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Fati Traoré, la beauté de l’énergie

 

Fati refuse de faire la vedette et ne voulait pas que l’on parle d’elle. Le narcissisme et le culte de la personnalité ne sont pas sa tasse de thé. Belle, impeccablement élégante et vêtue de couleurs aussi chatoyantes que son sourire, elle m’accueille dans « sa case », un agréable appartement situé dans un immeuble du Marais construit avec…les pierres de la Bastille. Sa petite chienne y gambade joyeusement. Nous voulions absolument vous la faire rencontrer, et il a bien fallu qu’elle se fasse à l’idée que, oui, nous allons parler d’elle.

Rencontrer Fati, c’est avoir l’impression de retrouver une copine de collège que l’on a quittée la veille, avec qui on partage quantité de souvenirs émouvants ou drôles, et avec qui la conversation démarre au quart de tour, sans afféteries ni sous entendus.

Une surdouée venue d’Afrique

Elle est originaire de Côte d’Ivoire et a eu la chance d’avoir un père à l’esprit ouvert et moderne qui a poussé également ses enfants, filles ou garçons, à entreprendre des études. En France ou en Afrique, cela n’allait pas de soi, à cette époque. Quelle époque ? Fati qui enchante par sa jeunesse et sa joie de vivre a 73 ans, ce qui semble proprement incroyable.

Donc, envoyée en France par ses parents afin de suivre des cursus qui n’existaient pas alors en Afrique, cette surdouée devient médecin, spécialiste en parasitologie, et consacre sa vie professionnelle à la recherche et à l’enseignement. Elle me raconte d’étranges thrillers parasitologiques ayant pour héros des mollusques d’apparence anodine qui, dissimulés dans le cresson sauvage, vous transforment le foie en passoire. Mais aussi des travaux de commandes en sciences de la nutrition destinés à prouver, en faisant déguster des vins de Loire à des rats richement nourris, que le mélange des corps gras et de l’alcool n’est pas bon pour la santé.

Bénévole à la Clairière

On devine, en filigrane de son récit, la difficulté pour une femme, même à ce degré d’excellence, de mener une carrière à la hauteur de ses capacités. Le combat est-il gagné, d’ailleurs…Comptons donc les femmes chefs d’entreprise ou ministres. C’est ce type de lutte ajouté à une éducation rigoureuse, qui a forgé ce caractère sans faille et cette volonté de pousser les autres femmes à faire reconnaître leur véritable valeur, d’abord en se considérant libres, ensuite en devenant audacieuses et autonomes.

Depuis sa retraite, Fati a rejoint les équipes de bénévoles de la Clairière, dont elle avait entendu parler presque par hasard. Une femme aussi active n’envisageait pas de passer sa retraite à se croiser les bras. C’est donc vers les autres femmes qu’elle porte son regard, et pour leur être utile qu’elle mobilise son savoir et son énergie. Femmes issues de l’immigration ou en grande difficulté, infantilisées ou déroutées par le mode de vie énigmatique auquel elles se trouvent confrontées.

Elle encourage la curiosité

Que devenir lorsqu’on ne sait ni lire ni écrire ? Comment utiliser le moindre instrument, comment retrouver son chemin si l’on ne connaît pas l’itinéraire ? Comment faire ses courses ? Comment même oser poser une question tant on est ligotée par la timidité ou paralysée par la honte ? Peut-on se débrouiller si l’on ne parle pas la langue du pays où l’on se trouve, et que l’on doit s’en remettre aux enfants pour la traduction ? Quel respect attendre alors de ses enfants et quelle autorité reste possible ?

Fati insiste sur la nécessité d’inculquer aux enfants le respect de l’autorité et le goût de l’effort. (Elle sait de quoi elle parle, elle a élevé deux enfants tout en travaillant). C’est à ces obstacles qu’elle donne à ces femmes le courage de s’attaquer. L’alphabétisation, le soutien scolaire, et plus encore l’insertion sociale sont devenus son souci.

Plusieurs fois par semaine, elle leur apprend à dépasser leurs limites pour se débrouiller face aux machines à affranchir de la poste, aux guichets de la mairie, aux démarches administratives complexes. Elle ne se contente pas de conseils, mais prodigue une formation pratique à base de démonstrations (elle n’est pas scientifique pour des prunes). Une fois osé le premier pas, tout devient possible. Elle encourage aussi cette vertu indispensable : la curiosité. Il ne suffit pas d’acquérir des automatismes, il faut aussi apprendre à s’étonner, à poser des questions, à obtenir des réponses.

Le véritable souci de l’autre, l’empathie vraie, sont aussi éloignés que possible de la pleurnicherie et de l’apitoiement mollasson. Fati, parfois, leur remonte copieusement les bretelles. Elle a la langue bien pendue, on le lui a quelquefois reproché, mais elle considère que l’on ne doit pas renoncer, surtout si les problèmes sont grands.

Elle n’aime pas parler d’elle

Ne pas connaître le fonctionnement de son corps alors que l’on est mère de famille, ne pas s’opposer à la tyrannie domestique, faire l’autruche devant les dangers possibles, voilà à ses yeux les véritables embûches, sur lesquelles elle insiste et pour lesquelles elle invente des modes de réponse adaptés. Mais elle sait aussi organiser des loisirs, trouver des occasions de distraction : déjeuners en commun où elle leur apprend, avec l’air de ne pas y toucher, comment se comporter à table, voyages en bateau-mouche sans mari et sans enfants…

Elle reste, cependant, ferme sur le fait que le travail du bénévole et la vie privée doivent demeurer strictement étanches, sous peine de perdre autorité et efficacité. La solidarité et l’assistanat ne lui paraissent pas superposables, et ce dernier lui paraît rien moins que souhaitable. Dissoudre la barrière des cultures n’est pas assimilable à l’effacement de toute vie privée. Fati est trop indépendante pour souffrir que quiconque soit dépendant. Son sens du service est profond, mais elle sait que la source de l’énergie est dans une vie intérieure qui doit être préservée.

C’est sans doute pour cette raison qu’elle n’aime pas parler d’elle, mais lorsqu’elle s’y résout, c’est un feu d’artifice d’intelligence et de vivacité, un rire joyeux, une gestuelle gracieuse. Elle vous entraîne dans ses souvenirs, évoque l’Afrique, la culture Bambara, la personnalité exceptionnelle d’un père qui lui a enseigné que la droiture et la rigueur sont les armes les plus importantes pour qui sait mener les vrais combats.

Anne Biroleau-Lemagny

 

 

 

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Article tiré du bulletin de l'Oratoire du Louvre à Paris

 

 

 

 

 

 

 

 

Fati Traoré


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