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Naissance de La Clairière en 1911
La Clairière
est-elle aussi bien connue par tous les membres de notre Eglise
que c'était le cas autrefois ? On peut en douter. Et parmi
ceux qui la connaissent, certains n'ont-ils pas tendance à
regretter qu'elle ne soit plus identique a ce qu'elle était
à l'origine ?
Il y a certainement beaucoup de vrai dans une telle constatation.
Le " patronage " créé rue Greneta en 1911
par le Pasteur Wilfred Monod avait une seule activité hebdomadaire,
dans laquelle existait un enseignement biblique donné aux
jeunes enfants qui le fréquentaient. Aujourd'hui La Clairière
est devenue un " Centre Social " aux activités
permanentes et diversifiées. Et c'est par son existence plutôt
que par un enseignement proprement dit qu'elle porte témoignage
de l'Evangile.
Il est impossible de regretter cette mutation lorsqu'on en analyse
les causes, car elle correspond au fait que l'environnement social
et humain dans lequel est située la Clairière n'a
presque plus rien de commun - sauf sa localisation - avec ce qu'il
était il y a plus de trois quarts de siècle.
A une population française en presque totalité avait
succédé dès l'entre-deux-guerres une population
plus composite, en grande partie formée d'immigrés,
mais d'immigrés d'origine européenne, notamment d'Espagnols
qui exerçaient des métiers liés à la
proximité des Halles.
Depuis que celles-ci ont été transférées
à Rungis, - mais pas seulement pour cette raison, - une importante
population d'origine maghrébine et africaine est apparue
dans les quartiers de Paris proches de La Clairière. En outre,
la construction du Forum des Halles, ce" chef d'uvre
" (?) de l'architecture souterraine, a eu l'effet - totalement
inattendu pour ceux qui l'avaient décidée - de transformer
les niveaux inférieurs de ce " Forum " en un lieu
de rassemblement d'un très grand nombre de marginaux, jeunes
ou moins jeunes, provenant de toutes les régions de l'hexagone,
coupés de tout encadrement familial, scolaire, professionnel
ou local, et livrés aux multiples tentations, de celles de
la drogue à celle de la délinquance, qui résultent
pour eux de cette situation.
Il faut bien le comprendre, les changements qui se sont produits
dans les activités de La Clairière correspondent à
une adaptation de celle-ci à des besoins qui n'existaient
pas lors de sa création.
Dès l'entre-deux-guerres, les consultations médicales
pour les jeunes enfants et leurs mères, et une aide scolaire,
avaient complété l'accueil des enfants jusque vers
13 - 14 ans au club du jeudi: tout ceci pouvait être le fait
de bénévoles, mais il avait déjà fallu
que le travail de ceux-ci fût complété par celui
d'une assistante sociale rémunérée.
Depuis 1945, s'y sont ajoutés, à l'intention notamment
des femmes maghrébines, l'alphabétisation, le planning
familial, la couture et, au 58 rue Greneta, un club pour les adolescents
devenus trop âgés pour le petit club : ce qui, à
ce dernier égard, ne pouvait être le fait de seuls
bénévoles. Et, depuis la construction du Forum, La
Clairière s'est également consacrée en ce lieu
à une action systématique de " prévention
", dont l'objet est de tenter la réinsertion sociale
des jeunes " paumés " qu'on y rencontre en si grand
nombre.
En somme, à une activité concentrée sur certains
jours de la semaine, et qui pouvait être le fait de bénévoles
(et qui continue de l'être) se sont ajoutées des actions
permanentes, et qui ne peuvent être confiées qu'à
des éducateurs spécialisés et (modestement)
salariés.
Il n'était pas concevable dans ces conditions que le financement
de cette véritable entreprise sociale qu'est devenue La Clairière
continuât, comme autrefois, à ne reposer que sur des
cotisations et des dons d'origine privée et sur ce que notre
Eglise, grâce au produit de sa " vente " et aux
contributions de son diaconat, peut heureusement faire encore pour
boucler le budget de La Clairière. D'où le recours
à des subventions qui proviennent pour l'essentiel de la
Direction de l'Action Sanitaire de l'Enfance et de la. Santé
(D.A.S.E.S.) de la ville de Paris.
Une telle évolution correspond pour une part au fait qu'on
cette fin du 20o siècle, les pouvoirs publics ont pris conscience
de leurs responsabilités dans des activités sociales
qui relevaient autrefois de la seule initiative et du seul financement
privés. Il faut bien comprendre qu'il s'agit là d'un
changement d'ordre général, qui, par exemple, s'est
également produit pour la Fondation John Bost à La
Force. Le budget de celle-ci doit aujourd'hui la majeure partie
de ses ressources à un financement d'origine publique: pour
La Force, les " prix de journée " de la Sécurité
sociale; pour La Clairière, des subventions d'origines diverses.
Il n'en reste pas moins, et c'est ce qu'il faut bien comprendre
que pour La Clairière, comme pour la Fondation John Bost,
il est tout à fait indispensable qu'à ce financement
par le pouvoirs publics vienne s'ajouter un financement par des
dons et des cotisations provenant de personnes privées. Sans
doute la fiscalité qui pèse aujourd'hui sur les revenus
de ces personnes ne permet plus d'espérer, comme c'était
le cas avant la Première guerre mondiale, et même encore
entre les deux guerres, qu'il soit désormais possible à
une activité sociale de quelque ampleur de reposer entièrement
sur la générosité de cotisants' et sur le bénévolat.
Mais le manque de liberté et d'initiative qui correspond
à ce type de finance. ment et d'action présente une
valeur considérable. D'abord, parce qu'elle écarte
la tentation pour l'Etat ou les collectivités territoriales
(régions, départements et communes) de se substituer
purement et simplement à des organismes qui, associés
au service publie, n'en conservent pas moins leur caractère
propre, moins anonyme et plus souple que celui de ce service public.
Et aussi, dans le cas de La Clairière, parce que le fait
que celle-ci soit étroitement liée à notre
Eglise de l'Oratoire, constitue indiscutablement, je puis en témoigner
personnellement, une des raisons de la confiance qui lui est faite
par la ville de Paris.
Est-il besoin de formuler la conclusion des réflexions qui
précèdent ? Il est non seulement souhaitable, mais
absolument nécessaire que le plus 'grand nombre possible
de membres de notre Eglise donnent leur soutien à La Clairière,
soit en apportant leur collaboration bénévole à
celles de ses activités qui n'exigent pas une formation particulière,
soit en contribuant à alimenter son budget, soit de l'une
et l'autre de ces manières. Ainsi, La Clairière, tout
en étant autre chose qu'à ses débuts, continuera-t-elle
de constituer pour l'Eglise de l'Oratoire une forme particulière
du témoignage de l'Evangile.
François GOGUEL
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