/
/
|
Messe
Il est hautement significatif que la tradition
latine et occidentale ait choisi pour désigner le culte le
terme de messe (missa) dont l'origine (dimittere, dimissio) correspond
à un verbe exprimant la dislocation d'une réunion, la
dispersion et le renvoi d'une assemblée. On a donc appelé
le culte tout entier par ce qui lui met fin. Cette appellation originelle
est un rappel très important pour notre compréhension
du culte. On peut y voir un quadruple enseignement:
1. Premièrement, le culte ne saurait se clore et se fermer
sur lui-même, trouver son sens en lui-même, par lui-même,
non seulement parce qu'il est réponse à un appel de
Dieu, mais aussi parce que son entrée et sa sortie (du point
de vue du temps et de l'espace) supposent une... ouverture; parler
par conséquent du culte, c'est parler forcément de
ce qui le précède et le suit, de ce qui l'entoure
et l'environne. René Voeltzel, dans la partie introductive
de son essai consacré au début du culte, écrit
: " Je reviens à cette entrée à l'église.
En disant qu'on n'entre que pour sortir, je brûle d'un seul
coup presque toutes mes cartouches. Cela aurait dû être
la conclusion. Mais il est bon de savoir tout de suite que c'est
suffisamment important pour qu'on en prenne conscience dès
le départ ". Lier ainsi, dans le cadre d'une réelle
ouverture (au sens propre et figuré de ce mot), le début
du culte à sa fin, c'est une question de... bon sens!
2. Deuxièmement, le culte, comme je l'ai déjà
suggéré, comporte un avant et un après, parce
que le culte du dimanche ne peut et ne doit pas être séparé
des moments de recueillement qui ponctuent notre vie personnelle,
familiale, collective. La prière qui précède
et suit, enveloppe et entoure le culte, en fait un acte " pré-médité
", pour reprendre une expression suggestive de Serge Guilmin.
Mais il ne suffit pas, pour marquer la corrélation du culte
avec notre existence de croyant, de le relier ainsi à notre
vie de prière, quels qu'en soient les moments, les lieux,
les acteurs. Il faut encore souligner avec force que, dans la foi,
c'est notre vie tout entière qui est placée devant
Dieu, parce que Dieu nous prend avec lui (comprend) en Jésus-Christ.
Nous sommes invités à saisir chacune de nos vies devant
Dieu. Notre vie personnelle est ainsi un culte authentique que la
célébration publique et dominicale exprime de manière
explicite et en l'intégrant à une réalité
communautaire.
3. Troisièmement, le culte s'inscrit dans notre existence
quotidienne, non seulement spirituelle ou religieuse, mais sociale.
Ce que nous vivons jour après jour a un retentissement dans
le culte. On ne peut participer à un culte en en faisant
une sorte de tour d'ivoire, de vase clos, de cénacle fermé,
d'espace et de temps aseptisés, plus stériles que
protégés, plus propres à la marginalisation
et à l'asphyxie qu'à la retraite.
4. Quatrièmement, et c'est là l'exact répondant
du point précédent, le culte n'a pas sa fin en lui-même
parce qu'il a une dimension missionnaire, que son envoi final, avant
la bénédiction, nous invite à vivre notre foi
dans le monde et l'histoire sans opérer entre l'Eglise et
la société une coupure artificielle et dangereuse.
Limiter le culte et notre existence spirituelle au point d'en faire
une prison et de nier la force du témoignage aussi bien que
notre action dans la cité des hommes est un... contre-sens
! André Gounelle écrit. " Au contraire, le culte
protestant apparaît comme une préparation à
la vie chrétienne. Il se veut fons, certes, source et origine,
mais non culnien, aboutissement ". La vie cultuelle du chrétien
est un va et viens; au " viens et suis-moi " (Lc 13 :
23) répond toujours et simultanément un " va
et toi fais de même " (Lc 10: 37).
Laurent Gagnebin
Réagissez sur le blog de l'Oratoire, faites profiter les autres de vos propres réflexions…
Si vous voulez remercier ou soutenir l'Oratoire : il est possible de faire un don en ligne…
|
|