Puissante est pour nous sa bonté

(Psaume 117 ; Romains 15:8-13 ; 1 Jean 4:7-11)

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Culte du dimanche 16 août 2015
prédication du pasteur Louis Pernot
Eglise Protestante de l'Etoile

Grand merci à T.C. qui a saisi cette prédication à partir de l'enregistrement,
afin d'en partager le texte avec ceux quye cela intéresserait :-)

Voici donc le Psaume le plus court de tout le psautier :

Louez l’Eternel, vous toutes les nations, Célébrez-le, vous tous les peuples!

Je connais depuis longtemps ce psaume, tellement court qu’il a évidemment toujours attiré mon attention.

Mais j’avoue avec humilité que ce psaume m’a toujours ennuyé ; c’est-à-dire que je n’y ai jamais trouvé grand sens. Il y a des psaumes bouleversants, pleins de tendresse, pleins de douceur, pleins d’espérance, d’amour, et celui-là me semble un pur jus de langages ecclésiastiques, de langues de bois psalmiques, je n’ai jamais réussi à y trouver grand-chose de vraiment passionnant, pour tout vous dire. Mais néanmoins, j’ai appris à me méfier des choses trop simples. Et en particulier, quand dans l’Ecriture, dans la Bible, on trouve des passages qui semblent n’être sans intérêt, il faut toujours au contraire redoubler d’attention. Et ce dans ce cas d’autant plus, que d’abord, ce psaume est l’un des très rares cités dans le nouveau testament. C’est quand même un honneur qui n’est pas offert à tous les psaumes.

Et puis en travaillant dans ma bibliothèque, j’ai découvert que Luther, en 1530, avait fait un commentaire du Psaume 117. Et que ce commentaire était tellement développé qu’il en a fait tout un livre. Alors je me suis dit “comment peut-on écrire un livre entier sur deux versets sans intérêt !“

Alors j’ai lu Luther - j’aurais peut-être dû commencer par là – et j’ai trouvé qu’effectivement quand on regarde un peu plus précisément - c’est-à-dire si on sort sa loupe spirituelle et qu’on regarde ce psaume de peu plus près - on y trouve des choses absolument passionnantes. Et s’il a tellement plu à Luther ce psaume, c’est qu’il y voyait le fondement de toute la théologie réformée, voire le fondement, de toute - je dirais - la pensée de Luther, de la pensée réformatrice, et en fin de compte le résumé, la confession de foi de ce que nous prêchons jour après jour dans nos temples.

Alors regardez d’abord : “Louez l’Eternel, vous toutes les nations”

Ça semble rien, mais c’est déjà beaucoup parce que le mot nation qui se trouve là est un mot hébreu qui est probablement un des rares mots que vous connaissez, c’est goïm ; et les goï, qui est-ce ? Ce sont les païens, c’est-à-dire les non juifs. Autrement dit, nous avons déjà une chose étonnante, c’est que le psaume commence par dire : « vous, tous les païens, louez l’Eternel ! » Et là, Luther dit : c’est une prophétie. Parce que dans l’ancien testament, ne louaient l’Eternel que les juifs. Et ensuite c’est Jésus qui a ouvert - je dirais - l’économie du salut aux païens. Et c’est grâce à l’évangile, grâce au Christ, que nous, en tout cas moi, probablement beaucoup d’entre vous qui n’êtes pas juifs, vous êtes invités à participer à l’économie du salut, du Dieu d’Israël ; nous sommes invités à rentrer dans le peuple élu, par adoption en quelque sorte, pour louer l’Éternel, c’est-à-dire pour louer le Dieu d’Israël. Et cela, c’est une révolution considérable, parce que dans l’ancien judaïsme, comme encore à peu près aujourd’hui, on était dans la religion, dans le peuple élu par filiation ; on est juif si ses parents sont juifs. Et Jésus va bouleverser tout çà en disant : la religion n’est pas une question de gène, ce n’est pas une question d’hérédité mais une question de choix personnel. C’est une question de choix personnel. Et donc, on ne nait pas chrétien, mais on le devient. Et il ne suffit pas d’avoir des parents ou des ancêtres chrétiens pour être chrétien, il ne suffit pas d’avoir des ancêtres protestants pour se dire protestant. Non seulement, il ne le suffit pas, mais cela n’est même pas indispensable. Ou alors nous reprendrions la même logique en disant : moi je suis vraiment protestant parce que j’ai un ancêtre inscrit sur le mur de ceux qui ont été envoyés aux galères, au musée du désert… Mais le protestantisme et le christianisme ne sont pas des religions héréditaires, ce sont des options personnelles ; et on choisit effectivement de vouloir adorer le Dieu de Jésus Christ, ou pas.

Alors, vous voyez, c’est à la fois une promesse extraordinaire de dire : vous êtes tous bienvenus, quelque soit votre histoire, quelque soient vos antécédents, quelque soit ce en quoi croit votre famille. La question aujourd’hui c’est : vous, en quoi croyez-vous ? Et çà, il faut avoir aussi le courage. Et c’est là donc une promesse agréable, mais aussi une exhortation. Le courage à un moment donné de dire : en question de religion, c’est moi qui décide pour moi. Mes parents, mes frères et sœurs, mes amis croiront ce qu’ils veulent, ils appartiennent à ce qu’ils veulent, pour une fois si j’ai un choix que je peux faire pour moi, c’est celui-là. Et donc cela nous invite à faire ce choix, d’une façon libre et volontaire en se positionnant par rapport à un message.

Et donc, la transmission de la foi ne se fait plus par les gènes dans le nouveau testament, mais elle se fait par la parole. C’est-à-dire par la transmission d’un message, auquel on adhère ou pas. Et c’est pourquoi il faut comprendre l’essentiel de notre église : elle est effectivement fondée sur la parole. Et c’est pourquoi aussi dans la réforme on a dit : le centre du culte, c’est la prédication. Et c’est pourquoi dans cette église, transformée en église protestante, nos prédécesseurs ont mis une énorme chaire, au centre, très haute, en disant : c’est cela la base de notre foi. Ce ne sont pas des rites, des actes religieux, des sacrements ou autres, c’est la prédication de la parole. Ecoutez la parole, lisez l’évangile, et dites si vous croyez ou non dans la bonne nouvelle de Jésus Christ.

Et c’est pourquoi également, dans nos paroisses, la chose la plus essentielle c’est effectivement la transmission de la parole, c’est-à-dire la prédication, et aussi les catéchismes. Les catéchismes, c’est donner aux enfants le ferment de la parole. Ils en feront quelque chose ou rien. Mais si on ne leur donne pas la parole, comment croiront-ils ? Une fois de plus, la religion n’est pas héréditaire, et ce n’est pas parce qu’on est baptisé à 3 mois que, forcément, on découvre que Jésus Christ est une bonne nouvelle pour soi.

Et cela est toute l’idée du nouveau testament - et de Paul en particulier - qui va développer cela dans l’épître aux Romains, au chapitre X, quand il dit : il n’y a aucune différence entre le juif et le païen puisqu’ils ont tous un même Seigneur qui est riche pour tous ceux qui L’invoquent car, quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé. Et il continue en disant : mais comment invoqueraient-ils celui en qui ils n’auraient pas cru et comment croiraient-ils en quelqu’un dont ils n’auraient pas entendu parler ? et comment entendraient-ils parler s’il n’y avait personne pour prêcher ?

Alors donc, voyez-vous, il y a cette nécessité pour nous de porter la parole partout. Et du coup non seulement nous croyons parce que nous recevons une parole, mais aussi nous sommes invités à ne pas être des rameaux stériles, et à transmettre. Et comment pouvons-nous transmettre ? En transmettant une parole.

Alors, cela est essentiel, ces païens : louez l’Eternel, vous les païens ! Là encore, il y a écrire autre chose que l’on peut y voir : le psaume ne dit pas que les païens aillent à Jérusalem pour louer l’Eternel. Le psaume dit juste : les païens qui louent l’Eternel – sans préciser. Et là encore, autre grande nouvelle, essentielle, fondamentale, et fondatrice de l’évangile et de notre foi protestante : il n’y a pas de lieu particulier pour adorer l’Eternel. Le psaume ne dit pas que les païens courent au temple, à la synagogue, à Jérusalem pour adorer l’Eternel, mais qu’ils louent l’Eternel, eux les païens, là où ils sont. Et donc, nous pouvons louer Dieu partout, là où l’on est.

Le psaume continue en disant : célébrez-le, vous, tous les peuples ! Là, on a un autre mot. Tout-à-l’heure, c’était les nations, les nations païennes. Ce coup-ci, ce sont les peuples. Et là c’est plus compliqué, parce que ce mot peuple vient du mot mère ; en effet le mot âme c’est le peuple, et âme c’est la mère. Et donc ces peuples dont il est question là, on pourrait dire pour nous en français, c’est comme la mère-patrie. Et Luther dit (puisque Luther connaissait apparemment l’hébreu, trois mots, en tout cas plus que moi ; j’ai vérifié qu’il avait raison) : âme – le peuple - désigne le peuple dans sa structure politique et avec son organisation sociale. Il a raison. Et du coup, cela veut dire que chaque peuple – dans sa structure politique et dans son organisation sociale – est invité à louer Dieu. Et là encore, il n’est pas question pour un peuple d’abandonner son organisation ou sa structure, mais le peuple, organisé comme il est, peut louer l’Eternel, à sa manière. Cela veut dire que chaque pays, chaque peuple peut louer l’Eternel sans avoir à se restructurer autrement pour adorer Dieu, d’une façon ou d’une autre. Il n’y a pas à imposer à un peuple une organisation particulière, mais on peut louer Dieu comme on est dans son pays et dans sa culture.

Et là encore, c’est quelque chose à laquelle la pensée réformée a toujours été très attachée : c’est ce qu’on appelle la théologie de la culture. Et de dire : il n’y a pas à « déculturer » les gens en leur disant que devenir chrétien c’est forcément renoncer à sa vie dans le monde où l’on est, mais que c’est dans le monde où l’on est avec sa culture, ses traditions et sa nature : adorer l’Eternel ! C’est la seule chose qui compte. Et du coup effectivement, je crois que notre religion doit s’adapter à la culture, et doit aussi s’adapter au temps moderne. Notre foi doit avancer avec le monde mais sans jamais oublier d’adorer l’Eternel. Louez, célébrez l’Eternel tous les peuples !

En effet, tous ces peuples pourraient courir un danger : c’est de célébrer, non pas l’Eternel, mais leur chef, leur roi, leur empereur. Et là le psaume dit bien : d’accord, vous avez votre organisation, tout ce que je vous demande, c’est de célébrer non pas votre organisation ou votre chef mais l’Eternel. Et ainsi il ne faut pas croire que sous prétexte que l’on veuille s’adapter à la culture ambiante, on soit néanmoins à la remorque de la culture ambiante. C’est de vivre dans notre culture ambiante, en célébrant l’Eternel. Le danger serait de faire de notre pays, de notre culture, de nos habitudes, de notre modernité, d’en faire une sorte de religion comme si ce en quoi nous croyons c’était notre structure démocratique, c’étaient nos habitudes dans le vent, les progrès de la “morale”, ou je ne sais quoi, mais non ! on peut adopter la culture de son pays, mais l’important c’est de toujours célébrer l’Eternel.

Et d’ailleurs, vous remarquerez aussi – je vous ai dit il faut lire ce psaume avec une loupe – que le mot peuples est au pluriel : vous, tous LES peuples. Et donc là encore, le psaume ne dit pas : il faut que tout le monde vienne, venir dans le peuple qui est Israël – Am ha’aretz, le peuple de la terre, le peuple de Dieu, le peuple de l’Eternel – il dit : vous, les peuples. Et donc le psaume – et c’est très moderne – admet une diversité et une pluralité de peuples. Cela est assez important, par exemple même pour l’œcuménisme aujourd’hui ; parce que l’œcuménisme parfois voudrait nous faire croire que le but serait d’avoir une seule organisation, un seul peuple chrétien réuni autour d’un seul berger avec une hiérarchie ; certains le croient, le psaume 117 croit le contraire, Luther aussi, et moi aussi. On peut avoir différentes organisations, on peut avoir différentes églises – vous êtes protestants, vous êtes catholiques, vous êtes arméniens, vous êtes coptes… - je m’en fiche, Dieu s’en fiche, louez l’Eternel. Et puis c’est tout. Là où vous êtes. Donc recherchez justement quelque chose qui est au-dessus de vous, recherchez ce Dieu, l’Eternel, qui est le Dieu qui nous libère, qui est ce Dieu qui vient à nous, comme le Dieu qui vient parler à Moïse sur l’Horeb en disant « je vois la misère de mon peuple et je viens pour le libérer », sans conditions, sans questions, juste par sa volonté et par sa grâce. Et donc mettez-vous sous le regard de ce Dieu de grâce et de libération qui est la seule chose qui compte dans notre vie.

Ensuite, ces nations, ces peuples, restent comme ils sont, humainement ; on ne leur impose aucune judéité, aucune uniformité. Cela montre aussi que la royauté du Christ doit être au-delà de ces questions de peuples, de nations, de religions, d’appartenances et de structures humaines. Et c’est là où évidemment Luther s’est engouffré (je vous ai dit il en a fait un livre entier, je vais essayer de faire un peu plus court pour ne pas vous lasser). On arrive dans une grande idée de Luther qui est ce qu’on appelle la théologie des deux règnes. Luther disait : il y a le règne de Dieu, c’est le règne de l’évangile, de la grâce et de l’amour, et puis le règne matériel : il faut bien que les pays aient des lois, il faut bien qu’il y ait des organisations, il faut bien que si des gens transgressent les lois humaines, on les punisse. Mais ce n’est pas le même règne. Transgresser la loi civile peut être une erreur mais n’est pas un pêché, en quelque sorte. Et Luther a voulu séparer ces deux règnes. Et c’est cela l’idée justement, une fois de plus : que les peuples gardent leurs droits, leurs coutumes, leurs lois, leurs cultures ; mais il y a un but plus élevé qui est de louer l’Eternel. Et ainsi le but pour chacun c’est de rester dans son métier, dans son activité humaine, et de louer l’Eternel. Il ne dit pas : faites votre métier seulement et contentez-vous de faire votre métier mais que dans son métier, dans son appartenance, dans sa corporation ou quoi que ce soit, il y a un but plus élevé qui soit la louange à l‘Eternel. Et cela est vrai même par rapport à toutes les lois morales, les lois civiles, les lois religieuses : de toujours aller au-delà pour louer l’Eternel.

On peut avoir des lois, des exigences, on peut avoir des structures d’églises mail il ne faudrait pas croire que l’enjeu d’être chrétien ou l’enjeu de la réussite ou du sens de sa vie serait de respecter ces règles. Il n’est pas là question d’obéissance, il n’est pas question de loi dans ce psaume ; nulle part il n’est question ni d’obéissance, ni de loi, ni de jugement, simplement de louer Dieu. Donc les lois, les exigences sont importantes, mais ce n’est pas l’essentiel, cela ne donne pas de sens, ce n’est pas un enjeu ultime. La morale consiste à voir comment on peut faire au mieux dans ce monde, mais la morale est une conséquence de notre foi, elle n’en est pas – je dirais – la cause.

Et puis Luther continue dans ce psaume en disant que toute sa théologie finalement repose sur un tout petit mot, qui est le mot qui est pile au centre du psaume. Ce mot est CAR – parce que. En effet le psaume dit « louez l’Eternel vous toutes les nations, célébrez-le vous tous les peuples CAR la bonté, l’amour de l’Eternel est immense. C’est-à-dire que la chose essentielle, le CAR, la raison pour laquelle nous pouvons louer Dieu, c’est que sa bonté est grande et que son amour est puissant. Et là encore, c’est toute la théologie de la réforme : parce que les prédicateurs médiévaux, au Moyen-âge, disaient aux gens : « faites de bonnes œuvres, faites le bien, pour que Dieu vous aime, et pour être sauvés. » Les réformateurs ont tout inversé en disant « il ne s’agit pas de faire le bien, de pratiquer des œuvres religieuses ou de louer Dieu pour qu’Il nous aime, mais nous pouvons louer Dieu et nous pouvons faire le bien PARCE qu’Il nous aime, et parce qu’Il nous a déjà sauvés ». Et donc vous êtes sauvés par grâce, cela est offert. Et cette grâce doit être la cause de votre capacité à faire le bien. Donc les réformateurs ont complètement inversé le système médiéval en faisant de l’amour de Dieu non pas, je dirais, le saucisson en haut du mât de cocagne qu’il faut essayer de gagner en grimpant sur le mât glissant, mais l’amour de Dieu comme étant le fondement de notre capacité-même à pouvoir un jour faire le bien. Cela est fondamental.

C’est redit dans le premier épître de Jean. Explicitement quand Jean dit : « nous aimons PARCE QUE Dieu nous a aimés en premier » ; c’est cela. C’est pour cela aussi que nous baptisons les bébés, parce que le baptême d’un bébé est un signe d’amour. Nous disons que l’amour est le premier, et avant même que nous en ayons conscience, déjà Dieu nous aime. Et la vie chrétienne consiste, non pas à essayer de gagner l’amour de Dieu mais d’apprendre à y répondre.

Vous voyez que, là, ce psaume en y mettant le CAR « car l’amour de Dieu est immense » est essentiel. Il n’y a pas un mot dans ce psaume d’un éventuel jugement, pas un mot de menace ; il n’y a aucun mot même sur les éventuels mérites de la sagesse, de la pratique ou de la loi. Rien sur les œuvres. Juste un amour inconditionnel qui est la cause de toute notre vie religieuse. C’est pour cela d’ailleurs que Paul cite ce psaume (Romains 15/9) quand il dit (je vous le relie parce que remis dans le contexte, cela redonne du sens) « tandis que les païens glorifient Dieu à cause de son amour, selon ce qui est écrit : C’est pourquoi je te louerai parmi les nations et je chanterai à la gloire de ton nom. Il est dit encore : Nations, réjouissez-vous avec son peuple ! Et encore : (là il cite le Psaume 117) Louez le Seigneur, vous toutes les nations, Célébrez-le, vous tous les peuples !» Alors on ne comprend pas pourquoi là, tout-à-coup, Paul cite ce Psaume 117 sauf si on connait la fin qui justement précise ce qu’il essaie d’exprimer qui est : « on peut glorifier Dieu à cause de son amour ».

Vous voyez que ce Psaume 117, bien que tout petit, est fondamental. Parce que si vous vous êtes, un jour, plongés dans les Psaumes, vous avez vu que juste après, le Psaume 119 est le plus long de tous les psaumes. Et celui-là, au contraire, est un psaume de lois, de commandements, de règles de justice…. On a 150, 180 versets de commandements, de lois, d’observances, de jugements et de choses comme ça. Il est essentiel de voir qu’on ne peut entendre la loi que si déjà à la base, on se sait pardonné, aimé et libéré. C’est-à-dire s’il n’y a pas d’enjeu fondamental de savoir « serai-je juste, serai-je non pêcheur, serai-je bon ? » Et de comprendre que c’est libéré et pardonné que je me tourne vers Dieu : Seigneur que ferai-je pour te servir et pour agir dans ce monde de façon positive ? Et c’est là où les psaumes ont en eux-mêmes toute la théologie de l’évangile.

Ce psaume est extrêmement fort également parce qu’il va à l’encontre de la tendance humaine. En effet, ce que nous aimerions dire, nous, c’est de dire « que tout le monde m’admire, que tout le monde me loue parce que mes œuvres règnent sur eux et ma doctrine doit demeurer éternellement ». Le psaume dit le contraire : « ce ne sont pas vos mérites qui doivent inviter les gens à vous adorer ou à vous admirer, mais simplement à vous tourner vers un plus grand que vous, qui est le Dieu d’amour ».

Et l’amour de Dieu donc, je vous l’ai dit, le psaume le qualifie comme puissant. Fort ou puissant est l’amour de l’Eternel ! Cela est intéressant aussi car cela montre que l’amour de Dieu n’est pas un amour mièvre : « ah c’est bien, dieu m’aime, Dieu est gentil, c’est sympathique, c’est touchant… » Non, ce n’est pas cela. L’amour de Dieu est un amour puissant, c’est un amour fort. C’est un amour qui bouleverse, un amour qui transforme, un amour qui renouvelle, un amour qui ressuscite, un amour qui guérit. Et je crois effectivement que le fond de l’évangile est là : il y a un dieu qui m’aime. C’est inacceptable, inadmissible, moi je suis peu de chose, je suis pêcheur ; cet amour de Dieu, on arrive à en prendre tellement conscience, que cela nous bouleverse, que cela nous transforme de l’intérieur. Parce que cet amour peut transformer des vies, il peut bouleverser des existences, il peut changer des cours de vie et faire de très, très grandes choses dans l’existence.

Et David continue dans ce psaume en disant : « car puissant est son amour pour nous - ou sur nous. C’est étonnant ce nous. David qui écrit ce psaume met un nous, qui englobe tout le monde : les peuples et aussi les païens. Ou encore, si vous, vous dites ce psaume, vous ne dites pas : parce que grande est sa bonté pour moi. Ce n’est pas pour moi, c’est pour nous ! Donc là encore, le psaume nous invite à sortir de notre égoïsme, pour voir que l’amour de Dieu, certes, me transforme mais que c’est aussi un amour dans lequel je suis en communion avec des frères et des sœurs, quelle que soit leur appartenance religieuse, ethnique ou autre. Fort est son amour pour nous.

C’est la même chose d’ailleurs dans le Notre Père : Notre Père – tout au nous ; ces demandes qui font en sorte que nous ne sommes pas des individus isolés, dans un contact unique avec Dieu mais que nous sommes dans une communauté. Et qui est ce nous ? Et bien, tout le monde, tous ceux à qui la parole est adressée.

Et puis le Psaume continue encore en disant : « sa fidélité est pour l’éternité ». La fidélité est compliquée parce que dans le texte hébraïque, Emet – Emuna, est à la fois la fidélité et la vérité. Et suivant les traductions d’ailleurs, vous trouverez l’un ou l’autre : sa fidélité demeure pour l’éternité ou sa vérité demeure pour l’éternité. La fidélité est une très belle chose. Peut-être la chose la plus formidable après l’amour de Dieu qui nous est dit. C’est-à-dire que même si nous nous éloignons de cette grâce de Dieu, Dieu nous attend toujours indéfectiblement pour nous recevoir. Et Dieu, même si nous, nous faiblissons, reste toujours fort, stable et fidèle. C’est la fidélité de Dieu. Dieu qui est inébranlable et qui est, je crois, la seule chose dans notre vie qui soit inébranlable. Tout ce après quoi nous nous attachons peut être balayé, bouleversé d’un instant à l’autre, nous pouvons tout perdre d’une minute à l’autre : la santé, les enfants, la famille, la maison, la fortune, la richesse, le métier, tout. Seul Dieu est fidèle pour l’éternité, inébranlable. Parce que votre Dieu, Il ne vous abandonnera jamais. Et toujours, vous aurez ce Dieu avec vous, qui vous accompagne, toujours source inépuisable, infinie patience d’amour, de pardon, de paix et d’espérance.

Ou alors on pourrait effectivement entendre, pas tellement fidélité dans ce cas-là, mais vérité. La vérité de Dieu demeure pour l’éternité. Ce n’est pas mal cela car depuis le début on nous dit l’amour, l’amour, l’accueil, la douceur,… mais est-ce qu’il n’y a pas aussi à un moment donné une vérité ? Une vérité de Dieu ?

Le couple fertile : amour et vérité. L’amour pur est une sorte de chose molle, qui est bien agréable, réconfortante mais qui ne fait pas forcément grandir. La vérité, c’est ce qui nous aide à grandir, qui nous fait comprendre qui nous sommes, ce que nous pouvons faire, la vérité du monde. Mais la vérité est dure. L’amour est doux mais la vérité est dure. Mais l’amour sans la vérité, c’est peu de chose. Et la vérité sans amour, ça nous tue. Et donc, je crois justement que l’amour de Dieu n’est pas un amour qui nous trompe en nous faisant croire que l’on peut rester comme on est, qu’il n’y a pas de problèmes. Mais c’est un amour vrai qui nous rappelle aussi qui nous sommes. C’est une vérité qui ne nous écrase pas, qui ne nous écrase pas dans notre péché, parce que cette vérité de Dieu, elle est aussi amour.

Je comprends pourquoi Luther a tant aimé ce psaume parce que là encore, c’est la base de toute la théologie de Luther qui disait : le fondement de l’histoire, c’est que l’homme est à la fois pêcheur et pardonné. L’homme est pêcheur, c’est la vérité. Vous êtes mauvais, faible, vous avez raté, vous avez fait plein d’erreurs dans votre vie ; ça c’est la vérité nue, pure et vraie. Vous ne pouvez pas dire le contraire. Mais l’homme est aussi pardonné. C’est-à-dire : et alors ? Néanmoins, Dieu t’aime, tu as le droit d’exister, tu as le droit de vivre, tu as le droit de te relever, de te remettre en marche. Et tu as le droit d’être, et de te présenter dans le monde, devant les autres et devant Dieu.

Donc l’homme est à la fois pêcheur et pardonné. Il faut arriver à maintenir les deux : si je suis trop pêcheur alors je suis plein de complexes et je ne fais plus rien ; si je suis trop pardonné, alors je me fiche de tout. Mais il faut savoir : la vérité c’est que je suis pêcheur et néanmoins que je suis pardonné. Le fait que je sois pardonné n’enlève pas le fait que je sois pêcheur, le fait que je sois pêcheur n’enlève pas que je sois pardonné. Vous regarderez la prochaine fois la liturgie du culte du dimanche, tout tourne autour de ça.

Et donc il y a une vérité, la vérité de Dieu. Parce que la vérité de Dieu, ce n’est pas simplement de dire ce que nous sommes ; je crois que Dieu se fiche un peu de ce que nous sommes, de ce que nous avons fait et de notre passé. Ce qui compte pour Dieu, Sa vérité, c’est ce à quoi nous sommes appelés ; c’est-à-dire que la vérité de Dieu est en avance sur ce que nous sommes. Et Dieu dit : tu peux faire ça ! ça c’est la vérité. Dieu dit : il y a là quelque chose pour toi, il y a là un chemin pour toi ! ça c’est la vérité. La vérité de Dieu est créatrice. Et c’est peut-être ça le plus essentiel. Quand Dieu dit : la lumière est – dans la création, c’est faux, il n’y a pas de lumière. Mais quand Dieu dit : la lumière est, moi je vous assure, la lumière, elle arrive. C’est-à-dire la vérité de Dieu est une vérité en avance sur ce qui est. Et c’est pour cela d’ailleurs que les dix commandements ne sont pas des impératifs mais des futurs : tu adoreras un seul Dieu, tu ne feras pas d’image taillée, tu ne commettras pas d’adultères…, tu ne voleras pas, tu ne tueras pas. Ce sont des futurs, c’est-à-dire ce sont des promesses. Et donc nous avons un amour vrai et créateur, une parole qui fait du neuf en nous.

Et puis enfin ce psaume termine dit Luther par une exhortation : Alleluia – si on traduit, cela fait Louez soit Dieu, Louez l’Eternel. Que faire en réponse à l’amour de dieu, à sa fidélité, à sa vérité ? Mes amis, une seule chose : louanges et actions de grâce. C’est-à-dire se reporter à plus grand que soi. Louez Dieu, rien d’autre n’est imposé ; pas d’actes religieux, pas de morale, rien. Mais c’est la conscience de l’amour, de la fidélité de Dieu et le fait de pouvoir Le louer qui doit être le cœur de toute notre vie, de toutes nos décisions, de notre façon de vivre, de notre vie profane et religieuse parce que si le cœur est bon, les fruits aussi seront bons.

Louez l’Eternel, vous toutes les nations,
Célébrez-le, vous tous les peuples !
Car puissante est pour nous sa bonté,
Et sa fidélité est pour l’éternité.
Louez l’Eternel !

Amen.

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Lecture de la Bible

Psaume 117

1 Louez l’Eternel, vous toutes les nations, Célébrez-le, vous tous les peuples!
2 Car sa bonté pour nous est grande, Et sa fidélité dure à toujours. Louez l’Eternel!

Romains 15:8-13

8 Je dis, en effet, que Christ a été serviteur des circoncis, pour prouver la véracité de Dieu en confirmant les promesses faites aux pères,
9 tandis que les païens glorifient Dieu à cause de sa miséricorde, selon qu’il est écrit: C’est’est pourquoi je te louerai parmi les nations, Et je chanterai à la gloire de ton nom. Il est dit encore:
10 Nations, réjouissez-vous avec son peuple! Et encore:
11 Louez le Seigneur, vous toutes les nations, Célébrez-le, vous tous les peuples! Esaïe dit aussi:
12 Il sortira d’Isaï un rejeton, Qui se lèvera pour régner sur les nations; Les nations espéreront en lui.
13 Que le Dieu de l’espérance vous remplisse de toute joie et de toute paix dans la foi, pour que vous abondiez en espérance, par la puissance du Saint-Esprit!

1 Jean 4:7-11

Bien-aimés, aimons-nous les uns les autres; car l’amour est de Dieu, et quiconque aime est né de Dieu et connaît Dieu.
8 Celui qui n’aime pas n’a pas connu Dieu, car Dieu est amour.
9 L’amour de Dieu a été manifesté envers nous en ce que Dieu a envoyé son Fils unique dans le monde, afin que nous vivions par lui.
10 Et cet amour consiste, non point en ce que nous avons aimé Dieu, mais en ce qu’il nous a aimés et a envoyé son Fils comme victime expiatoire pour nos péchés.
11 Bien-aimés, si Dieu nous a ainsi aimés, nous devons aussi nous aimer les uns les autres.

(cf. Traduction NEG)