas donner d’explication de tout et – plus que cela – ne pas pouvoir savoir. Pourquoi cet enfant a-t-il un cancer du cerveau ? Pourquoi cette jeune mère meurt-elle dans un accident ? Pourquoi cet être naît-il avec un handicap qui en fait un difforme ?

La Bible raconte qu’Abraham partit d’Ur, riche capitale d’une province agricole irriguée, port actif à l’embouchure du fleuve, ville opulente, rayonnante de culture dans la civilisation sumérienne qui a inventé l’écriture et les mythes religieux repris par les religions qui ont suivi. Comment Abraham aurait-il pu imaginer que le pays promis par Dieu était un ensemble de collines et de cailloux secs, une contrée pauvre entre une mer morte et un désert aride ?

Ainsi le Christ nous invite à croire, c’est-à-dire à faire confiance. J’ai découvert, en méditant cette prédication, que dans les Evangiles, Jésus ne fait jamais appel à l’espérance. Le mot espérer ou espérance n’est jamais dans la bouche de Jésus.

L’espérance entend donner une forme à l’avenir, comme si l’avenir était un présent continué, perfectionné. Et l’espérance, quand elle n’est pas réalisée, nous amène à la déception, au découragement. Que d’hommes, de croyants ont été déçus après avoir tout donné, sacrifié à des parents, à des amis.

Vous aviez des amis auxquels vous aviez beaucoup donné. Vous comptiez sur eux. Vous vous appuyiez sur eux. Ils sont comme les Egyptiens dont parlait Ezéchiel (29/6-7). Le roi d’Israël s’est appuyé sur une canne de roseau. Le roseau s’est brisé, a perforé la main, déchiré l’épaule et finalement, dans la chute du roi, a cassé les reins. Vous imaginiez telle année ou étape comme paisible navigation en eaux calmes. Et voici les tempêtes qui font sombrer toutes les embarcations aux voiles gonflées de vent, d’ambition, d’affection.

Par contre, telle personne surgit dans votre histoire, au détour du chemin, comme le Christ ressuscité sur la route d’Emmaüs. Cet inconnu se conduit pour vous mieux qu’un frère ou un parent. Des amis deviennent une vraie famille pour vous. C’est pourquoi, mes enfants, c’est passionnant de vivre. Le lendemain n’est jamais ce qu’on a prévu. Nous ne savons jamais ce qui se passe dans l’esprit des êtres chers et de nos proches. La vie a plus d’imagination que les romans.

Il faut faire confiance et ne pas essayer de décrire le paysage du pays promis par Dieu, pays inconnu vers lequel nous marchons et que Dieu a promis.

« Sans savoir »

Oui, la foi ne croit pas « à cause de … ». Ce serait de la démonstration logique. La foi croit « malgré… ».

Plus il y a d’injustices, plus nous aspirons à la justice. Plus il y a de silence, plus nous attendons une parole. Moins nous voyons de Dieu dans ce monde plus nous comptons sur Lui.

De toute façon, nous partons, nous sommes embarqués (Pascal). Quand on est embarqué, il faut supporter le mal de mer et les nausées en cours de navigation. Mais nous portons en nous le mystère avec le Christ embarqué avec nous. Quelle sera notre attitude durant la navigation sur la mer ou dans le désert ? D’un côté, la prétention de tout savoir un jour, de se représenter le progrès, nous expose aux déceptions. D’un autre côté, la résignation et le fatalisme (puisque nous ne pouvons savoir) détruisent notre personnalité et stoppent tout dynamisme. « Résigne-toi, mon c?ur, dans ton sommeil de brute ». (Baudelaire)

La foi marche sans les illusions de l’espérance et ses déceptions, et sans irresponsabilité. Elle part avec confiance : Dieu est devant. Dieu est à naître. Dieu devient au cours de la marche.

Il vous est arrivé parfois au sommet d’une tour (donjon de Provins, tour Eiffel) de vous accouder à la balustrade en fer et de regarder paisiblement du haut de la plate-forme surplombant le vide, le grand abîme vertigineux. Auriez-vous fait ce geste s’il n’y avait pas eu cette protection ? Certainement pas. La balustrade supprime le vertige. Se pencher et regarder est un geste de mort s’il n’y a pas de barrière, mais un émerveillement s’il y a cette sécurité donnée à notre esprit.

Environné d’abîme, ignorant les mystères de foyers qui sont autour de nous, ignorant les événements infinis de la forêt qui grouille, appuyons-nous sur le savoir de Dieu. Le Dieu d’Abraham ne donne pas d’explication de tout. Il crée la confiance. Comme le petit enfant qui donne la main à son père, nous partons avec la douceur d’ignorer au sein du grand Amour qui sait et qui nous accompagne dans le voyage. Nous ignorons à l’intérieur du savoir de Dieu. Il nous suffit de connaître que « nous sommes connus ». Abraham d’aujourd’hui, en route sur sa Parole, avec Lui.

Amen.

(Merci à Mme Monique Ngontamack pour la numérisation de ce texte)

 

 

pasteur Christian Mazel

pasteur Christian Mazel

 


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