Tout commence dans un camping 

au pied de la montagne

( Exode 19:11-20 ; Actes 2:1-4 )

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Culte du dimanche 15 mai 2011 à l'Oratoire du Louvre
prédication du pasteur Marc Pernot

Chers amis, Pâques nous propose de relire la libération des hébreux hors d’Égypte, racontée dans le livre de l’Exode, comme une ouverture à une libération que Dieu nous donne en Christ, une résurrection. Commence alors un cheminement pour les hébreux. Après la sortie d’Égypte, un second épisode extrêmement important pour les hébreux est la rencontre avec Dieu sur le mont Sinaï et le don des « dix paroles ». La Pentecôte nous propose de relire cet événement comme le Saint-Esprit qui est donné à chacun, comme si nous étions un peu Moïse.

Je vous propose de nous préparer à ce temps de Pentecôte en relisant le formidable épisode de la rencontre du peuple hébreu avec Dieu sur le mont Sinaï, ce récit se trouve au chapitre 19 du livre de l’Exode.

Le mont Sinaï était tout en fumée,
parce que l’Eternel y était descendu au milieu du feu,
cette fumée s’élevait comme la fumée d’une fournaise,
et toute la montagne tremblait avec violence.
Le son de la trompe retentissait de plus en plus fortement.
Moïse parlait, et Dieu lui répondait à haute voix.

Si nous avions assisté à cela, nous aurions une foi formidable. Nous serions prêts à transporter des montagnes.

Mais une telle expérience n’arrive pas comme une météorite qui tomberait du ciel devant nos pieds, assurant notre fortune. Je ne dis pas que ça ne puisse pas arriver, mais en général, les grands moments de notre existence et les grands moments de l’histoire sont comme préparés, ils sont travaillés avant. Pour que quelque chose germe, il faut un terrain favorable, il y a une aptitude à saisir l’occasion, à saisir la chance de la rencontre qui va tout changer. J’ai rencontré vendredi dernier un homme qui étant parti de rien est arrivé à être un champion dans son domaine, il m’a dit que oui, il y a une grande part de chance dans son itinéraire, mais que la chance est comme un oiseau qui vole dans le dos d’un aveugle, il faut sentir le léger courant d’air provoqué par les ailes pour l’accueillir dans ses mains.

Nous le voyons dans ce récit de livre de l’Exode. Dieu accompagne son peuple, il est là comme cet oiseau de la chance qu’ils vont apprendre à saisir. À l’aube du troisième jour, nous dit le texte, les hébreux verront Dieu et entendront sa voix. C’est une résurrection, une naissance à une vie plus vivante.

Cet événement essentiel qui va constituer le peuple hébreu et influer profondément l’humanité entière par une foi, une sagesse, une intelligence et un cœur. De cette rencontre va naître le fameux décalogue, et la Bible tout entière, dans ce milieu naîtra Jésus-Christ. Une nouvelle façon d’espérer et de vivre s’ouvre à eux par cet événement, un autre rapport à Dieu dans la confiance et le respect. C’est un autre rapport au temps avec des pauses pour respirer, pour se préparer et pour agir. C’est un autre rapport aux autres, une conscience de la dignité de chaque personne et de notre vocation…

Ce événement est donc majeur. Dans cette rencontre, dans cette foi et cette sagesse, les montagnes tremblent et le son profond de la voix de Dieu se fait entendre, comme le son d’une trompe qui sonne longuement, comme la foudre et le tonnerre qui résonne dans les montagnes.

Mais ce n’est pas venu d’un seul coup, il a fallu une préparation, un cheminement spirituel pour arriver à cette révélation… des hésitations et des craintes, des montées et des descentes. Mais cela nous est promis, cette rencontre est aussi pour nous, comme une aube de Pâques, comme une Pentecôte pour chacun de nous et pour nous tous ensemble.

Le texte nous parle de trois mois de cheminement, puis de trois jours de préparation et d’attente, ce chiffre de trois sur lequel le texte insiste nous invite à relire ce récit comme un cheminement spirituel. C’est aussi ce que nous propose de faire le récit de Pentecôte dans le livre des Actes des apôtres.

Chacun de nous est un petit Moïse, de deux façons :

  • D’abord, fondamentalement, je crois que chacun a un petit Moïse à l’intérieur de lui-même, et même une petite dimension de Christ, par l’Esprit. Cette part de Moïse qui est en nous, c’est notre dimension d’intelligence, d’espérance, de foi, c’est une fibre de compassion pour ceux qui souffrent et un atome de générosité, de volonté de participer
  • Mais ensuite, comme Moïse est un intermédiaire entre Dieu et le peuple pour le sauver, chacun de nous est appelé à être un Moïse en allant vers les autres, en essayant de faire avancer les choses avec l’aide de Dieu. Au début de son histoire, il a essayé de libérer ses frères en suivant son seul instinct, provoquant des catastrophes. Maintenant, c’est en équipe avec Dieu qu’il avance, et ça va déjà bien mieux.
  • Et puisque nul n’est parfait, nous avons besoin aussi de savoir accueillir le Moïse que sont les autres, le Moïse dont nous avons besoin aujourd’hui pour nous appeler et nous ressusciter.

Les hébreux sont donc en chemin. Les trois mois évoquent un temps de maturation spirituelle. Ils seront mûrs pour franchir un palier supplémentaire, et même un palier vraiment décisif. Et ce récit nous invite à les suivre dans cette ouverture et cette préparation à l’exceptionnel, à l’inouï. Ce récit invite les Moïse qui sont au fond de nous à faire mille allers et retours s’il le faut entre Dieu et nous pour unifier nos vies, et nous unir en un peuple.

Camper dans le désert, devant la montagne

Camper dans le désert est la première chose que nous propose ici Moïse, c’est prendre un moment, un temps d’arrêt un peu en retrait, dans la solitude, l’intimité et le calme, sans musique et sans bavardage, s’arrêter un moment pour méditer et prier, par choix personnel. Juste camper et non s’installer dans cet isolement, car camper c’est déjà penser à reprendre la route après la pause.

Camper vis-à-vis de la montagne : c’est regarder vers le haut. Je crois qu’au moins, il faut avoir de l’idéal, et pour cela, il faut philosopher un peu, s’arrêter de temps en temps et regarder vers le haut. Mais les hébreux, guidés par Moïse, ce n’est pas devant une montagne quelconque qu’ils campent, mais devant LA montagne, c’est la leur finalement et celle de Dieu, c’est la montagne où Moïse a déjà entendu Dieu dans un petit buisson de feu.

La réflexion et la prière, c’est au moins cela : prendre un petit temps de recueillement pour faire mémoire d’un petit moment d’espérance et de foi que nous avons pu vivre dans le passé, comme Moïse le fait ici. Et si nous n’avons pas le sentiment d’avoir jamais nous-même rencontré Dieu, nous pouvons, comme ces hébreux, faire mémoire de la rencontre qu’ont fait Moïse, Abraham, Isaac et Jacob. Et nous, nous avons Jésus-Christ, l’unique, à ajouter comme témoin essentiel de la présence de Dieu auprès de nous.

Dans l’humanité, tant qu’il y aura une personne pour camper ainsi un peu devant la montagne de la rencontre avec Dieu, l’avenir sera lumineux. Et en nous, ce petit Moïse est peut-être minuscule, bien faible, mais il existe, il peut camper, il peut monter et nous aider à nous ouvrir aux dons de Dieu.

Escalade en montagne et envoi vers les autres

Moïse monte sur la montagne vers Dieu, il y arrive facilement et légèrement, car c’est notre dimension d’intelligence, d’espérance, de foi, et qu’il est comme chez lui dans cette élévation, et que ce temps de pause dans le désert, face à la montagne le lui permet. C’est vrai que pour l’instant, cette élévation n’aide pas tellement l’ensemble du peuple, c’est juste comme un brin d’espérance qui commence à frétiller en nous.

Moïse ne demande rien, il fait simplement un pas vers Dieu. Moïse monte sur la montagne, il considère Dieu au-dessus, bien au-dessus, au sommet, il médite et ce que Dieu lui dit… c’est de redescendre et d’aller vers les autres leur porter une sagesse et une foi. Ce petit Moïse redescend en mobilisant notre mémoire et en éveillant le sentiment de notre dignité, une dignité et une vocation décidées par Dieu.

D’abord la reconnaissance. « Vous avez vu ce que j’ai fait à l’Egypte, et comment je vous ai portés sur des ailes d’aigle » nous dit Dieu. Et c’est vrai. Il nous a tirés du néant, élevés au dessus des brumes de l’inconscience, donné un cœur et une tête en plus de tout. Dieu est plus qu’un idéal de vie, il est un principe actif qui nous porte, nous élève, nous donne de la force pour surmonter et pour nous élever. Soyons reconnaissants.

Moïse nous dit ensuite que nous sommes dignes, chacun, du plus petit au plus grand, du plus jeune au plus âgés, du plus fin théologien jusqu’à celui qui ne sait même pas lire… chacun est digne du meilleur.
Nous sommes, chacun de nous, dignes d’écouter directement la voix de Dieu. Oui, personnellement. Et cela change tout. Vous êtes dignes d’être prophète, nous dit ici la Bible, Dieu vous ouvre le cœur, les yeux, l’esprit et l’intelligence, vous êtes dignes d’entendre ce que Dieu vous dit, dignes de réfléchir et de philosopher. Vous êtes dignes d’être un grand prêtre et un roi pour dire à Dieu votre point de vue, pas seulement pour l’écouter lui, mais pour donner votre avis, discuter avec lui de vos projets, et vous êtes dignes d’agir dans le monde pour bâtir le monde de demain.

Se décider

Les hébreux disent « nous ferons tout ce que l’Éternel a dit ». Bien entendu, ils ne « le feront » pas toujours, mais au moins il t-y a une bonne volonté, une bonne intention, ensuite, oui, nous faisons tous des erreurs, nous avons nos limites, parfois nous nous laissons aller. Mais au moins ils se décident, ils espèrent.

C’est cette décision que prennent les adultes qui demandent un baptême ou qui font une profession de foi. C’est cette décision que prendront des catéchumènes à la Pentecôte dans un mois. C’est pour nous à chaque fois une joie et un honneur d’être témoin d’une telle parole, de cette volonté bonne.

Moïse remonte et redescend encore. Car ce n’est que le début, c’est déjà l’essentiel mais ce n’est que l’ouverture de la porte. Dieu envoie Moïse les préparer et les appeler à se préparer eux-mêmes un peu.

Nous préparer

L’Éternel dit à Moïse: Va vers le peuple;
sanctifie-les aujourd’hui et demain,
qu’ils lavent leurs vêtements.

Le Moïse qui est en nous peut vraiment nous sanctifier, c’est-à-dire nous faire prendre conscience de notre dignité unique et de notre vocation personnelle. Les uns par les autres nous pouvons nous aider mutuellement en reconnaissant la sainteté de l’autre qui est à nos côtés. Il nous reste alors à nous laver et à laver nos vêtements. Car le spirituel n’est pas tout, il faut comme Moïse redescendre sur terre et mettre un peu d’ordre dans notre vie, nous purifier et attendre, être prêts pour accueillir la présence de Dieu, accueillir le cœur vivant qu’il nous donne.

Enfin, Dieu descend et reste avec nous

À l’aube du 3e jour, Dieu descend, nos montagnes en sont ébranlées, le peuple se rassemble.
Dieu descend comme dans une épaisse colonne de fumée. Il se montre mais nous échappe. Il est là comme un ami formidable mais on ne peut le saisir. Dieu descend mais le texte ne nous dit pas qu’il remonte ensuite. C’est également comme cela que l’Évangile se termine, sur la promesse de Jésus que Dieu sera avec nous tous les jours, qu’il fera sa demeure au milieu de nous et en nous.
La vie maintenant et pour toujours, par la foi, l’espérance et l’amour.

Amen.

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Pasteur dans la chaire de l'Oratoire du Louvre - © France2

Pasteur dans la chaire de
l'Oratoire du Louvre
© France2

Lecture de la Bible

Exode 19:1-20

1 Le troisième mois après leur sortie du pays d’Egypte, les enfants d’Israël arrivèrent ce jour-là au désert du Sinaï. 2 Etant partis de Rephidim, ils arrivèrent au désert du Sinaï, et ils campèrent dans le désert; Israël campa là, vis-à-vis de la montagne.
3 Moïse monta vers Dieu: et l’Eternel l’appela du haut de la montagne, en disant: Tu parleras ainsi à la maison de Jacob, et tu diras aux enfants d’Israël:
4 Vous avez vu ce que j’ai fait à l’Egypte, et comment je vous ai portés sur des ailes d’aigle et amenés vers moi.
5 Maintenant, si vous écoutez ma voix, et si vous gardez mon alliance, vous m’appartiendrez entre tous les peuples, car toute la terre est à moi; 6 vous serez pour moi un royaume de sacrificateurs et une nation sainte. Voilà les paroles que tu diras aux enfants d’Israël.
7 Moïse vint appeler les anciens du peuple, et il mit devant eux toutes ces paroles, comme l’Eternel le lui avait ordonné. 8 Le peuple tout entier répondit: Nous ferons tout ce que l’Eternel a dit.
Moïse rapporta les paroles du peuple à l’Eternel.
9 Et l’Eternel dit à Moïse: Voici, je viendrai vers toi dans une épaisse nuée, afin que le peuple entende quand je te parlerai, et qu’il ait toujours confiance en toi. Moïse rapporta les paroles du peuple à l’Eternel.
10 Et l’Eternel dit à Moïse: Va vers le peuple; sanctifie-les aujourd’hui et demain, qu’ils lavent leurs vêtements. 11 Qu’ils soient prêts pour le troisième jour; car le troisième jour l’Eternel descendra, aux yeux de tout le peuple, sur le mont Sinaï.
12 Tu fixeras au peuple des limites tout autour, et tu diras: Gardez-vous de monter sur la montagne, ou d’en toucher le bord. Quiconque touchera la montagne sera puni de mort. 13 On ne mettra pas la main sur lui, mais on le lapidera, ou on le percera de flèches: animal ou homme, il ne vivra point. Quand corne retentira longuement, ils monteront dans la montagne.
14 Moïse descendit de la montagne vers le peuple; il sanctifia le peuple, et ils lavèrent leurs vêtements. 15 Et il dit au peuple: Soyez prêts dans trois jours; ne vous approchez d’aucune femme.
16 Le troisième jour au matin, il y eut des coups de tonnerre, des éclairs, et une épaisse nuée sur la montagne; le son de la trompette retentit fortement; et tout le peuple qui était dans le camp fut saisi d’épouvante.
17 Moïse fit sortir le peuple du camp, à la rencontre de Dieu; et ils se placèrent au bas de la montagne.
18 Le mont Sinaï était tout en fumée, parce que l’Eternel y était descendu au milieu du feu; cette fumée s’élevait comme la fumée d’une fournaise, et toute la montagne tremblait avec violence.
19 Le son de la trompette retentissait de plus en plus fortement. Moïse parlait, et Dieu lui répondait à haute voix.
20 Ainsi l’Eternel descendit sur le mont Sinaï, sur le sommet de la montagne; l’Eternel appela Moïse sur le sommet de la montagne. Et Moïse monta.

Actes 2:1-4

Le jour de la Pentecôte, ils étaient tous ensemble dans le même lieu. 2 Tout à coup il vint du ciel un bruit comme celui d’un vent impétueux, et il remplit toute la maison où ils étaient assis.
3 Des langues, semblables à des langues de feu, leur apparurent, séparées les unes des autres, et se posèrent sur chacun d’eux. 4 Et ils furent tous remplis du Saint-Esprit, et se mirent à parler en d’autres langues, selon que l’Esprit leur donnait de s’exprimer.