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La longue marche en vue
de la constitution
d'une vraie paroisse oratorienne
Un décret de mars 1852
institue dans chaque paroisse réformée un conseil
presbytéral. A la suite des agrandissements de Paris, en
1860, qui passe de douze à vingt arrondissements, la capitale
compte cinq paroisses . St Lazare (c'est-à-dire l'Oratoire),
Pentemont, Ste Marie, les Batignolles, Plaisance, puis rapidement
sept paroisses avec Passy et Belleville.
Il aurait été logique de doter chacune de ces paroisses,
qui avaient un ou plusieurs pasteurs attitrés, d'un conseil
presbytéral. Le conseil presbytéral de Paris est unique
et se compose de douze laïcs. Avec l'adjonction des quinze
pasteurs et délégués des paroisses de Versailles,
des Ageux (Oise), de St Germain-en-Laye, de Marsauceux et de Chartres,
il constitue le consistoire de Paris composé de 39 membres,
dont 24 parisiens.
Les libéraux qui représentent un peu moins de la
moitié des membres électeurs parisiens sont systématiquement
écartés du consistoire et du conseil presbytéral
de Paris par la très légère majorité
orthodoxe, majorité qui semble avoir été obtenue
avec les voix des électeurs des nouveaux arrondissements
qui, pour la plupart d'entre eux, touchent des subsides des membres
orthodoxes du diaconat de Paris.
Le courant orthodoxe ne tient évidemment pas à ce
que l'on change cet ordre des choses d'autant plus qu'une nette
majorité libérale se dessine dans la paroisse de l'Oratoire.
Chaque tendance met à profit ses relations personnelles auprès
des gouvernements successifs de Napoléon 111, puis de la
Troisième République. Les libéraux gagneront
la sympathie de l'Empire dans sa phase finale, les orthodoxes seront
soutenus par le gouvernement de l'Ordre moral. L'Union protestante
libérale fondée en 1861 a pour but d'obtenir une représentation
laïque équitable au sein du conseil presbytéral
et du consistoire de Paris. En 1864 le refus de renouveler la suffragance
du pasteur Athanase Coquerel fils met le feu aux poudres. Une pétition
de 5 000 signatures dénonce cette affaire qui a pour but
d'éliminer progressivement les pasteurs libéraux de
l'Eglise réformée de Paris en écartant toute
candidature.
En 1868, les libéraux décident de fonder l'uvre
des prédications protestantes libérales et obtiennent,
non sans peine, du gouvernement l'autorisation d'ouvrir des salles
de prédication. Une autorisation est accordée nominativement
aux pasteurs A. Coquerel fils, Dide et Grawitz. Deux salles sont
ouvertes, la salle St André, 29, cité d'Antin et celle
du 17, rue Richard Lenoir. Elles seront très fréquentées.
Il est à remarquer que les protestants libéraux n'ont
pas entendu constituer une Eglise distincte ni renoncer à
leur place dans l'Eglise nationale. Ils ont continué à
faire usage des temples officiels pour les baptêmes et les
mariages et n'ont jamais administré les sacrements dans les
salles de prédication.
Des incidents tragi-comiques se produisent. Ainsi le pasteur libéral
Martin Paschoud, ami de Lamartine et très introduit auprès
de Napoléon III, est mis à la retraite pour raison
de santé, il devient en 1868, en tant que pasteur le plus
ancien, président de droit du consistoire orthodoxe de Paris
qui n'a pas réussi à l'écarter. Le célèbre
docteur Broca n'arrive pas à se faire inscrire sur le registre
électoral de l'Eglise. Il est obligé de menacer le
conseil presbytéral de se présenter au siège
de l'Eglise avec un huissier de justice.
Le conseil presbytéral de Paris ayant décidé
d'appliquer strictement les modifications apportées par le
Synode national de 1872 aux conditions électorales, les électeurs
libéraux se retirent. Le registre paroissial de Paris se
trouve alors réduit de près de la moitié. Un
registre paroissial non synodal est ouvert par les libéraux.
Il reçoit les noms de 863 électeurs qui élisent
un comité libéral de l'Eglise réformée
de Paris. Un diaconat très structuré est constitué
avec la Réunion protestante de Charité qui à
l'origine regroupe les anciens catéchumènes du pasteur
A. Cocquerel fils. C'est la réunion de quatre comités
(darnes, messieurs, orphelinat Richard-Lenoir, orphelinat de Belleville).
Trente ans après le décret de 1852 on en vient à
une vue plus sereine de la situation ecclésiastique à
Paris. Chaque paroisse va enfin être dotée d'un conseil
presbytéral. L'Eglise de l'Oratoire du Louvre, qui est jusqu'à
cette date l'Eglise centrale de Paris, va devenir l'une des paroisses
de Paris. Le nouveau conseil se réunit pour la première
fois le 23 mai 1882. Les laïcs qui viennent d'être élus
sont libéraux. Nous sommes en présence d'une Eglise
à majorité libérale dont les deux pasteurs,
Recolin et Decoppet, sont orthodoxes. En dépit d'un mouvement
de mauvaise humeur du consistoire qui doit donner son agrément,
le conseil presbytéral choisit un troisième pasteur.
Il s'agit d'Ariste Viguié, professeur à ia Faculté
de théologie de Paris et président du consistoire
de Nîmes. Le conseil presbytéral ne peut le recruter
que comme pasteur auxiliaire rétribué par l'Eglise
de l'Oratoire elle-même, au traitement annuel de 5 000 F,
car il ne s'agit pas d'un poste officiel. Bien accueilli par ses
deux collègues orthodoxes, A. Viguié aura les mêmes
attributions que les autres pasteurs.
Philippe VASSAUX
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