« Vous le voyez, benoîte Angèle – dis-je – je reste auprès de
vous ;… mais ne croyez pas que ce soit par amour…
– Ô non ! je sais… répondit-elle.
–… Mais, Angèle, voyez ! m’écriai-je avec un peu d’espoir : onze heures presque ! Oh ! comme l’heure du culte est passée ! »
Alors, en soupirant, elle dit :
« Nous irons à celui de quatre heures. »
Et tout retomba de nouveau.
Angèle eut à sortir.
– Regardant par hasard l’agenda j’y vis l’indication de la
visite aux pauvres, je m’élançai vers le bureau de poste et
télégraphiai :
« Oh ! Hubert ! – et les pauvres ! »
Puis rentré j’attendis la réponse en relisant le Petit Carême.
– À deux heures je reçus la dépêche. – On lisait : « Merde,
lettre suit. »
– Alors m’envahit plus complètement la tristesse.
– Car, si Hubert s’en va, gémis-je – qui viendra me voir à
six heures ? Paludes terminé, Dieu sait ce que je m’en vais
pouvoir faire. – Je sais que ni les vers ni les drames… je ne les
réussis pas bien – et mes principes esthétiques s’opposent à
concevoir un roman. – J’avais pensé déjà à reprendre mon
ancien sujet de POLDERS – qui continuerait bien Paludes, et ne
me contredirait pas…
À trois heures, un exprès m’apporta la lettre de Hubert ; on
y lisait : « Je remets à tes soins mes cinq familles indigentes ; un
papier qui viendra te donnera leurs noms et les indications suffisantes ; – pour les autres diverses affaires, je les confie à
Richard et à son beau-frère, car toi tu n’y connaîtrais rien.
Adieu
– je t’écrirai de là-bas. »
– Alors je rouvris mon agenda et sur la feuille du lundi,
j’écrivis : « Tâcher de se lever à six heures. »
… À trois heures et demie, j’allai prendre Angèle ; – nous
allâmes ensemble au culte de l’Oratoire.
À cinq heures – j’allai voir mes pauvres. – Puis, le temps
rafraîchissant, je rentrai – je fermai mes fenêtres et me mis à
écrire…
À six heures, entra mon grand ami Gaspard.
Il revenait de l’escrime. Il dit :
« Tiens ! Tu travailles ? »
Je répondis : « J’écris Polders… »
oOo