L'année 1958, qui commence,
ne sera pas de tout repos en France. L'aggravation de la crise algérienne,
le retour aux affaires du Général de Gaulle et le
changement de République qui va s'ensuivre domineront l'actualité.
La " Feuille Rose ", qui entame sa 59èrne année
d'existence, a, pour l'instant, d'autres préoccupations inhérentes
au fonctionnement de l'Eglise. Pour les aborder, le ton est celui
du parler vrai, tout à fait à l'opposé de la
langue de bois.
C'est le pasteur Vidal qui donne le " la" dans son éditorial
de Nouvel An, intitulé "Debout ". " La religion
chrétienne, écrit-il, n'est pas un lit de repos. L'Evangile
veut être reçu et pratiqué debout (...) A vivre
mollement couchés en confort et bien-être, les plus
forts perdent leur courage. Le souci de leur tranquillité
détourne leur esprit des préoccupations et des inquiétudes
sacrées ". On ignore ce qui se passe au juste durant
les soirées d'études bibliques destinées aux
jeunes; en tout cas, là encore, le ton est peu amène
pour rappeler l'utilité de ces réunions d'" approfondissement
de notre foi ".
" Faut-il le répéter s'interroge-t-on. L'Evangile
est une source de vie, non de sommeil. De même, une vraie
étude biblique n'est pas une heure de sombre piété
sclérosée dans l'ennui, mais une heure de ressourcement
". Jusqu'à la responsable des sorties théâtrales
qui donne de la voix avant une soirée au Théâtre
de l'OEuvre où l'on joue " Inquisition ". "
Il est bien clair, écrit-elle dans la Feuille Rose de février
1958, que les personnes qui s'inscrivent pour avoir un billet s'engagent
aussi à assister à la discussion de la pièce.(...)
Nous ne sommes pas un bureau de location ".
" Chantez à l'Eternel, vous qui l'aimez ! ". L'exhortation
du psalmiste connaît des défaillances parmi les paroissiens
depuis que, trois mois auparavant, " pour obvier à trop
d'accoutumance, la plupart (des " spontanés ")
ont été changés ". Sous le titre "
Méditation ", le pasteur Lauriol estime que " les
fidèles ne les ont pas appris assez vite. Il arrive que la
Maîtrise seule entonne les premières mesures. L'assemblée
rattrape comme elle peut, comme elle sait. Ce n'est pas digne de
notre culte ". Un seul remède: " Préparez-les
à la maison, recommande le pasteur Lauriol (...) Chantez-les
en famille, comme faisaient nos pères ". Ainsi en finira
t-on, espère t-il, avec " le murmure de lèvres
entrouvertes ". " Un cantique mal su, hésitant,
grelottant, supprime la ferveur qu'il devrait exprimer ".
Cette chronique sur le " parler vrai " serait incomplète
si l'on n'évoquait pas le problème récurrent
des finances. " C'est l'avenir de l'Oratoire qui est en jeu.
Voulonsnous qu'il vive ? ", s'interroge-t-on à propos
du faible rendement de la souscription pour le réaménagement
du le' étage de la Maison paroissiale destiné désormais
aux jeunes. Pas d'empressement non plus pour rassembler l'aide promise
à la Société des Missions: le responsable "
n'a pas encore reçu le tiers de la somme que nous devons
fournir ". Il est vrai que les paroissiens sont sollicités
de toutes parts: entre autres pour la reconstruction de nos orgues,
dont l'installation a pris du retard; pour la " Feuille Rose
", dont le coût augmente de 10%, mais pour laquelle les
paroissiens ont quand même versé 28 200 francs en un
mois.