Voyage en terres orthodoxes :
le judaïsme orthodoxe
Le 5 décembre, Philippe
Goldmann, qui étudie et enseigne la pensée juive,
est venu nous parier des orthodoxies dans le judaïsme. Signalant
d'entrée de jeu la complexité de l'univers juif, il
s'est attaché à en évoquer les différents
groupes. En Israël, les orthodoxes, c'est-à-dire ceux
qui observent toutes les règles de la halakhah représentent
20 % de la population, à côté des traditionalistes,
qui sont d'observance plus souple : 35 %, des laïcs : également
35 %, des militants laïcs anti-religieux: 10 %et du judaïsme
libéral. En France, les synagogues et les centres orthodoxes
sont nombreux et se développent en marge des consistoires
ainsi que le mouvement libéral.
Historiquement, il faut faire la différence entre :les
Ashkénazes (juifs d'Allemagne puis d'Europe centrale parlant
yiddish) et les Sépharades (juifs d'Espagne puis du monde
méditerranéen parlant le judéo-espagnol) les
sionistes (pour la création d'un État en Israël)
et les anti-sionistes, les Hassidim et les Mitnagdim,
Toute l'histoire du judaïsme européen est marquée
par les expulsions et les persécutions. (Angleterre au XIlle
siècle, Espagne en 1492, massacres en Pologne en 1648 ...
) Mais malgré sa dispersion, le judaïsme a bén&
ficié de règles unifiées, notamment grâce
au travail de Joseph Caro, qui rédigea le Shulhan Arukh (la
table dressée) imprimé à Venise en 1565. Ayant
vécu comme lui à Safed au XVIe siècle, le kabbaliste
Isaac Louria eut également une grande influence sur tout
le monde juif.
C'est nourri des enseignements de la kabbale et au cur des
pers&cutions que le hassidisme (hassid en hébreu veut
dire pieux) est fondé par le Baal Shem Tov en Podolie (Pologne/Russie)
au XVIlle siècle. Il s'agit d'un véritable mouvement
de réveil spiritualiste. En réaction, le Gaon de Vina
(Lithuanie) conduira le mouvement des mitnagdim (opposants) dans
la voie de l'étude et de la culture.
Au début du sionisme (le, congrès du mouvement sioniste
en 1897) le j4daïsme orthodoxe le taxe de faux messianisme
et d'idolâtrie. Mais il y aura des rabbins sionistes, ainsi
Abraham Cook, pour qui le sionisme est un messianisme rédempteur.
Aujourd'hui en Israél, il y a de multiples organisations
politiques représentant toute la gamme des sensibilités
orthodoxes mais le lieu d'origine familiale compte beaucoup dans
le choix d'une organisation. Cela conditionne donc également
les opinions sur la question du sionisme et de l'État, qui
sont très diverses. Mais le but du monde orthodoxe dans son
ensemble est de se maintenir, car il a été décimé
par la Shoah. Par rapport à la modernité, on peut
noter une affitude paradoxale : tous les outils proposés
par la modernité sont utilisés par des gens qui, en
revanche, gardent un style et une tradition vestimentaire très
liés au passé. De même, cet univers qui baigne
dans une ambiance miraculeuse forte reçoit aussi un enseignement
rationaliste de qualité dans les yeshivot (écoles).
Néanmoins, la marque du monde orthodoxe est l'isolement
volontaire, aussi bien au niveau de l'habitat que des réseaux
scolaires, des hôpitaux, de la presse ... Vis-àvis
du monde extérieur, la méfiance règne, notamment
à l'encontre du christianisme et de l'Islam, et il n'y a
pas de prosélytisme, sauf chez les Loubavitch.
Le monde orthodoxe se définit encore par son puritanisme
et une stricte séparation des sexes, mais l'importance de
l'amour conjugal y est très affirmé, et les épouses
sont très respectées. Et depuis le début du
XXe siècle, les filles ont des écoles.
Dernière remarque de Philippe Goldman: il existe une certaine
violence verbale et parfois physique vis-à-vis de l'extérieur,
car c'est un monde sur la défensive, mais cette violence
s'exerce aussi à l'intérieur du monde orthodoxe lui-même.
Comme on a tendance à être très critique à
son égard, il est bon de garder en mémoire les valeurs
positives que sont
- la recherche d'un idéal de sainteté et l'exaltation
des vertus morales
- un modèle de vie communautaire où la solidarité
n'est pas un vain mot
- un profond respect des anciens
- une foi profonde qui fait accepter la pauvreté et des
conditions de vie souvent difficiles.
Florence Taubmann
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