Un paroissien répond à Alphonse N'Goma sur
le travail dominical. Vous pouvez réagir et envoyer vos
contributions, sur ce sujet ou sur un autre, au secrétariat
au 4 rue de l'Oratoire 75001 Paris ou par mail à accueil@oratoiredulouvre.fr
Je me souviens d'avoir eu à
me prononcer par vote en Suisse au sujet d'une loi qui allait
autoriser certains commerces à ouvrir le dimanche. J'avais
alors pris une position religieuse et raisonnablement conservatrice
en votant contre ce projet de loi.
Il y avait à mon sens suffisamment de commerces ouverts
pendant la semaine pour ne pas se priver d'un moment d'accalmie
qui commence le vendredi soir avec le Shabbat juif, continue pendant
le samedi et se prolonge le dimanche, pendant la journée
de culte des chrétiens.
Si le Shabbat est assez bien observé par les juifs, y compris
par les non pratiquants, il n'engendre pas autant de silence dans
nos villes occidentales que la journée du dimanche. Elle
possède encore aujourd'hui une puissance particulière
due notamment à la fermeture des commerces.
À y regarder de plus près, l'enjeu de vouer une
journée au Seigneur et en particulier la journée
du dimanche, (septième jour de la semaine et légendaire
journée pendant laquelle Dieu se reposa après avoir
créé le monde selon la Genèse) ne se limite
peut-être pas à la condition que les magasins soient
fermés.
Une ambiance de recueillement semble s'ajouter au silence. Ne
sent-on pas monter des communautés diverses, chrétiennes
ou non, religieuses ou non, une force invisible, née de
leurs prières et de leurs méditations ?
N'a-t-on pas senti dans notre propre cur une disposition
particulière ce jour là, une certaine disponibilité
que les sons de cloches au loin seraient venues réveiller
?
Le profond silence ne serait donc pas dû qu'au repos ? Mais
peut-être dû au fait que nous nous recentrons davantage
sur notre respiration, lentement, sans urgence, jusqu'à
apprécier le moment présent, ce moment où,
quelle que soit notre confession ou nos convictions, nous pouvons
nous relier à nous mêmes par la prière et
par le chant.
Pour les protestants, le dimanche sera le moment idéal
pour prier le Seigneur, pour prier Jésus, pour les louer
en chantant. Les catholiques y chanteront la Vierge Marie, les
bouddhistes invoqueront Bouddha. L'important sera de se recueillir. L'important
sera de prier.
La prière est alors le grand lien qui nous tient libre
dans l'instant, libre de décider de notre vie, libre de
décider ou non d'être heureux.
Aujourd'hui, on nous répète que notre société
traverse une grave crise. Les plus touchés sont ceux à
qui l'on ne laisse pas le choix. S'ils veulent vivre, il leur
faut travailler. Ceux qui souffrent de la baisse du pouvoir d'achat
se demandent s'ils ne vont pas travailler le dimanche. Aucun économiste
n'a de réponse absolue face à la conjoncture. Chacun
essayera de tirer son épingle du jeu quand il ne s'agira
pas d'éviter tout simplement la faillite.
Tout ce que l'on peut dire en voyant les premières conséquences
de la crise boursière, c'est que la solidarité ne
s'est pas beaucoup manifestée. Le partage est resté
le même, voire s'est atténué.
Si personne n'a la réponse à tant de questions,
si le monde n'a pas de véritable guide qui pourrait ouvrir
la voie de la confiance, du partage, et qui pourrait redonner
l'envie d'être heureux, une poignée d'entre nous
peut cependant se souvenir qu'il reste la force de la prière.
Il nous reste à nous recueillir le dimanche et à
prier pour tous ceux qui souffrent plus que nous, tous ceux qui
sont plus perdus que nous, tous ceux qui sont plus seuls que nous.
Et si chacun d'entre nous se recueille, prie et chante à
la gloire du Seigneur, il y a peu de chance pour qu'il ne nous
entende pas. Si il ne nous entend pas, c'est que nous ne sommes
pas assez recueillis. Alors il faut continuer de prier, de chanter
et de méditer chaque dimanche.
Le dimanche où il nous entend, ce sera vraiment la journée
du Seigneur.
Travis Bürki