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Cours d'instruction religieuse (1944-1946)

Pasteur André-Numa Bertrand
Oratoire du Louvre

Deuxième 2ème année

II -La vie divine dans les âmes

Chapitre I - Les sources de la vie divine

Pourquoi l'homme est-il religieux ? Pourquoi ne s'enferme-t-il pas dans les préoccupations purement matérielles ou intellectuelles, mais cherche-t-il au-dessus de lui la raison d'être de son existence et de celle du monde ? Pourquoi croit-il en Dieu ?

Cette question, que nous allons étudier dans ce chapitre, ne doit pas être posée ainsi : Peut-on démontrer l'existence de Dieu ?. La religion a été une rencontre avec Dieu avant d'être une réflexion sur Dieu ; celui-ci a été cherché, trouvé et adoré, avant que son existence ait été démontrée. Nous cherchons ici ce qui a fait de l'homme un être religieux.

1- Le besoin religieux

La place que la préoccupation religieuse occupe dans l'histoire humaine prouve que ce besoin est profondément ancré dans le cœur de l'homme. « Mon âme a soif de Dieu » chantait le Psalmiste. Cette soif est très vivante en certaines âmes ; dans d'autres elle se réduit à un désir assez vague, dans d'autres enfin elle semble éteinte. Il faut donc voir si le besoin qu'elle révèle n'est qu'une illusion ou s'il est vraiment essentiel à l'homme.

a) Le besoin religieux naît d'abord d'une impression de faiblesse et de solitude qui nous saisit devant le monde. Sommes-nous seuls dans un univers aveugle et sourd ? ou le monde est-il gouverné par une pensée, une volonté que nous pouvons rejoindre ?

Nous avons le sentiment qu'un monde gouverné par Dieu serait plus compréhensible à notre esprit et plus rassurant pour notre cœur qu'un monde purement mécanique. La forme la plus simple du besoin religieux, c'est le désir de trouver derrière le monde une Pensée à laquelle il obéit.

b) D'autre part, l'homme se trouve dépaysé dans un monde qui ne lui donne pas ce qu'il ne peut s'empêcher de chercher : le bonheur, le bien, l'idéal. A certains égards, il se sent supérieur à ce monde dans lequel il se voit si faible ; il le juge et le condamne, il cherche au dessus de lui, en Dieu, le but véritable de sa vie, de son action.

Le vrai besoin religieux est le besoin de donner à notre vie et à nous-mêmes une loi en un Maître plus puissant que le monde et surtout plus juste.

c) Mais la forme la plus haute du besoin religieux, c'est le besoin du salut. Dès le moment où nous savons qu'il y a une loi de notre vie, nous constatons que nous ne pouvons pas la réaliser. Elle exige que nous soyons ce que nous ne sommes pas. Une vie nouvelle doit naître en nous, et nous ne pouvons pas créer une vie autre que celle que nous avons reçue ; créer est l'acte d'un Dieu. Y a-t-il donc un Dieu qui puisse nous sauver de nous-mêmes et de notre misère ?

Telle est la vraie question religieuse. J'ai besoin de quelqu'un qui m'apporte une vie plus haute ; Dieu peut-Il et veut-Il être celui-là ?

C'est à cette question que nous allons chercher une réponse, en étudiant ce que le monde, ce que notre cœur, ce que Jésus-Christ ont à nous dire au sujet de Dieu.

Psaume 42, 2-12 Mon âme soupire après Toi

Psaume 63, 2- 9 Mon âme a soif de Toi

Genèse 28, 10-22 Dieu était là...

Psaume 25, -14 Mon âme Te cherche

Psaume 14, 1- 7 Un monde sans Dieu

Psaume 27, 1- 5 Dieu est ma lumière

Psaume 23 Dieu, mon berger

2- Le Mystère du monde

On entend souvent dire « L'origine du monde est un mystère qui ne s'explique que par l'existence d'un Dieu qui a tout créé ; il est clair que Dieu existe, car le monde doit avoir un auteur ».

Ce raisonnement n'est pas faux, mais il est un peu sommaire et ne donne à l'idée de Dieu un sens religieux que si on ajoute

a) quelques remarques sur le mystère,

b) quelques considérations sur le monde que l'on prétend expliquer.

a) Les adversaires de l'idée de Dieu disent en effet que celle-ci est peu à peu rendue inutile par les progrès de la connaissance. Tant qu'on ne connaît pas la cause réelle d'un fait, on le trouve mystérieux et on l'attribue à l'action de Dieu ; puis une fois que la science l'a expliqué, il n'y a plus de mystère et on ne parle plus de Dieu. Ainsi chaque jour la science fait reculer le mystère, et Dieu par la même occasion.

Cette vue est radicalement fausse. Plus nous connaissons le monde, plus nous découvrons en lui de mystères ; la science ne nous place pas devant un univers simple où tout est compréhensible ; chaque problème qu'elle résout soulève d'autres questions plus complexes ; la découverte de l'électricité, par exemple, a expliqué un certain nombre de phénomènes, mais elle a ouvert devant nous un monde nouveau, plein de mystère et d'inconnu. L'idée que nous nous faisons du monde est beaucoup moins simple que celle que s'en faisaient les anciens, et l'appel à une pensée directrice y est plus nécessaire encore.

b) Nous trouvons en effet dans le monde de l'ordre, et un ordre que nous pouvons comprendre et deviner. Nous sommes donc autorisés à penser qu'il y a à l'origine du monde une pensée, et une pensée à laquelle la nôtre est apparentée, puisque nous pouvons la comprendre.

Nous trouvons en outre dans le monde la vie, mystère bien plus merveilleux encore que l'ordre, et d'autant plus troublant que chacun de nous la porte en lui-même. Le monde de la vie nous apparaît comme une seconde création superposée à la première, et nous sommes autorisés à penser que la réalité qui est à l'origine du monde porte en elle le secret de la vie comme celui de l'ordre.

Enfin nous trouvons dans le monde l'esprit. C'est là le suprême mystère : Que l'homme ait la faculté de penser, de raisonner, et aussi d'aimer, d'espérer, de craindre, de croire, voilà qui nous donne une idée incomparable de la réalité dont il est issu.

Le spectacle du monde est donc, pour qui sait le comprendre, la révélation d'une réalité mystérieuse, raison d'être des choses et de nous-mêmes, qui ne peut avoir introduit dans le monde l'ordre, la vie et l'esprit, que si elle est elle-même Ordre, Vie et Esprit.

Genèse, 1, 1-25 Dieu créateur du monde

Genèse 1,26 à 2,3 Dieu créateur de l'homme

Job 38, 1-25 Dieu ordonnateur du monde

Psaume 96, 1-8 & 11-15 Dieu maître du monde

Actes 17, 22-31 La vie est en Lui

Psaume 139, 1-12 Dieu connaît nos cœurs

Jean 4, 19-26 Dieu est Esprit

3- Le Mystère de l'Homme

Nous avons trouvé dans le monde l'ordre, la vie et la pensée ; mais il suffit de regarder en nous-même pour y trouver la vie de l'esprit sous des formes bien plus caractéristiques que la pensée elle-même.

a) ll y a d'abord en nous le mystère du Devoir, plus profond que celui de la raison. L'homme sent en lui une force qui le domine et qui n'est pas lui, puisqu'il cherche à lui échapper. Cette forme lui impose une volonté à laquelle il lui est toujours possible de désobéir, mais qu'il est contraint de respecter, d'honorer et d'approuver même alors qu'il n'y souscrit pas. C'est la force du devoir.

Nous appelons Dieu cette volonté qui nous commande.

b) Plus haut que le devoir, il y a l'Idéal. Le devoir est une consigne et nous ne pouvons pas enfermer toute notre vie intérieure dans un certain nombre de défenses. Il y a des beautés morales qu'aucune règle n'impose, qui sont comme la poésie de la vie spirituelle, et que nous ne pouvons pas ne pas rechercher : l'amour, le sacrifice, et d'un mot l'Idéal.

On s'est souvent étonné de voir l'homme poursuivre un idéal qui, par sa nature, échappe à ses atteintes. Pourquoi ne se contente-t-il pas du devoir qui est une chose nette et précise ? On s'est moqué du caractère insatiable de l'âme humaine. mais précisément l'homme est fait pour l'infini et rien de ce qui est fini ou imparfait ne peut le contenir. Il a soif de perfection.

Ici Dieu nous apparaît comme une beauté qui nous attire.

c) Enfin nous trouvons en nous le sens de l'adoration ou tout simplement le sentiment religieux. L'homme n'est satisfait ni par la sécheresse du devoir, ni par le vague d'un idéal qui recule à mesure qu'on s'en approche ; il lui faut une perfection réalisée, vivante, et trouvant sa puissance dans sa perfection même. L'homme cherche au-dessus de lui une Personne, un Dieu qui explique la voix intérieure du devoir et l'attrait souverain de l'idéal, qui explique surtout le sens de l'adoration que nous portons en nous-mêmes.

Tout le monde ne connaît pas l'adoration ; mais tout le monde connaît un sentiment qui en est très voisin et qui peut nous aider à comprendre sa nature ; c'est l'admiration, c'est-à-dire la joie désintéressée de se sentir dominé et dépassé, de trouver devant nous quelque chose et quelqu'un qui nous fasse sentir, en même temps que notre infériorité, la possibilité d'y échapper.

Dieu nous apparaît, de ce point de vue, comme la sainteté qui nous humilie et en même temps nous relève.

d) Ainsi l'homme porte en lui-même un triple mystère ; mais c'est un mystère lumineux ; et l'on comprend que l'homme trouve son repos et sa paix dans la connaissance d'un Dieu qui commande, qui inspire, et qui, malgré sa sainteté, n'est pas loin de notre misère.

Psaume 119, 1-34 Dieu, auteur de la Loi

Romains 1, 18-25 Quand on abandonne Dieu

Proverbes 1, 7-35 Détournez-vous des niaiseries

Proverbes 3, 1-19 La sagesse est précieuse

Job 28, 1-16 La sagesse est en Dieu

Psaume 119, 97-176 Dieu, but de la vie

Jean 4, 5-15 Dieu seul désaltère l'âme

4- Le Mystère de Dieu (Le problème du Mal)

Nous avons vu que la vision autour de nous de ce qui est, et plus encore la vision en nous de ce qui doit être, nous conduisent l'une et l'autre, vers l'idée d'une Pensée et d'une Volonté qui porte en soi la raison d'être du monde et le but de notre vie. C'est cette personne que nous appelons DIEU.

a) Cela aussi est un mystère, qui résume tous les autres, et devant lequel notre pensée s'arrête, impuissante. Nous comprenons que cette affirmation de Dieu est nécessaire, mais en même temps nous éprouvons que cette idée nous dépasse infiniment et déborde les capacités de notre esprit.

Cependant ce Dieu mystérieux nous apporte un apaisement ; nous ne sommes pas livrés au hasard ; le monde a un sens, notre vie a un but ; nous trouvons une certaine sécurité à penser que nous ne vivons pas dans le royaume du hasard, mais dans la maison de l'Esprit.

b) Seulement, aussitôt que nous voulons aller plus loin, nous sommes arrêtés par une difficulté redoutable : l'idée de Dieu nous vient à la fois de la nature (ce qui est) et de la conscience (ce qui doit être) ; mais la nature et la conscience ne parlent pas le même langage.

Dans la nature nous voyons que Dieu a institué des lois impitoyables, qui n'ont aucun égard à la valeur morale des êtres et des choses ; notre conscience réclame au contraire, un Dieu qui donne à chacun ce qui lui est dû. Le monde nous donne le spectacle d'un ordre admirable du point de vue matériel, mais d'un désordre effroyable au point de vue moral. L'idée que nous pouvons nous faire de Dieu d'après ce qui arrive ne satisfait pas notre conscience, et le Dieu que réclame notre conscience paraît sans pouvoir sur le monde.

Voilà le plus troublant de tous les mystères ; c'est ce qu'on appelle le problème du mal ; si Dieu règne, pourquoi y a-t-il tant de mal dans le monde ? .

c) Ce problème est le plus grave que puisse se poser un chrétien. Beaucoup d'esprits sincères s'écartent du christianisme parce qu'ils ne parviennent pas à comprendre comment un monde comme le nôtre peut être l'œuvre de Dieu, que les Psaumes - et Jésus lui-même - nous présentent comme veillant sur nous avec bonté.

« Si Dieu est bon, Il n'est pas tout puissant ; s'Il est tout-puissant, Il n'est pas bon. ». Cette formule, qu'on lance volontiers contre une certaine piété, ne va pas au fond des choses ; mais tous les raisonnements qu'on pourra lui opposer n'effaceront jamais le scandale de la souffrance imméritée.

Ce qu'il faut chercher, ce n'est pas une réponse à une attaque habile, c'est une forme de piété qui domine d'assez haut ce terrible problème.

Psaume 1, 1 –6 Le juste est toujours heureux

Psaume 73, 2-22 Le méchant est toujours puni

Job 5, 6-27 La souffrance voulue de Dieu

Job 9, 2-24 Dieu est-il indifférent ?

Ézéchiel 18, 22-32 L'homme qui ne comprend pas

Psaume 34, 12-19 Dieu protège les justes

Psaume 22, 1-12 La plainte du malheureux

Les lectures de cette semaine expriment les idées imparfaites des croyants de l'Ancien Testament et leur trouble devant les problèmes du mal, avant que Jésus nous eût révélé la signification véritable de la souffrance.

5- Le Dieu de Jésus-Christ

Essayons de voir si la conception de Dieu sur laquelle est fondée la piété de Jésus-Christ ne nous permettrait pas d'échapper aux difficultés soulevées par le problème du mal.

a) Jésus constate comme nous l'indifférence des lois de la nature ; il sait bien que Dieu fait lever son soleil pour les méchants comme pour les bons ; mais au lieu d'y voir un scandale, il y voit une marque de la bonté de Dieu qui traite tous ses enfants de la même manière. Il ne veut pas d'un Dieu partial qui ne ferait pleuvoir que sur les champs du juste.

Il repousse résolument la vieille idée israélite que les malheurs sont toujours des châtiments. Par là, il libère l'âme devant la souffrance d'autrui et donne libre cours à la pitié (voir page19).

b) La volonté de Dieu à l'égard des hommes est toujours bonne, mais elle n'est pas seule à s'exercer dans le monde ; parce qu'une chose arrive, cela ne prouve pas qu'elle est voulue de Dieu ; bien des malheurs au contraire arrivent parce que le hommes ne respectent pas la volonté de Dieu.

Jésus ne dit pas comme le Psalmiste « Dieu règne » ; il nous apprend à prier : « Que ton règne arrive », car il sait qu'actuellement la volonté de Dieu ne se fait pas sur la terre comme au ciel. Les hommes ont introduit dans le monde des germes de désordre, en sorte que le spectacle du monde ne nous donne pas, par lui-même, une idée exacte de Dieu.

c) La religion de Jésus ne sera donc pas une adoration de la nature, mais un appel de la conscience en Dieu qui aura le dernier mot. Elle nous invite à rétablir dans le monde la volonté de Dieu, c'est-à-dire l'ordre, l'harmonie et l'amour ; et elle nous promet que le Maître du monde travaillera avec nous si nous savons travailler avec lui.

Le Chrétien est le disciple du Juste crucifié ; il ne s'étonne donc pas qu'il y ait de l'injustice dans le monde ; mais il se dresse contre cette injustice au nom de Dieu par qui seul, elle pourra être vaincue.

d) La piété n'est pas pour Jésus un moyen d'expliquer la douleur, de savoir d'où elle vient ; elle est plutôt un moyen de savoir où elle nous conduit et ce que Dieu attend de nous dans notre souffrance.

Le christianisme n'est pas une religion de résignation à tout ce qui arrive, comme si tout événement nous révélait forcément la volonté de Dieu ; c'est une religion de foi, de travail de conquête spirituelle, tournée vers l'avenir. Elle ne dissipe pas tous les mystères et ne nous donne pas une formule pour reconnaître si un événement de notre vie exprime ou non la volonté de Dieu ; mais elle nous aide à comprendre et à situer un monde où nous avons pour mission d'établir le règne de notre Père.

Job 39, 36 à 42, 6 Le mystère qui nous dépasse

Matthieu 5, 33-48 Sur les bons comme sur les méchants

Jean 9, 1- 7 « Pourquoi est-il aveugle ? »

Jean 9, 24-39 « Maintenant, je vois »

Luc 3, 33-49 La suprême injustice

Jean 14, 1-11 Ayez confiance

Jean 3, 6-21 L'amour, secret du monde

6- Le Mystère du Christ

La vie intérieure de Jésus nous a mis en présence d'une piété pour laquelle le problème du mal ne se pose pas et qui domine les contradictions que notre pensée ne peut résoudre. Mais nous jugerions bien superficiellement les choses si nous pensions que par là tout est éclairci.

La Personne du Christ nous place au contraire en présence d'une série de problèmes qui, par leur profondeur même, ont exercé sur les âmes un attrait incomparable et les ont courbées devant ce que l'apôtre Paul appelle « le Mystère du Christ ».

a) La vie et la mort de Jésus ont définitivement ruiné dans les esprits l'idée que tout ce qui arrive est juste, parce que tout est conforme à la volonté du Dieu saint. Le problème posé par le gouvernement du monde est moins simple que cela. Et cependant, jamais la foi en la justice de Dieu ne s'est aussi puissamment imposée à nous que depuis la crucifixion du Juste ; jamais la foi en la présence de Dieu à nos côtés n'a été affirmée avec autant de force que par la victime du Calvaire.

b) Ce qu'il y a de paradoxal et de mystérieux dans ce fait s'accentue encore lorsqu'on voit ce que Jésus a promis à ses disciples et quels résultats il a obtenus. Le but de la vie, pour l'homme que guide son instinct, c'est le bonheur ; pour Jésus, le but de la vie c'est le service de Dieu. Donner sa vie est peu de choses, si par là on s'assure qu'elle ne sera pas une vie perdue, mais une vie sauvée. L'homme n'est pas sur la terre pour chercher le bonheur, mais pour donner à sa personne la plus haute valeur possible en servant Dieu et les hommes. Les « heureux » c'est-à-dire ceux qui réalisent leur véritable destinée, ce sont les pauvres, les purs, les pacifiques, les persécutés, etc...

c) Il serait incompréhensible que cette prédication ait conquis le monde, si ceux qui ont suivi Jésus n'avaient vu en lui qu'un prédicateur admirable, assez convaincu pour rester fidèle à ses idées jusqu'à la mort. Mais malgré le désordre du monde, ils ont vu en Jésus la preuve que la création de Dieu avait un but ; que le monde n'était pas un monde manqué, puisqu'on pouvait y trouver une âme capable de porter en soi une pareille grandeur et de la faire naître chez les autres.

Ils ont vu dans la personne, la vie, la mort, le triomphe du Christ, la preuve que Dieu Lui-même s'était engagé dans cette aventure tragique qui s'appelle l'histoire, et qu'Il voulait la conduire à son terme.

d) Ceux qui ont vu en Jésus-Christ « un Dieu qui souffre et qui meurt » ont employé une expression qui peut paraître étrange et incompréhensible ; mais la vérité qu'ils ont voulu exprimer demeure éternelle : que dans la souffrance et la mort du Juste, il y a une puissance de Dieu pour le salut du monde.

La justice de Dieu n'est pas une chose toute faite qu'il établit par sa propre volonté, à la manière des lois naturelles ; c'est le but sublime qu'Il a assigné à sa création et vers lequel Il la conduit Lui-même à travers la douleur et le mystère, par le chemin que trace sur notre terre la souffrance de ceux qui savent « donner leur vie pour la sauver ».

Matthieu 5, 3-10 Le vrai bonheur

Luc 1, 68-79 Le premier cantique à sa gloire

Marc 11, 7-33 L'autorité mystérieuse de Jésus

Marc 10, 35-45 La « gloire » offerte par Jésus

II Corinth. 11, 23-32 La « richesse » offerte par Jésus

Jean 1, 1-18 Le Christ, principe de vie

Coloss. 1, 15-23 La divinité du Christ

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Chapitre II - Les étapes de la vie divine

Au point de départ de la vie divine, il y a l'appel de Dieu que tout homme trouve dans son cœur comme une aspiration souvent confuse et indistincte, mais qui a pris une forme précise dans la conscience des grands croyants et qui a trouvé dans la personne de Jésus son incarnation définitive.

Par quelles étapes l'homme qui veut répondre à cet appel va-t-il s'acheminer vers la vie divine ? C'est ce que nous allons examiner maintenant.

1- La Repentance

Le premier pas de l'homme dans la vie spirituelle, c'est la repentance, c'est-à-dire le jugement de ses torts envers Dieu et la résolution de revenir à Lui.

a) Pour un homme qui vit sans respect pour les lois de Dieu et sans souci de le servir, la repentance est une condamnation radicale de toute sa vie qui est une vie perdue, un amer regret de son passé sans valeur, une décision de s'adonner désormais à une vie meilleure.

Beaucoup de grands croyants (saint Augustin, Pascal, etc...) sont ainsi entrés dans la vie chrétienne par une repentance qui a été une véritable métamorphose.

b) L'homme qui a toujours essayé de répondre à l'appel de son Dieu, connaît aussi la repentance, car il lui arrive de se laisser entraîner par ses mauvais penchants. Se repentir d'une faute, c'est d'abord reconnaître sincèrement sa faute, ne rien faire pour tromper les autres ni pour nous tromper nous-mêmes sur notre valeur morale ; c'est ensuite la regretter, en éprouver une honte véritable ; c'est enfin prendre la décision de ne pas laisser se renouveler pareille défaillance.

c) Mais le chrétien qui compare sa vie quotidienne à celle que Dieu attend de lui, ne condamne pas seulement certaines fautes particulières ; il sait que son existence toute entière et sa personne même ne sont pas ce qu'elles devraient être. Il se sent pécheur, c'est-à-dire infidèle à l'appel qu'il a reçu et indigne d'être aimé de Dieu tant qu'il n'aura pas ouvert son cœur et reconnu sa misère.

La repentance est alors un retour à une attitude plus filiale envers Dieu, à une vie mieux consacrée à son service.

C'est ainsi que Jésus a compris le péché et la repentance ; il nous les a représentés dans la Parabole de l'Enfant Prodigue, non comme une désobéissance et un regret, mais comme un éloignement et un retour.

d) Ce qui fait la valeur unique de la repentance, c'est qu'elle est un acte de sincérité, un effort pour nous voir tels que Dieu nous voit. Par là elle est le premier acte de la vie religieuse, la condition même de la prière, de l'appel à Dieu et à son pardon.

Ainsi à la base de tout, il y a la repentance, et quand on va au fond de la repentance, on trouve la sincérité, en dehors de laquelle l'homme ne peut avoir de contact avec Dieu.

Psaume 51, 3-14 « Aie pitié de moi »

Psaume 32, 1- 7 L'aveu donne la paix

Matth. 3, 1-11 Repentez-vous

Jérém. 13,15-25 Ceux qui ne veulent pas se repentir

Sophonie 1, 6-18 Le tremblement des pécheurs devant Dieu

Rom. 9, 14-24 Qui me délivrera de moi-même?

Luc 16, 11-24 Mon Père, je ne suis pas digne

2- La Foi

La repentance ne peut être pour nous le point de départ d'une vie nouvelle que si cet accent de sincérité est le témoignage de la confiance avec laquelle nous acceptons le jugement de Dieu sur notre vie et sur notre personne. C'est pourquoi Jésus a toujours lié le salut (l'entrée dans la vie divine) à deux conditions inséparables, la repentance et la foi.

a) La foi est l'acte de confiance par lequel l'homme ouvre son cœur à Dieu et s'en remet à Lui de prononcer sur son passé et sur son avenir ; elle n'est complète que lorsque l'homme s'abandonne tout entier et livre le fond même de sa personne.

« Ta foi t'a sauvé » dit Jésus aux malades et aux pécheurs ; car l'homme ne peut être sauvé (renouvelé et introduit dans la vie divine) que par un mouvement de son cœur.

b) On voit que la foi n'est pas seulement l'affirmation de certaines idées ou doctrines ; l'homme qui se confie en Dieu accepte les décisions qui sont conformes à sa volonté, aussi bien que les affirmations conformes à sa vérité ; affirmer que Dieu existe, ce n'est pas encore avoir foi en Dieu.

Certaines idées sont indispensables à la naissance de la foi ; elles ne sont pas l'objet de la foi. L'objet de la foi est toujours une Personne en qui on se confie.

c) Les Églises ont souvent abusé de cette idée que la foi est un abandon de soi-même consenti dans une confiance absolue, pour demander à leurs fidèles d'abdiquer entre leurs mains et de leur remettre aveuglément le soin de leur pensée et de leur vie religieuse.

Mais la foi n'est pas la crédulité, la facilité à croire ce qu'enseigne votre Église ; il n'y a rien de plus réfléchi et de moins crédule que la foi. S'abandonner entre les mains de Dieu, c'est descendre en soi-même assez profondément pour y rencontrer le mystère qui domine et protège notre vie intérieure ; se remettre entre les mains des hommes, c'est sortir de soi-même, appauvrir sa vie spirituelle et renoncer à en assurer la direction. C'est s'éloigner de Dieu en s'éloignant de soi-même. Il n'y a donc aucune analogie entre l'acte de foi et l'abdication de sa liberté spirituelle. d) Ainsi la foi est simple dans son principe ; mais elle fait naître en nous toute une floraison de forces spirituelles ; la joie, la paix, la reconnaissance, l'amour, etc... Elle est la forme la plus riche de la vie chrétienne, l'attitude inspirée à l'âme par une confiance absolue en son Dieu.

I Rois 2, 1-10 Une mort dans la foi

I Rois 19, 1- 8 Une foi qui défaille et qui se relève

Marc 7, 24-30 Une foi obstinée

Philip. 1, 12-20 Une foi qui accepte tout

Philip. 3, 12 à 4,1 Une foi qui va de l'avant

Hébreux 11, 1-3 & 32-40 Les victoires de la foi

Romains 8, 31-39 Plus que vainqueurs!

3- La Foi en Jésus-Christ

La piété chrétienne a ceci de particulier qu'elle associe indissolublement dans sa foi, Dieu à Jésus-Christ, et les questions posées par le rapport qui existe entre l'un et l'autre ont toujours occupé une large place dans la pensée chrétienne.

a) Notons simplement ici que ce mot de « foi » peut être légitimement employé pour désigner notre attitude envers Jésus-Christ. Elle exprime la plénitude et l'intégrité de la confiance que nous avons en Lui. Avoir foi en Jésus-Christ, c'est croire à la vérité de sa parole, à l'excellence de ses directions spirituelles, à la réalité des espérances qu'il nous offre, à la fécondité de l'idéal qu'il nous propose.

La véritable preuve de cette confiance, c'est l'obéissance à ses commandements « Vous êtes mes disciples, si vous faites ce que je vous commande ».

b) Les sentiments du chrétien envers son Maître pourraient s'exprimer dans les termes les plus divers ; nous pourrions parler de notre admiration, de notre reconnaissance, de notre amour, etc... Si nous préférons parler de notre foi, c'est pour marquer le caractère religieux du lien qui nous unit à Jésus-Christ. Tous les termes dont nous pourrions user pour d'autres que Lui, nous paraissent insuffisants, si beaux et si vrais qu'ils soient.

Les chrétiens ont donc employé des termes tels que Maître, Seigneur, Sauveur, qui expriment leur attitude devant Jésus, la place qu'Il a prise dans leurs cœurs et le rôle qu'Il joue dans leur vie. Il est essentiel de savoir quelles expériences les grands chrétiens et particulièrement les Apôtres ont mises sous ces mots, et de leur donner nous-mêmes dans notre vie tout le sens qu'ils comportent.

c) En dehors de ces titres, il y en a d'autres, comme ceux de Fils de l'Homme ou de Fils de Dieu par lesquels nous essayons de dire non seulement ce que Jésus est pour nous, mais ce qu'Il est aux yeux de Dieu. Il est évident que dans ce domaine, nous ne pouvons jamais exprimer qu'une part de la réalité et dire comment Jésus nous apparaît dans ses rapports avec Dieu.

La personne de Jésus est trop haute, trop belle et trop grande, pour que nous puissions la comprendre tout entière ; il y a en Lui quelque chose qui dépasse l'humanité et nous met en contact avec Dieu ; c'est ce qu'on a exprimé en l'appelant Fils de Dieu ; et en même temps il y a en Lui quelque chose de si profondément humain que nous le sentons très près de nous, c'est pourquoi on l'a appelé Fils de l'Homme.

d) Nous pouvons dire en conclusion qu'en Jésus nous trouvons la véritable nature de l'homme, non tel qu'il est mais tel qu'il devrait être selon la volonté de Dieu. En même temps nous trouvons en Lui tout ce que notre esprit peut connaître de Dieu, sa sainteté, son amour. Nous ne parlerions pas de notre foi en Lui, si nous n'avions été dominés par sa Personne et éveillés par Lui à une vie nouvelle, si nous n'avions pas éprouvé ainsi qu'Il participe à l'action créatrice de Dieu. Chaque chrétien doit exprimer cette foi par les mots qui lui paraissent les plus conformes à l'expérience des croyants à travers les siècles et ses propres expériences.

Marc 5, 21-34 « Ta foi t'a sauvée »

Marc 5, 35-43 « Ne crains point, crois seulement »

Jean 5, 1-11 Un croyant

Marc 8, 27-33 « Tu es le Christ »

Jean 10,1-6 & 11 « Je suis le bon berger »

Jean 4, 31-42 Pourquoi on croit en Lui

Éphés. 3, 13-20 « Je fléchis les genoux »

4- La Discipline Morale

La foi du chrétien crée spontanément en lui le désir d'une vie supérieure ; elle lui donne le goût du contact avec Dieu, en sorte que le fruit naturel de la foi est une vie conforme à la volonté de Dieu, à ce que le Nouveau Testament appelle « la justice » et nos contemporains « la vie morale ».

L'opinion courante est sévère pour les hommes qui se disent chrétiens et ne savent pas imposer à leur vie de chaque jour la simple discipline de la vie morale ; on pense généralement qu'une foi sans fruits n'est pas une foi sincère. Cela ne mérite pas d'être appelé une foi ; ce n'est rien du tout.

a) Le chrétien n'a pas besoin qu'on lui demande d'observer la discipline morale ; il l'accepte joyeusement, parce que c'est la volonté d'un Dieu qu'il aime. La loi de Dieu n'est pas pour lui une servitude, elle est ce que l'épître de Jacques appelait « la loi de la liberté », c'est-à-dire la conséquence naturelle et joyeuse de notre consécration à Dieu et de notre amour pour Lui. L'Évangile rejoint ainsi la morale ; il obtient de nous les mêmes actes ; mais ceux-ci sont inspirés par d'autres sentiments ; le chrétien n'est pas un homme qui obéit, c'est un homme qui aime ; il n'exécute pas une consigne, il suit un idéal dont la beauté l'a séduit.

b) Alors, comment se fait-il que Jésus se déclare plus exigeant en fait de justice (de moralité). que les scribes et les pharisiens ? Ce n'est pas qu'il nous impose une loi plus compliquée ; c'est qu'il veut pénétrer au-delà des actes jusqu'aux sentiments. Il ne veut pas que nous dominions seulement nos mauvais penchants, mais que nous les supprimions. Il ne condamne pas seulement la violence, mais la haine et la colère. Une morale qui réglerait nos actes sans changer nos cœurs ne saurait le satisfaire.

Cette distinction entre la moralité des actes et la pureté du cœur nous permet de fixer les limites d'une morale sans religion. La loi peut me demander de contenir mon impatience ; Dieu seul peut changer mon cœur, si je l'ouvre à son action par la foi. Un homme trouvera toujours raisonnable que vous lui demandiez de bien régler sa conduite ; il trouvera absurde et impossible que vous lui demandiez de changer son cœur, si Dieu n'est pas là pour l'aider. Une morale profonde est nécessairement une morale religieuse.

c) Ce caractère intime et profond de la morale de Jésus ne doit pas nous faire croire qu'elle ne dépasse pas la discipline de la vie personnelle et qu'elle ignore les problèmes de la vie sociale. La préoccupation de Jésus est au contraire de créer entre les hommes des rapports normaux, elle est donc essentiellement sociale.

Seulement Jésus sait que la source de la vie est dans le cœur de l'homme ; il sait qu'on a rien fait aussi longtemps qu'on n'a pas changé les cœurs ; il sait aussi que le chrétien doit combattre tout ce qui empêche le développement de la vie intérieure. Non seulement il tirera les conséquences pratiques de sa foi, dans tous les domaines, mais il combattra tout ce qui fait peser sur l'homme la domination brutale des choses : paupérisme, alcoolisme, etc...

Ainsi la discipline morale n'apparaît plus comme une contrainte, mais comme l'effort par lequel l'homme s'efforce de se mettre lui-même et de mettre le monde au service du Dieu auquel il a voué sa foi.

Matthieu 5, 17-24 Mieux que les scribes

Jacques 2, 14-24 Les œuvres de la foi

Jacques 1, 19-27 La piété pratique

Éphés. 4, 25 à 5, 2 Imitateurs de Dieu

Romains 12, 9-21 Un programme

Philip. 1, 27 à 2, 4 Digne de l' Évangile

I Pier. 3, 8-17 Ayez une bonne conscience

5- L'Amour Chrétien

a) L'idéal chrétien est celui d'un monde fondé sur l'amour ; et la forme la plus haute de la discipline morale qu'un chrétien puisse poursuivre est celle qui consiste à vaincre son égoïsme et à aimer ses frères.

Ce qui montre que cet idéal est bien celui qu'il faut opposer à notre misère, c'est qu'en remontant à la racine de nos vices, nous y trouvons toujours l'égoïsme. Vaincre cet égoïsme, aimer les hommes, renoncer à soi-même, s'oublier soi-même, autant d'expressions qui désignent, avec des nuances diverses, l'œuvre que le chrétien est appelé à poursuivre.

b) L'idée chrétienne d'un monde fondé sur l'amour se heurte à l'objection de ceux qui pensent que le monde ne peut et ne doit être fondé que sur la justice, car la justice est, dit-on, une chose fixe, toujours égale, tandis que l'amour est variable et capricieux. Les relations entre les hommes ne peuvent être réglées que par la justice.

Il y a là une double confusion : d'abord il ne s'agit pas de supprimer la justice au nom de l'amour ; il s'agit de l'éclairer, de la vivifier par la générosité du cœur. L'amour suppose la justice ; avant de donner aux hommes quelque chose de ce qui est à nous, il faut naturellement commencer par leur donner ou leur laisser ce qui est à eux. Mais précisément une société où chacun serait âprement occupé à poursuivre ses droits propres ne pourrait pas subsister. Ensuite il n'est pas vrai que la justice soit plus fixe que l'amour ; les hommes ont des idées différentes sur la justice ; ils savent tous ce que c'est que l'amour. Il ne s'agit pas de substituer le caprice à la règle ; il s'agit de bâtir sa vie sur cette force à la fois souple et une qu'est l'amour.

c) Ici nous trouvons pour notre propre compte ce principe d'héroïsme que nous avons rencontré dans la piété de Jésus.

L'Évangile est merveilleusement simple, c'est-à-dire facile à comprendre ; cela ne signifie pas que la vie chrétienne soit facile à réaliser. C'est précisément parce qu'elle offre un idéal difficile qu'elle est capable d'enthousiasmer les cœurs.

On dit parfois que l'idée du renoncement est contraire à la nature de l'homme. Le renoncement à notre égoïsme (qui n'est pas le renoncement à la vie, qui en est même le contraire) est en réalité la réalisation de notre vraie nature. Mais il est contraire à la nature égoïste et artificielle que nous nous sommes faits. En ce sens, il y a quelque chose d'héroïque qui est fait pour attirer les âmes nobles, bien plus qu'une morale facile.

Et d'ailleurs un joug que l'on porte avec amour est toujours léger, et le chrétien a toujours devant lui, lorsqu'il s'agit de renoncer à quelques-uns de ses droits ou de ses biens, l'exemple de Celui qui a renoncé au plus élémentaire de tous les droits, le droit de vivre, et qui en donnant sa vie par amour pour les hommes, a créé le plus grand courant d'héroïsme que l'humanité ait connu.

I Cor. 13, 1-13 L'amour ne passera jamais

I Jean 3, 1-11 Aimons-nous les uns les autres

I Jean 3, 13-24 Que notre amour soit pratique

Luc 10, 30-37 L'amour en action

Philém. 1, 4-20 L'amour engendre la bonté

Rom. 14, 1-13 L'amour engendre la largeur d'esprit

Marc 12, 41-44 L'amour engendre le sacrifice

6- La Conversion

On désigne souvent par le mot de conversion l'entrée dans une Église ou le passage d'une Église dans une autre ; c'est là sa signification la plus superficielle. En réalité, la conversion véritable est l'ensemble des changements par lesquels nous nous tournons vers Dieu.

a) La question fondamentale de la vie est en effet de savoir vers qui on est orienté, où l'on va, quel but on a donné à sa vie. Est-ce que je vis pour moi ou pour les autres ? Voilà la question qui me juge et qui fixe ma véritable valeur. Un homme doit avoir un but dans la vie, et la valeur de sa vie dépend de la valeur de ce but et de la fidélité avec laquelle il est poursuivi.

Et qu'on ne dise pas ; c'est une question sans importance, que bien des hommes ne pensent pas à se poser. Il est certain que le plus grand nombre de nos contemporains ne se pose pas clairement la question ; mais dans la pratique, tout le monde est bien obligé de lui donner une réponse par sa conduite. Un égoïste ne dit peut-être pas : « je ne vis que pour moi seul » ; mais il le fait ; et c'est là sa réponse à la question concernant l'orientation de sa vie.

b) La conversion n'est pas nécessairement un changement brusque ; c'est souvent un lent développement régulier, et il ne faut pas appliquer sans réflexion à des hommes qui ont été élevés dans un milieu chrétien ce que saint Paul, par exemple, écrivait à des païens qui avaient tout à changer dans leur vie. Mais il vient toujours une heure où l'homme se rend compte des changements que l'Évangile a produits dans sa vie et de ceux qu'il doit y apporter encore ; c'est l'heure de sa « seconde naissance », non pas celle du corps mais celle de l'esprit.

c) La conversion crée en effet dans la vie de l'homme un changement si profond que Jésus l'appelle « une nouvelle naissance », c'est-à-dire la naissance en nous d'un homme nouveau, d'une personnalité nouvelle.

Y a-t-il donc tant de différences entre les chrétiens et ceux qui ne le sont pas ? entre ceux qui sont passés par la conversion et ceux qui l'ignorent ? Le plus souvent, on dit que les chrétiens sont « des hommes comme les autres ». Assurément, le fait d'entrer dans une Église chrétienne ne nous change pas automatiquement ; mais celui qui a décidé de marcher sous la direction de Jésus donne par là une valeur à sa vie bien plus haute. En même temps qu'il prend conscience de sa faiblesse personnelle, ce qui le garde de l'orgueil, il prend aussi conscience de la beauté du but qui est offert à sa vie et il se garde ainsi de la médiocrité.

d) L'éducation religieuse a précisément pour but d'attirer l'attention des jeunes gens sur cette orientation nouvelle à donner à leur vie, et sur l'importance qu'elle présente pour ceux qui ne veulent pas se résigner d'avance à la médiocrité spirituelle.

Genèse 32, 22-30 Conversion de Jacob

Luc 19, 1-10 Conversion de Zachée

Actes 29, 9-20 Conversion de saint Paul

Actes 16, 25-34 Conversion du geôlier de Philippe

Jean 3, 1-10 Naître de nouveau

II Cor. 5, 14-19 Devenir un homme nouveau

Éphés. 4, 17-24 Revêtir l'homme nouveau

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Chapitre III - Les instruments de la vie divine

Pour assurer dans son cœur le développement de la vie divine, le chrétien dispose de ressources diverses ; tantôt il s'appuie sur les institutions et les traditions que l'Évangile a engendrées, tantôt il met en œuvre ses propres forces intérieures, tantôt il accueille une initiative de Dieu à son égard.

1- L’ Église

La réalisation de notre idéal religieux étant liée à la prédication de Jésus-Christ, il faut d'abord que nous soyons mis en rapport avec lui. Ce rôle appartient à l'Église.

a) L'Église est la suite des générations chrétiennes qui nous rattachent à Jésus-Christ. Si l'Évangile n'était qu'un enseignement, il suffirait d'un livre pour le transmettre et nous n'aurions pas besoin de l'Église. Mais l'Évangile est une puissance de vie, le christianisme est une forme de vie, et il faut que cette vie soit transmise par des âmes vivantes.

L'Église est la série ininterrompue des âmes chrétiennes qui ont transmis la vie divine de Jésus à nous.

b) L'Église constitue, pour chaque génération, le milieu dans lequel la vie chrétienne se développe et se reproduit.

Ce résultat ne s'obtient pas seulement par la prédication et l'enseignement mais aussi par l'organisation du ministère, de la vie religieuse, et de l'effort social.

L'Église reçoit l'homme dès sa naissance par le baptême ; elle collabore à son éducation, elle consacre sa maturité spirituelle en l'unissant à Jésus-Christ par la communion, elle bénit son foyer, elle sanctifie ses deuils. Ainsi elle s'efforce de faire des membres de l'Église un seul corps, et de les unir entre eux en les unissant à Jésus-Christ.

Mais elle doit aussi s'efforcer de créer autour d'elle le milieu social le mieux fait pour aider au développement de la vie spirituelle, et enlever du chemin où marchent les hommes tout ce qui peut les éloigner de Dieu : la corruption, la misère, la guerre, l'isolement, etc...

c) Que devons-nous penser des Églises particulières entre lesquelles se partagent la chrétienté ? Il faut éviter de croire, soit qu'elles sont radicalement mauvaises sauf la nôtre, soit qu'elles se valent toutes. En toutes, il y a quelque chose de l'Évangile, mais toutes ne sont pas également fidèles. Il faut être ni sectaire, ni indifférent.

Nos Églises protestantes ne sont pas parfaites ; mais telles qu'elles sont elles constituent d'admirables champs de travail. Aucun autre milieu n'offre autant de possibilités pour le développement de la vie spirituelle.

La qualité essentielle de l'Église protestante est de ne vouloir d'autre Maître que Jésus-Christ, d'autre enseignement que l'Évangile, d'autre autorité que Dieu et sa parole. Les Églises perdraient toute leur valeur si elles oubliaient que Dieu est plus grand qu'elles, et qu'il y a partout des cœurs croyants, sauvés par son amour.

Actes 20, 17-35 Le ministère dans l'Église

I Cor. 12, 4-21 L'unité organique dans l'Église

Rom. 12, 1-8 Diversité des dons dans l'Église

I Cor. 1, 10-17 Nécessité de l'union dans l'Église

Éphés. 4, 1-7 &11-15 Unité du corps du Christ

I Cor. 8, 5-13 Dieu seul compte

Luc 14, .5-21 Tous invités

2- Le Culte public

Toutes les Églises ont institué des cultes publics, c'est-à-dire qu'elles ont fixé des moments où elles invitent leurs fidèles à se réunir pour chercher dans l'expression commune de leurs sentime

nts religieux, un moyen de les fortifier et de les approfondir.

a) N'y a-t-il donc pas entre les sentiments des nombreuses personnes qui se réunissent dans un même temple, une telle diversité qu'il est impossible de les réunir toutes dans un même culte, et de les associer aux mêmes pensées ?

Assurément le culte public ne peut à lui seul répondre à tous les besoins de tous les fidèles ; mais il y a cependant à toute piété chrétienne un fond commun, sans lequel la propagation du christianisme serait incompréhensible. La soif de Dieu, la repentance, la foi sont des sentiments qui se retrouvent à la base de toute piété chrétienne.

b) Le culte public a d'abord pour but de donner plus de force à nos sentiments par le fait qu'ils sont éprouvés en commun et exprimés, par exemple dans les chants, d'une manière collective.

Il a pour but aussi de rapprocher les membres de l'Église et de développer entre eux la fraternité et la communion d'esprit, par l'expression de leurs sentiments chrétiens.

Enfin il doit être l'école du culte privé. Pour cela il faut que nous prenions l'habitude d'aller au culte, non seulement pour écouter ce qu'on voudra bien nous dire, mais avec le désir d'y apporter nous-mêmes notre collaboration active. Il ne faut pas seulement apporter au culte une âme ouverte à ce que dit le pasteur, mais surtout une âme ouverte à ce que Dieu veut nous dire, et capable d'entendre les voies intérieures.

c) A côté de cet élément d'adoration, qui est le plus important, le culte protestant contient, dans la prédication, les directions essentielles nécessaires à l'approfondissement de notre piété personnelle.

Notre culte a l'avantage d'être clair, accessible à tous, et surtout d'être biblique. On lui a souvent reproché, peut-être sans assez de réflexion, d'être froid, trop austère. Comme dans tous les cultes possibles, ce qu'on y trouve dépend surtout des dispositions qu'on y apporte. On reproche avec plus de raison au culte protestant d'être trop intellectuel. Il risque par là de donner une importance exagérée au prédicateur.

Du reste, les impressions varient d'un fidèle à l'autre, et chacun doit s'efforcer de se faire une idée du culte qu'il désire d'après ses propres besoins spirituels et non d'après les préjugés souvent sans fondement.

Luc 4, 16-30 Le culte à Nazareth

Ésaïe 1, 10-17 Le culte que Dieu aime

Psaume 84, 1-15 L'amour du sanctuaire

Ésaïe 53, 7-16 Beauté de la prédication

Jérém. 5, 16-21 La prédication, avertissement de Dieu

Jacques 2, 1- 9 La fraternité dans le culte

Psaume 150 Chantez!

Ézéch. 3, 6-21 Avertis-les!

3- La Bible

Le rôle de la Bible dans l'histoire du monde chrétien et particulièrement dans les Églises de la Réforme, est absolument unique ; aucun livre religieux ne saurait le remplacer non seulement parce qu'elle est le seul document que nous ayons sur la personne de Jésus, mais parce qu'elle exprime les expériences religieuses les plus profondes du Sauveur, de ses précurseurs et de ses disciples. Elle est à la fois le témoin et l'organe de son influence sur les âmes.

a) Nous avons vu que l'Église était l'organe de transmission de la vie chrétienne ; la Bible est l'organe de contrôle de cette vie. Parmi les formes multiples que revêt à travers les siècles et dans les peuples divers, la vie issue de Jésus-Christ, la Bible permet de reconnaître quelles sont celles qui sont conformes à l'esprit des origines, et d'assurer ainsi la permanence du type primitif de la vie spirituelle, telle que Jésus l'a voulue. C'est ce qu'on appelle son autorité. Cette autorité n'appartient pas à la lettre de la Bible, mais à l'Esprit de Jésus-Christ, qui s'exprime par elle. La seule autorité pour nous, c'est Jésus-Christ ; et si nous parlons de l'autorité de la Bible, c'est parce qu'elle nous met en contact avec le Sauveur. L'autorité n'appartient jamais à un texte, mais toujours à une personne.

b) L'idée que la Bible fait autorité amène beaucoup de chrétiens à la considérer comme un recueil de paroles destinées à mettre fin aux discussions entre chrétiens, en leur imposant les solutions révélées par Dieu lui-même. L'autorité de la Bible s'exerce dans un domaine plus profond, et se manifeste par sa fécondité. Nous ne pensons pas qu'il suffise qu'une phrase soit tirée de la Bible pour que la pensée qu'elle exprime s'impose à notre esprit. Mais lorsque nous nous plaçons loyalement en face de la Bible et de l'idéal religieux qui s'y trouve exprimé, nous devons reconnaître la supériorité de cet idéal et par conséquent accepter que son influence s'exerce sur nous. Nous ne lisons pas la Bible pour y chercher des vérités abstraites, mais pour nous rapprocher de Dieu et de Jésus-Christ et apprendre à leur rester fidèles. La Bible nous révèle son autorité par l'influence qu'elle exerce sur notre vie.

c) Cette autorité de la Bible vient de ce qu'on appelle son inspiration. Nous sentons dans ses pages quelque chose de plus qu'humain ; elle ne nous apparaît pas comme le livre d'une race ou d'une époque, mais comme le livre de l'humanité. C'est qu'elle est le Livre de Dieu, car les hommes qui l'ont écrites étaient remplis de son Esprit, fidèles à sa Parole, et tout entiers orientés vers Lui. Tandis que chez les meilleurs d'entre nous, les préoccupations personnelles ou égoïstes se font jour sans cesse, ils ont apporté dans leur vie entière une telle soumission à l'Esprit qui les inspirait, que l'on trouve sans peine à travers les inexpériences de la parole humaine, la Parole de Dieu qui retentissait dans leur cœur.

Cette inspiration n'est pas toujours égale à elle-même ; mais elle se révèle aux cœurs droits par une évidence joyeuse et convaincante que Calvin appelait « le Témoignage intérieur du Saint-Esprit ».

Genèse 4, 2-16 Le premier crime

Genèse 24,34-54 Une idylle près des sources

I Samu. 7, 31-37 & 42-51 L'héroïsme juvénile

Job 13, 3-12 Le poème du désespoir

Marc 4, 21-34 Les paraboles du Seigneur

Marc 10, 46-52 Une guérison

Apoc. 5, 1-14 Une vision grandiose

La Bible ne contient que fort peu de paroles relatives à sa propre autorité ou à sa propre valeur. Nous donnons ici l'indication de quelques lectures montrant la diversité des récits qu'elle renferme.

4- La Prière (1)

La prière est une des grandes forces spirituelles de l'humanité ; la plus grande parce qu'elle est à la fois la plus haute et la plus simple. Elle exprime ce qu'il y a de plus instinctif dans l'âme des tout-petits, comme ce qu'il y a de plus sublime dans l'âme de Jésus.

Quelle que soit la forme dans laquelle elle s'exprime, elle est toujours l'attente d'une âme qui cherche son Dieu et veut rejoindre sa volonté.

a) La forme la plus naturelle de la prière, c'est la demande. A l'éveil de la vie religieuse, elle fut d'abord le cri instinctif de la peur ou de l'intérêt, et il ne faut pas avoir honte de ce caractère intéressé de la prière à son origine ; il faut seulement la purifier et l'embellir dans l'esprit où l'a fait Jésus lui-même.

Pour le chrétien aussi, la prière est un refuge ; mais à l'angoisse devant les forces matérielles du monde, se substitue l'angoisse devant les grands problèmes et devant les périls de la vie religieuse. La peur peut être noble si c'est la peur de manquer à son devoir.

Enfin le chrétien peut purifier sa prière de tout égoïsme en l'élargissant, en priant pour dissiper non son angoisse propre, mais l'angoisse du monde, comme Jésus le fait dans les trois premières demandes du Notre Père.

b) La demande prend le nom d'intercession lorsqu'elle s'adresse à Dieu en faveur de personnes autres que celle qui prie. Intercéder auprès de Dieu pour ceux que nous aimons est chose naturelle ; même si nous ne demandons pas pour eux une chose précise, nous parlons d'eux à Dieu, nous les plaçons sous sa garde et nous les lui confions.

Tandis que l'âme qui prie semble souvent trouver en elle-même la paix qu'elle reçoit, l'exaucement de la prière d'intercession apparaît nécessairement comme un don de Dieu, dont la fidélité répond à notre appel ; et c'est un magnifique privilège de pouvoir tout demander pour ceux à qui nous ne pouvons peut-être rien donner.

c) On se demande souvent quels sont les biens pour lesquels un chrétien a le droit de prier, et c'est en effet une question qu'on ne peut éviter de se poser. On a dit parfois : il faut prier seulement pour les biens spirituels car les biens matériels ne sont pas dignes d'être demandés à Dieu. C'est là une conception très noble, mais un peu étroite.

Si la prière est l'état d'une âme qui s'ouvre à Dieu, il n'est pas permis de lui interdire ainsi certains domaines ; le croyant doit prier pour ce qu'il a dans le cœur, et montrer à Dieu son âme telle qu'elle est, ou bien il finira par tomber dans l'hypocrisie. Le chrétien doit seulement veiller à ne rien garder dans le cœur qu'il ne puisse faire passer dans sa prière.

C'est notre prière qui doit purifier notre cœur, et non pas notre réflexion qui doit purifier artificiellement notre prière.

Il n'est pas possible de dresser une liste des prières permises et des prières interdites au chrétien, sans aboutir à des choses inhumaines. La même prière qui est choquante pour un homme peut être légitime et même nécessaire sur les lèvres d'un autre. La seule règle que l'on puisse donner est celle-ci : « Dis à ton Dieu tout ce que tu as dans le cœur ; mais prends garde de ne conserver dans ton cœur que des pensées dignes d'être portées devant Dieu ».

Luc 1, 45-55 Un cantique qui est une prière

Matth. 6, 5-10 Vous donc, priez ainsi

Psaume 31, 10-19 En toi je me confie

I Rois 8, 23-40 Que tes yeux soient sur nous

I Rois 8, 41-51 Exauce et pardonne

Lament. 3, 19-58 Attendre en silence

Psaume 124, 1-5 Notre aide est au nom de Dieu

5- La Prière (2)

Nous avons envisagé jusqu'à présent la prière comme une demande ; essayons maintenant de voir ses autres formes et d'en dire les caractères généraux. On peut ainsi préciser divers aspects de la prière ; la prière n'exprime pas toujours devant Dieu nos besoins, mais parfois simplement nos pensées.

a) La prière d'adoration, dans laquelle le croyant se borne à exprimer le sentiment que lui inspire la puissance, la sagesse ou la bonté de Dieu. Certains psaumes sont d'admirables exemples de cette forme de la prière, qui n'est souvent qu'une méditation trop ardente pour rester silencieuse. La prière n'a pas pour but d'imposer à Dieu notre volonté, mais de nous mettre en état d'accepter et de réaliser la sienne ; il est donc naturel qu'elle se repose dans la contemplation des perfections adorables de Dieu. Plus que tout autre, cette prière doit être d'une sincérité absolue et ne rien contenir qui dépasse l'expression spontanée de nos sentiments, et ressemble à un artifice littéraire.

b) La prière d'humiliation, qui est la contrepartie de la prière d'adoration. Au lieu d'exalter Dieu, l'homme s'abaisse lui-même ; ainsi dans les deux cas, il marque la distance infinie entre Dieu et lui. Jésus en fait le type de la prière qui justifie (le Pharisien et le Péager). Ici encore, il faut prendre garde que ce que nous disons de notre misère corresponde bien à un sentiment réel et sincère de nos fautes, de nos torts envers Dieu.

c) La prière d'action de grâces ou de remerciements, par laquelle le croyant exprime à Dieu sa reconnaissance pour les bienfaits qu'il a reçu de Lui. Cette prière correspond à un sentiment trop naturel pour qu'il soit nécessaire de l'expliquer. On peut se demander quels sont les biens pour lesquels on doit remercier Dieu ; ce sont tous ceux dont nous avons le droit de penser en toute conscience qu'ils viennent de Lui. Cependant, il ne faut pas oublier que nos bonheurs sont souvent des privilèges et il faut en remercier Dieu de telle sorte que ceux qui en sont privés puissent entendre notre prière sans en être froissés. Il y a des remerciements qu'on pourrait traduire ainsi : « Mon Dieu, je te remercie de ce que ce sont les autres qui souffrent et pas moi ». Une telle prière n'a pas de sens dans le cœur d'un chrétien.

d) Enfin il est permis de se demander si la prière est, comme on l'a dit souvent, un devoir. Ce mot ne paraît pas heureusement choisi. Un devoir est une chose qu'il faut faire, même si elle vous ennuie ; la prière n'existe vraiment que dans la joie, la spontanéité, la liberté. C'est plutôt un privilège, et le plus glorieux de tous. Ce qui est un devoir, ce n'est pas de prier à tel moment de la journée si notre cœur ne nous y porte pas ; c'est de cultiver en soi l'esprit de prière, de prendre l'habitude de chercher Dieu, de considérer comme le signe d'une vie religieuse insuffisante et d'une âme sans élan les heures de sécheresse où notre cœur ne ressent pas le besoin de trouver Dieu et de lui parler. D'ailleurs la prière ne prend pas toujours la forme d'une parole précise et articulée ; elle n'est parfois qu'un soupir, une larme ; tout effort de l'âme pour rencontrer Dieu est une prière et mérite d'être recherché.

Psaume 104, 1-10 Adoration

Psaume 145, 5-15 Louange

Néhémie 9,32-37 Humiliation

Luc 18, 8-14 La prière qui justifie

Psaume 103, 1-14 Mon âme, bénis l’Éternel

I Tim. 2, 1- 8 Invitation à la prière

Psaume 116, 1-15 Action de grâces

6- L' Esprit de Dieu

Si la prière est un entretien de l'âme avec Dieu, il est naturel qu'après la demande de l'homme, nous envisagions la réponse de Dieu. Pour le chrétien qui a fait de la prière «la respiration de son âme», la réalité de cette réponse ne fait aucun doute ; l'exaucement de la prière est une expérience triomphale qui domine sa vie intérieure, et il lui paraîtrait ridicule d'avoir à démontrer ou même à légitimer sa foi. Elle est liée à tout ce qu'il sait de l'amour de Dieu pour lui. Le Père ne laisse pas tomber dans le silence l'appel de son enfant.

a) A ceux qui n'ont pas cette certitude intérieure, n'avons-nous rien à dire pour éviter qu'ils nous croient victimes d'une illusion, comme si ceux qui écoutent Dieu n'entendaient en réalité que l'écho de leur propre voix ?

Remarquons d'abord que si la réponse que nous croyons recevoir à nos prières est une simple illusion, tout homme qui prie est dans l'erreur et ce sont les hommes qui ne prient pas qui sont dans la vérité. Il est donc à prévoir que ceux qui vivent dans l'erreur auront moins de force, de paix et de joie que les autres, puisque leur vie est fondée sur une illusion. Or c'est le contraire qui se produit.

Il est d'ailleurs absurde de penser que c'est nous-mêmes qui nous donnons ce que nous demandons, dans nos prières, alors que nous prions précisément parce que nous n'avons pu le trouver en nous-mêmes.

b) Cependant lorsque nous demandons à Dieu une chose précise, devons-nous croire qu'il nous la donnera certainement ?

Dieu sait mieux que nous ce qui est bon, et lorsque nous prions il faut toujours le faire comme Jésus, en ajoutant : « Que ta volonté soit faite et non la mienne ». Notre rôle n'est pas de commander mais d'obéir. Il faut donc nous attendre à ce que Dieu réponde souvent à nos prières en nous donnant autre chose que ce que nous lui demandons ; et il faut laisser notre âme ouverte à d'autres réponses que celle que nous désirons et demandons.

c) Mais comment se fait-il que l'abîme qui nous sépare de Dieu n'empêche pas notre prière d'avoir un écho dans son cœur ?

C'est que la prière n'est pas une initiative de l'homme. ce n'est pas nous qui avons eu l'idée de nous tourner vers Lui, c'est Dieu qui a mis dans nos cœurs l'instinct de la prière et nous invite ainsi à nous tourner vers Lui. Ce que nous appelons notre demande est déjà une réponse à l'appel de notre Dieu.

Dieu n'est pas seulement dans la réponse ; il est déjà dans la prière ; c'est son Esprit qui nous

pousse vers Lui. Il n'est pas étonnant que la prière aille jusqu'à Dieu, puisqu'elle vient de Lui.

Nous retrouvons la grande pensée qui est au fond de l'Évangile, que ce n'est pas nous qui avons aimé Dieu, c'est Lui qui nous a aimé le premier.

Psaume 107, 1- 9 Délivrés de la faim

Psaume 107, 10-22 Délivrés des ténèbres

Psaume 107, 32-42 Délivrés de la tempête

Marc 14, 32-43 Ta volonté, non la mienne

II Cor. 12, 1-10 Ma grâce te suffit

Ésaïe 55, 6-11 Dieu n'exauce pas en vain

Romains 8, 26-30 L'Esprit soupire en nous

7- La Communion avec Jésus-Christ

Le mot de communion que nous employons pour désigner le lien qui nous unit à Jésus, indique d'emblée qu'il ne s'agit pas pour nous de copier ses actes, mais de nous approprier le principe même de sa vie. « Porter en nous la vie divine qui s'est manifestée dans la personne de Jésus », nous avons toujours dit que c'était là ce qui faisait de nous des chrétiens. Il est donc inutile de souligner davantage que nous sommes ici au centre même de la vie chrétienne, et que nous devons retrouver dans la communion avec Jésus-Christ ses éléments fondamentaux, l'amour, la foi et l'espérance.

a) La première chose qui frappe dans la personne de Jésus, c'est la puissance d'amour que révèlent sa vie et sa mort ; et il est impossible que cet amour n'éveille pas chez le chrétien un amour semblable.

Cet amour qui s'éveille en présence de la vie et surtout du sacrifice de Jésus est ce qui peut nous incliner le plus fortement à faire effort pour lui ressembler. Aucun commandement, aucune exhortation, ne pénétrerait à la même profondeur dans nos âmes.

b) Dans cet amour, il y a déjà de la foi, c'est-à-dire une confiance absolue dans l'excellence et la fécondité des directions spirituelles de Jésus. Chercher à faire de la vie de Jésus notre vie, c'est s'abandonner entièrement à son influence, c'est reconnaître que rien ne peut venir de son cœur qui ne soit excellent pour le nôtre.

Une telle attitude n'est possible que si derrière l'influence de Jésus, nous reconnaissons l'influence de Dieu lui-même. Cette identité de la volonté de Jésus et de la volonté de Dieu, que nous avons trouvée à la base de la piété de Jésus, a été exprimée de bien des manières par les penseurs chrétiens. Le fond de toutes ces formules, c'est qu'en faisant de la vie de Jésus, le principe de notre vie nouvelle, nous ne recevons pas seulement en nous la plus belle des forces humaines, mais la force même de Dieu.

c) Nous comprenons maintenant ce que saint Paul voulait dire lorsqu'il appelait Jésus « Christ notre espérance ».

Lorsqu'on réfléchit, on se rend compte en effet que la communion entre Jésus et nous, n'est possible que si nous considérons Jésus comme une personnalité encore capable d'agir, s'il est pour nous non un mort mais un vivant. La communion est le signe à la fois de la mort et de la résurrection du Sauveur. C'est au nom de son corps rompu et de son sang répandu qu'il nous invite à le suivre ; cela signifie que son sacrifice a été un des moyens les plus efficaces de créer entre Lui et nous une communion intime de nos âmes, en sorte que sa mort même est le moyen décisif dont il se sert pour faire naître en nous une vie semblable à la sienne. Comme les premiers disciples, c'est en rompant le pain avec Lui que nous reconnaîtrons que le Seigneur est vivant.

Ces hautes vérités sont représentées dans l'Église chrétienne dans la cérémonie de la Sainte-Cène (le Saint Repas), dans laquelle nous retrouvons avec l'émotion des souvenirs chrétiens les plus précieux, trois sentiments fondamentaux de la vie chrétienne : l'amour, la foi et l'espérance.

Luc 22, 7-20 Faîtes ceci en mémoire de Moi

Jean 5, 16-21 Il donne la vie

Luc 10, 38-42 Aux pieds de Jésus

Marc 10, 13-16 Ceux dont le cœur Lui est ouvert

Rom. 6, 1-14 Mourir et vivre avec Lui

Marc 6, 30-44 Donnez-leur vous-même à manger

Jean 6, 25-35 Donne-nous de ce pain là

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Chapitre IV - Les privilèges de la vie divine

Jésus apportait aux hommes « la Bonne Nouvelle » : Dieu les aime et veut les ramener à Lui ; même s'ils se sont égarés loin de la maison paternelle, ils peuvent, comme l'Enfant Prodigue, y revenir et retrouver leurs privilèges d'enfants de Dieu ; ils peuvent être sauvés.

Tout l'ensemble de la pensée chrétienne est dominée par la question du salut. Qu'est-il ? Comment nous est-il assuré ? Dans quel rapport est-il avec la vie, la mort, la résurrection de Celui que nous appelons « Notre Sauveur » ? Telles sont les pensées qui se posent de siècle en siècle devant l'Église.

1- Qu’est-ce que le Salut ?

La plupart des chrétiens se représentent le salut comme la conséquence d'un jugement favorable porté sur nous par Dieu au terme de notre vie. Tout homme doit comparaître devant Dieu pour être justifié ou condamné, à l'entrée de la vie mystérieuse qui sera pour lui une vie de salut ou de perdition.

Cette idée n'est pas entièrement fausse, mais elle est très incomplète. Le salut n'est pas une chose que nous devrions recevoir seulement dans un autre monde ; c'est à la fois une réalité de la vie présente et une promesse pour la vie éternelle. Être sauvé, ce n'est pas être « acquitté » à la fin de sa vie (ce qui nous laisserait dans le doute jusqu'à ce jour) ; c'est être changé aujourd'hui et pour toujours, d'une façon dont on ne peut douter ; c'est être arraché à notre vie de pécheur pour être introduit dans la vie d'enfant de Dieu en vue de laquelle nous avons été créés.

Aux coupables qu'il ramène à Dieu, Jésus dit : « Ta foi t'a sauvé, tes péchés te sont pardonnés » : il ne dit jamais : Ta foi te sauvera, tes péchés te seront pardonnés ; et cependant les paraboles parlent de la croissance, semblable à celle des plantes, par laquelle on arrive au salut.

C'est que le salut est à la fois une chose d'aujourd'hui et une chose de demain ; l'enfant qui vient de naître le porte en lui, mais il n'en possède pas toute la richesse ; bien des fonctions de cette vie, et des plus hautes, lui sont d'abord refusées ; aimer, vouloir, penser ne viendront que plus tard.

L'homme qui a senti s'éveiller en lui la vie que Jésus donne, possède déjà le salut ; il est né à une vie nouvelle ; ni la repentance ou la foi, ni le culte ou la prière, ne sont pour lui ce qu'ils étaient autrefois ; Dieu, le monde et la vie ont pour lui un sens nouveau. Seulement ce changement a des prolongements infinis ; le pécheur entré dans le salut ne le possède pas encore dans sa plénitude ; il l'aura seulement lorsqu'il sera parvenu « à la stature du Christ », ambition qui dépasse nos possibilités pour la vie présente. L'idée du salut ouvre donc des perspectives sur la vie éternelle ; il n'est pas limité aux horizons terrestres, il est nécessairement éternel comme le jugement de Dieu. Seulement ce n'est pas à notre mort ou au jugement dernier, que Dieu le prononcera sur nous, c'est à chaque heure de notre vie, et le salut n'est pas autre chose que la vie avec Dieu, pour le temps et pour l'éternité.

Ésaïe 40,1 8 Promesse de salut

Éphés. 2, 1-10 La Miséricorde de Dieu

Luc 7, 36-50 Va en paix

Luc 15, 1-10 A la recherche des perdus

Luc 19, 1-10 Le salut, aujourd'hui

Luc 13,23-30 Le jugement

Luc 9, 23-27 Sauver sa vie

2- L'œuvre de notre Salut

L'Évangile n'est pas seulement une promesse, il est aussi une invitation : « Venez à Moi ! » Dieu offre aux hommes le salut ; les uns l'acceptent, les autres non. Il y a donc deux volontés en face l'une de l'autre, celle de Dieu et celle de l'homme, soit qu'elles s'accordent, soit qu'elles s'opposent. Quelle est la part de chacune dans l'œuvre de notre salut ?

Peu de questions ont divisé les Églises autant que celle-là ; et cela se comprend car l'attitude du chrétien devant Dieu dépend forcément de la façon dont il croit pouvoir accéder au salut.

a) Le catholique considère le salut comme la récompense accordée à ceux qui ont obéi aux commandements de Dieu et de l'Église. C'est donc l'homme qui est l'auteur de son salut ; « il fait son salut » à force de bonnes œuvres propres à lui valoir des « mérites » qui compensent et rachètent ses péchés. C'est la doctrine du salut par les œuvres (voir page 30).

Cette conception a le tort de considérer le péché d'une façon assez artificielle, comme « un acte qui mérite un châtiment » ; elle considère moins la vie profonde du chrétien que ses actes, et envisage la justice de Dieu d'une façon toute humaine, comme une balance entre les bonnes et les mauvaises actions. La bonté de Dieu et la foi n'y paraissent qu'au second plan, par le fait que Dieu veut bien attribuer les mérites du Christ à ceux qui ont foi en Lui.

b) Pour combattre cette doctrine et pour écarter toute idée de mérite, les Réformateurs et surtout Calvin ont professé la doctrine de la « prédestination », qui répond à certains aspects de la pensée de saint Paul : Dieu a décidé de toute éternité qui serait sauvé et qui serait réprouvé ; et comme tous sont pécheurs et méritent la condamnation, nous n'avons qu'à admirer sa bonté dans ceux qu'Il sauve et sa justice dans ceux qu'Il condamne. Dans l'œuvre du salut Dieu est tout et l'homme rien.

Cette conception est de nature à donner à la vie chrétienne un parfait désintéressement ; puisque ses œuvres bonnes sont inutiles à son salut qui est déjà acquis, le chrétien ne s'attend pas à être payé ; elles sont le fruit de sa reconnaissance et de son amour. C'est ce qui fait la grandeur de cette idée.

c) Cependant la plupart des protestants considèrent l'idée de prédestination comme l'exagération d'une idée juste. Ce qui est essentiel, c'est bien de sauvegarder le désintéressement du chrétien ; mais il n'est pas nécessaire pour cela de réduire à zéro son travail et sa personnalité elle-même.

L'Évangile est une invitation ; ce n'est pas moi qui m'invite, c'est Dieu et s'Il ne m'invitait pas, je resterais dans ma misère ; le salut est la vie du Christ en nous et cette vie ne peut venir que de Lui ; nul ne s'engendre soi-même à la vie. Si Dieu m'offre le salut, c'est parce qu'il m'aime et que je suis fait pour être son enfant. C'est ce qu'on appelle la doctrine du salut par la grâce : le salut est un don gratuit de Dieu. Mais ce don, l'homme doit se l'approprier et en cultiver les fruits, et d'abord l'accepter, croire au pardon qui lui est offert ; c'est pourquoi la formule évangélique complète, c'est le salut par grâce par le moyen de la foi. Une vieille femme convertie par la Mission disait : la foi c'est la main du cœur, c'est-à-dire l'organe par lequel il saisit le salut.

Il ne s'agit plus ici d'un châtiment ou d'une récompense que l'on aurait mérité, mais d'un don reçu par la foi, d'une vie nouvelle qui commence ; le péché est l'éloignement de Dieu, l'état d'une âme qui est déchue de sa dignité d'enfant de Dieu ; le salut est le retour à cette filialité divine, par la grâce de l'amour divin.

Rom. 6, 12-23 Les fruits de la vie nouvelle

Rom. 9, 14-24 La prédestination

Éphés. 4, 17-24 L'homme nouveau

Luc 17, 7-10 Sans mérites

Luc 15, 20-24 ll était perdu et il est retrouvé

Éphés. 3, 1-12 Fils adoptifs par Jésus-Christ

Coloss. 1, 3-14 Fortifiés par la puissance de Dieu

3- Jésus, notre Sauveur

Tous les chrétiens, à quelque Église qu'ils appartiennent, s'accordent pour appeler Jésus « notre Sauveur » ; il importe cependant qu'ils mettent sous ce titre des idées aussi précises que possibles, tout en respectant le mystère qui recouvre à nos yeux l'action de Dieu et ses desseins miséricordieux à l'égard de l'humanité.

a) Il ne suffit pas de dire que, historiquement, c'est Jésus qui est au point de départ de ce grand mouvement de foi en l'amour sauveur que représente le christianisme, qu'il en est le héraut et le messager. Certainement Jésus est l'annonciateur de l'amour divin, mais il est plus que cela, il en est le porteur ou comme dit la Bible, l'incarnation. « Dieu était en Christ, amenant le monde à la réconciliation avec Lui » dit saint Paul. Il faut laisser à l'amour que Jésus a témoigné aux hommes son caractère magnifiquement humain, humain par la faiblesse, la souffrance et la mort qu'il a fait peser sur le Crucifié ; mais il faut aussi savoir qu'il n'est pas seulement l'amour humain le plus beau que l'on puisse concevoir, qu'il est l'amour même de Dieu venant à la rencontre d'une humanité pécheresse.

b) Lorsque l'Église affirme que nous sommes sauvés par les souffrances et par la mort du Christ, lorsque Jésus dit lui-même qu'il est venu pour servir et donner sa vie en rançon, que faut-il entendre par là ?

Il est certain que la vie d'abaissement volontaire, de service et de sacrifice qui fut celle de Jésus trouve son couronnement sur la Croix. La mort de Jésus n'est pas un événement fort, une sorte d'accident de l'histoire ; elle est impliquée dans sa vocation, comme lui-même l'indique dans la parabole des vignerons. L'amour descendant dans le royaume du péché, sait qu'il y trouvera la souffrance et la mort ; et il l'accepte parce que les hommes ne peuvent connaître autrement la profondeur de leur péché et la générosité de l'amour de Dieu.

c) Toutefois ce n'est pas la souffrance elle-même qui nous sauve, mais l'amour dont elle est le gage et le témoin. Quand on dit que la mort de Jésus paie le rachat de nos fautes, il ne faut pas raisonner comme s'il nous sauvait du châtiment, de la souffrance que nous avons méritée et qu'il paierait Dieu pour que celui-ci ne nous le réclame pas ; il nous sauve du péché lui-même, prend sur lui cette souffrance qui est nécessairement au point de départ de tout relèvement et que, depuis la Crucifixion, l'Église a toujours appelée « la mort à nous-mêmes ».

d) Ainsi la mort de Jésus ne serait rien pour nous si elle n'entraînait pas en nous la mort du vieil homme, comme sa résurrection n'aurait pas de sens si elle n'éveillait pas en nous une vie nouvelle ; comme dit saint Paul, « le chrétien doit mourir avec Jésus-Christ et ressusciter avec Lui » Tous les mots que l'on emploie pour exprimer la signification de la mort du Christ : rançon, rachat, rédemption resteront de pâles images, incapables d'exprimer toute la richesse du sacrifice de Jésus, tant que nous n'aurons pas éprouvé la réalité du lien qui unit à la mort du Crucifié, notre mort à la vie intérieure, comme à sa résurrection la naissance en nous de la vie divine.

Ésaïe 52,13 à 53, 3 L'homme de douleur

Ésaïe 53, 4-10 Il a porté nos douleurs

Matt. 20,17-28 En rançon

Marc 12, 1-12 C'est le Fils, tuons-le

Jean 1, 24-34 L'agneau de Dieu

Éphés. 2, 11-22 Il est notre paix

Coloss. 3, 1-11 Ressuscitons avec le Christ

4- L’espérance d'outre-tombe

La vie nouvelle à laquelle le chrétien a été éveillé par Jésus-Christ ne saurait être considérée par celui qui la porte en lui comme limitée aux quelques années que nous avons à vivre sur la terre ; elle porte en elle une espérance d'éternité.

a) Mais cette espérance d'une vie après la mort n'est-elle pas inadmissible du fait que tout exercice de la pensée est lié au fonctionnement du cerveau ?

On entend dire : « La science démontre que la pensée ne saurait exister sans le cerveau ». Une pareille façon de parler n'est pas exacte. Tout ce qu'on peut dire scientifiquement, c'est que pour des êtres organisés comme nous sommes, il n'y a pas de manifestations de la pensée sans l'intermédiaire du cerveau. Supprimez le cerveau, vous supprimez la manifestation de la pensée, mais supprimez-vous son existence ? La science n'en sait rien. Encore cela n'est-il vrai que pour des êtres organisés comme nous le sommes et l'existence d'une vie se déroulant dans une autre organisation n'est pas un problème d'ordre scientifique.

b) Si la vie à venir apparaît comme possible, avons-nous le droit de dire qu'elle est réelle ?

Il faut d'abord renoncer à certains arguments insuffisants et même fâcheux.. Par exemple, il ne faut pas dire que s'il n'y a pas une vie future, le devoir est une duperie ; quand même nous mourrions tout entiers, la vérité vaudrait toujours mieux que le mensonge.

Il faut aussi prendre garde que la plupart des arguments que nous invoquons ne prouvent pas la réalité de la vie future ; ils montrent seulement que cette foi particulière est impliquée dans notre foi de chrétien. Par exemple lorsqu'on dit qu'il doit exister ailleurs un monde juste, parce que celui-ci est trop injuste, cela signifie seulement que si le monde est l'œuvre d'un Dieu juste, il doit comporter plus de justice que nous n'en pouvons trouver dans le monde actuel. De même l'idée que nos affections ne peuvent être brisées pour jamais, n'est juste que si l'amour vient de Dieu parce que Dieu est amour. En réalité, la foi que nous avons en la vie future dépend de celle que nous avons en la valeur et la dignité de la vie humaine. On voit combien il est faux de dire que l'espérance d'une autre vie nous détourne de celle-ci, puisque c'est dans la mesure où nous comprenons la grandeur de la vie humaine que nous croyons à sa prolongation après la mort. On comprend aussi que l'espérance éternelle s'épanouisse surtout dans les milieux chrétiens, où la valeur de l'âme n'est pas jugée d'après nos « vies perdues », mais d'après la victoire à laquelle Jésus nous appelle.

c) Quelle idée peut-on se faire d'une vie au delà de la mort ?

Il y a dans l'amour une protestation instinctive contre la mort ; l'espérance d'outre-tombe portera donc le plus souvent sur le revoir de ceux qui se sont vraiment aimés dans la vie présente. Pour le chrétien, l'espérance éternelle est étroitement liée à l'idée du salut. Les images du ciel et de l'enfer dans lesquelles se résument souvent la pensée biblique relativement à l'avenir ne doivent pas être prises au sens matériel. Le ciel est l'état d'une âme à qui la vie avec Dieu est accordée ; l'enfer est l'état d'une âme à qui la vie avec Dieu est refusée. Encore parait-il difficile de penser que cette séparation puisse se prolonger éternellement et que Dieu, par les moyens innombrables dont dispose sa puissance et son amour, ne ramène pas à Lui les enfants prodigues dont il attend le retour.

Job 14, 1-16 Là où l'on meurt sans espérance

Job 19, 15-27 Malgré tout, j'espère

Psaume 30, 1-12 Enseigne-nous à compter nos jours

Psaume 130 (De profundis) Mon âme espère

Jean 11, 17-31 Je suis la résurrection et la vie

Jean 11, 32-44 Jésus pleure

II Cor. 4, 13-18 Regarder aux choses invisibles

5- Christ, notre Espérance

a) S'il est vrai que l'idée de la vie future s'impose à nous par le contraste entre l'étroitesse de la vie présente et l'ampleur de nos ambitions spirituelles, il paraîtra naturel que la personne de Jésus et la valeur unique de son âme devienne pour nous la grande preuve de la destinée éternelle de l'âme humaine. En fait, la résurrection de Jésus a été le vrai point de départ de la foi en une vie que la mort ne saurait détruire ; les récits qui la concernent sont la plus haute expression de l'impossibilité pour l'âme chrétienne de se résigner à la mort, c'est-à-dire à la séparation de ceux qui s'aiment et à la destruction des valeurs humaines.

Il faut donc analyser ce récit avec le plus grand soin, en se rappelant que la distinction entre l'âme et le corps, qui nous est si familière, était étrangère aux disciples, et qu'ils ne parlaient pas comme nous d'une mort apparente et partielle, mais d'une mort provisoire.

b) Nous possédons quatre récits de la Résurrection, un dans chaque Évangile. Deux autres documents essentiels éclairent, sinon les faits eux-mêmes, du moins leur signification religieuse ; le premier se trouve à la fin de l'Évangile selon saint Luc, l'autre dans la première Épître aux Corinthiens (1 Cor. 15). Ce sont d'ailleurs les plus anciens.

c) Le fond des quatre récits évangéliques reste le même ; mais les détails diffèrent suivant la distance où les écrivains se trouvent des événements ; et l'on peut dire au sujet du tombeau vide : autant il est certain qu'il s'est passé quelque chose de décisif au matin de Pâques, autant il est impossible de reconstruire ce qui s'est passé.

d) Le récit des disciples à Emmaüs, qui se trouve à la fin de l'Évangile selon saint Luc (Ch. 34) constitue un des rares témoins de l'époque où l'Église doutait encore de la réalité de la résurrection et en cherchait la signification religieuse. Dans une forme admirable de poésie et d'émotion, ce récit affirme que tous les témoignages relatifs au tombeau vide ne peuvent pas fonder la foi, aussi longtemps qu'on demande simplement si on l'a vu ou si on ne l'a pas vu. La foi s'affirme lorsqu'on renonce à voir Jésus par les yeux du corps, mais qu'on le cherche par la communion du cœur avec Lui.

e) Saint Paul enfin nous a laissé un chapitre plein d'une haute et pénétrante pensée, où :

1°- Il ne dit rien du tombeau vide ni des visions des femmes ; par contre il parle de la vision dont il eut lui-même le privilège sur le chemin de Damas, dans les mêmes termes que celles qui éclairèrent les apôtres au matin de Pâques.

2°- L'apôtre présente des remarques profondes sur le caractère spirituel de la résurrection, tant en ce qui concerne Jésus qu'en ce qui nous concerne nous-mêmes.

3°- Il lie étroitement la résurrection du Christ et celle du croyant : le sort du Christ, c'est ce que nous espérons pour nous-mêmes ; ce que nous attendons pour nous-mêmes, c'est ce que nous affirmons pour le Christ. Pour lui, il est essentiel de savoir ce qui s'est passé le jour de Pâques, puisque Christ est notre espérance ; mais il est plus essentiel encore de réaliser cette espérance et de savoir que Christ est ressuscité dans nos cœurs.

Marc 15, 42 à 16,7 Le tombeau vide

Jean 20, 11-18 On a enlevé mon Seigneur

Jean 20, 19-29 Heureux ceux qui n'ont pas vu

Jean 21, 15-19 Pais mes agneaux

Luc 24, 13-35 Emmaüs

I Cor. 15, 3-13 La résurrection du Christ

I Cor. 15, 35-57 Notre résurrection (sauter 39-41 & 51-52)

6- L'espérance du Royaume de Dieu

L'espérance personnelle du chrétien pour la vie à venir n'est pas toute l'espérance chrétienne. Comme l'individu, le monde doit être sauvé, et un christianisme qui ne serait qu'un christianisme d'outre-tombe serait un christianisme incomplet.

a) Ce que nous espérons pour notre terre, c'est le royaume de Dieu, c'est-à-dire une terre où Dieu règne, où sa volonté se fasse comme au Ciel. Cette espérance est si essentielle pour le chrétien qu'elle est répétée par deux fois au centre de l'Oraison dominicale. Elle date des Prophètes. Ce sont eux qui l'ont formulée en termes magnifiques et nous ont proposé comme but de notre travail sur la terre, une société dans laquelle ce ne sont pas seulement les individus qui obéissent à la loi de Dieu, mais aussi les collectivités : Églises, États, classes sociales.

La question du Royaume de Dieu se pose dans la pensée chrétienne sous la forme suivante : l'Évangile est-il seulement le principe de la vie individuelle, ou est-il aussi celui de la vie sociale ? Elle trouve son équivalent approximatif dans la pensée laïque sous cette forme : la morale ne s'impose-t-elle qu'aux individus, ou les collectivités (États, Églises) ont-elles les mêmes devoirs ?

Nous croyons que l'Évangile a le secret, non seulement du salut personnel, mais aussi du salut social. Nous croyons donc au Royaume de Dieu, car si nous ne pouvons pas croire que les individus soient voués éternellement au mal, pourquoi le croirions-nous de l'humanité dans son ensemble ?

b) Le Royaume de Dieu étant pour l'histoire humaine un but final, dont la réalité est subordonnée aux desseins mystérieux de Dieu, quel doit être actuellement le programme chrétien ?

D'abord, l'application des principes de l'Évangile à toute la vie, tant sociale qu'individuelle. Il n'y pas pour la vie chrétienne de terrain réservé où elle ne doive pénétrer. Le chrétien n'a pas deux consciences, une pour la vie individuelle, une pour la vie sociale. Il va sans dire qu'il ne doit jamais se servir de puissances contre lesquelles il lutte ; la fin ne justifie pas les moyens. Nous voulons une humanité dans laquelle il n'y a plus de haine, plus de violence, plus de mensonges ; nous ne devons donc recourir ni au mensonge, ni à la violence, ni à la haine.

Ensuite la réalisation d'une société où la vie chrétienne soit possible. Il y a des milieux où l'épanouissement d'un cœur pur, l'affirmation d'une conscience droite, sont impossibles. Le chrétien doit être l'adversaire de tout ce qui rend impossible ou seulement plus difficile l'éclosion de la vie chrétienne dans les âmes.

c) La grande arme du chrétien, c'est l'amour. Jésus n'a voulu combattre que par lui, et pour vaincre le débordement de la haine il s'est cantonné sur le terrain du renoncement et du sacrifice. Le chrétien doit s'inspirer du même esprit. Cela ne veut pas dire qu'il renonce à se dresser contre le mal, et qu'il accepte tout en courbant la tête ; cela veut dire qu'en luttant contre les ennemis de Dieu il aura soin de ne pas se laisser envahir par la haine et perpétuer ainsi en lui ou autour de lui les sentiments mêmes qu'il voulait détruire. Ceux qui ont voulu prendre à la lettre les paroles de Jésus sur le devoir de ne pas résister au méchant se sont trompés ; l'Évangile n'est pas un code mais un esprit, et l'amour doit être viril ; ce n'est pas lorsqu'il refuse de les punir qu'un père aime le mieux ses enfants. Le chrétien travaille à l'établissement du Royaume de Dieu sur la terre en donnant dans sa vie la première place à l'effort désintéressé et en préparant par l'amour la création de personnalités chrétiennes capables de travailler elles-mêmes à l'avènement d'une société fondée sur la justice et sur l'amour chrétien.

Deut. 6, 4-25 Une terre où Dieu régnerait

Ésaïe 5, 18-24 Ce que Dieu a en horreur

Jérém. 7, 21-28 Le royaume du mal

Jérém. 9, 23-24 Fondement du Royaume de Dieu

Ésaïe 62, 1- 9 Paix et sécurité

I Pier. 1, 10-16 La sainteté, fondement du Royaume

Apoc. 21, 22 à 22, 5 La Jérusalem céleste

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Conclusion

1- Pourquoi et comment nous sommes Religieux

Lorsque nous nous interrogeons nous-mêmes sur les raisons que nous avons d'être religieux, nous voyons que les raisons qui nous poussent vers la piété ne sont pas empruntées au raisonnement, mais à notre vie morale. On peut dire d'un mot, que c'est l'impossibilité de nous enfermer dans une vie sans idéal.

a) L'homme ne peut pas vivre avec l'idée que sa vie n'a pas de sens, qu'elle s'en va au hasard et que le soin de son existence matérielle ou de ses occupations professionnelles est toute sa vie. Nous sentons bien que notre vie est quelque chose de plus que cela. Aussi l'homme a-t-il toujours cherché à donner un sens à sa vie.

Mais est-il libre de lui donner le sens qui lui plaît ? L'idéal, la destinée à laquelle nous sommes appelés, ne sont-ils que le reflet de nos fantaisies personnelles ? N'y a-t-il pas une loi de la vie, qui est en nous mais vient de plus haut que nous ? Toute la question religieuse est là. Un homme est religieux quand il sait que sa vie ne lui appartient pas, et quand il vit en conséquence. L'idée du devoir nous conduit aux portes de la vie religieuse ; l'idée de l'idéal, de la destinée, nous y introduit pleinement, car un idéal c'est une pensée ou une volonté qui domine notre vie.

C'est donc à vrai dire la manifestation d'un Dieu. Dieu pour nous n'est pas un étranger qui est à l'origine lointaine du monde ; c'est une force qui est en nous, c'est comme dit l'Écriture, un Esprit, une Lumière, un Amour. C'est sous cette forme là que nous saisissons Dieu d'une façon vivante et pratique ; nous sentons que toute notre vie est liée à Lui, et que s'il fallait renoncer à ce Dieu de nos âmes, il faudrait renoncer en même temps à l'idéal, à l'idée que la vie a un sens et à tout ce qui ouvre à notre vie des perspectives sur l'au-delà.

b) La piété à laquelle nous aboutissons ainsi, que sera-t-elle ?

D'abord elle sera pratique et active. Notre religion ne consiste pas en théories sur Dieu, et encore moins en cérémonies ou en pratiques. Elle sera une orientation de la vie, une forme qui nous aidera à mieux vivre, à vivre comme un homme qui sait qu'il a une destinée à remplir et qui s'y applique. Nous ne connaissons Dieu que par le fait qu'il nous change. Un Dieu qui nous laisserait dans notre misère morale, nous n'aurions pas le droit de dire que nous le connaissons. La vraie religion c'est celle qui change le cœur et élève le croyant.

Notre piété sera large, car rien de ce qui élève l'homme ne peut le séparer de ses frères. Si la religion est en nous quelque chose de vivant, la façon dont nous la comprenons dépend évidemment de notre vie et de nos expériences. Il est donc naturel que chacun ait sa foi. Si nous ne savons pas comprendre et respecter une religion autre que la nôtre, c'est que notre cœur est plein de nous-même et non pas de Dieu. Il n'y a rien de plus large que l'idée de Dieu, en qui doivent se rejoindre tous les croyants, même ceux dont la foi s'ignore ou se cherche encore. « Dieu, dit l'Écriture, est plus grand que notre cœur ».

Enfin notre piété sera joyeuse et libre. Il n'y a pas de religions qui écrasent l'homme devant Dieu. Elles répondent à un certain côté de la réalité religieuse ; mais elles en négligent l'essentiel. L'idée de Dieu pour nous ne doit pas opprimer et rétrécir notre vie, car Il nous appelle à collaborer avec Lui. Mais ceci nous introduit déjà sur le terrain de l'Évangile et du christianisme.

2- Pourquoi et comment nous sommes Chrétiens

Ce qui a entraîné le cœur des hommes, ce qui les a détachés des traditions religieuses d'ordre inférieur dans lesquelles ils étaient enracinés, ce qui les a éveillés à la vie de l'esprit, c'est la personne de Jésus.

a) Si l'on étudie la prédication de Jésus par fragments, on s'aperçoit que tout ce qu'il a dit d'essentiel se retrouve ici ou là dans les écrits de l'Ancien Testament ; ce qui est original, c'est la personnalité qui s'exprime dans cette prédication et en fait l'unité profonde.

Historiquement, le christianisme ne s'est pas constitué autour de la parole de Jésus, mais autour de sa vie, ou plutôt de sa personne ; il s'est présenté tout de suite comme la religion de ceux qui prêchent Jésus, et non de ceux qui prêchent comme Jésus.

Il est encore pour nous la piété de eux qui vivent de Jésus et par conséquent veulent le suivre et lui ressembler. La vie que nous portons en nous vient de Lui et par conséquent doit être de même nature que la sienne et nous conduire au même but.

S'il est vrai que la religion est née en nous du sentiment qu'il existe pour l'homme une destinée morale, et qu'il y a par conséquent un type normal de l'humanité, on peut dire que nous sommes chrétiens parce que nous avons reconnu dans la personne de Jésus l'image de l'humanité fille de Dieu.

b) Quelles sont les caractéristiques de cette humanité ? ou si l'on préfère comment comprenons-nous notre qualité de chrétien ?

· Ce qui caractérise l'humanité chrétienne, c'est d'abord la prédominance accordée sur toutes les autres à l'idée de sainteté ou de perfection. Nous avons dans la vie des intérêts multiples ; le christianisme affirme que l'intérêt spirituel, c'est-à-dire moral ou religieux, doit primer tous les autres. Il ne faut pas dire qu'il supprime ou condamne tous les autres, car Dieu ne veut pas régner sur un désert, mais sur une âme aussi riche que possible ; il faut dire qu'il les domine et même qu'il les inspire. Il est légitime que nous fassions une place à l'intérêt familial, national, intellectuel, artistique, etc..., mais notre Sire Dieu premier servi.

· Le christianisme a d'ailleurs une notion particulière de la sainteté ou de la perfection ; pour lui elle ne consiste pas en l'obéissance, mais dans l'amour. Dieu est conçu comme Père ou comme Sauveur, non comme législateur seulement. Mais ces deux idées ne s'excluent pas. L'amour domine et inspire l'obéissance, il ne la supprime pas. Le chrétien n'est pas sous la loi mais il n'est pas non plus « sans loi », comme dit saint Paul.

C'est sur la puissance de l'amour que compte le christianisme pour éliminer du monde ce qui est contraire à la sainteté ; pour lui le mal n'est pas vaincu tant que le coupable est simplement châtié, mais seulement lorsqu'il est relevé et sauvé.

· L'originalité du christianisme est donc de s'emparer de toute la vie sans en rien sacrifier, mais en dominant, en inspirant tout par la puissance pacificatrice de l'amour. Il n'est donc pas essentiellement une Église, ni un rite, ni une croyance ; il est une conception de la vie et de la valeur relative des choses.

Et c'est parce qu'il trouve et parce qu'il place au centre de la vie une réalité qui a une valeur éternelle, qu'il permet à l'humanité d'envisager une destinée par-delà les limites de la vie terrestre.

3- Pourquoi et comment nous sommes Protestants

Être protestant ce n'est pas professer une religion particulière, c'est être chrétien d'une certaine façon. Nous décrirons seulement ici les principaux traits du christianisme que nous avons trouvés dans les Églises de la Réforme française et qui sont nos raisons de les aimer.

Nous ne prétendons pas que ces traits ne puissent se trouver ailleurs, ni qu'ils se trouvent nécessairement dans toutes les Églises protestantes ; nous disons seulement qu'en fait, nous les avons trouvés dans notre Église et que notre devoir est de travailler à les y maintenir.

a) Ce qui nous plaît d'abord dans le protestantisme, c'est qu'il laisse la première place et même toute la place à Jésus-Christ. Pas d'autre autorité que la sienne, pas d'intermédiaire.

On peut dire que c'est la forme la plus chrétienne du christianisme, ou comme on dit souvent, la plus évangélique, la plus fidèle à l'Évangile. Cette fidélité est le principe du protestantisme, et c'est ce qui explique la place qu'occupe la Bible dans la pensée et la piété protestante. La Bible est le lien permanent entre Jésus et nous, et l'instrument d'un contrôle toujours possible pour chaque fidèle, sur la conformité des enseignements de l'Église et de la prédication de Jésus-Christ.

b) Le protestantisme serait donc infidèle à lui-même et infidèle à Jésus-Christ s'il se laissait détourner de l'esprit largement humain qui se manifeste dans l'Évangile et dans la vie de Celui qui l'a prêché.

Ce que nous aimons dans le protestantisme authentique, c'est qu'il est et veut être une religion qui ne nous sépare de personne. S'il veut fonder une Église qui constitue un milieu favorable à la vie chrétienne et un instrument pour la prédication de l'Évangile, il ne prétend pas enfermer le christianisme et l'Évangile dans cette Église, et déclarer qu'en dehors d'elle il n'y a point de salut.

Un catholique qui garde l'esprit libéral et considère les chrétiens non-catholiques comme des égaux ne peut le faire qu'en abandonnant les principes les plus fermes de son Église. Un protestant manquerait au contraire à son premier devoir, s'il ne gardait un respect fraternel pour toutes les formes de la piété chrétienne. Le principe libéral est aussi essentiel au protestantisme que le principe évangélique.

c) Par une application naturelle, le protestant est conduit à porter son attention sur des réalités plus profondes que l'appartenance à une Église déterminée ou l'adhésion de l'esprit à une croyance. Le protestantisme est la religion de la vie intérieure et de l'action pratique par laquelle celle-ci se manifeste ? « Ce qui sert en Jésus-Christ, c'est d'être une nouvelle créature ». Tout le reste n'a de valeur que comme moyen de stimuler ou la vie intérieure, ou l'action pratique.

Les actes du culte, l'adhésion à l'Église, ne sont rien s'ils ne servent pas à développer en nous l'adoration ou la consécration. Cela seul a une valeur devant Dieu, qui atteint à notre cœur ou qui en jaillit.

Ainsi malgré tous les déficits actuels d'un protestantisme que nous devons sans cesse travailler à améliorer, nous sommes protestants parce que nous trouvons dans cette forme de christianisme une religion qui nous unit à Jésus-Christ, qui ne nous sépare de personne, et qui assigne pour but à notre effort l'épanouissement de notre vie intérieure et de l'action chrétienne qui en manifeste la réalité.

 

 

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