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Jean Monod
(1765-1836)

 


Jean Monod est né à Genève en 1765 deux ans après le dernier Synode du Désert. Son père, le pasteur Gaspard Monod, remplit les fonctions d'aumônier du gouverneur de la Guadeloupe lorsque l'île est occupée par les Anglais en 1759. 11 prêche en français pour les protestants qui y sont établis malgré la Révocation de l'Edit de Nantes. De retour en Suisse lorsque la Guadeloupe est rendue à la France trois ans plus tard, il se fait connaître par plusieurs traductions d'ouvrages anglais.

Sous la direction de son père Jean Monod fait des études classiques brillantes et entre, à dix-sept ans, à l'Académie de Genève en 1783. Consacré pasteur à vingt et un ans, il reste lié avec divers érudits de son temps, notamment Frédéric Bancillon, de Berlin, l'auteur des " Révolutions du système politique de l'Europe " depuis le XVe siècle (4 volumes). Il épouse en 1793 Louise de Coninck et se fixe à Copenhague en 1794 comme pasteur de l'EL-lise française qui existe toujours. Les époux assistent aux attaques anglaises contre le Danemark en 1801 et 1807.

A la mort du pasteur Frédéric Mestrezat, le Consistoire de Paris fait appel en 1808 à Jean Monod, qui va quitter Copenhague pour un ministère de vingt-sept ans. Cet homme modéré, grand admirateur de Samuel Vincent et d'Alexandre Vinet, a su se garder à la fois des hardiesses parfois excessives de la théologie allemande et des étroitesses de l'orthodoxie du Réveil. Il n'a publié qu'un seul de ses sermons, prononcé lors du retour des Bourbons. L'avènement de Louis XVIII est salué avec reconnaissance dans certains milieux protestants car il apporte la paix. Quinze ans plus tard, il se félicite du nouvel ordre instauré par Louis-Philippe. Les sincérités excessives des pasteurs parisiens au début du XIXe siècle nous surprennent quelque peu aujourd'hui !

Jean Monod a collaboré à la Biographie Universelle de Michaud à laquelle il a fourni au moins quinze articles. Il a traduit et préfacé les " Lettres de Reinhard sur ses études et sa carrière de prédicateur " en 1816. Père de douze enfants, il est à l'origine de la branche française des Monod. Quatre de ses enfants deviendront pasteurs. Etranger à la lutte des partis, ce patriarche ne sera pas toujours d'accord avec ses fils sur le plan théologique. Leur affection mutuelle ne sera pas ébranlée pour autant. Son fils Frédéric (17941863) devient pasteur adjoint à Paris en 1819, pasteur en titre en 1832. Son troisième fils Adolphe (1802-1856) sera suffragant à Paris en 1847, pasteur en 1849.

Jean Monod a prêché avec talent et conviction. Tous ses contemporains sont unanimes sur ce point., Il a eu une grande audience en son temps et peut être considéré comme tout à fait représentatif de la tendance pré-libérale qui insiste beaucoup sur la nécessité d'une morale chrétienne, substrat indispensable de la vie spirituelle.

La Bibliothèque de Genève a conservé une importante collection de sermons de Jean Monod, annotés par ses fils Frédéric, Guillaume et Adolphe, qui ont envisagé d'en publier quelques-uns. Ceux-ci, adeptes de la théologie du Réveil, ont fini par y renoncer. Les grandes orientations de la pensée de leur père, qu'ils vénéraient sincèrement, étaient trop éloignées des leurs.

Dans ses " Cinquante Ans de Souvenirs religieux et ecclésiastiques " le professeur de théologie, J. Pedezert, qui ne peut être suspecté de libéralisme, remarque que, si l'ancien pasteur de Copenhague n'était pas un homme du Réveil, les hommes du Réveil l'ont respecté, mais " sa prédication grave et calme comme lui-même était plus propre à fortifier la vertu qu'à nourrir la piété ". Ce n'est sans doute pas ce qu'ont pensé les fidèles de l'Oratoire, qui avaient tout intérêt à arriver à l'heure s'ils voulaient trouver une place assise. Jean Monod a redonné certains de ses sermons plus de vingt fois. Les dames de l'Oratoire, bouleversées par une prédication sur le pouvoir de la charité, sont allées jusqu'à jeter leurs bijoux dans la bourse des pauvres. Il n'est pas surprenant que trois mille personnes aient accompagné Jean Monod jusqu'à sa dernière demeure terrestre le 23,avril 1836.

Nous extrayons du sermon de Jean Monod sur I Thimothée 1/50 (Le but de notre prédication, c'est la charité) le passage suivant qui est toujours d'actualité à une époque où l'on parle de précarité et de nouvelle pauvreté. " Venez donc, bienfaiteurs généreux qui faites la gloire et l'espérance de cette Eglise, venez, elle attend de vous avec confiance de nouveaux efforts et de plus grands sacrifices. Vous tous, mes chers frères, quelle que soit la mesure de vos facultés, que chacun se livre aux mouvement de son cœur; que chacun se taxe, que chacun apporte son offrande; que personne ne se repose sur les autres ou ne se croit dispensé de donner par la modicité du don qu'il peut présenter... Nous n'aurons pas la douleur d'être témoins journaliers de souffrances que nous ne pourrons pas soulager ".

Philippe VASSAUX

 

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Article tiré du bulletin de l'Oratoire du Louvre à Paris


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