Le pasteur Paul-Henri Marron
(1754-1832)
Né à Leyde en 1754
aux Pays-Bas, dans une famille huguenote partie en e)dl, consacré
en 1774 à 20 ans, pasteur à Dordrecht en 1775, Paul-Henri
Marron est nommé à la Chapelle de Hollande à
Paris en 1782. LAmbassade de Hollande et sa chapelle, située
à J'angle de la rue des Saints-Pères et du Boulevard
Saint-Germain, est devenue au )GIP siècle le centre et le
refuge des réformés de Paris qui s'y rendent à
leurs risques et périls. Les cultes avaient lieu deux à
trois fiDis par dimanche avec plus de 600 personnes.
Reconstituée après l'édit de tolérance
de Louis XVI en 1787, l'église réformée de
Paris reprend vie en 1788 après plus d'un siècle de
silence forcé. Paul-Henri Marron en est le premier pasteur,
aidé dans cette nomination par le député protestant
Rabaut-Saint-Etienne.
En juin 1789, une salle est louée à un marchand
de vins rue Mondétour près des Halles. Un an après,
le pasteur Marron et sa communauté louent quelques mois le
musée social de la rue Dauphine ; puis, après plusieurs
demandes, il obtient du maire de Paris Bailly, avec l'aide de Lafayette,
l'Église Saint-Louis du Louvre (à l'emplacement de
la place du Carrousel) donnée à bail aux protestants
de Paris. La dédicace l'Église a lieu le 22 mai 1790
et le pasteur Marron rappelle ce mot de Mirabeau 'j'aperçois
de cette fenêtre le balcon funeste d'où un roi égaré
par de perfides conseils lançait le plomb meurtrier dans
le sein de ses sujets" ; en effet, un bon nombre de protestants
se trouvait parmi les Suisses et le régiment des chasseurs
des Cévennes, seuls à défendre Louis XVI. Le
pasteur Marron de 1789 à 1792 porte le titre de "ministre
du Saint-Evangile et pasteur des protestants de Paris".
La tourmente révolutionnaire entraîne Paul-Henri
Marron et le 23 brumaire de l'an II (1793) il dépose sur
le bureau de la Commune 4 coupes d'argent de communion en prononçant
ces quelques paroles (qui lui seront reprochées plus tard)
: "tous les rangs confondus buvaient dans ces coupes d'égalité
et de fraternité ; mon ministère a toujours eu pour
objet d'en propager les principes". Cette attitude républicaine,
pour ne pas dire pro-révolutionnaire, n'empêchera pas
son arrestation à trois reprises comme girondin sous la Terreur.
La chute de Robespierre le sauvera de la guillotine. Durant tout
le Directoire, il continuera à remplir ses devoirs pastoraux
en gagnant sa vie comme traducteur au Ministère des Affaires
Extérieures.
C'est en 1802 avec les articles organiques du Concordat que Napoléon
accorde la liberté de culte et qu'enfin le protestantisme
obtient droit de cité. Une église consistoriale avec
le Pasteur Marron à sa tête est créée
; elle comprend deux autres pasteurs : Frédéric Mestrezat;
suisse de Bâle, et Jacques-Antoine Rabaut-Pommier, député
de la Convention, frère de Rabaut Saint-Etienne, sous-préfet
au Vigan qui restera en poste jusqu'en 1816 ; il sera exilé
pour des raisons politiques.
À partir de 1803, l'Église réformée
de Paris s'installe à Saint-Louis du Louvre, reconstruite
en 1744 à la place de la vieille église collégiale
de Saint Thomas du Louvre. Elle sera démolie en partie en
1811 et totalement en 1852.
C'est en 1811 que le Pasteur Marron et ses deux collègues
s'installent officiellement à l'Oratoire du Louvre et le
premier culte a lieu le 31 mars 1811. Les protestants vont entreprendre
de lourds travaux pendant de nombreuses années, endettant
d'ailleurs le consistoire de Paris. Il y a affluence à l'Oratoire
à cette époque (2000 personnes au culte le dimanche
qui est célébré à midi ; il n'y a pas
que des protestants qui assistent à ces cultes mais des philosophes,
des curieux et des catholiques).
On a reproché une certaine démagogie à louer
les gouvernements successifs que le pasteur Marron a connus. Il
avait pourtant coutume de dire certaines vérités par
exemple, lors d'un service d'action de grâce pour l'anniversaire
de la naissance de Napoléon en 1806 "Tous sont frères
aux gens de Dieu et égaux aux gens de la loi" et de
citer l'Empereur lui-même "l'empire de la loi finit où
commence celui de la conscience". Paul-Henri Marron et ses
deux collègues seront décorés de la Légion
d'Honneur (un vitrail au-dessus de l'orgue de l'Oratoire porte cette
haute distinction). Il est à noter que le pasteur Mestrezat,
mort en 1807, est remplacé par le pasteur Jean Monod qui
vent de Copenhague et restera pasteur jusqu'en 1836, date de sa
mort.
Le Pasteur et Madame Marron habitaient place Vendôme, logés
par le Consistoire. Madame Marron est décrite comme "courte,
grasse, brune et plutôt jolie". Il meurt à son
poste en 1832 emporté par l'épidémie de choléra
à l'âge de 78 ans. Il est enterré au Père-Lachaise.
Le Pasteur Marron a traversé bien des régimes et
a été très marqué par le siècle
des Lumières; bien souvent seul au gouvernail, et dans des
périodes très troublées de notre pays, il a
réussi à maintenir la barque de l'Église Réformée
de Paris. Il fut le premier pasteur en titre de l'Oratoire.
Odile Roure
(cet article a été écrit d'après
"De la chapelle de Hollande à l'Oratoire du Louvre",
Philippe Vassaux, Feuille Rose N- 647, 1985).
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