« Seigneur, à qui d’autre irions-nous ? »

( Jean 6 :56-69 )

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Culte du dimanche 9 février 2014 à l'Oratoire du Louvre
prédication du pasteur Marc Pernot

Eh les enfants, pourquoi êtes-vous venus aujourd’hui ? Il y a quantité de jolies choses à faire le dimanche matin. Pourquoi est-ce que nous nous sommes déplacés ici ?

Dans le texte que je vais vous lire, l’apôtre Pierre, se pose lui aussi la question. Pourquoi est-ce que je me suis déplacé pour écouter ce que raconte Jésus ? Est-ce que ça vaut le coup où est-ce que j’arrête ?

Il se pose la question avec ses amis juste après que Jésus ait dit « mangez ma chair, buvez mon sang ! » Ils ne comprennent rien, ils se demandent si Jésus est en train d’inventer une histoire de vampires et de loups-garrous.

L’apôtre Pierre hésite, il reconnaît devant Jésus qu’il s’est demandé s’il n’allait pas rentrer chez lui bien tranquillement. Mais finalement Pierre est là, avec Jésus, parce que finalement, tout bien pesé, il n’y a pas mieux.

Bravo à vous, les enfants d’être là. Bravo aux parents. Bravo à chacun de nous.

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Jésus est triste et déçu, car plein de disciples s'en vont. Il demande à ses plus proches : vous aussi, vous allez partir ? On sent un pincement au cœur, un sentiment d’échec mais en même temps une détermination. Il est clair que Jésus ne cherche pas à plaire. Avec son intelligence, avec son charisme, il n’aurait pas eu de mal à gagner des élections. Mais il ne cherche pas à plaire mais à faire vivre. Et pour cela, il doit parler en disant la vérité. Pour cela, il doit chercher à éveiller le meilleur chez les personnes qu’il rencontre, et non flatter leur penchant naturel. Il doit les réveiller, pas les endormir. Il ne cherche pas à les distraire, au contraire il essaye de les faire se sentir concernés. Jésus ne cherche pas à les captiver, mais au contraire à les rendre géniaux et actifs. Alors oui, ça en fatigue plus d’un.

Jésus donc dit aux douze : Et vous, ne voulez-vous pas aussi vous en aller ? (67)

Il en reste quand même quelques-uns pour lui faire confiance, dont Pierre qui explique pourquoi avec ce cri du cœur : Seigneur, à qui d'autre irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle ! Ces mots laissent supposer que l'idée de partir lui est venue à l'esprit, comme aux autres. Il ne dit pas à Jésus : c'est hors de question de te quitter, nous n'y avons jamais pensé une seconde ! Mais Pierre donne une raison négative de ne pas abandonner Jésus : on n'a pas trouvé mieux.

Au moins, chercher quelque chose !

Mais en réalité, la réponse de Pierre n'est pas si négative que ça : il a au moins compris que l'on ne peut pas vivre sans foi. Il faut poursuivre un idéal, il faut croire en quelque chose, c'est vital. On a le droit de ne pas être chrétien, bien sûr, mais il faut au moins croire en quelque chose parce que ne croire en rien c’est être comme une feuille morte emportée par le vent. de répondre « bof » à tout idéal et de n'avoir ainsi aucun élan supérieur. Aucun souffle.

Le pire serait de refuser le Christ dans sa vie et de ne le remplacer par rien. Si quelqu'un ne veut pas s’intéresser à Jésus-Christ... qu'il choisisse Bouddha, s'il n'aime pas Bouddha, qu'il s'intéresse à Mahomet, à Platon, à Marx. Ou peut-être de faire un savant mélange de plusieurs inspirations… mais au moins croire en quelque chose et croire vraiment, croire activement, pas comme un touriste. Pas comme ces gens qui disent « je suis croyant, mais pas pratiquant », quelle que soit sa croyance, ce n’est pas une façon de vivre sa vie que de rester ainsi.

Ce n’est donc pas par hasard que Pierre s’intéresse à Jésus. Il a cherché différentes solutions, il s’est intéressé, rencontré, réfléchi, il a foncé (c’est son genre). Et il n’a pas trouvé mieux que Jésus.

Comment évaluer notre démarche ?

Il est donc utile de savoir que nous avons le choix, et il est utile de savoir comment choisir. Comme Pierre, nous voulons avancer, et comme lui, nous cherchons. Nous tâtonnons. Et pour cela nous devons être capable de faire le point, capable d’évaluer en cours de route nos choix de vie. C’est ce que font Pierre et ses amis en discutant entre eux. C’est bien d’en discuter avec ses amis même si en définitive, c’est un choix personnel que nous avons à faire, et donc à évaluer. Jésus les encourage d’ailleurs, à faire le point pour eux-mêmes :

Jésus donc dit aux douze : Et vous, ne voulez-vous pas aussi vous en aller ?

Jésus est triste de voir des gens abandonner, mais il ne les critique pas. Si ce qu’il leur propose ne les fait pas vivre, ils font bien de changer d’avis et d’abandonner maintenant.

Comment est-ce que Pierre évalue le fait d’avoir choisi de suivre Jésus ?

  • Dans un sens, Pierre et ses amis trouvent que les paroles de Jésus sont dures à avaler, et cela leur donne envie de quitter Jésus et de retourner chez eux.
  • Mais d’un autre côté, Pierre reconnaît en lui-même que les paroles de Jésus ont été pour lui source de vie et même source de vie éternelle.

Et donc finalement, même si cela ne l’amuse pas beaucoup, Pierre va continuer avec Jésus.

Est-ce que ma façon de vivre et d’espérer me rend plus vivant ? C’est la vraie question. Ne pas s’arrêter à l’écorce des choses, mais examiner si telle activité, telle croyance, telle pratique, telle passion, tel culte… me rend meilleur. Ou non.

Peut-être que ce qui convient à l’un ne convient pas à un autre. Peut-être que c’est une question de quantité, de dosage. Il faut donc, comme le fait Pierre creuser un peu la question. Pour cela, il convient de se connaître un peu soi-même, il convient d’ouvrir les yeux et oser se regarder dans la glace, ou plutôt regarder à l’intérieur de nous-mêmes, examiner notre dynamique interne. Est-ce que dire que nous sommes grands et que nous pouvons évoluer, nous pouvons choisir, décider, changer, progresser.

Les paroles de Jésus : chair ou Esprit ?

En tout cas, ce que Jésus nous apporte d’important, ce sont ses paroles, nous disent ici tous les témoins.

D’un côté, les paroles de Jésus sont dures à écouter. Pierre dit qu’elles ont été pour lui source de vie, source d’une incroyable qualité de vie, même.

C’est comme toute chose, comme toute machine puissante ou tout médicament efficace, il faut connaître le mode d’emploi pour qu’il fasse vivre. Par exemple pour un micro-onde, il y a marqué sur le mode d’emploi que ça sert à réchauffer les aliments, mais que ce n’est pas pour faire sécher le chat ou réchauffer son bébé s’il a froid. Jésus explique ici le mode d’emploi de ses paroles.

C’est l’Esprit qui vivifie la chair ne sert à rien.
Les paroles que je vous ai dites sont Esprit
et elles sont vie.(63)

C’est qu’il y a « paroles » et « paroles », toutes n’ont pas le même statut, le même mode d’emploi. Et pour ceux qui sont en train d’écouter Jésus, il y a une ambiguïté.

  • Certains pensent que Jésus est un professeur, un maître, et que ses paroles sont un peu comme une loi, qu’il faut nécessairement être d’accord et leur obéir.
  • L’expérience de Pierre c’est que les paroles de Jésus ont une puissance de vie.

Mais pour cela, il faut saisir le mode d’emploi. Mais peut-être n’est-il pas hyper clair pour nous, aujourd’hui. Jésus dit d’abord qu’il faut manger sa chair, maintenant il dit que la chair ne sert à rien, que c’est l’Esprit qui donne la vie. Puis il dit que ses paroles sont Esprit et vie.

Cela nous donne une piste. Chacun de nous, et Jésus aussi, est à la fois chair et Esprit.

  • La chair, c’est notre existence en ce monde, c’est ce qui est créé, c’est le cadre.
  • L’Esprit, c’est le terme utilisé dans la Bible pour parler de la présence de Dieu quand il crée, quand il donne la vie.

Les deux sont bons. Jésus ne méprise pas la vie en ce monde, ni le corps vivant que nous sommes, ni la vie en ce monde. Mais il ne faut pas confondre

Les paroles de Jésus sont aussi à la fois chair et Esprit. Quand il parle, c’est avec des sons, avec des mots, un langage, des citations, des images. Il utilise des paraboles, il dit des choses curieuses, choquantes parfois, provocantes. Il dit aussi des choses belles et agréables à entendre comme l’annonce de l’amour infini et éternel de Dieu pour chacun de nous. Mais tout cela est comme la chair, nous dit-il, c’est comme un beefsteak préparé pour que nous le mangions.

Un beefsteak, tel quel, c’est un peu dégoûtant. D’ailleurs quand ne chanteuse qui se fait appeler Lady Gaga a mis une robe faite entièrement de beefsteaks cousus ensemble, elle sait bien que c’est choquant. C’est se tromper de mode d’emploi, alors que cette viande aurait pu aider des dizaines d’enfants pauvres à être plus en forme.

Manger la Parole

Jésus nous dit que ses paroles sont faites pour être mangées et pour être distribuées à ceux qui ont faim. Ses paroles ne sont pas faites pour rester de la chair, car en les prenant, les mangeant, les digérant elles sont Esprit et vie pour nous. Ses paroles ne sont pas faites pour que nous nous en fassions des manteaux, ni pour que nous nous en fassions des prisons pour nous enfermer dedans ou pour enfermer les autres, ni pour nous sentir jugées par ces paroles, en encore moins pour juger les autres.

Ces paroles sont chair pour être prises, mâchées, digérées. Alors, elles sont Esprit et vie.

Les paroles de Jésus donnent la vie. C’est ce que remarque Pierre, les paroles de Jésus donnent une impulsion de vie. Elles donnent envie de changer notre regard sur Dieu, sur la vie, sur les autres, et sur nous-mêmes. Elle nous donnent envie de devenir meilleur et de changer le monde… tout cela serait insupportable si cela venait de l’extérieur comme une contrainte, mais quand cela nous vient comme un amour que nous ressentons et qui nous fait fondre, quand cela est vécu comme une confiance dans ce que nous sommes capables… cela devient une impulsion de vie et non plus un coup de pieds aux fesses.

Les paroles de Jésus sont Esprit, c’est même plus que de dire qu’elles ont la vie. Car si les paroles du Christ donnent une impulsion, l’Esprit serait plutôt un moteur. Un moteur qui nous est donné. Mais là aussi un moteur, quand c’est porté à l’extérieur, c’est très très lourd. Mais quand c’est un moteur qui est monté dans une moto cela donne de ne plus avoir besoin de quelqu’un qui nous pousse comme quand on commence à faire du vélo, mais le moteur nous permet d’être nous-mêmes source de mouvement.

Les paroles du Christ sont comme ça, elle sont géniales si on s’en saisit, si nous les prenons dans notre bouche pour en discuter comme le font Pierre et ses amis, si on les mâche, les déconstruit et les digèrent comme un beefsteak, pour s’en nourrir. Comme des paroles extérieures, elles ont dures, impossibles, c’est ce qui arrive quand on les prend pour des réponses toutes faites, comme un idéal impossible, comme une belle occasion de se culpabiliser et de culpabiliser les autres. Mais comme paroles intérieurs elles sont géniales comme des promesses qui nous sont faites, comme de bonnes questions pour nous aider à trouver notre réponse personnelle, comme des pistes de réflexion, comme un amour qui nous permet de ne plus avoir peur d’être abandonné.

Pierre, comme nous tous, est dans l’entre deux. La parole du Christ est encore en partie extérieure, dure à entendre, fatigante à mâcher, à réfléchir, à expérimenter. Mais Pierre a déjà goûté de l’effet de cette parole quand on la prend en soi comme une expérience.

Seigneur, Tu as les paroles de la vie éternelle.
Et nous avons confiance
et nous savons que tu es le Christ, le Saint de Dieu.

La foi, l’expérience et la connaissance

Dans un sens, c’était déjà de la foi, un début de foi que d’essayer un peu d’écouter ce que Jésus racontait. Juste pour voir. Mais dès que l’on commence à expérimenter l’Évangile, que dans ces paroles, quand elles sont mangées, il y a non seulement la vie, mais une source de vie qui jaillit en nous. Alors là, nous dit Pierre, est vraiment née sa foi, sa confiance en Jésus.

De l’expérience naît une confiance, Pierre ensuite réfléchit, annalyse. Une telle impulsion de vie, et même une telle source de vie en lui ne vien pas seulement de la chair. Cela le dépasse, cela dépasse l’humain. De cette expérience, de cette confiance nait une connaissance. Jésus est un envoyé de Dieu. Il est même le Christ. Ce n’est pas seulement à moi que Dieu veut ce bien fou. C’est à chacune et à chacun.

Nous partageons cette expérience, cette foi et cette connaissance.

« Voyez et Goûtez comme le Seigneur est bon » (Psaume 34 :9)

Amen.

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Pasteur dans la chaire de l'Oratoire du Louvre - © France2

Pasteur dans la chaire de
l'Oratoire du Louvre
© France2

Lecture de la Bible

Jean 6:57-69

Jésus leur dit :

56 Celui qui mange ma chair et qui boit mon sang demeure en moi, et je demeure en lui.

57 Comme le Père qui est vivant m’a envoyé, et que je vis par le Père, ainsi celui qui me mange vivra par moi.

58 C’est ici le pain qui est descendu du ciel. Il n’en est pas comme de vos pères qui ont mangé la manne et qui sont morts: celui qui mange ce pain vivra éternellement.

59 Jésus dit ces choses dans la synagogue, enseignant à Capernaüm.

60 Plusieurs de ses disciples, après l’avoir entendu, dirent: Cette parole est dure; qui peut l’écouter?

61 Jésus, sachant en lui-même que ses disciples murmuraient à ce sujet, leur dit: Cela vous scandalise-t-il?

62 Et si vous voyez le Fils de l’homme monter où il était auparavant?...

63 C’est l’Esprit qui vivifie;
la chair ne sert à rien.
Les paroles que je vous ai dites
sont Esprit
et elles sont vie.

64 Mais il en est parmi vous quelques-uns qui ne croient point. Car Jésus savait dès le commencement qui étaient ceux qui ne croyaient point, et qui était celui qui le livrerait.

65 Et il ajouta: C’est pourquoi je vous ai dit que nul ne peut venir à moi, si cela ne lui a été donné par le Père.

66 Dès ce moment, plusieurs de ses disciples se retirèrent, et ils n’allèrent plus avec lui.

67 Jésus donc dit aux douze: Et vous, ne voulez-vous pas aussi vous en aller?

68 Simon Pierre lui répondit:
Seigneur, à qui irions-nous?
Tu as les paroles de la vie éternelle.
69 Et nous avons cru
et nous avons connu
que tu es le Christ, le Saint de Dieu.