Jean avait un vêtement de poils de chameau(Évangile selon Marc 1:1-13)(écouter l'enregistrement - culte entier - voir la vidéo ci-dessous) Culte du dimanche 15 janvier 2017 Les évangiles nous donnent des détails assez étranges et rigolos sur Jean-Baptiste.
En réalité tout est important dans l’Évangile, sinon, l’auteur ne l’aurait pas mis. Par exemple, pourquoi nous donne-t-on le menu des repas de Jean-Baptiste et pas le menu des repas de Jésus ? Pourtant Jésus est infiniment plus important que Jean-Baptiste et le menu des repas de Jésus devaient être plus appétissants que ceux de Jean, puisque nous savons que Jésus aimait bien manger et boire. C’est que le menu des repas de Jésus n’a pas d’importance pour notre salut, alors que le menu du repas de Jean-Baptiste est important pour nous faire avancer. Mais quoi ? Et d’abord pour quoi faire ? Pour préparer notre chemin, dit l’Évangile selon Marc. Et ce chemin, c’est le Christ. Être vivant dans ce beau chemin, c’est la vie, une vie belle et vraie, une vie avec Dieu, une vie qui rayonne de plein de bonnes choses. Une vie plus forte que tout. Les 4 évangiles nous le disent tous, Jésus tout seul n’y suffit pas. Il apporte l’essentiel, mais pour l’accueillir dans notre vie, nous avons besoin d’être préparé. Cette préparation aussi nous est donnée, c’est ce qu’apporte Jean-Baptiste. Et c’est pour nous montrer ce que Jean apporte que l’Évangile nous donne ces détails bizarres : le désert, le manteau en poils de chameau, la ceinture de cuir, les sauterelles et le miel sauvage. Seulement, ces mots de l’Evangile renvoient à autre chose qu’à leur sens premier. Par exemple cette histoire nous dit que Jean « criait dans le désert » et que tout le monde venait à lui, c’est bizarre car il n’y a pas grand monde dans le désert alors comment « tous les habitants de Jérusalem et du pays de Judée venaient vers lui » ? Et comment est-ce que Jean pouvait les « baptiser dans le désert » alors que plus loin il est précisé que c’était plutôt dans le fleuve Jourdain qu’il baptisait (ce qui est plus logique, c’est moins sec). « Plongés dans le désert »Le mot « désert » ici ne veut pas simplement dire un endroit tout sec ou un endroit où il n’y a personne. Souvent, dans la Bible, des mots renvoient à des histoires anciennes et bien connues de la Bible. C’est comme sur internet, quand des mots sont soulignés par un trait ou une couleur, ou simplement le curseur change de forme quand on passe dessus, nous savons que ces mots renvoient à une autre page. On appelle cela de l’hypertexte. C’est du texte mais c’est plus que ce texte car il renvoie aussi à autre chose. C’est comme cela que fonctionnent la Bible et particulièrement les évangiles, ils sont pleins d’hypertextes. Alors peut-être que Jean vivait en partie comme un ermite dans des coins isolés, mais ce n’est pas la question puisque l’Évangile ne nous demande pas de devenir des ermites mangeant des sauterelles. Il faut cliquer sur le lien pour comprendre. Que veut dire alors cette phrase « Jean baptisait dans le désert », ou plus précisément, il est écrit « Jean plongeait (les personnes qui l’écoutaient) dans le désert ». Ce n’e’st pas difficile. Le désert fait référence à une des deux ou trois histoires les plus connues de la Bible : l’histoire de Moïse et du peuple hébreu libéré de l’esclavage en Égypte en voyage dans le désert vers la Terre Promise. Dans ce désert, les hébreux sont nourris par Dieu de pain (la manne) et nourris aussi de sa Parole (Moïse y rencontre Dieu, et apprend quantité de choses de lui, sur lui, sur la vie). Pour approfondir encore ce que cela peut nous dire, il faudrait relire donc le livre de l’Exode et le livre des Nombres. Jean « nous plonge dans le désert », il nous replonge dans cette histoire. Et même, le texte de passe ici au singulier : « Voici, j'envoie devant toi mon messager pour préparer ton chemin, c'est la voix de celui qui crie dans le désert » Cet appel est individuel, personne ne peut le faire à la place d’un autre. Se plonger dans cette histoire, vivre pour soi-même cette libération, vivre cette rencontre avec Dieu, être enseigné et nourri par lui, être conduit jusqu’à la vie. Ou en tout cas attendre cela, savoir que Dieu veut nous l’apporter et que c’est en Christ que nous le vivrons, que je le vivrai, moi. Et que toi, tu pourras le vivre. Se plonger dans « le désert ». Pour approfondir encore ce que cela peut nous dire, il faut faire un peu d’hébreu. Car le mot «désert », midebar en hébreu, veut dire « désert », certes, mais il veut dire aussi autre chose
Peut-être nous faut-il ensuite nous intéresser à ce que Jean nous dit de la part de Dieu avec son curieux look : « Poils de chameau et ceinture de cuir »Est-ce que Jean veut lancer une nouvelle ligne de vêtement ? Cela nous aurait plus intéressé de savoir à quoi Jésus ressemblait physiquement, mais de cela l’Évangile ne nous dit rien car cela n’a aucune importance pour notre cheminement vers la vie. Alors qu’apparemment, le vêtement en poil de chameau et la ceinture de cuirs autour des reins de Jean-Baptiste sont importants. D’abord le vêtement en poils. C’est quand même étonnant, non ? Mais l’allusion est là encore facile à trouver pour les personnes de cette époque où l’on attendait le Messie, qui devait être précédé, pensait-on, par le retour du prophète Élie qui portait lui aussi ce genre de vêtements au poil (1 Rois 1:8). Et bien entendu, la population savait pourquoi Élie portait un vêtement en poils, car eux aussi avaient appris à lire la Bible comme un hyper-texte. Ce vêtement d’Élie était également un renvoi à une histoire plus ancienne de la Bible, celle d’Ésaü et Jacob (Genèse 25:25). Rappelez-vous. Ésaü était, dès sa naissance, poilu comme un singe. Il est la figure de notre dimension animale. Son jumeau Jacob est la figure de notre dimension spirituelle, apparemment faible mais qui doit avoir dans notre bénédiction la première place même si notre Ésaü évoque aussi une bonne dimension, bénie et sainte. Que nous suggère donc ce vêtement de poil d’Élie et de Jean-Baptiste ? De bien voir où nous en sommes. De bien nous ajuster dans notre tête, dans notre pensée, dans notre espérance entre les multiples dimensions de notre être. De hiérarchiser nos priorités. Bien entendu pas pour mépriser notre dimension animale. Au contraire. Comme Jean-Baptiste le figure, nous sommes des Ésaü. Mais Jacob talonne Ésaü. Faisons-lui place, Bénissons-le. Noël cherchait à nous apprendre que déjà le Christ est né en nous. Jean-Baptiste nous appelle à le bénir, à le baptiser en nous. Mais en même temps de bien saisir que nous ne sommes actuellement pas encore pleinement Christ. Nous sommes aussi Ésaü. Et cela nous invite à la conversion, au cheminement. Et c’est là que l’ajout de la couleur du poil est intéressante. Se savoir vêtu comme de poils de chameau. Un Ésaü encore, certes, mais comme un chameau, en marche dans le désert. C’est son domaine, ce silence habité par une Parole. D’autres trouveraient ça aride, lui s’y sent bien. Ses larges pattes s’appuient en souplesse sur la fluidité du sable, comme le chercheur de sens aime le foisonnement des interprétations. Et puis le chameau est plus libre que d’autres car il a de bonnes réserves d’eau dans ses bosses. Nous ne sommes pas des bébés qui doivent être allaités au biberon toutes les 3 heures. Le chameau peut marcher une semaine sans rien manger ni boire, et quand il trouve alors un point d’eau il se rattrape en buvant 120 litres d’un coup. Christ nous donne cette liberté, cette autonomie. Il suffit que régulièrement nous puissions boire à la source de bénédiction qu’est Dieu pour ensuite avancer librement sur notre chemin. Car c’est en nous, dans notre cœur, dans notre être que nous portons la bénédiction de Dieu, comme le chameau porte de l’eau dans ses bosses. C’est une première force, interne, que Dieu nous donne en Christ pour cheminer dans la vie. La ceinture de cuir de Jean-Baptiste représente une autre force dont il nous appelle à nous armer. Savez-vous à quel texte fait référence cette seconde pièce de l’habillement de Jean ? Encore dans la Genèse, quand Adam et Ève ont eu le projet de se prendre pour dieu à la place de Dieu, ils vont très mal. Dieu leur donne un bout de vêtement en cuir pour les couvrir, en signe de pardon, en signe de paix, pour les aider à vivre et avancer. Même si nous étions les pires des mauvais, complètement ennemis de Dieu comme Adam et Ève, cette histoire de bout de cuir nous dit que nous pouvons compter sur le pardon et l’aide de Dieu. Cette connaissance, cette promesse, cet évangile nous pouvons nous en faire une ceinture pour notre chemin en ce monde. C’est une grande force pour faire le pas suivant, pour avoir une idée nouvelle, une inspiration. Mais pour marcher, même quand on est un chameau, il faut de la nourriture pour franchir le désert. Jean a un menu tout trouvé : Sauterelles du chef et son miel sauvage.Pour saisir l’allusion, cela aide de se rappeler que nous sommes invités à nous préparer à vivre comme les hébreux un chemin de libération dans le désert. Eux, c’était d’Égypte jusqu’à la Terre Promise. Nous, c’est donc depuis l’esclavage de notre animalité jusqu’à la promesse d’être vivant grâce au Christ. Dans ce trajet des hébreux, il est précisément question de sauterelles (au début) et de miel (à la fin du trajet). Le menu de Jean nous invite donc à nous nourrir de cette force de salut qu’est Dieu dans cette histoire. Pas simplement la connaître mais y puiser notre substance. Dieu envoie des sauterelles pour libérer les hébreux en faisant plier l’horrible pharaon qui les transformait en esclaves. Les sauterelles dévastent ses précieuses récoltes. Jean-Baptiste nous propose de nous nourrir de cette méthode : affamer ce qui nous empêche d’avancer. Travailler en amont du problème qui nous enchaîne. Ce n’est pas toujours facile avec nos propres forces d’affamer ainsi notre faiblesse, notre colère, notre frustration, nos rancunes... Mais avec l’aide de Dieu, qui fait des prodiges dans ce domaine, oui. Et nous nourrir aussi de miel. C’est l’aliment par excellence de la Terre Promise dont l’autre nom est « le pays où coule le lait et le miel ». Tout au long du trajet, Dieu donne aux hébreux un avant gout de la Terre promise avec la manne qu’il fait pleuvoir le matin et qui a le goût de gâteau au miel, nous dit la Bible. Ce miel est sauvage car étant un cadeau de Dieu nous n’avons pas eu à le cultiver. Assaisonner nos sauterelles de bon miel. D’abord, ça fait passer (la sauterelle, j’imagine un peu sec, amère et âcre, comme un médicament). Mais plus profondément, cela nous place dans une double espérance d’aide de Dieu. Sur les deux buts de ce cheminement, de cette ouverture à ce que le Christ peut nous apporter. Travailler à la fois sur notre origine et sur notre but, compter sur Dieu pour briser ce qui nous enchaîne encore ; et déjà nous nourrir de l’aliment de la vie éternelle. Car nous sommes en chemin dans le désert, mais nous avons encore un pied en Égypte et déjà un pied en Terre Promise. Jean essaye de nous faire saisir cette réalité ambiguë, et passionnante de la condition humaine. A la fois Ésaü par notre naissance et déjà Jacob par la bénédiction de Dieu. À la fois Adam rebelle contre Dieu et pourtant déjà ressuscité en Christ. Encore en chemin dans un désert tout sec mais alimenté par la source intérieure de l’Esprit et nourri du miel de la Parole de Dieu. À la fois faible et retombant sans cesse mais fort de l’amour et du pardon de Dieu. Avec tout cela, nous pouvons tranquillement avancer à notre rythme, au pas chaloupé du chameau. Nous sommes chez nous dans ce désert où Dieu nous accompagne. Amen Vous pouvez réagir sur cet article du blog de l'Oratoire,
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Pasteur dans la chaire de
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Vidéo de la partie centrale du culte (prédication à 07:51)(début de la prédication à 07:51) film réalisé bénévolement par Soo-Hyun Pernot Si vous avez des difficultés pour regarder les vidéos, voici quelques conseils.
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