Comment répondre à la question
Lorsque le grand rabbi Israël
Baal Chem-lrov devait répondre à une question difficile,
il avait pour habitude d'aller se recueillir à un certain
endroit dans la forêt ; là, il allumait un feu, récitait
une certaine prière et le miracle s'accomplissait il savait
comment répondre à la question !
Plus tard, lorsque son disciple, le célèbre Maquid
de Meïeritch, devait lui aussi répondre à une
question ou à une difficulté que traversait sa communauté
ou le peuple juif dans son ensemble, il se rendait au même
endroit dans la forêt et disait : - Maître de l'univers,
prête l'oreille. Je ne sais pas comment allumer le feu,
mais je suis encore capable de réciter la prière.
- Et le miracle s'accomplissait.
Plus tard, le rabbi Moché-Leib de Sassov, pour trouver
réponse aux questions difficiles et sauver son peuple,
allait lui aussi dans la forêt et disait : - Je ne sais
comment allumer le feu, mais je peux situer l'endroit, cela devrait
suffire. - Et cela suffisait : là encore le miracle s'accomplissait.
Puis ce fut le tour du rabbi Israël de Rizbin de répondre
aux questions difficiles. Assis dans son fauteuil, il prenait
sa tête entre les mains et parfait à Dieu : - Je
suis incapable d'allumer le feu, je ne connais pas la prière,
je ne peux même pas retrouver la forêt. Tout ce que
je sais faire, c'est raconter cette histoire. Cela devrait suffire.
- Et cela suffisait.
De l'interprétation ...
Cette histoire hassidique très connue peut être lue
comme une métaphore de notre relation à la Bible.
Il y a bien longtemps, des hommes ont été capables
de percevoir ce que Dieu a à dire aux hommes. Ces hommes
étaient exceptionnels, non pour leurs qualités morales
- certains d'entre eux étaient des filous ou des vaniteux,
ou de jeunes hommes sans expérience. Mais pour leur capacité,
que Dieu leur avait donnée, à soulever légèrement
le voile qui le cache aux autres hommes.
Cette expérience les a amenés à raconter
à parler, à agir : ils ont donc interprété,
avec leur intelligence et leur culture, ce qu'ils ont cru percevoir
de l'autre côté du voile.
Soit ils ont écrit eux-mêmes l'essentiel de leur
expérience et de leur vie, soit des disciples, ou des disciples
de disciples l'ont fait à leur place. Et bien sûr,
chacun a interprété l'expérience originale
à sa manière.
Ces écrits ont été la plupart du temps remaniés,
corrigés, réorganisés par des écrivains-interprètes
pour qu'ils soient transmis de génération en génération.
Et puis des copistes et des traducteurs, qui ont eu leur propre
facture-interprétation, ont permis à d'autres hommes
parlant d'autres langues dans d'autres cultures, d'avoir accès
à ces écrits.
Enfin, avant même que nous n'ajoutions notre propre interprétation,
des générations nous ont précédés
et ont apporté la leur qui nous est bien utile.
À chaque interprétation nouvelle et au fil des siècles,
quelque détail a pu se perdre ou se déformer, mais
le miracle s'est toujours produit : la Parole de Dieu, devenue Écriture,
a atteint des hommes se posant des questions.
Reste pour chacun d'entre nous cette ultime question .- saurais-je
raconter l'histoire ?
Jean-Michel Perraut
Réagissez sur le blog de l'Oratoire, faites profiter les autres de vos propres réflexions…
Si vous voulez remercier ou soutenir l'Oratoire : il est possible de faire un don en ligne…
|