Moïse : quelle mission, « nom de Dieu » !?( Exode 3:7-15 ) (écouter l'enregistrement - culte entier - voir la vidéo) Culte du dimanche 6 octobre 2013 à l'Oratoire du Louvre Je ne sais pas pour vous, mais moi, je comprends Moïse : je comprends en effet, qu’il ne puisse pas totalement saisir l’évènement qu’il vit ou tout au moins en être en partie réfractaire. Je ne vous l’ai pas relu, mais quelques versets avant notre lecture, notre cher Moïse se retrouve quand même, alors qu’il s’occupe du troupeau de son beau-père, face à un ange du Seigneur qui apparait dans une flamme de feu, du milieu du buisson. Et comme si cela ne suffisait pas, le buisson était bien en feu mais le buisson n’était pas dévoré. Je mets au défi nos jeunes mais aussi nos anciens éclaireurs et éclaireuses unionistes à faire un jour un feu sans que le bois qui brûle ne soit ainsi dévoré… Bref, Moïse se retrouve face à une surnaturelle lumière qui éclaire et enflamme finalement sa vie. Comme pour nous ce matin, cette lecture sans nous brûler, sans nous consumer nous entraîne peut-être vers de nouveaux chemins. En effet, force est de constater avec ces quelques versets mais j’aurai pu aussi vous lire les versets suivants qui pourraient relever plus de la magie ou du surnaturelle présentés dans certains cirques ou théâtres parisiens quand le bâton devient serpent une fois jeté à terre et redevient bâton une fois repris dans la main de Moïse… Oui, avec divers passages de ce livre de l’Exode et de l’ensemble des Ecritures, force est de constater que finalement le possible de Dieu est souvent impensable pour l'homme. Rappelez-vous dans le premier testament la vieille Sarah qui se retrouve dans la situation d’avoir à son âge un enfant ou encore dans les Evangiles, la situation de la jeune Marie avec sa maternité à peine fiancé sans avoir connu son Joseph Impensable !? Et pourtant… Que dire encore quand dans le nouveau testament dans les Evangiles est souligné l’impensable pour les contemporain de Jésus et peut-être aussi pour nous même : le Fils de Dieu qui nait dans une étable et qui va aller jusqu’à mourir sur une croix, sans parler de son extraordinaire résurrection. Bref, l’impensable traverse comme ce buisson qui brûle sans se consumer, notre Bible et questionne les hommes, les femmes, les jeunes et moins jeunes que nous sommes. « Dans notre conception humaine, à notre échelle : impensable et souvent synonyme au final d’impossible ! Nous avons tellement conscience de nos limites, nous voulons être crédibles, réalistes, raisonnables, objectifs. Ainsi, nous sommes tentés d'enfermer le possible dans nos modèles, de le réduire à nos dimensions. Or, le possible ou l'impossible, ce n'est pas une question d'objectivité, c'est une question de foi. A nous (plutôt) d'accepter de nous laisser entraîner par Dieu. Et, généralement, il nous conduit autrement que nous ne l'imaginions : dans son amour et au-delà de nos normes. Car Dieu est ailleurs, hors de nos références humaines. Il ne nous enferme pas, il nous ouvre à la vie, à la liberté, pourvu que nous nous ouvrions à lui au lieu de l'enfermer en nous. Entre Dieu et nous, pas de rapport de force ou de domination, seule la totale confiance. Oui, vraiment, pour Dieu, rien n'est impossible [… alors] si nous osions seulement la confiance ?" Si la confiance n’était pas qu’un slogan mis sur des badges mais une réelle conviction pratiquée au quotidien, n'aurions-nous pas alors franchi déjà un grand pas ? A l'audace d’amour de Dieu, que nous venons d’ailleurs de rechanter, une seule réponse est donc attendue : la confiance des hommes, des femmes en ce Dieu. Arrêtons-nous alors aujourd'hui sur cet appel de Dieu qui devient audace même et surtout quand nous ne sommes pas prêts. Moïse, comme l'écrit cette Bible pour les jeunes ou les nouveaux lecteurs de la Bible, Ze Bible : "Moïse cherche à se défiler : la mission est trop grande, le Pharaon trop puissant. Il se sent écrasé, incapable, trop ceci, pas assez cela, etc. Dieu, lui, y croit. Il argumente pour convaincre Moïse. Dieu sait mieux que nous-mêmes ce dont nous sommes capables." Non seulement, il sait ce que nous pouvons être mais il sait aussi ce que nous avons traversé et nos détresses présentes. Il entend, voit, se souvient. " Dieu avait promis à Abraham des descendants et un pays, et il reste fidèle à sa promesse. Les cris de son peuple le touchent. Il répond, Il s'engage." Ainsi Moïse qui vaque à ses occupations quotidiennes se retrouve avec Dieu qui vient à sa rencontre. "Intrigué devant un phénomène étrange, Moïse va voir. Alors, Dieu l'appelle par son nom. Une relation décisive est en train de naître, tellement forte qu'elle suscite le respect. Elle va changer la vie de Moïse et celle de son peuple." Mais voilà Moïse s'assure qu'il est quand même à la hauteur de la mission qui lui est confié. En même temps, je ne suis pas sûr que nous ferions mieux que lui, peut-être même pire. Nous aurions certainement tendance à prendre la poudre d’escampette à la mode d’un certain prophète appelé Jonas. Je dois faire ceci, bon ben, je vais donc plutôt faire cela et partir en sens inverse… Or Dieu ne va pas par quatre chemins avec Moïse : dans notre passage, il lui dit qu’il a entendu le peuple et qu’il va le délivrer des Egyptiens et le faire monter vers cette fameuse terre promise où le bétail pourra correctement être élevé et où l’on pourra cultiver. Ainsi Dieu dit à Moïse : j’ai entendu, je sais ce qu’il faut pour eux alors à toi de te mettre au travail en allant vers le Pharaon pour sortir d’Egypte mon peuple ! Sympathique Seigneur ? Il comprend mais c’est à nous de faire le boulot en y allant, et n’ayons pas peur des mots, en allant à ce qui s’apparente ici pour Moïse à un « casse-pipe » ! Voilà pourquoi Moïse veut tout d'abord une légitimation. Dieu le lui la donne en lui affirmant simplement et c’est énorme qu’Il est avec lui, mais celui-ci ne l’entend pas, il veut plus, il veut obtenir un mandat, celui du nom de Dieu. Et là, le Seigneur persiste, « il est qui il sera », il refuse de se soumettre à la requête formulée par Moïse, peut-être aussi parfois par nos propres requêtes. Il nous faut effectivement nous aussi entendre, que le mandat qui nous est donné de chrétien, c'est qu'avec chacun et chacune d'entre nous, Dieu est tel qu’Il sera. Alors, si j’ose dire, à notre tour ne passons pas à côté du buisson ardent, laissons Dieu se faire connaître et retenons qu’à celui qui cherche à le voir, Dieu se révèle par sa Parole. Et c’est après s’être fait connaître par sa Parole qu’il intervient pour son peuple. Et c’est là qu’il nous faut accepter de recevoir la révélation, à sa manière, du nom de Dieu. EHYEH esher EHYEH, nous dit le texte hébreu, ce nom qui vaut pour tous les temps et que la TOB (Traduction Œcuménique de la Bible) traduit non pas par "je serai qui je serai" comme la NBS (Nouvelle Bible Segond) mais par "je suis qui je serai". Il nous faut comprendre cela non pas comme un sens futur mais comme une action qui se poursuit, une ouverture à un futur. Nous pourrions ainsi le traduire par : « Je me montrerai comme Celui en tant que tel je me montrerai. », la traduction œcuménique de la Bible propose dans ses notes : « je suis là, avec vous, de la manière que vous verrez ». Cette révélation du nom de Dieu montre que celui-ci « ne se laisse enfermer ni dans nos descriptions, ni dans nos conceptions. Il est bien au-delà de ce que nous pouvons en dire. Il se définit par le simple fait qu’il est. Un Dieu dont on ne décrit pas la personne, mais que l’on connaît par la façon dont il nous rejoint et nous accompagne dans notre histoire. YHWH ne se décrit pas, c’est la raison pour laquelle les images sont interdites. Il est. Il est le créateur. Il est celui qui entend la souffrance de son peuple et qui le libère. Il est celui qui sauve. Dans le livre de l’Apocalypse, Dieu est appelé l’Alpha et l’Oméga (le commencement et la fin), celui qui est, qui était et qui vient (Ap. 1.8). Et peut-être que la meilleure traduction de YHWH serait (tout simplement) : Le Vivant. » Car Dieu révèle à Moïse, non pas son nom, mais qu’il est l’existant. La nature de Dieu est d’être et non d’être dite. C'est pourquoi n'oublions jamais ce Vivant qui est avec chacun, chacune d'entre nous, quel que soit notre âge, quel que soit notre situation de vie, dans nos joies comme dans nos peines. C’est ce Vivant dont nous devons être les témoins en confiance dans notre engagement d'Eglise, de croyant, dans la société, dans ce monde dans lequel nous vivons. « Les quelques versets d’Exode 3 [que nous avons donc lu] sur le nom divin peuvent paraître énigmatiques. Ils nous disent de Dieu une réalité décisive : le Dieu en qui nous nous confions, celui-là même que Jésus priait et servait, est un Dieu qui se définit par les liens qu’il noue avec ses créatures. Il est le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, le Dieu des pères. Il est le Dieu qui appelle Moïse à son service, s’engage dans une alliance avec le peuple d’Israël. Et la forme verbale dont il use pour se désigner évoque son engagement dans l’histoire, dans l’histoire du peuple, dans l’histoire du monde, dans notre histoire personnelle, dans celle de la création tout entière pour faire triompher son projet d’amour. […] Son nom reste mystérieux et indicible. Et pourtant il fut, il est et il sera un Dieu avec nous… » C’est pourquoi, « entre la question « quel est ton nom ? » et «c’est mon nom à jamais », Dieu se présente sous deux aspects : Celui dont la présence active est ouverte vers un avenir (« Je suis qui je serai »), et celui qui se rattache aux pères des origines, un Dieu de l’histoire passée comme de l’histoire à venir, qui se rend proche de son peuple. Le nom donné est ainsi mémoire pour tous les âges. » En refusant de donner véritablement un nom, Dieu se place dans un refus d’être considéré comme une idole. En effet, « lorsque nous ouvrons la Bible pour lui poser la question première : Qu’est-ce que Dieu ? ou Qui est Dieu ? , le plus difficile est de faire abstraction de toutes les images préconçues que nous en avons. Le mot Dieu n’est pas neutre, et avant d’écouter l’Ecriture, nous avons en tête l’idée d’un Esprit doté d’un certain nombre d’attributs : l’omniscience (celui qui sait tout), l’omniprésence (celui qui est partout à la fois), l’omnipotence (celui qui peut tout), l’impassibilité (celui qui n’a pas de sentiment), l’immuabilité (celui qui ne change pas)… et mécaniquement nous dotons le Dieu biblique de tous ces attributs. Cela est le plus sûr moyen de passer à côté du Dieu de l’Ecriture. Nous pourrions certes picorer à droite et à gauche des versets qui justifieraient chacun de ces attributs, mais nous raterions le cœur de la révélation biblique. L’Ecriture en effet nous présente un Dieu de relation, un Dieu qui s’engage dans l’aventure de l’humanité, un Dieu qui fait alliance avec les hommes. » En enfermant Dieu dans nos propres images nous ne laissons pas Dieu devenir lui-même. En effet, « que ce soit avec Dieu ou avec nos prochains, il n’est pas possible d’avoir des relations justes, saines et équilibrées, si nous ne laissons pas à l’autre la possibilité d’être lui-même. S’imaginer l’autre tel que nous voudrions qu’il soit, au lieu de lui laisser la liberté d’être ce qu’il est, ne peut conduire qu’au malentendu et à la déception. » Alors nous pouvons conclure sur ce passage de l'appel de Moïse que « l’actualité des thèmes de l’Exode est multiple. L’esclavage du peuple en Egypte, ses plaintes, son attente de la libération : on sait l’écho de tout cela dans tant de situations d’oppression aujourd’hui. L’esclavage n’est pas seulement celui dont sont victimes des populations affamées, exploitées et torturées [qui meurt aujourd’hui en voulant fuir leur condition]. Il peut aussi revêtir des formes plus sournoises et bien présentes dans nos sociétés démocratiques. Le projet de Dieu est de nous conduire de cet esclavage à la liberté… de le servir. La liberté véritable n’est pas la simple absence de contraintes, mais la possibilité d’établir des relations nouvelles avec les autres. Quel est ce Dieu qui libère ? L’interrogation de Moïse est [peut-être] aussi la nôtre, la réponse de Dieu toujours aussi décisive. Il est celui qui s’est allié aux pères, celui qui s’engage dans la libération des siens, et cela jusqu’à venir en son fils partager notre détresse. Nous ne sommes pas Moïse. Sa vocation a un caractère exceptionnel, comme celle des quelques autres personnages bibliques. Toutefois, Dieu nous appelle, nous aussi, à son service. A chacun, il promet sa force pour que nous puissions lui être fidèles. La vie chrétienne ne se construit pas à la force des poignets. Elle se reçoit comme une grâce [un cadeau] qui nous est faite. » Oui, écoutons, Dieu nous parle et nous ouvre notre route vers Lui, à son service et vers nous-même. La réponse à l'appel, à la grâce qui nous est faite à autant une résonance interne qu'externe. Nous restons trop souvent focalisé sur la conséquence externe ou à l'apparence de nos vies alors que de ce buisson ardent nait une surnaturelle lumière qui éclaire et enflamme nos vies, nos cœurs, sans les brûler, sans les consumer mais nous entraînant vers de nouveaux chemins. Cette vivifiante lumière qui crépite, enluminure dorée annonciatrice d’une Parole. Il ne s’agit pas d’une Parole éphémère qui disparait comme de la fumée. C’est une Bonne Nouvelle, une Bonne Nouvelle pour toi qui est là et le monde, dès maintenant et à jamais :
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