Ressuscite et avance joyeusement

( Actes des apôtres 3 :1-11 )

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Culte du dimanche 13 juin 2010 à l'Oratoire du Louvre
prédication du pasteur Marc Pernot

Si nous sommes ici, dans l’Oratoire ce matin, c’est que nous voulons remercier Dieu d’avoir accompli des miracles pour nous, comme cet homme qui saute de joie dans le temple de Jérusalem.

En effet, chacun de nous est d’abord un miracle d’évolution. Comment est-ce que de la matière toute bête, des atomes qui auraient pu n’être que de la poussière, ou même seulement une bûche, comment cette matière a pu devenir l’être capable d’aimer, capable de rêver d’un monde meilleur, capable d’inventer des choses jamais vues, capable de blaguer et de rire ? Cette évolution est un miracle qui laisse pantois. Comment ces milliards de cellules élémentaires peuvent rester unies et collaborer d’une façon aussi merveilleuse ? Cela est stupéfiant.

Chacun de nous est un incroyable miracle d’évolution, un miracle fait de la rencontre de ces cellules mais aussi d’une synthèse de ce que nous avons reçu de notre famille et de mille autres rencontres et informations diverses.

Oui, la vie est un miracle. Ouvrons les yeux pour voir l’incroyable beauté de la vie, afin de ne pas voir simplement tout ce qui ne va pas, mais rendons grâce à Dieu, déjà, pour ce qu’il y a de beau, pour ce qu’il y a de merveilleux, il y a vraiment de quoi sauter de joie, comme le monsieur de cette histoire de la Bible.

Mais ce n’est pas tout. Il y a plus, bien plus encore.

Comme cet homme déposé sur le trottoir par ses amis, nous ne sommes encore qu’à moitié vivant. Quand nous étions un bébé, nous n’étions pas libres de grand chose. Nous étions, menés par le bout du nez : par nos instincts, par notre caractère et nos humeurs, et nul n’aurait pu nous en vouloir, nous avons tous été comme cela quand nous étions bébé, et nous n’avions pas la liberté de faire mieux. Même encore aujourd’hui, dans une certaine mesure, nous ne sommes pas tellement libres.

La liberté ne va pas de soi. Même maintenant, de quoi sommes nous libres, en réalité ? Le moindre de nos progrès est un miracle. Et nous connaissons, bien souvent, le sentiment d’être incapable d’avancer. Comme dans ce rêve que nous faisons parfois, quand nous avons de la fièvre, de ne pouvoir marcher librement, d’être pris dans une atmosphère qui ressemble à du miel collant.

« Lève-toi et marche », lui dit Pierre. Littéralement, il y a marqué dans le texte grec « ressuscite et avance ». L’homme n’était qu’à moitié vivant, il a des jambes, des chevilles et des pieds, mais ça ne marche pas, il n’a pas la liberté d’avancer, pas le droit d’entrer dans le temple, pas la liberté de se réjouir devant Dieu.

Qui donc nous sauvera de nos chaînes, de ce manque de contrôle sur nos propres facultés ? Qui nous libérera ? Nous-mêmes ? Peut-être un peu, mais nous savons que nos possibilités sont très limitées. Des amis ? Ça aide, mais est-ce suffisant pour nous libérer à l’intérieur de notre propre tête ? Alors Dieu pourrait nous ressusciter et nous libérer ? Sans doute. Dieu seul peut vraiment le faire, mais encore, le peut-il vraiment toujours ? Et comment ? Relisons donc ce récit de libération.

À mon avis, il est bon de commencer en nous considérant d’abord comme cet homme largement privé de liberté. Car c’est là d’où nous venons, c’est là où nous en sommes encore un peu. Dans un second temps, nous pourrons nous mettre à la place de Pierre et de Jean qui sont capables d’avancer, eux, et capables d’aider un autre à être libéré, ressuscité par Dieu.

Avec cet homme handicapé, acceptons d’avoir besoin des autres, n’ayons pas peur d’être porté, n’ayons pas peur de demander de l’aide. Cela demande du courage et de l’humilité, c’est vrai, et nous aimerions mieux être celui qui peut aider, nous aimerions mieux ne pas avoir à supporter peut-être le regard méprisant de celui qui passe et nous considère comme moins que lui. Mais bon. C’est comme ça, sans cette humilité nous sommes coupés de ce que pourraient nous apporter les autres, et dans ce cas, même Dieu aura bien du mal à nous aider.

Même le plus doué des hommes ne s’est pas fait tout seul. Il n’y a donc pas de honte à reconnaître que nous avons besoin d’aide pour avancer. Comme ce paralytique, nous avons été portés par d’autres, rt ild noud ont déposé à la porte de notre vie. Sachons donc, comme cet homme, recevoir de l’aide quand nous ne pouvons avancer, et demander de l’aide quand nous ne pouvons nous nourrir.

Nous sommes à la belle porte de notre vie. Une libération nous est donnée, une résurrection est à vivre maintenant.

Cet homme n’est pas très doué pour espérer, mais quand même il espère un tout petit peu, il demande le strict minimum, mais quand même il cherche à nourrir sa vie, il espère comme il peut, il se laisse porter, il se fait porter par des amis, et il regarde autour de lui, il cherche. C’est bien.

Parfois, nous avons tendance à nous lamenter, certaines personnes restent des années durant à se lamenter sur tout ce qui ne va pas, sur ce qui manque, sur la méchanceté des gens, sur le gouvernement, à grogner contre les plus riches que nous et contre les plus pauvres que nous, contre les français et contre les étrangers, contre ceci et cela… et ça n’arrête jamais.

Il faut briser ce cercle qui nous enferme, ce tourbillon de déception et de colère qui nous aspire vers le fond. Mais ce n’est pas facile. C’est hors de nos forces. Nous avons tout pour être heureux, mais à la manière de cet homme qui a des jambes et qui ne peut pas marcher. Cet homme est là, incapable de bouger par lui-même. Peut-être qu’il énerve les passants avec ses appels, avec sa souffrance, avec son handicap. Il est lui-même peut-être énervé par la santé et la richesse des autres, énervé contre la vie, contre Dieu. Et c’est bien normal.

Mais quand même, il espère un petit peu, et c’est déjà ça, même s’il espère le minimum, quelque chose pour vivre aujourd’hui. Il se fait placer sur le chemin du temple. Il n’est pas capable de prier lui-même, il se sent peut-être rejeté par Dieu, lui le handicapé, lui qui se sent ver de terre, utile à rien et à personne. Mais quand même, il est là, à la porte du temple, et cette porte est belle. Cette porte, c’est le Christ, cette tendresse de Dieu et cette force de Dieu qui ensemble nous ressuscitent. Il ne peut pas encore vivre la bénédiction de Dieu, mais déjà, il s’est placé à la porte par laquelle d’autres entrent parfois en présence de Dieu. Et nous sommes ce matin, nous aussi, à cette porte, comme cet homme, comme le petit chien qui est sous la table et qui espère qu’il tombera quelques miettes. L’homme est à la porte, lui qui n’arrive pas à entrer en relation à Dieu, il espère quand même, en étant là, bénéficier d’une miette de bénédiction.

Il espère et il regarde. Il voit Pierre et Jean, il demande machinalement l’aumône.

Pierre et Jean lui disent « regarde-nous ». Et déjà, il s’ouvre à une espérance plus grande.

  • La foi c’est d’abord cela : se placer sur le chemin et espérer une miette de bénédiction.
  • La foi, c’est ensuite cela : c’est un appel à voir, à bien regarder, à discerner une espérance plus grande mais encore indécise. Entendre et voir la bénédiction quand elle passe à nos côtés, et elle passe, repasse, je vous le garantis.
  • La foi c’est ensuite accepter que la bénédiction ne s’annonce pas comme ce que l’on avait espéré. L’homme attendait une pièce, peut-être un instant a t-il espéré même un billet, quand Pierre lui annonce qu’il n’aurait rien de tout ça, il aurait pu se refermer.

L’homme regarde Pierre et Jean, il entend la bénédiction « ressuscite et avance », et il sent le geste qui le relève. La foi, c’est ensuite cela, c’est faire l’expérience qu’une liberté nouvelle nous est offerte en cadeau, une liberté que nous n’attendions pas.

Ce Pierre et ce Jean, c’est pour chacun de nous, d’abord, un Pierre et un Jean qui sommeillent en nous. C’est l’homme de foi en nous, même si ce n’est qu’un commencement de début de foi, c’est l’homme de foi en nous qui monte pas à pas vers la présence de Dieu comme Pierre et Jean montaient vers le temple. Ce Pierre et ce Jean, c’est cette petite voix en nous, une voix qui vient de Dieu et qui nous dit que le monde a besoin de notre lumière. Ce Pierre c’est une force et un enthousiasme qui sommeillent en nous, une vigueur comme celle de Pierre dans les évangiles, qui se lance souvent un peu trop vite et fait parfois un peu n’importe quoi, mais qui au moins se lance, ose, se jette à l’eau… Jean, lui, c’est l’ami de Jésus, c’est celui qui ose lui dire ce qu’il a sur le cœur même s’il a un peu honte, ce Jean c’est celui qui fait l’expérience de la tendresse de Dieu pour nous.

Rentrons en nous-mêmes et voyons ce Pierre et ce Jean qui existent, il faut regarder, bien regarder l’un et l’autre, la force et la douceur de la foi naissante en nous, l’enthousiasme et la paix, même si ce n’est encore qu’un frémissement. Il faut la tendresse de Jean qui semble dire à l’homme encore inachevé : qu’il est aimé ainsi, aimé déjà même s’il est inutile, même s’il est dérangeant, même s’il est incapable encore de prier Dieu. Il nous faut à la fois faut la tendresse de Jean et le dérangement de ce geste de Pierre qui nous relève, nous fait bondir et sauter en l’air d’enthousiasme.

Mais ce Pierre et ce Jean en nous doivent être éveillés par des rencontres avec d’autres personnes qui parlent et agissent au nom de Jésus-Christ, par un Pierre qui nous saisit et nous aide à nous relever, ou par un Jean qui nous dit la tendresse de ce Dieu qui nous aime. Mais tant que nous ne reconnaissons pas ces deux dimensions comme au moins un petit peu vivantes à l’intérieur de nous-mêmes, personne ne pourra nous ressusciter de force, pas même Dieu.

L’homme est relevé. C’est un don de Dieu qu’il saisit par le simple regard, qu’il saisit par la foi. L’homme est debout.

Mais cette résurrection n’est qu’une étape, et pas la dernière. La bénédiction donnée était en deux volets : « ressuscite et avance », c’est Dieu qui ressuscite, il lui reste à avancer avec lui. Le Christ est la résurrection et la vie. La résurrection nous est donnée, ou plutôt des étincelles de résurrection nous sont offertes un peu plus chaque jour, il nous reste à les vivre dans une liberté nouvelle.

Il y a de la joie à vivre, à exprimer, à prier. Il y a déjà tant de belles choses, et aujourd’hui, un progrès a déjà été reçu. Et puis il y a encore bien de nouvelles belles choses à vivre et à faire. Maintenant l’homme pourra lui aussi être un petit peu celui qui réveille le Pierre et le Jean à l’intérieur d’autres personnes. En effet, il peut maintenant monter en présence de Dieu pour chanter ses louanges, et c’est dans la mesure où nous montons, dans la mesure où notre enthousiasme pour Dieu et notre expérience de la tendresse de Dieu progressent que nous pouvons aider parfois telle ou tel de nos proches à s’éveiller un peu, à ressusciter, s’ils le veulent bien…

Amen.

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Pasteur dans la chaire de l'Oratoire du Louvre - © France2

Pasteur dans la chaire de
l'Oratoire du Louvre
© France2

Lecture de la Bible

Actes 3:1-11

Pierre et Jean montaient ensemble au temple, à l’heure de la prière : c’était la neuvième heure.

2 Il y avait un homme boiteux de naissance, qu’on portait et qu’on plaçait tous les jours à la porte du temple appelée la Belle, pour qu’il demande l’aumône à ceux qui entraient dans le temple.

3 Cet homme, voyant Pierre et Jean qui allaient y entrer, leur demanda l’aumône.

4 Pierre, de même que Jean, fixa les yeux sur lui, et dit: Regarde-nous. 5 Et il les regardait attentivement, s’attendant à recevoir d’eux quelque chose.

6 Alors Pierre lui dit: Je n’ai ni argent, ni or; mais ce que j’ai, je te le donne: au nom de Jésus-Christ de Nazareth, lève-toi et marche. 7 Et le prenant par la main droite, il le fit lever. Au même instant, ses pieds et ses chevilles devinrent fermes; 8 d’un saut il fut debout, et il se mit à marcher. Il entra avec eux dans le temple, marchant, sautant, et louant Dieu.

9 Tout le monde le vit marchant et louant Dieu. 10 Ils reconnaissaient que c’était celui qui était assis à la Belle porte du temple pour demander l’aumône, et ils furent remplis d’étonnement et de surprise au sujet de ce qui lui était arrivé. 11 Comme il ne quittait pas Pierre et Jean, tout le peuple étonné accourut vers eux, au portique dit de Salomon.