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Les dames de Barbezieux
de Jacques Chardonne
fréquentaient l'Oratoire du Louvre

 

 

« Les destinées Sentimentales » constituent l’avant-dernière œuvre que nous vous présentons, dans le cadre de nos chroniques « L’Oratoire et la littérature ». L’auteur de cet ouvrage, Jacques Chardonne n’est plus guère lu aujourd’hui. L’histoire de la littérature de Lagarde et Michard, qui a formé les générations de lycéens d’après-guerre, ne lui consacre que deux pages, autant dire qu’il n’a jamais été mis au programme du bac. Si « Les destinées sentimentales » provoquent un petit sursaut de mémoire, c’est parce qu’elle ont été portées à l’écran en juillet 2000 par Olivier Assayas.

L’hiver dans la capitale

Jacques Chardonne (1884-1968) avait une double ascendance provinciale. Son père, qui était Charentais, dirigea une importante maison de cognac tandis que sa mère, une Haviland, Américaine quaker, était héritière d’un des plus grands porcelainiers de Limoges. Il fut élevé dans la religion protestante pour laquelle il manifesta un goût modéré.

L’œuvre romanesque de Chardonne se déroule dans ce double cadre provincial : la Charente d’abord avec sa ville natale de Barbezieux, Limoges ensuite. Elle est empreinte du charme désuet d’une époque révolue qui vit les grandes dynasties industrielles bourgeoises sombrer progressivement pour n’avoir pas su s’adapter aux mutations du monde de l’après- guerre de 1914-1918.

Ainsi en fut-il des Pommerel de Barbezac (Barbezieux) arc-boutés sur la commercialisation de cognacs de plus de 70 ans d’âge vieillis en fûts de chêne, qui,n’ont pas su prendre le virage de la mise en bouteille et qui furent progressivement évincés du marché international. Il en fut de même pour les Barnery de Limoges qui, longtemps, produisirent la porcelaine la plus raffinée que l’on puisse trouver, mais qui perdirent, eux aussi, leur clientèle américaine qui se tourna vers les porcelaines allemandes moins belles mais beaucoup moins chères.

Les Pommerel et les Barnery étaient de vieilles familles protestantes, unies par des liens d’amitié. Les chefs de ces dynasties vivaient sobrement, sans ostentation, logeant à proximité de leurs chais ou de leur fabrique, mais les familles possédaient des châteaux où toute la jeunesse se retrouvait lors de grands bals. On allait faire du tennis, on canotait sur la Charente ou sur la Vienne. On vivait avec les principes immuables de la bourgeoisie de province. Ces familles possédaient toutes des appartements dans les quartiers chics de la capitale, où les douairières venaient passer les rigueurs de l’hiver.

Les destinées sentimentales

Chardonne est surtout considéré comme le romancier du couple dont il décline à longueur de pages toutes les figures du sentiment amoureux dans un style admirable et précieux. Dans « Les destinées sentimentales » il met en scène le couple de Jean Barnery héritier des porcelainiers qui, ayant répondu à une vocation pastorale, était venu, alors qu’il était un jeune célibataire prendre la paroisse de Barbezac, chaudement recommandé par la famille Pommerel.

Mais un pasteur de province ne doit pas rester célibataire longtemps, ce n’est pas convenable, aussi épousa-t-il Nathalie, la fille d’un contremaître de la fabrique de sa famille avec qui il eut une fille, Aline. Cette mésalliance fut désastreuse et se termina par un divorce. Jean Barnery se remaria avec une jeune fille de Barbezac, Pauline, nièce des Pommerel, mais il dut renoncer à sa carrière de pasteur et quitter la ville.

Le beau sermon de l’Oratoire

Venons-en aux liens de ces familles avec l’Oratoire du Louvre. Quand une des jeunes femmes de cette société revenait d’un voyage à Paris, avec « des ondulations profondes, une veste nouvelle à col Médicis, une voilette à gros pois, l’attitude dégagée, laissant voir sous sa jupe verte des volants de taffetas changeant », on l’interrogeait :

-« As-tu été au théâtre ?

- Je suis allée à l’Opéra, au Français…J’ai entendu un beau sermon de M. Roberty à l’Oratoire.

- As-tu été au temple de M. Wagner, boulevard Beaumarchais ?

- Non, il y a tant de monde qu’il faut arriver très tôt. Et puis mes parents n’aiment pas les libéraux, qui ne croient pas à la divinité de Christ…Cela mènerait loin.

- Gardons nous d’aller trop loin, dit Pauline ».

Pauline, qui devait plus tard épouser le pasteur Jean Barnery, avait pourtant fait son instruction religieuse avec le pasteur Wagner. Sollicitée par Jean de devenir monitrice à l’école du dimanche de Barbezac, elle refusa catégoriquement.

- « Pourquoi ? Vous avez bien fait votre instruction religieuse ?

- Je l’ai faite à Paris, avec un pasteur admirable, un paysan de génie : Charles Wagner. Et pourtant, je vous l’avoue, pas un jour, même enfant, un sentiment religieux ne m’a effleurée.

- Vous avez perdu la foi ?

- Pardon, je ne l’ai pas perdue. Je ne l’ai jamais eue. Je n’ai jamais éprouvé rien qui en approchât. Je n’enseignerai pas à des enfants ce que je ne crois pas ».

La visite au pasteur

Quand Jean Barnery prit la décision de se remarier avec Pauline, il voulut assurer une vie confortable à Nathalie, sa première femme et à leur fille Aline qu’il installa dans un appartement de l’avenue de Messine à Paris. Nathalie se préoccupa de l’instruction religieuse de sa fille devenue adolescente, parce que ses fréquentations lui donnaient du souci. Elle alla voir le pasteur de l’Oratoire, M. Théophile Sabatier qui habitait depuis longtemps rue de Miromesnil dans un vaste appartement où il recevait ses visiteurs deux fois par semaine. La cheminée de son bureau était surmontée d’un Coligny en bronze, la main sur son épée et figé dans toute l’énergie de sa foi.

« Aline avait passé l’âge de la première communion, mais elle ne pouvait toujours différer cette cérémonie. Une telle infraction à la coutume ne se concevait pas, même à une époque de révolution des mœurs.

«Tu feras ta première communion cette année.

- Oui maman ».

Une Première Communion à l’Oratoire

« Au second étage de la maison presbytérale, face au temple de l’Oratoire, dans une salle tapissée d’un papier brun, les jeunes auditeurs sont assis autour d’une longue table présidée par M. Sabatier. A sa gauche se tiennent les garçons, le visage encore enfantin, avec leurs cols ouverts, les cheveux drus partagés par une raie, les mains bien lavées ; à sa droite les filles bouffies et molles ou futées, ou qui ressemblent déjà à de petites vieilles anguleuses et jaunes. Tous de conditions différentes, pauvres ou riches, c’est à peine si l’on distingue les variétés d’origine à un détail du vêtement.

Lorsque Aline s’assit au bout de la table, elle ôta son manteau de petit- gris, découvrant sa robe de velours souple, les manches courtes, un cercle d’or gravé au dessus du coude. Personne ne parut la remarquer ».

Nathalie avait toujours écrit les lettres de sa fille. C’est elle qui rédigeait les devoirs que M. Sabatier demandait à ses catéchumènes. De son écriture enfantine, tout engourdie, Aline recopiait péniblement le texte enflammé et un peu incohérent. M. Sabatier fut frappé par l’accent des devoirs d’Aline ».

Un peu plus tard, raccompagnant la jeune fille par le jardin des Tuileries, « avec des gestes qui faisaient flotter les pans de sa redingote, il dit : « La première communion est tardive dans notre religion, parce que nous voulons que l’enfant ait conscience de ses actes et de ses engagements. Vous entendez souvent une parole dont il faut avant tout se pénétrer : « Nous sommes nés dans la corruption ». Quand vous prendrez conscience du mal qui est en vous, vous serez sur le chemin du salut. Si le mal est en nous, il y a aussi une voix (…) il y a un ami (…) Apprenez à l’entendre (…) écoutez-le (…) Alors tout sera transformé par une nouvelle naissance (…) par l’union avec Dieu (…) »

« Nous sommes enfants du péché (…) Dieu châtie celui qu’il aime (…) Aline courba les épaules et remonta sa fourrure ».

Une scène glaciale

« Ces paroles du pasteur Sabatier pèseront comme une chape de plomb sur les épaules de la jeune fille et l’enfonceront dans une solitude que l’on peut imaginer. Pour faire bonne mesure, il la dirigera quelques années plus tard vers la communauté des diaconesses de Reuilly. Le jour de sa consécration, son père Jean Barnery, qui s’était glissé incognito dans l’assemblée entendra le cœur brisé le pasteur questionner la jeune fille : « Aline Barnery, vous sentez vous pénétrée d’une telle reconnaissance envers votre Dieu Sauveur qui nous a rachetés à un si grand prix, que vous voulez lui consacrer, dans le service des diaconesses, votre corps et votre esprit qui lui appartiennent ? »

Ceux qui ont vu le film ont gardé de cette scène un sentiment glacé.

François Lerch

 

 

 

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Article tiré du bulletin de l'Oratoire du Louvre à Paris

 


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