Dieu dit : « Qu’est-ce que tu veux ? 

Je te ferai un cadeau »

( 1 Rois 3:1-14; Matthieu 4:1-11; Matthieu 6:19-33 )

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Culte du 28 juin 2009 à l'Oratoire du Louvre
prédication du pasteur Marc Pernot

Salomon a déjà été bien gâté. Tout jeune, il se retrouve à la tête d’un pays prospère, et allié par mariage avec le pharaon d’Égypte. C'est pour cela qu'il offre en sacrifice de louange à l’Éternel un millier de bœufs. Mais Salomon n'a pas fini de recevoir, car Dieu lui dit : « Qu’est-ce que tu veux ? Je te ferai un cadeau. » C’est assez curieux, car Dieu n’est pas en réalité comme le génie qui sort de la lampe merveilleuse d’Aladdin, et ce n’est pas tellement la théologie biblique de concevoir Dieu comme exauçant le caprice de l’homme, heureusement.

Mais ce récit nous propose d’abord de nous poser cette question essentielle : Qu'est-ce que j'attends de Dieu, qu'est-ce que je voudrais qu'il me donne ? Cette question est essentielle car elle nous permet de mieux nous connaître nous-mêmes. Qu’est-ce que je cherche vraiment, en réalité, dans la vie ? Qu’est-ce qui est pour moi le plus grand bien ? Il est utile pour nous de chercher à répondre à cette question honnêtement, pour, peut-être, nous recentrer un peu sur quelque chose qui en vaille la peine.

Cette question « Que demanderais-je à Dieu ? » nous permet de savoir quel dieu nous adorons en réalité. Cela peut nous surprendre, car le Dieu de la croyance de quelqu’un n’est pas forcément le dieu de son adoration. Par exemple il y a des gens qui disent de pas croire en Dieu et qui sont, de fait, animés d’une passion religieuse pour quelque chose, comme l’argent, la montagne ou tel idéal politique… D’autres personnes croient en Dieu, intellectuellement, mais ne pensent jamais à lui et n’attendent donc rien de lui concrètement, parce qu’ils espèrent autre chose, qu’ils adorent autre chose, un autre dieu. Par exemple, si Salomon avait demandé à Dieu la richesse et la gloire, le dieu de Salomon aurait été, en réalité non pas l’Éternel, mais son dieu aurait été le pouvoir, l'argent ou la gloire, et l’Éternel ne serait pour lui qu'un simple moyen d'avancer vers ce but.

  • C’est ce que fait remarquer Maître Eckhart avec un art de la formule et une pertinence qui l’ont rendu célèbre, il dit : « Lorsque l'on invoque Dieu en ayant en vue un bien de ce monde, ce n'est pas Dieu que l'on invoque, mais l'on invoque ce qui fait l'objet de la prière, et on utilise Dieu comme un valet. » (Les dits de Maître Eckhart, N° 39)
  • Saint Augustin dit à peu près la même chose : « C'est à ce que tu aimes que va ta prière. Tu invoques ce que tu appelles en toi, tu invoques ce que tu veux avoir en toi. Or, si tu invoques le Seigneur afin qu’il t’arrive de l’argent, un héritage, une dignité du monde, tu appelles en réalité des biens que tu désires posséder, tu te fais un Dieu complice de tes convoitises, non un Dieu qui écoute les prières. » (Discours sur le Psaume 85 §8)

Mais avant Eckhart et Saint Augustin, Jésus lui-même dit que ceux qui prient Dieu pour avoir de l’argent ou de la santé, tout en croyant en Dieu, puisqu’ils le prient, sont en réalités d’une certaine façon des païens, puisqu’en priant ainsi, ils sont des adorateurs de Mammon, le dieu de l’Argent, ou d’Esculape, le dieu de la santé…

C’est dur, comme sentence, de se faire traiter de païen. Mais ce n’est pas pour nous accabler que Jésus dit cela, mais pour nous sauver, bien sûr, nous sauver en nous aidant à nous recentrer sur l’essentiel, sur Dieu. Jésus ne critique pas le fait que nous ayons besoin d’argent, de vêtement, de nourriture et de santé. Dieu ne critique pas le fait que Salomon vive comme un roi, qu’il se construise un palais, qu’il épouse une princesse… Dieu sait que nous avons besoin de tout ça, nous dit Jésus. Mais il ne faut pas pour autant que nous nous laissions aller à faire de ces choses des dieux que nous adorons.

Il y a un seul Dieu, une seule puissance transcendante dans le monde, c’est le créateur de l’univers, c’est l’Éternel, c’est notre Père, c’est l’amour, qu’importe la façon dont on l’appelle, mais c’est lui seul qui peut nous faire vivre. Mais si l’on adore n’importe quoi on devient esclave de ce n’importe quoi.

Fondamentalement, la seule « chose » que nous puissions donc demander à Dieu sans devenir païen, c’est Dieu lui-même, c’est lui demander sa présence active. C’est ce que Salomon fait ici. On pense souvent que Salomon demande la sagesse à Dieu, mais non, s’il demandait à Dieu la sagesse, Salomon n’adorerait plus l’Éternel, mais il serait devenu un adorateur de la sagesse, et il ferait de Dieu son valet, comme le dit maître Eckhart. Mais ce que Salomon demande à Dieu c’est de lui « donner un cœur qui écoute », c’est-à-dire un cœur ouvert à ce que Dieu voudra lui apporter par sa Parole, Salomon lui demande que son être soit capable de vivre ce commandement fondamental de la Loi de Moïse « Écoute l’Éternel notre Dieu, l’Éternel est l’Unique » (Deutéronome 6:4)

Salomon demande ainsi à Dieu sa présence, son aide, son action créatrice, il le demande avec confiance, un peu comme Marie dit à Dieu : « je suis la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon ta Parole » (Luc 1 :38). Salomon demande à Dieu « un cœur qui écoute afin de pouvoir gouverner le peuple que Dieu lui a confié, et discerner le bien et le mal ! ». Salomon espère peut-être que Dieu lui soufflera à l’oreille, ou au cœur, ce qu’il penser ou faire. Dieu lui offrira bien mieux que ça, car ce serait le transformer en un gentil petit robot bien programmé. Ce sont plutôt des dieux comme Mammon ou Esculape qui nous transforment ainsi en esclave quand nous les adorons. Mais c’est déjà leur faire trop d’honneur que de dire ça, puisque Mammon et Esculape n’ont pas de puissance propre. Mais c’est, précisément, en mettant notre espérance dans quelque chose qui ne peut pas nous faire vivre que nous régressons, et ce n’est pas d’un dieu que nous sommes alors esclave, mais de notre propre illusion.

Salomon demande donc à Dieu « un cœur qui écoute afin de pouvoir gouverner le peuple que Dieu lui a confié, et discerner le bien et le mal ! » Dieu va lui donner un cœur capable d’apprendre et de réfléchir. Dieu n’aura alors pas à lui dicter ce qu’il doit faire, ni à lui révéler ce qui est bien. Dieu ne le fait que dans des cas exceptionnels, pour donner une impulsion, un appel, un encouragement. Car le but de Dieu n’est pas de nous transformer en robot mais de nous rendre capable d’avoir un génie propre. C’est en étant Jean-Sébastien Bach, c’est en composant du Bach que Jean-Sébastien Bach apporte quelque chose dont Dieu est fier, pas en étant un simple jouet dans la main de Dieu. C’est donc en étant Salomon, en faisant du Salomon, avec sa personnalité, sa sensibilité que Salomon sera utile.

Plutôt que d’adorer des moyens matériels, tout utiles et bons qu’ils soient par ailleurs, Salomon a la sagesse, déjà, de s’adresser à Dieu pour le seul amour de Dieu. Il sait reconnaître en Dieu la source de sa vie, il sait voir que Dieu lui a confié des personnes pour que lui, Salomon, leur fasse du bien, et non pour que Salomon en profite. Et quand Dieu lui demande ce qu’il veut, Salomon répond : Je ne suis qu'un enfant, c'est toi qui m'as fait roi de ton peuple, aides-moi à être capable de ce service. En se considérant comme un enfant devant Dieu, Salomon permet à Dieu d'agir envers lui comme un père, comme une mère, comme son créateur. C'est effectivement ce qu'est Dieu et Salomon s'adresse ainsi à la bonne personne avec une attente cohérente avec ce qu'il est.

Notre désir est toujours légitime, et nous n’avons pas à culpabiliser pour ce que nous désirons, mais il vaut finalement mieux ne pas être esclave de son propre désir, comme le sont Adam et Ève à la chute. Plutôt que de vivre en adorant son propre désir en priant Dieu de répondre à ce désir, Salomon nous propose de demander à Dieu de nous éclairer sur ce qui est bien, pour que nous ayons la sagesse de le chercher et le faire. Dieu peut faire même plus que de nous dire ce qui est bien, il peut nous rendre capable d’être même source de bien.

Dieu ne critique pas Salomon de s'être marié à une riche et puissante égyptienne, Dieu ne le critique pas non plus de s'être construit pour lui-même un superbe palais... Ce que nous propose la Bible, ce n'est pas de vivre comme si nous étions de purs esprits (nous ne le sommes pas), ni de négliger la santé, la bonne renommée, ou les moyens comme l'argent ou le pouvoir qui peuvent être utiles pour faire du bien. Mais ce que nous dit la Bible c'est qu'il est bon que notre relation avec le créateur soit centrale dans notre existence. Mais l’intérêt d’un centre, c’est d’être justement le centre de quelque chose : et la dimension spirituelle de notre être est intéressante quand elle éclaire et donne du sens à une existence dans ce monde. Ce n'est pas parce que nos conditions de vies en ce monde n'auraient pas d'importance que ce n'est pas une bonne idée de les demander à Dieu, mais parce que les souhaiter plus que tout décentre notre existence, la coupe de la source.

Jésus prit la parole, et dit : Ayez foi en Dieu. Je vous le dis en vérité, si quelqu'un dit à cette montagne : Ote-toi de là et jette-toi dans la mer, et s'il n’hésite pas dans son cœur, mais a foi que ce qu'il dit arrive, il le verra s'accomplir. (Marc 11:22-24)

L'essentiel : c'est la foi en Dieu. La foi ce n'est pas forcément sentir la présence de Dieu, mais c'est simplement reconnaître Dieu comme le plus grand bien, comme la source du bien.

La première force que nous donne cette foi en Dieu, nous dit Jésus, c'est de pouvoir jeter les montagnes dans la mer. C’est une image qui nous semble curieuse aujourd’hui, mais dans la Bible, les montagnes évoquait le culte à Dieu ou aux divinités locales. Nous voyons au début de cette histoire que Salomon adorait encore Dieu sur des montagnes diverses, parce que sa foi n’était pas encore bien bien construite sur la seule présence de Dieu. Salomon adorait ainsi Dieu parce qu’il était conscient de tout ce que Dieu lui avait déjà donné d’avoir dans sa vie. Salomon adore ainsi à la fois Dieu mais aussi un peu l’argent dont il remercie Dieu, le pouvoir dont il remercie Dieu, la victoire contre ses ennemis dont il remercie Dieu… Il place quand même Dieu au-dessus, mais il adore encore un peu le reste. Ce n’est que progressivement, que l’on peut purifier sa foi et devenir de plus en plus monothéiste, adorant Dieu seul.

Si notre cœur est effectivement en Dieu, nous pourrons dire à ces choses qui nous possèdent quand on leur rend un culte : jette-toi dans la mer, retourne au chaos, et nous serons libérés… sans doute pas en une seconde, même Jésus a mis 40 jours à se débarrasser, un à un, de ses propres faux dieux. Mais, par la foi, Dieu finira quand même par nous débarrasser de ces faux dieux qui trompent notre espérance. Alors, nous demanderons à Dieu ce qu'il peut nous apporter : le fait d’être créé par lui à son image et à sa ressemblance.

Amen

Voir la prédication du dimanche suivant, avec la 2e demande de Salomon

 

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Pasteur dans la chaire de l'Oratoire du Louvre - © France2

Pasteur dans la chaire de
l'Oratoire du Louvre
© France2

Lecture de la Bible

1 Rois 3:1-14

Salomon s’allia par mariage avec Pharaon, roi d’Egypte. Il prit pour femme la fille de Pharaon, et il l’amena dans la ville de David, jusqu’à ce qu’il ait achevé de bâtir sa maison, la maison de l’Eternel, et le mur d’enceinte de Jérusalem.
2 Le peuple ne sacrifiait que sur les hauts lieux, car jusqu’à cette époque on n’avait point été bâti de maison au nom de l’Eternel.
3 Salomon aimait l’Eternel, et suivait les coutumes de David, son père. Seulement c’était sur les hauts lieux qu’il offrait des sacrifices et des parfums.
4 Le roi se rendit à Gabaon pour y sacrifier, car c’était le principal des hauts lieux. Salomon offrit mille holocaustes sur l’autel.

5 A Gabaon, l’Eternel apparut en songe à Salomon pendant la nuit, et Dieu lui dit: Demande ce que tu veux que je te donne.
6 Salomon répondit: Tu as traité avec une grande bienveillance ton serviteur David, mon père, parce qu’il marchait en ta présence dans la fidélité, dans la justice, et dans la droiture de coeur envers toi; tu lui as conservé cette grande bienveillance, et tu lui as donné un fils qui est assis sur son trône, comme on le voit aujourd’hui.
7 Maintenant, Eternel mon Dieu, tu as fait régner ton serviteur à la place de David, mon père; et moi je ne suis qu’un jeune homme, je n’ai point d’expérience.
8 Ton serviteur est au milieu du peuple que tu as choisi, peuple immense, qui ne peut être ni compté ni dénombré, à cause de sa multitude.
9 Accorde donc à ton serviteur un coeur intelligent pour juger ton peuple, pour discerner le bien et le mal! Car qui pourrait juger ton peuple, ce peuple si nombreux?
10 Cette demande de Salomon plut au Seigneur.
11 Et Dieu lui dit: Puisque c’est là ce que tu demandes, puisque tu ne demandes pour toi ni une longue vie, ni les richesses, ni la mort de tes ennemis, et que tu demandes de l’intelligence pour exercer la justice,
12 voici, j’agirai selon ta parole. Je te donnerai un coeur sage et intelligent, de telle sorte qu’il n’y aura eu personne avant toi et qu’on ne verra jamais personne de semblable à toi.
13 Je te donnerai, en outre, ce que tu n’as pas demandé, des richesses et de la gloire, de telle sorte qu’il n’y aura pendant toute ta vie aucun roi qui soit ton pareil.
14 Et si tu marches dans mes voies, en observant mes lois et mes commandements, comme l’a fait David, ton père, je prolongerai tes jours.

Matthieu 4:1-11

Jésus fut emmené par l’Esprit dans le désert, pour être tenté par le diable.
2 Après avoir jeûné quarante jours et quarante nuits, il eut faim.
3 Le tentateur, s’étant approché, lui dit: Si tu es Fils de Dieu, ordonne que ces pierres deviennent des pains.
4 Jésus répondit: Il est écrit: L’homme ne vivra pas de pain seulement, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu.
5 Le diable le transporta dans la ville sainte, le plaça sur le haut du temple,
6 et lui dit: Si tu es Fils de Dieu, jette-toi en bas; car il est écrit: Il donnera des ordres à ses anges à ton sujet; Et ils te porteront sur les mains, De peur que ton pied ne heurte contre une pierre.
7 Jésus lui dit: Il est aussi écrit: Tu ne tenteras point le Seigneur, ton Dieu.
8 Le diable le transporta encore sur une montagne très élevée, lui montra tous les royaumes du monde et leur gloire,
9 et lui dit: Je te donnerai toutes ces choses, si tu te prosternes et m’adores.
10 Jésus lui dit: Retire-toi, Satan! Car il est écrit: Tu adoreras le Seigneur, ton Dieu, et tu le serviras lui seul.
11 Alors le diable le laissa. Et voici, des anges vinrent auprès de Jésus, et le servirent.

Évangile selon Matthieu 6:19-33

Ne vous amassez pas des trésors sur la terre, où la teigne et la rouille détruisent, et où les voleurs percent et dérobent;
20 mais amassez-vous des trésors dans le ciel, où la teigne et la rouille ne détruisent point, et où les voleurs ne percent ni ne dérobent.
21 Car là où est ton trésor, là aussi sera ton coeur.
22 L’oeil est la lampe du corps. Si ton oeil est en bon état, tout ton corps sera éclairé;
23 mais si ton oeil est en mauvais état, tout ton corps sera dans les ténèbres. Si donc la lumière qui est en toi est ténèbres, combien seront grandes ces ténèbres!
24 Nul ne peut servir deux maîtres. Car, ou il haïra l’un, et aimera l’autre; ou il s’attachera à l’un, et méprisera l’autre. Vous ne pouvez servir Dieu et Mammon.
25 ¶ C’est pourquoi je vous dis: Ne vous inquiétez pas pour votre vie de ce que vous mangerez, ni pour votre corps, de quoi vous serez vêtus. La vie n’est-elle pas plus que la nourriture, et le corps plus que le vêtement?
26 Regardez les oiseaux du ciel: ils ne sèment ni ne moissonnent, et ils n’amassent rien dans des greniers; et votre Père céleste les nourrit. Ne valez-vous pas beaucoup plus qu’eux?
27 Qui de vous, par ses inquiétudes, peut ajouter une coudée à la durée de sa vie?
28 Et pourquoi vous inquiéter au sujet du vêtement? Considérez comment croissent les lis des champs: ils ne travaillent ni ne filent;
29 cependant je vous dis que Salomon même, dans toute sa gloire, n’a pas été vêtu comme l’un d’eux.
30 Si Dieu revêt ainsi l’herbe des champs, qui existe aujourd’hui et qui demain sera jetée au four, ne vous vêtira-t-il pas à plus forte raison, gens de peu de foi?
31 Ne vous inquiétez donc point, et ne dites pas: Que mangerons-nous? que boirons-nous? de quoi serons-nous vêtus?
32 Car toutes ces choses, ce sont les païens qui les recherchent. Votre Père céleste sait que vous en avez besoin.
33 Cherchez premièrement le royaume et la justice de Dieu; et toutes ces choses vous seront données par-dessus.